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« Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle/Jugement dernier » : différence entre les versions

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=== JUGEMENT DERNIER ===
Ce sujet est fréquemment représenté, soit en
sculpture, soit en peinture, dans nos églises du moyen âge. Mais la
manière de le représenter diffère suivant le temps et suivant les écoles
provinciales.

C'est sur le portail des églises abbatiales que nous voyons le Jugement
dernier tenant tout d'abord une place importante; mais, au XIII<sup>e</sup>
siècle,
il apparaît dans les tympans des portes principales des cathédrales, des
églises paroissiales et même des chapelles.

<span id=Autun15>Sur la porte de la cathédrale d'[[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes A#Autun|Autun]], dont la construction est de 1140
environ, nous voyons sculpté un des jugements derniers les plus anciens
et les plus complets. Le Christ occupe la partie centrale du tympan; à
côté de lui se tient un ange qui pèse les âmes et un diable qui attend les
damnés. Dans le linteau, à la droite du Christ, sont les élus qui regardent
le ciel. Un ange colossal prend une à une les âmes des bienheureux et
les introduit, par une fenêtre, dans un palais qui représente le paradis
À la gauche du Sauveur sont les damnés; un ange armé d'une épée leur
interdit la communication avec les élus. Ces damnés, nus, ont la tête
plongée dans leurs mains. Déjà, dans cette sculpture, l'idée dramatique
domine; les expressions sont rendues avec une vigueur sauvage qui ne
manque ni de style ni de noblesse. Mais c'est au commencement du
XIII<sup>e</sup> siècle que les artistes se sont plu à représenter d'une manière
étendue les scènes du Jugement dernier; non-seulement alors elles
occupent les tympans au-dessus des portes, mais les claveaux inférieurs
des voussures. Le Jugement dernier de la porte centrale de la cathédrale
de Paris est un des mieux traités. Le linteau est entièrement occupé par
des personnages de divers états sortant de leurs tombeaux, réveillés par
deux anges qui, de chaque côté, sonnent de la trompette. Tous ces
personnages sont vêtus; on y voit un pape, un roi, des guerriers, des
femmes, un nègre. Dans la zone supérieure, au centre, est un ange qui
pèse les âmes; deux démons essayent de faire pencher l'un des plateaux
de leur côté. À la droite du Christ sont les élus, tous vêtus de
longues
robes et couronnés. Ces élus sont représentés imberbes, jeunes et
souriants;
ils regardent le Christ. À la gauche, un démon pousse une foule
d'âmes enchaînées portant chacune le costume de leur état. Les
expressions
de ces personnages sont rendues avec un rare talent: la terreur, le
désespoir se peignent sur leurs traits. Dans la partie supérieure est, au
centre, le Christ assis, demi-nu, qui montre ses plaies; deux anges,
debout, à droite et à gauche, tiennent les instruments de la Passion; puis
sont placés à genoux, implorant le Sauveur, la Vierge et saint Jean. Les
voussures du côté des damnés sont occupées, à la partie inférieure, par
des scènes de l'enfer, et, du côté des élus, par un ange et les patriarches,
parmi lesquels on voit Abraham tenant des âmes dans son giron; puis
des élus groupés. Cette sculpture remarquable date de 1210 à 1215; elle
était entièrement peinte et dorée.

Nous trouvons le même sujet représenté à la cathédrale de Chartres, à
Amiens, à Reims, à Bordeaux. Mais, dans ces derniers bas-reliefs, les
âmes sont représentées nues généralement, sauf celles des élus, et les
compositions sont loin de valoir celle de Notre-Dame de Paris. Le sentiment
dramatique est déjà exagéré, les groupes sont confus, les damnés
grimaçants, les démons plus ridicules qu'effrayants. Presque toujours
l'entrée de l'enfer est représentée par une gueule énorme vomissant des
flammes au milieu desquelles des démons plongent les damnés. Au
XIV<sup>e</sup> siècle, ce sujet, bien que fréquemment représenté, perd beaucoup
de son importance; les figures, trop nombreuses, sont petites, et les
artistes, en cherchant la réalité, en multipliant les scènes, les personnages,
ont enlevé à leur sculpture ce caractère de grandeur si bien tracé
à Paris. On voit des bas-reliefs représentant le Jugement dernier sur le
tympan du portail des Libraires à la cathédrale de Rouen, sur la porte
principale de l'église Saint-Urbain de Troyes, qui datent du XIV<sup>e</sup>
siècle, et
qui, par leurs détails sinon par l'ensemble, présentent encore des sculptures
traitées avec une rare habileté. Des vitraux de roses étaient souvent
occupés par des scènes du Jugement dernier dès le commencement du
XIII<sup>e</sup> siècle. Celles de la rose de l'église de Mantes, qui appartiennent à
cette époque, sont fort belles. La rose sud de la cathédrale de Sens
(XVI<sup>e</sup> siècle) présente d'assez bonnes peintures de ce même sujet. Mais
les meilleures peintures sur verre du Jugement dernier, de l'époque de
la Renaissance, sont celles de la sainte-chapelle du château de Vincennes,
attribuées à Jean Cousin. <span id="Alby13">Il existe aussi quelques peintures murales du
Jugement dernier en France; nous mentionnerons particulièrement celles
de la cathédrale d'[[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes A#Alby|Alby]], qui datent de la fin du XV<sup>e</sup> siècle.

