Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/141-150

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Fascicules du tome 1
pages 131 à 140

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 141 à 150

pages 151 à 160


parties d’argent qu’en affinant les casses & les glettes. Idem. Cet Auteur décrit tous ces différens affinages dans son Tr. des Monn. C.20 & 21.

Affinage. C’est aussi un terme de Manufacture de lainage, qui se dit de la meilleure & dernière tonture que le tondeur de drap leur peut donner. On appelle Affineurs, ceux qui donnent cette façon.

Affinage. Terme de Filassier. Voyez Affiner.

Affinage, se dit aussi de l’adresse que l’on a eue de rendre certaines choses plus fines & plus déliées. L’affinage du ciment, que l’on appelle Royal, est variable & incertain.

☞ AFFINEMENT. s. m. C’est de même l’action d’affiner ; mais il se dit mieux des métaux. L’affinement de l’or se fait en plusieurs manières.

AFFINER. v. a. Rendre plus pur, plus fin, plus excellent, & de plus haut prix. En parlant des métaux, c’est purifier un métal de tous les métaux qui peuvent lui être unis, en les séparant entièrement de lui. C’est le débarrasser de toutes les parties qui lui sont étrangères. Purgare, expurgare. On affine l’or & l’argent par la coupelle, par l’inquart, par la cémentation, par les eaux fortes. Voyez l’explication de ces mots à leur ordre. Les autres métaux s’affinent par une fusion réitérée. Comme le feu affine l’or, ainsi l’adversité éprouve la fidélité d’un ami. St. Evr.

Affiner. Terme de Cloutier d’Épingle, faire la pointe au clou, en le faisant passer sur la meule.

Affiner le cuivre. Terme de Fondeur en terre & sable. C’est jeter de l’eau fraîche dans les moules où l’on a fondu quelqu’ouvrage, aussitôt que le métal liquide y a été versé par le jet. Voyez Fondeur en Sable.

Affiner le sucre. C’est le faire fondre, bouillir & écumer. Purgare, perficere. Affiner le fromage, c’est le mettre à la cave avec du foin & de la lie, pour le rendre plus fort & plus piquant. Caseum acriorem, mordaciorem fingere, vini fæce imbuere, inficere, macerare.

Affiner, se dit aussi du ciment, & c’est le rendre plus fin, plus délié, & le réduire en une poudre presque impalpable. Intritam tenuissimum in pulverem redigere.

Affiner, est aussi un terme de Relieur, & signifie, renforcer. Stipare, subigendo stingere. Affiner du carton.

Affiner, est aussi un terme de Cordier, & signifie, passer le chanvre ou le lin par l’affinoir, c’est-à-dire, par plusieurs peignes de fer dont les dents vont toujours en augmentant de finesse, pour le rendre meilleur & plus fin. Canabim aut linum tenuissima in fila ducere.

☞ Ce verbe est aussi réciproque dans les acceptions dont on vient de parler. L’or s’affine dans la fournaise. Le sucre s’affine avec du salpêtre. Le fromage s’affine dans la cave. La filasse s’affine en passant par l’affinoir, &c.

Affiner, au figuré, rendre plus fin, plus adroit. Cautum reddere. Il est difficile d’affiner un sot. Cette expression dont on se sert dans le grand Vocabulaire sans aucune modification, sans aucune note, paroît bonne pour le fauxbourg saint Marceau. En Bretagne & dans quelqu’autres provinces, affiner se dit populairement pour attraper quelqu’un, le rendre plus fin en lui faisant quelque tromperie. Illudendo erudire, cautum reddere.

On dit en termes de Marine, que le temps affine ; pour dire, que l’air s’éclaircit, & que le temps devient plus beau. Alors il se prend dans un sens neutre. Dies aperitur, clarescit, redit serenitas.

Affiner, autrefois vouloit dire Tuer, mettre fin à la vie.

Achilles le Preux combatable
Avoit été si destiné,
Qu’il ne pouvait être affiné.
Fors par la plante seulement. Ovide. Ms. cité par Borel.

AFFINÉ, ÉE. part. Purgatus, expurgatus, &c.

☞ AFFINERIE. s. f. Lieu où l’on rend plus purs les métaux, le sucre, &c.

Il y en a qui disent raffiner, raffinement, raffineur, &c. mais ces mots sont plus propres dans le moral que dans le physique.

Affinerie, est encore en usage dans le commerce, & parmi ceux qui travaillent aux forges. Il signifie une espèce de petite forge, où l’on tire le fer en fil d’archal. Fabrica tenuando in fila ferro apta, apposita. Porter le fer à l’affinerie.

Affinerie, signifie aussi du fer rafiné & mis en rouleaux, pour faire divers ouvrages, Ferrum in laminas tenuatum. J’ai fait venir, j’ai acheté, j’ai employé un milier d’affinerie.

AFFINEUR. s. m. Celui qui affine. Auri, vel argenti, vel ferri excoquendi, purgandi, artifex. Il y a des officiers de la Monnoie qui ont le titre d’Affineurs pour l’or & pour l’argent. Tous les Affineurs se doivent retirer dans les Hôtels des Monnoies par les règlemens de l’an 1555, & il leur est défendu de travailler ailleurs. Il y a des Affineurs dans les sucreries pour affiner & écumer le sucre.

