Page:Widmann - La Patricienne, trad P César, 1889.djvu/149

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
147
la patricienne

impossible ! fût compris tout le vide, toute la désolation d’une existence de femme.

— Il faut en finir, balbutiait-elle, pour soi, très bas, dans le silence de ses amères réflexions et de ses nuits sans sommeil. Il faut en finir. Ah ! pourquoi n’ai-je plus de mère pour lui dire mes angoisses, lui confier mes tourments ? Mais si j’en parlais à ma tante ? Oui ! c’est cela ; peut-être le ferai-je quand mes amies ne seront plus là.

Et elle avait peur. Où trouver des mots pour exprimer ce qu’elle éprouvait ? Comment oserait-elle jamais crier sa honte ? Avouer son amour pour un homme qui n’était pas son égal ? Ah ! qu’il vînt celui qui devait la sauver ! Qu’il vînt et il serait bien accueilli !

Justement, le troisième jour après le départ de son frère et du docteur, Max de Rosenwelt apparut à la villa. Dougaldine était au jardin, quand Juliette vint lui annoncer l’arrivée de l’étranger.

L’un et l’autre furent contents, même agréablement surpris de se revoir. Dougaldine se montra charmante. Quant à Max, il entrevit la possibilité d’un riche mariage, qui flatterait son ambition et son orgueil.

La patricienne n’avait d’abord eu pour lui aucun penchant, pas la moindre étincelle de sympathie. Tout l’éloignait de cette nature de viveur : ses goûts, ses aspirations et ses idées sur la vie. Néanmoins, l’instinct de sa conservation, la décision qu’elle avait prise d’échapper à la passion qui l’entraînait vers Jean, modifièrent ses dispositions en faveur du Poméranien, du moins elle se le persuada. Pourquoi