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la patricienne

comme le docteur était cette fois plus fréquemment avec la jeune fille, la présence du Poméranien lui était doublement désagréable. En conséquence, il changea de tactique. Il ne voulut pas, sans tenter la lutte, abandonner ainsi la partie. Mais il avait affaire à un roué qui devina aussitôt son jeu. Le lendemain, de Rosenwelt demandait à Dougaldine si elle ne serait pas disposée à faire quelques sorties à cheval ; les routes étaient bonnes, très sûres, et on avait une vue splendide sur les alentours et sur les Alpes.

Mlle Fininger raffolait de l’équitation. Elle acquiesça avec joie à ce désir. Toutefois, il fallait encore obtenir l’assentiment de son père. On écrivit au banquier. Ce dernier vit bien qu’un refus chagrinerait sa fille ; il donna donc son consentement.

On avait dressé un des chevaux à l’usage exclusif de Dougaldine. À Berne, elle le montait de temps en temps, mais très peu, pour une courte galopade. Le cocher l’accompagnait ; quelquefois son père. La selle était encore en ville. C’est M. Fininger lui-même qui, le jour suivant, l’apporta en venant à Beau-Port.

Il recommanda la plus grande prudence à sa fille et voulut sortir la première fois avec elle : tout alla le mieux du monde. Dès ce jour, elle fit une promenade plus ou moins longue tous les matins. Ce fut pour elle, dont l’âme était si sensible aux beautés de la nature, un vif plaisir de courir ainsi sur la route blanche, qui serpentait sur le bord du lac, les joues caressées par la brise et respirant à pleins poumons l’air frais et salubre qu’embaumaient les herbes humides de rosée. Elle essayait, parfois, de devancer le bateau à vapeur dont le panache de fumée s’élevait au milieu de la plaine liquide, ou bien, deve-