Affineur, se dit aussi de ceux qui travaillent aux forges de fer, & signifie l’ouvrier qui affine le fer dans l’affinerie. Qui ferrum ducit, tenuat in fila.

Affineur, se dit aussi dans les Manufactures de lainage, des ouvriers qui tondent les draps d’affinage.

AFFINITÉ. s. f. Liaison qui se fait entre deux maisons, ou familles, par le moyen d’un mariage. Affinitas. c’est-à-dire, que l’affinité se contracte entre le mari, & les parens de sa femme ; & réciproquement entre la femme, & les parens de son mari. Ainsi l’affinité n’est pas une véritable parenté ; mais à cause de l’étroite liaison qui est entre le mari & la femme, la parenté devient commune. Le Lévitique a marqué certains degrés où l’affinité est un obstacle au mariage. C’est au Ch. XVIII. Il y en a trois. 1o Un frere ne pouvoit pas épouser sa belle-sœur ; c’est-à-dire, la veuve de son frere, Lev. XVIII, 16, à moins que le frere mort n’eût point laissé d’enfans ; car en ce cas, non-seulement il étoit permis, mais il étoit ordonné, sous peine d’infamie, à un frere d’épouser la veuve de son frere, comme on le peut voir au Deut. XXV, 5. 2o Le beau-pere ne pouvoit épouser la fille de son beau-fils, ou de sa belle-fille ; c’est-à-dire, du fils ou de la fille de sa femme. Lev. XVIII, 17. 3o Il n’étoit pas permis d’épouser sa belle-sœur ; c’est-à-dire, la sœur de la femme, pendant que celle-ci vivoit encore ; c’est à-dire, qu’il n’étoit pas permis d’avoir en même tems pour femmes les deux sœurs. Lev. XVIII. 18. Avant la Loi le dernier point n’étoit pas défendu, comme il paroît par l’exemple de Jacob. Sorus, Valquez, & d’autres encore, que l’on peut voir dans Banacina, T. 1, q.3, de Matrim. p. 12, n. 7, prétendent que le droit naturel ne défend le mariage cum affini qu’au premier degré. Quoiqu’il en soit, il est clair par le premier article, selon la remarque de Tirin, que tous les degrés d’affinité prohibés par la Loi de Moyse, n’étoient pas défendus par la loi naturelle. On ne trouve rien dans l’ancien Droit Romain qui regarde la défense des mariages à cause de l’affinité. Papinien est le premier qui en ait parlé à l’occasion du mariage de Caracalla. Les Jurisconsultes qui vinrent après lui, étendirent si loin les liaisons d’affinité, qu’ils mirent l’adoption au même point que la nature. Les Chrétiens, qui ne voulurent pas être surpassés par les Païens dans les égards pour la bienséance, & l’honnêteté des mariages, introduisirent un troisième genre d’affinité qui n’étoit point encore connue. Les Canonistes ont donc distingué trois espèces d’affinité. La première se contracte entre le mari & les parens de sa femme ; & entre la femme & les parens de son mari. La seconde, entre le mari, & les alliés de sa femme, & entre la femme, & les alliés de son mari. Enfin, dans le IVe Concile de Latran tenu en 1213, on traita à fonds la matière de l’affinité. On trouva qu’il n’y avoit que l’affinité du premier genre, qui produisît une véritable alliance, & que les deux autres espèces d’affinité, n’étoient que des raffinemens qu’il falloit abroger. C’est ce qui fut fait dans le fameux Chapitre Non debet, au titre De Consang. & Affin. Quelques-uns prétendent que cette abrogation du deuxième & du troisième genre d’affinité ne se doit entendre que de la ligne collatérale, & non pas de la ligne directe. Quoi qu’il en soit, il est certain que les récusations des Juges ont lieu jusqu’au quatrième degré d’affinité, suivant l’Ordonnance. De même l’affinité est un empêchement au mariage jusqu’au quatrième degré inclusivement. Mais il faut remarquer qu’il s’agit d’une affinité directe, & du premier genre ; & qu’elle ne s’étend pas jusqu’à ceux qui ont de l’affinité avec les personnes avec qui j’ai de l’affinité : Affinis mei affinis, non est affinis meus. Enfin, il faut encore remarquer, que cet empêchement du mariage suit non-seulement de l’affinité que l’on contracte par un mariage légitime, mais encore de celle qui se contracte par un mauvais commerce, si le crime a été consommé. Le crime cependant n’apporte d’obstacle au mariage qu’au premier & au second degré, Conc. Trid. Sess. xxiv, c. 4, au lieu que le mariage en met jusqu’au quatrième degré. Il n’est pas nécessaire au reste que le commerce ait été volontaire ; un commerce involontaire a les mêmes effets, comme il paroît par le Chapitre Discretionem, de eo qui cognovit consanguineam. Quant à la manière de compter les degrés d’affinité, elle n’est point différente de celle dont on compte les degrés de consanguinité, & par conséquent elle est autre dans le Droit Canon que dans le Droit civil. Voyez Consanguinité.

Affinité, ou Cognation spirituelle, est celle qui se contracte par les Sacremens de Baptême, & de Confirmation, comme entre les parrains & marraines d’un côté, & les filleuls & les filleules de l’autre. Un parrain ne peut pas contracter mariage avec sa filleule sans dispense. Il se contracte aussi affinité avec les pere & mere de l’enfant qu’on tient sur les fonts ; ce qui s’appelle Compaternité ; mot qui n’est guère en usage. Voy. le Concile de Trente. Sess. xxiv. De Reform. c. 2.

