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LA PATRICIENNE

gnantes. À l’époque où commence notre récit, leur situation sociale s’était complètement transformée. Elle avait subi le sort de la noblesse dans les pays que l’esprit de la Révolution française de 1789 a réveillés. Peu à peu, ses droits et ses privilèges avaient été attaqués les uns après les autres et finalement détruits. La gloire de celle de Berne s’était éteinte ; il ne lui restait plus que de vieux parchemins jaunis, quelques traditions historiques et la liberté, dont n’usait pas tout le monde, de porter la particule « de » entre leurs prénoms et leurs noms patronymiques. Quelques-unes de ces familles étaient pauvres ; d’autres possédaient de grands biens, mais d’une exploitation difficile ; enfin, des troisièmes avaient gagné de belles fortunes, soit dans l’industrie, soit dans le commerce ou les affaires de banque.

Ils ne faisaient que de rares concessions aux idées modernes et seulement lorsque les exigences des temps nouveaux le commandaient impérieusement. De même qu’à Rome, on les appelait les patriciens. Ils se tenaient à l’écart, ne participaient plus guère à l’administration de l’État. Le français était leur langue de prédilection, bien qu’ils fussent pour la plupart d’origine germaine. Ils se mariaient entre eux ; cependant quelques jeunes nobles, les plus huppés, sinon les plus ambitieux, consultaient parfois l’almanach de Gotha pour trouver une femme.

Il ne pouvait donc être question, pour certaines familles de la bourgeoisie, d’entretenir des relations suivies avec les familles patriciennes. Les bals de professeurs étaient arrivés au bon moment. Sans se compromettre, la noblesse osait bien y paraître, puisque l’Université, comme institution, revendi-