Dernière version du 9 février 2014 à 15:46

Jubé <
Index alphabétique - J
> Labyrinthe
Index par tome

JUGEMENT DERNIER. Ce sujet est fréquemment représenté, soit en sculpture, soit en peinture, dans nos églises du moyen âge. Mais la manière de le représenter diffère suivant le temps et suivant les écoles provinciales.

C’est sur le portail des églises abbatiales que nous voyons le Jugement dernier tenant tout d’abord une place importante ; mais, au XIIIe siècle, il apparaît dans les tympans des portes principales des cathédrales, des églises paroissiales et même des chapelles.

Sur la porte de la cathédrale d’Autun, dont la construction est de 1140 environ, nous voyons sculpté un des jugements derniers les plus anciens et les plus complets. Le Christ occupe la partie centrale du tympan ; à côté de lui se tient un ange qui pèse les âmes et un diable qui attend les damnés. Dans le linteau, à la droite du Christ, sont les élus qui regardent le ciel. Un ange colossal prend une à une les âmes des bienheureux et les introduit, par une fenêtre, dans un palais qui représente le paradis À la gauche du Sauveur sont les damnés ; un ange armé d’une épée leur interdit la communication avec les élus. Ces damnés, nus, ont la tête plongée dans leurs mains. Déjà, dans cette sculpture, l’idée dramatique domine ; les expressions sont rendues avec une vigueur sauvage qui ne manque ni de style ni de noblesse. Mais c’est au commencement du XIIIe siècle que les artistes se sont plu à représenter d’une manière étendue les scènes du Jugement dernier ; non-seulement alors elles occupent les tympans au-dessus des portes, mais les claveaux inférieurs des voussures. Le Jugement dernier de la porte centrale de la cathédrale de Paris est un des mieux traités. Le linteau est entièrement occupé par des personnages de divers états sortant de leurs tombeaux, réveillés par deux anges qui, de chaque côté, sonnent de la trompette. Tous ces personnages sont vêtus ; on y voit un pape, un roi, des guerriers, des femmes, un nègre. Dans la zone supérieure, au centre, est un ange qui pèse les âmes ; deux démons essayent de faire pencher l’un des plateaux de leur côté. À la droite du Christ sont les élus, tous vêtus de longues robes et couronnés. Ces élus sont représentés imberbes, jeunes et souriants ; ils regardent le Christ. À la gauche, un démon pousse une foule d’âmes enchaînées portant chacune le costume de leur état. Les expressions de ces personnages sont rendues avec un rare talent : la terreur, le désespoir se peignent sur leurs traits. Dans la partie supérieure est, au centre, le Christ assis, demi-nu, qui montre ses plaies ; deux anges, debout, à droite et à gauche, tiennent les instruments de la Passion ; puis sont placés à genoux, implorant le Sauveur, la Vierge et saint Jean. Les voussures du côté des damnés sont occupées, à la partie inférieure, par des scènes de l’enfer, et, du côté des élus, par un ange et les patriarches, parmi lesquels on voit Abraham tenant des âmes dans son giron ; puis des élus groupés. Cette sculpture remarquable date de 1210 à 1215 ; elle était entièrement peinte et dorée.

Nous trouvons le même sujet représenté à la cathédrale de Chartres, à Amiens, à Reims, à Bordeaux. Mais, dans ces derniers bas-reliefs, les âmes sont représentées nues généralement, sauf celles des élus, et les compositions sont loin de valoir celle de Notre-Dame de Paris. Le sentiment dramatique est déjà exagéré, les groupes sont confus, les damnés grimaçants, les démons plus ridicules qu’effrayants. Presque toujours l’entrée de l’enfer est représentée par une gueule énorme vomissant des flammes au milieu desquelles des démons plongent les damnés. Au XIVe siècle, ce sujet, bien que fréquemment représenté, perd beaucoup de son importance ; les figures, trop nombreuses, sont petites, et les artistes, en cherchant la réalité, en multipliant les scènes, les personnages, ont enlevé à leur sculpture ce caractère de grandeur si bien tracé à Paris. On voit des bas-reliefs représentant le Jugement dernier sur le tympan du portail des Libraires à la cathédrale de Rouen, sur la porte principale de l’église Saint-Urbain de Troyes, qui datent du XIVe siècle, et qui, par leurs détails sinon par l’ensemble, présentent encore des sculptures traitées avec une rare habileté. Des vitraux de roses étaient souvent occupés par des scènes du Jugement dernier dès le commencement du XIIIe siècle. Celles de la rose de l’église de Mantes, qui appartiennent à cette époque, sont fort belles. La rose sud de la cathédrale de Sens (XVIe siècle) présente d’assez bonnes peintures de ce même sujet. Mais les meilleures peintures sur verre du Jugement dernier, de l’époque de la Renaissance, sont celles de la sainte-chapelle du château de Vincennes, attribuées à Jean Cousin. Il existe aussi quelques peintures murales du Jugement dernier en France ; nous mentionnerons particulièrement celles de la cathédrale d’Alby, qui datent de la fin du XVe siècle.