Affinité, se dit figurément de la conformité, de la convenance, du rapport qui se trouve entre différentes choses. Ces deux esprits ont une grande affinité. Ces deux mots ont beaucoup d’affinité ensemble. La Physique & la Médecine, la Géométrie & l’Astronomie, ont bien de l’affinité entre elles. Notre ame a comme une espèce de liaison & d’affinité avec ces choses. Boil. Ces choses n’ont aucune affinité entre elles. Ablanc.

☞ On le dit dans le même sens de la liaison intime qui se trouve entre deux personnes. Il y avoit une grande affinité entre eux. Ils se ressouviennent de l’affinité qu’ils avoient avec les Tyriens. Vaug.

Affinité, en Chimie, signifie le rapport d’une substance avec une autre, la disposition que ces substances ont à s’unir ensemble.

AFFINOIR. s. m. C’est un terme de Cordier, qui signifie une espèce de seran dont les broches sont petites & serrées, au travers desquelles on fait passer le lin, le chanvre, pour les affiner. Pecten, echinus. Prenez cet affinoir, & affinez ce chanvre. Faites passer par l’affinoir.

☞ AFFINS. s. m. pl. Terme de droit qui n’est plus en usage. On l’avoit francisé pour exprimer des personnes de deux familles distinctes, mais attachées seulement l’une à l’autre par les liens de l’affinité.

AFFIQUET. s. m. ou Porte-aiguille. Petit bois percé & proprement tourné, qui sert à tenir les aiguilles à tricoter. Les femmes le mettent à la ceinture, quand elles tricotent.

AFFIQUETS. s. m. pl. On entend par-là tous les petits ornemens que les Dames portent pour se parer, & pour relever leur beauté ; comme sont les bracelets, les colliers, & toutes les autres choses qui regardent particulièrement la coiffure. Mundus, comptus muliebris. On ne se sert de ce mot qu’en raillant, & il n’a le plus souvent cours que dans le style familier & comique. Ablancourt a pourtant dit : Les femmes n’apportent rien en mariage aux Allemands ; au contraire elles reçoivent d’eux, non pas des parures, ni des affiquets ; mais une couple de bœufs, un cheval enharnaché, le bouclier, la lance & l’épée. En général toutes les parures, vaines, superflues, affectées, s’appellent par raillerie, & même par mépris, Affiquets. Que voulez vous faire de tous ces affiquets-là ? Nicod dérive ce mot Ab affigendo, parce que les affiquets se fichent particulièrement sur la tête. On disoit autrefois affiguets.

AFFIRMANT, ANTE. adj. Terme de Logique. Affirmans. Il y a des propositions universelles affirmantes. ☞ On dit plus ordinairement affirmative. Voyez le mot suivant.

AFFIRMATIF, IVE. adj. Qui affirme. Vous soutenez que cela est ainsi d’une manière si affirmative, d’un ton si affirmatif, qu’il faut vous en croire. On ne doit rien proposer d’un certain air affirmatif, qui témoigne qu’on ne doute pas de ce qu’on avance, & qu’on ne veut pas même en douter. Nicol. Oui est une particule affirmative.

☞ En Logique on appelle proposition affirmative, celle par laquelle on affirme une chose, par laquelle on déclare que l’attribut convient au sujet. Dieu est juste, est une proposition affirmative.

Affirmatif. s. m. Affirmativus. Terme de l’Inquisition Romaine. C’est le nom que donne le S. Office aux hérétiques qui avouent qu’ils sont dans les erreurs dont on les accuse, & qui, dans les interrogatoires, soutiennent ces erreurs avec opiniâtreté.

Affirmative, est aussi quelquefois substantif, & signifie opinion, proposition par laquelle on affirme. Affirmantis, afferentis opinio. L’affirmative & la négative de la plûpart des opinions, ont chacune leur probabilité. Pasc. L’affirmative paroît la plus probable. Roh. Prendre l’affirmative pour quelqu’un, c’est se déclarer pour lui. Il prend toujours l’affirmative contre moi ; c’est-à-dire, il est toujours contraire à mes sentimens.

AFFIRMATION. s. f. Expression par laquelle on assure qu’une chose est vraie. Affirmatio. Ce mot qui vient du Latin, n’est guère en usage que dans le Barreau.

Affirmation en Justice. C’est le serment qu’on prête, & l’assurance qu’on donne de la vérité de quelque fait : ce qui se passe en présence du Juge, lequel fait lever la main, & jurer que la chose affirmée est véritable. On distingue deux sortes d’affirmation, l’une en matière civile, l’autre en matière criminelle. Il n’est pas douteux qu’en matière criminelle l’affirmation se peut diviser ; ensorte que dans la déposition du criminel l’on peut prendre ce qui fait contre lui, & rejeter ce qui tend à sa décharge. Mais en matière civile, lorsque l’affirmation est volontaire, & faite en conséquence d’un serment déféré à l’une des parties, l’on ne peut point la diviser, sur-tout si elle contient des choses connexes ; il faut ou l’accepter toute entière, ou la répudier de même. L’affirmation, par exemple, de celui qui déclare avoir reçu & restitué un dépôt, doit être prise dans son entier, & l’on ne peut l’accepter pour la réception du dépôt, & la rejetter pour la restitution.

