Théorie des nombres irrationnels, des limites et de la continuité/Section VI

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VI

THÉORÈMES SUR LES LIMITES

22. Soit une suite de nombres

(1)

D’après les § 14 et 15, trois cas sont possibles :

1o  Il y a une limite finie . Alors . Soit . Nous pouvons, d’après le § 19, prendre et rationnels tels que

et.

Il y a un entier tel que, pour , on a

.

Si et sont deux entiers supérieurs à , on a donc (§ 21)

.

2o  Il y a une limite infinie ; et sont égaux, soit à , soit à  ; soit, par exemple,

.

Quel que soit l’entier , et quel que soit le nombre , il y a tel que .

Donnons-nous arbitrairement un nombre rationnel positif , prenons un terme quelconque de la suite (1), soit . Prenons un nombre rationnel  ; est un certain nombre rationnel ; nous pouvons trouver tel que . Des conditions

,

on déduit (§ 21)

.

On remarquera que est arbitraire et que et peuvent être choisis supérieurs à tout entier . On aurait une conclusion identique dans le cas de

.

3o  Il n’y a pas de limite. On a . Soient deux nombres tels que

.

Quel que soit , il y a et tels que

,,

d’où résulte

.

Nous sommes maintenant en mesure d’énoncer les théorèmes suivants :


23. Théorème I.La condition nécessaire et suffisante pour que la suite (1) ait une limite (finie) est que, à tout nombre positif corresponde un entier tel que les conditions , entraînent .

1o  La condition est nécessaire, parce que, d’après l’étude du cas 1o  (§ 22), elle est remplie si la suite a une limite finie.

2o  La condition est suffisante, car elle n’est pas remplie dans les cas 2o  et 3o , puisqu’il y a alors un nombre positif ( dans le cas 2o , dans le cas 3o ) auquel certaines différences sont au moins égales, et pouvant être choisis supérieurs à tout entier .


24. Théorème II.Si l’on a deux suites

(1)

(2)

dont la première a pour limite un nombre , la condition nécessaire et suffisante pour que la seconde ait aussi pour limite est que ait pour limite 0.

1o  La condition est nécessaire. Supposons que la suite (2) ait pour limite , comme la suite (1). Soit un nombre positif, prenons et tels que

et.

Quand surpasse un certain entier , on a

et.

d’où

 ;

étant un nombre positif arbitraire, ceci exprime que a pour limite 0.

2o  Pour montrer que la condition est suffisante, je vais montrer qu’elle n’est pas remplie si ne tend pas vers . Dans cette hypothèse, des deux nombres et relatifs à la suite (2), l’un au moins n’est pas égal à  ; l’une au moins des deux hypothèses , est vérifiée, sans quoi on aurait , et comme , on aurait .

Soit, par exemple, . Soient deux nombres tels que

.

Quand dépasse une certaine valeur, on a

,

et, quel que soit , pour une certaine valeur de , on a

.

De

résulte

.

Il est donc impossible que ait pour limite 0.

La conclusion est la même dans le cas de , ce qui démontre le Théorème II.


25. En considérant le cas particulier où les nombres sont tous égaux à un même nombre , auquel cas la suite (1) a évidemment pour limite , on arrive à la conclusion suivante :

Théorème III.Pour qu’une suite ait pour limite un nombre , il faut et il suffit que ait pour limite 0.


26. Théorème IV.Si l’on a deux suites

ayant respectivement pour limites et , a pour limite .

Dans le cas où , ce théorème se réduit à la partie 1o  du Théorème II.

Considérons le cas où .

Supposons par exemple . Soit un nombre rationnel positif. On peut déterminer quatre nombres rationnels tels que

(1)

avec

(2)

,.

Quand dépasse un certain entier , on a

(3)

.

On déduit respectivement de (1) et (3)

d’où

.

Comme, d’après (2) ( étant rationnels)

,

et que est un nombre positif rationnel quelconque, on a

,

c’est-à-dire, d’après le Théorème III,

.

Comme les nombres opposés à et sont et (§ 20), on a aussi (§ 16)

.

et

.