Page:Widmann - La Patricienne, trad P César, 1889.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
167
la patricienne

Le repas terminé, le docteur sortit de la villa et dirigea sa promenade vers le lac. Arrivé sur le bord, comme la fraîcheur y était très agréable, il s’assit sur un banc et, pendant que son regard admirait mélancoliquement le jeu des lueurs crépusculaires sur les Alpes empourprées, il réfléchit derechef aux divers incidents de la journée et à la ligne de conduite qu’il devait suivre à l’avenir.

Il était entièrement plongé dans sa rêverie, sans s’apercevoir de la fuite du temps, lorsque, venant du lac, une voix retentit brusquement à ses oreilles :

— Max ! Max ! Est-ce toi ?

Jean devint attentif.

Déjà la nuit couvrait de ses voiles la surface de l’onde. Cependant le docteur put reconnaître une petite barque qui stationnait à une assez faible distance. Elle côtoyait peut-être aussi le rivage depuis quelques instants. Il ne l’avait pas remarquée ; et, l’eût-il vue, il ne s’en serait pas autrement préoccupé, les pêcheurs des environs ayant souvent l’habitude de hanter les parages avoisinant Beau-Port.

On appelait de nouveau :

— Max ! Max ! Est-ce toi ? Es-tu seul ?

Le précepteur se leva, fit deux ou trois pas en avant, jusqu’à l’endroit où l’on débarquait et, se penchant un peu, pour mieux voir, il dit :

— Que désirez-vous ?

Un cri d’effroi lui répondit, et les rames battirent l’eau. On s’était trompé sans doute et on voulait fuir. Mais la personne qui montait la barque, dans la première seconde de trouble, ne sut pas se dégager par un habile mouvement. Au contraire, la chaloupe vint heurter de sa quille le fond de sable, en sorte que le