☞ En Angleterre on se contente d’une simple affirmation, sans serment, de la part des Quakres, qui soutiennent que le serment est absolument contraire à la Loi de Dieu.

Affirmation. Terme de bureaux, qui se dit de l’écrit qu’un comptable met à la tête de son compte pour le certifier véritable. Selon l’usage des bureaux l’affirmation se met au haut de la première page du compte, & dans la marge en forme d’apostille. Ce terme se dit aussi du serment que fait un comptable, lorsqu’il présente son compte à la Chambre des Comptes en personne, & qu’il affirme que toutes les parties en sont véritables.

Affirmation, est aussi un terme de Logique, opposé à négation, qui signifie l’expression par laquelle une proposition affirme, & dit d’une chose, qu’elle est. Cette proposition contient une affirmation, celle-là une négation. Il est de la nature de l’affirmation, de porter l’esprit à cela. Port-R.

AFFIRMATIONS, au pluriel, se dit en parlant du Greffe des affirmations. Tabularium forense affirmationum. Par l’Ordonnance de 1667, il y a un office de Greffe établi au Parlement pour recevoir, & donner les actes des affirmations des voyages, & du séjour de ceux qui viennent pour faire juger leur procès. Ces actes des affirmations servent au plaideur qui gagne son procès, pour faire taxer ses voyages.

AFFIRMATIVEMENT. adv. D’une manière affirmative. Affirmatè. Il m’a soutenu cela affirmativement & positivement. On dit dans l’Ecole, quand on propose une question, je répons affirmativement ; pour dire que la chose est ainsi.

☞ AFFIRMER. v. a. C’est employer le serment pour faire croire ce que l’on dit & pour détruire tout soupçon désavantageux. Affirmare. M. l’Abbé Girard. Voy. Assurer. Ce verbe dans sa signification la plus générale, veut dire la même chose qu’assurer, soutenir qu’une chose est vraie. Pouvez-vous affirmer cela ? Vous ne deviez pas si légérement affirmer une chose qui se trouve fausse. Dans une acception plus rigoureuse, c’est employer le serment pour faire croire ce que l’on dit, & pour détruire tout soupçon désavantageux. Syn. Fr. Affirmer tout ce qu’on dit, c’est le moyen d’insinuer aux autres qu’on ne mérite pas d’être cru sur sa parole. Les menteurs se font une habitude de tout affirmer ; les juremens ne leur coûtent rien. La bonne manière défend de rien affirmer que lorsqu’on en est requis dans le cérémonial de la Justice. Voyez Assurer & Confirmer.

Affirmer, en Justice, c’est lever la main devant le Juge, jurer qu’une chose est véritable. Jurejurando affirmare. Il a été déchargé de la demande qu’on lui faisoit, en affirmant qu’il avoit payé. Il faut qu’un compte qu’on présente soit affirmé véritable pardevant le Juge ; qu’on affirme la vérité d’une dette, quand on en a obtenu la collocation.

☞ En Logique on dit qu’une proposition affirme, quand elle exprime qu’une chose est. Toute proposition affirme ou nie.

AFFIRMÉ, ÉE. part.

AFFISTOLER. v. a. Terme de dérision, bas & populaire ; pour dire ajuster. Le voilà joliment affistolé.

AFFISTOLEUR. s. m. Ce mot veut dire rapporteur, selon Coquillart. Voyez Borel. Il n’est plus du tout en usage.

AFFLEURER. v. a. Terme d’Architecture. Réduire deux corps saillans l’un sur l’autre à une même surface ; comme une trape au niveau du plancher. Æquare ad libellam. Desafleurer est le contraire.

Affleurer. Terme de Mécanique. Toucher, joindre de fort près. Proximè adaptari. L’avantage de cette roue sur l’autre, est d’avoir un peu plus de simplicité dans sa construction ; mais elle a aussi beaucoup plus de frottement, parce que l’auge doit affleurer assez exactement les côtés, sinon il se fait beaucoup de perte d’eau. Des Billettes. Acad. 1699, Mém. 185.

☞ AFFLICTIF, IVE. adj. Ce mot n’est employé qu’au féminin, joint avec le mot peine. On appelle peine afflictive, toute peine corporelle, ou celle à laquelle la justice condamne un criminel, & qui n’est pas simplement pécuniaire. Pœna pœnaria.

AFFLICTION. s. f. état de tristesse ou d’abattement où nous jette un grand accident, & dans lequel la mémoire de cet accident nous entretient. Dolor, mœror, ægritudo. Les élûs sont éprouvés dans l’affliction. Les discours étudiés de ces consolateurs sans douleur, irritent plus l’affliction qu’ils ne l’adoucissent. M. Scud. Il reçut une sensible affliction de la mort de son ami. Ablanc. Je trouverai la paix dans mon affliction la plus amère. Port-R. Il n’y a qu’une affliction qui dure ; c’est celle qui vient de la perte des biens. La Bruyère. Il y a des femmes qui ont la triste & fatigante vanité de se rendre célébres, par la montre d’une inconsolable affliction Rochefort. L’homme doit être dégoûté & lassé de la vie par les douleurs, & par les afflictions. Abad. L’affliction est un tribut que l’homme sage doit payer sans honte à la nature ; & rien en cela ne le doit distinguer des foibles, que la modération. Cail.

☞ L’affliction est au chagrin, ce que l’habitude est à l’acte. La mort d’un pere nous afflige ; la perte d’un procès nous donne du chagrin. Les affligés ont besoin d’amis qui les consolent en s’affligeant avec eux. Les personnes chagrines ont besoin de personnes gaies qui leur donnent des distractions. Diderot.

☞ Le mot d’affliction, ainsi que ceux de chagrin, de tristesse & de désolation ne disent que des peines de l’esprit & du cœur. Voyez ces mots. Affliction dit plus que tristesse, mais moins que douleur. Désolation ajoute à tout cela.

AFFLIGEANT, ANTE. adj. Qui afflige. Tristis, Acerbus. La mort de la personne aimée est la chose du monde la plus affligeante. Combien d’affligeantes réflections ne devrions-nous pas faire sur notre malheureuse destinée ? P. Gail.

AFFLIGER. v. a. Jeter quelqu’un dans un état de tristesse & d’accablement. Dolorem afferre, Contristare. Dieu afflige les bons par la prospérité des méchans. Cet homme est affligé de la goutte. Je ne vous en dis pas d’avantage de peur de vous affliger. Cette nouvelle m’afflige.

Affliger, se dit comme synonyme d’ennuyer.

 Qu’un sot afflige mon oreille,
Passe encor, ce n’est pas merveille ;
Le don d’ennuyer est son lot. R.

Affliger, signifie aussi, maltraiter son corps, le mortifier, le faire souffrir. Affligere, afflictare, cruciare, macerare. Affliger son corps par des austérités. Port. R.. Les Saints ont toujours eu le soin d’affliger leurs corps par le jeûne & par les disciplines. Id.

Affliger, signifie encore, ruiner, désoler, dévaster. Evertere, vastare, depopulari. La guerre affligera l’Etat. Main. La peste, la famine afflige les Provinces.

Affliger, est aussi un verbe réciproque, & signifie sentir du déplaisir, de la peine de quelque chose. Dolere, mœrere. La civilité exige qu’on aille se réjouir, ou s’affliger avec les gens, de mille choses qui ne donnent ni joie, ni douleur. M. Scud. Si la sagesse de Dieu avoit imposé aux hommes la nécessité de vivre toujours, ils s’affligeroient peut-être de leur immortalité. Abad. Pourquoi, à la lecture de mes satyres, aimez-vous mieux vous affliger avec les ridicules, que de vous réjouir avec les honnêtes gens ? Boil.

AFFLIGÉ, ÉE. part. Souvent employé substantivement. Afflictus, Dolens, mœrens Presque tous ceux qui vont s’affliger avec les affligés, ne sentent rien de ce qu’ils disent sentir. M. Scud. C’est assez d’être du nombre des affligés, pour être de vos amis. Voit. Le temple de la Justice est le refuge inviolable des affligés Patr.

AFFLIGHEN. Célèbre monastère de Bénédictins, situé dans les Pays-Bas, à quatre lieues de Bruxelles, dans l’archevêché de Cambrai : c’étoit autrefois une retraite de voleurs. L’an 1083, six de ces voleurs ayant été convertis par les prédications de Gédéric, moine de Blandini, bâtirent un petit monastère dans ce désert, avec une église qui fut consacrée en l’honneur de saint Pierre par l’Évêque de Cambrai. Ils y vécurent sous la règle de saint Benoît, qui leur fut donné pour Abbé par le même Prélat. Cette Abbaye s’acquit tant de réputation, qu’un Gentilhomme nommé Héribrand, avec cinq de ses fils y prit l’habit, & y porta tous ses biens. Les Comtes de Brabant l’ont aussi beaucoup enrichie. Cette Abbaye a embrassé la réforme de saint Vannes. Philippe II, Roi d’Espagne, ayant fait ériger, par Paul IV, Malines en archevêché, lui donna, pour son revenu principal, l’Abbaye d’Afflighen, dont le titre abbatial fut supprimé. Ce monastère, avec quelques-autres, forme, depuis le Concile de Trente, la Congrégation qu’on appelle de saint Placide. Antoine Yepez, Chron. de l’ordre de saint Benoît. P. Héliot, T. VI. p.301.

AFFLUBER. v. a. Vieux mot, qui veut dire. Couvrir. Borel croît qu’il vient d’insulare. Voyez Affubler. C’est la même chose. Affluber s’est fait d’affubler, par une transposition de l, qui se fait en quelques provinces, où affluber est encore en usage parmi les paysans & le peuple.

AFFLUENCE. s. f. Se dit proprement d’un grand concours d’eaux. Affluentia. L’affluence des eaux a rompu la chaussée de ces étangs. L’affluence des humeurs cause diverses maladies. Le chemin étoit rompu par l’affluence des ruisseaux. Vaug. On dit aussi affluence de paroles, mais le plus souvent en mauvaise part. Verborum copia. Bon Dieu ! quelle affluence de paroles !

On dit encore ce mot figurément, d’une grande abondance de biens. Divitiarum copia. D’un grand concours de monde. Magnus hominum concursus, summa frequentia. Affluence de toutes sortes de biens. Grande affluence de peuple. Acad. Fr.

AFFLUENT, ENTE. adj. Il se dit d’une rivière qui tombe dans une autre. Affluens. On a expédié des Patentes pour rendre la Seine navigable jusqu’à sa source, & toutes les rivières y affluentes, tant au-dessus qu’au-dessous de Paris.

☞ Ce mot est employé dans la Physique moderne pour désigner la matière électrique qui vient de toutes parts au corps électrisé. Matière affluente, par opposition à la matière effluente. Voyez Aimant, Électricité.

Affluent. Suivant les Vocabulistes, est aussi un s. m. qui se dit du lieu où une rivière tombe dans une autre, comme confluent se dit d’un endroit où deux rivières se joignent. Je n’entends pas trop cette distinction. L’endroit où une rivière tombe dans une autre, se jette dans une autre, où deux rivières se joignent, mêlent leurs eaux, s’appelle confluent. A l’égard du mot affluent, je veux d’autres garans qu’eux.

☞ AFFLUER. v. n. Qui se dit au propre des eaux qui se rendent dans un même canal, dont le concours & la chute se font dans un même lieu. Plusieurs ruisseaux, plusieurs rivières affluent dans la Seine, dans la Loire. affluere.

☞ On le dit au figuré des choses qui arrivent en abondance, ou surviennent en grand nombre dans un même lieu. Toutes sortes de biens affluent dans cette maison. Les vivres affluoient dans le camp. Les écoliers affluent de toutes parts dans l’Université de Paris. Les étrangers affluent à Paris.

Ce mot, pris au figuré, déplaît à bien des gens, qui l’ont peut-être jugé trop rigoureusement. L’Acad. ne le condamne point.

☞ AFFOIBLIR. v. a. Rendre foible, diminuer les forces. Debilitare, frangere, infringere. La trop grande chaleur affoiblit le corps. Le vin pris avec excès affoiblit les nerfs. Un travail continu affoiblit la vue.

Affoiblir, dans les arts, c’est rendre plus foible, en ôtant de l’épaisseur ou de la grosseur. Debilitare, vim imminuere. A force de raboter une planche, on l’affoiblit. Les bois affoiblis exprès sont toisés de la grosseur de leur bossage, & comme s’il n’y avoit aucun cintre ni vide.

☞ On le dit également au figuré. Affoiblir le crédit & l’autorité de quelqu’un. La vieillesse affoiblit la mémoire. L’affectation, en matière de langage affoiblit la pensée.

Affoiblir les monnaies, c’est en diminuer le poids ou le titre. Pondus vimque imminuere. On affoiblit l’or, en le mettant dans l’eau-forte, en y mêlant de l’argent, du cuivre, de l’émeri. Lorsque le besoin de l’Etat le demandoit, le Roi pouvoit non-seulement lever de grosses sommes sur la fabrication des monnoies, mais même les affloiblir, c’est-à dire, en diminuer la bonté. C’est ce que nous apprend un plaidoyer fait en l’an 1304, par le Procureur-Général de Philippe le Bel, contre le Comte de Nevers qui avoit affaibli sa monnoie. Item abaissier & amenuiser la monnoie est privilége espécial au Roi de son droit royal, si que à lui appartient, & non à autre, & encor en un seul cas, c’est à savoir en nécessité, & lors ne vient pas le gãag ne conversit en son profit espécial, mais au profit & en la défense dau commun. le Blanc.

Affoiblir, est aussi neut. & signifie, devenir plus foible, plus débile, perdre de ses forces & de sa vigueur. Consenescere, debilitari, deficere. L’esprit affoiblit de plus en plus. Le parti affoiblit. Ablanc.

Affoiblir, est aussi réciproque, & signifie tout de même, devenir moins vigoureux, moins fort, s’abattre, se débiliter. Son corps & son esprit s’affoiblissent beaucoup. Son autorité s’affoiblit tous les jours.

AFFOIBLI, IE. part.

AFFOIBLISSANT, ANTE. adj. Qui affoiblit. Debilitans, infringens, imminuens. La saignée trop réitérée est un remède affoiblissant. Remèdes confortatifs. Remèdes affoiblissans.

AFFOIBLISSEMENT. s. m. Diminution de forces, diminution de vigueur : il se dit également bien dans le sens propre & dans le figuré. Debilitatio, infractio. Affoiblissement de corps. Affoiblissement d’esprit. La fleur de l’âge se passe, & la vigueur a ses affoiblissemens. Port-R. L’affoiblissement de la République de Rome est venu de la grandeur de ses citoyens. La vie austère produit l’affoiblissement des passions.

Affoiblissement, se dit particuliérement des monnoies. Charles VII. dans la grande nécessité de ses affaires, poussa l’affoiblissement si loin, & leva un si gros droit sur les monnoies, qu’il retenoit les trois quarts d’un marc d’argent pour son droit de seigneuriage, & pour les frais de la fabrication. Le Blanc. Le peuple se ressouvenant des dommages infinis qu’il avoit reçus de l’affoiblissement des monnoies, & du fréquent changement du prix du marc d’or & d’argent, pria le Roi qu’il quittât ce droit, consentant qu’il imposât les Tailles & les Aides, ce qui fut accordé. Id. Une Ordonnance de Philippe le Bel, du mois de Mai 1295, porte que le Roi étant à Paris, ayant aucunement affoibli les monnoies en poids & loi, espérant encore les affoiblir pour subvenir à ses affaires, & connoissant être chargé en conscience du dommage qu’il avoit fait, & feroit porter à sa République pour raison de cet affoiblissement ; le Roi s’oblige par Charte authentique au peuple de son royaume, que, ses affaires passées, il remettra la monnoie en bon ordre & valeur à ses propres coûts & dépens, & portera la perte & tare sur lui. Boizard. Il y a encore une pareille Ordonnance du Roi Jean donnée à Paris le 28 Décembre 1355, rapportée par le même Auteur, Traité des Monn. Ch. 10. Voyez Empirance. Ce mot vient du primitif, foible.

☞ AFFOLIÉE. adj. f. Terme de Marine, plus ordinairement Affolée. Voyez ce mot.

AFFOLER. v. a. Rendre excessivement passionné, jusqu’à la folie. Impotentem cupiditatis alicujus motum ciere, excitare. Il n’est guère en usage que dans le style familier, badin & satyrique, encore n’est-ce ordinairement qu’au participe. C’est la beauté de sa femme qui l’a affolé. Il étoit tellement entêté de cette opinion, qu’il en étoit affolé ; c’est-à-dire, qu’il en avoit presque perdu l’esprit.

Autrefois ce mot signifioit, estropier, blesser. Affoler une jambe, la blesser. Ledare, sauciare. Affoler une femme enceinte, la faire avorter. Abortum prægnanti inferre, facere. En ce sens il est hors d’usage. En 1397, le Roi donna du bien à l’Hôpital de Saint Antoine de Rouen, pour y recueillir, dit le titre de donation, les malades & affolés de la maladie de mondit Seigneur Saint Antoine. Geogr. & Hist. de la haute Norm. t.2. p.69. Du Cange dérive ce mot de affolare, qui signifie, toucher légérement, flatter en badinant. Le Roman d’Aubery emploie ce mot en le prenant pour blesser. De Sarazins y et molt affolés. Cela est vieux.

AFFOLÉ, ÉE. part. & adj. Qui est si passionné, & si sensiblement touché de quelque passion, qu’il approche de la folie. Insaniens cupiditate. C’est un homme affolé de son amour-propre. C’est une femme affolée de sa propre beauté. Tout cela n’est bon que dans le style familier & comique.

En termes de Marine, on appelle une boussole, ou une aiguille affolée, celle qui est défectueuse, ou touchée d’un aimant qui ne l’anime pas, qui indique mal le Nord. Acus magnetica deficiens, aberrans à polo.

AFFOLEURE. s. f. Vieux mot, qui signifie blessure. Gravior læsio. Ce mot n’est plus en usage ; il vient d’affoler. Dans une Charte de l’an 1328, (elle est d’Odoard Seigneur de Ham) il est dit, sauf à icelui Seigneur le cas d’affoleure.

AFFOLIR. v. n. Devenir fou. In insaniam incidere. Cet homme affolit tous les jours. Il n’est point d’usage.

AFFONDER. Vieux mot, qui signifioit plonger, enfoncer dans l’eau.

 S’il peut se plonge & affonde,
Souventefois en mer profonde. Ovide. Ms. cité par Borel.

AFFORAGE. s. m. Droit seigneurial qu’on paye au Seigneur, pour avoir permission de vendre du vin, ou autre liqueur dans son fief, & suivant la taxe qui en sera faite par ses officiers. Jus Dominii in vinum venale. Ragueau & du Cange en parlent.

Afforage, est aussi employé dans la dernière Ordonnance de la ville de Paris, du mois de Décembre 1672 ; pour dire, le prix d’une chose vénale fixé par autorité de Justice. Venalium æstimatio Judicis auctoritate facta. On ne peut vendre des vins étrangers, que le prix n’en ait été fixé par les Echevins, & qu’il n’en soit fait mention par l’acte d'afforage, comme il est porté au ch. 9 de la même Ordonnance. Pasquier témoigne que le mot d’affeurer, signifioit autrefois acheter, & qu’on disoit affeurer son cheval ; pour dire, l’acheter au feur, & au juste prix.

Ce mot vient du latin Afforare c’est-à-dire, Juxta foros & leges judicare. D’autres le dérivent de Fodrum, par une métaphore tirée de ceux qui étant obligés de payer au Seigneur une certaine quantité de feurre, ou de foarre, la faisoient estimer en argent à un certain prix.

AFFOUAGE. s. m. Droit de couper du bois dans une forêt pour sa famille. Du Cange. Jus cædendæ sylvæ domesticos in usus.

Ragueau dit plus particulièrement, le droit de prendre du bois dans une forêt pour son chauffage. Ce mot vient de ad, pour, & focus, feu, comme si l’on disoit, provision de bois pour son feu.

AFFOUAGEMENT. s. m. Est un état ou département qui se fait dans la Provence, & autres pays où les Tailles sont réelles, pour faciliter la levée des impositions qu’on fait sur la province, en réglant le nombre des feux de chaque paroisse ou communauté. Vectigalium descriptio. Environ l’an 1471 se fit le général affouagement, ou la quotité de feux pour l’imposition des tailles, par tous les Bailliages, Vigueries & Vallées de Provence ; auquel affouagement tous les biens possédés alors par les Ecclésiastiques, & par les Gentilshommes, furent déclarés nobles, & exempts de taille, & ceux que désormais les uns & les autres acquerroient, seroient sujets à la taille. Ce mot vient de fouage, qui vient de feu.

AFFOUGUER. v. a. Terme singulier pour exprimer les effets de la fougue & de la violence. ☞ Mettre en fougue. Les vents affouguent les mers.

☞ AFFOUGUÉ, ÉE. Violenté, mis en fougue. La mer affouguée. Garantir des roues à eau d’être affouguées par les vagues. Merc. d’Avr. 1727. Ce participe n’est pas plus usité que le verbe.

AFFOUIR en un lieu. Vieux mot, qui veut dire, se retirer d’un lieu en fuyant ailleurs. Confugere, secedere in aliquem locum.

AFFOURCHE. s. f. Terme de Marine. Ancre d’affourche, c’est une ancre mouillée de sorte que son cable fasse un angle, & comme une fourche avec le cable d’une autre ancre. Voyez Affourcher.

AFFOURCHER. v. a. Terme de Marine. C’est jeter une ancre à la mer dans une telle distance, que son cable fasse une manière de fourche avec le cable d’une première ancre qu’on y a déjà jetée. Ainsi on appelle ancre d’affourche, celle qui est jetée de cette sorte après la première. Ce mot vient de furca.

Affourcher en patte d’oie, c’est jeter trois ancres, de façon qu’il y en a deux qui travaillent ensemble du plus fort vent que l’on craint.

Affourcher à la voile, c’est porter l’ancre d’affourche avec le vaisseau, lorsqu’il est encore à la voile.

Affourcher. v. a. Passer un ruisseau ou autre chose en mettant un pied d’un côté & le second de l’autre. Ce mot n’est plus en usage, on dit Enjamber.

Affourcher. Terme de menuiserie, employé pour signifier un double assemblage de deux pièces de bois, avec une languette & rainure de l’un dans l’autre.

AFFOURCHÉ, ÉE. part. Vaisseau affourché sur ses ancres.

Affourché. adj. Monté sur une voiture, sur un animal, jambe deçà, jambe delà, comme un homme est à cheval. Vectus, equitans.

 Un jour un villageois sur son âne affourché,
Trouva par un ruisseau son passage bouché. Rouss.

AFFOURRAGEMENT, ou AFFOURAGEMENT. s. m. L’action d’affourrager. Pabuli præbitio. Passionis invectio.

AFFOURRER, ou AFFOURRAGER, ou AFFOURAGER. v. a. Donner du fourrage, de la paille aux moutons, ou à d’autres bestiaux. Ce mot vient de foarre, feurre, ou fourrage, & du latin far. Quelques-uns ont dit aussi affeurer : mais ce mot signifioit autrefois, mettre le prix aux denrées, d’où est venue la phrase, au feur & à mesure.

AFFOYS. Vieux mot, qui veut dire, promesses. Promissa.

☞ AFFRANCHI, IE. s. m. & f. Signifie proprement un homme mis en liberté. Libertus, Liberta.

☞ Dans le Droit Romain, c’étoit un nouveau citoyen devenu homme libre par l’affranchissement ou manumission. C’étoit le nom que l’on donnoit à l’acte par lequel un esclave étoit mis en liberté. Manumissio quo si dimissio de manu. Voyez ce' mot.

☞ Les Affranchis prenoient le nom & le prénom de leurs maîtres qu’ils joignoient à leur propre nom, & s’unissoient par-là, en quelque sorte, à leur famille. Un Affranchi étoit obligé à la reconnoissance envers son maître, non-seulement par la Loi naturelle, mais encore par la Loi civile, sous peine de rentrer dans la servitude.

☞ Ces nouveaux Citoyens étoient distribués dans les tribus de la ville qui étoient les moins honorables, très-rarement dans les tribus de la campagne.

☞ La condition d’Affranchi étoit comme mitoyenne entre celle des Citoyens par droit de naissance & celle des esclaves ; plus libre que celle-ci ; moins indépendante que la première.

☞ Le fils d’un Affranchi étoit libre à tous égards. Libertus & Libertinus signifient la même chose.

☞ A Athènes les Affranchis & les fils naturels étoient sur le même pied.

☞ AFFRANCHIR. v. a. Mettre quelqu’un en liberté, le tirer de la servitude. Manumittere. On affranchit un esclave quand il a rendu quelque service signalé à son maître. Par le Droit Romain on ne pouvoit affranchir un esclave avant l’âge de 18 ans.

☞ Il signifie aussi délivrer de quelques devoirs d’engagement, tirer d’une sujétion fâcheuse. Liberare, eximere, immunem facere. Le mariage affranchit de la puissance paternelle. On ne peut être affranchi des devoirs, du joug du mariage que par la viduité. Il est d’une ame grande & généreuse d’affranchir les peuples d’une cruelle servitude. Vaug. Les Hollandois se sont affranchis de la domination des Espagnols.

 
Vos invincibles mains
Ont de monstres sans nombre affranchi les humains. Rac.

Affranchir un héritage, en matière de fief, c’est le libérer de quelque charge, de quelque rente. On affranchit une terre, un fief, en obtenant des lettres d’amortissement. Voyez ce mot.

Affranchir un paquet, affranchir une lettre, affranchir le port des lettres ou des paquets, c’est payer le port d’un paquet, d’une lettre, en les mettant à la poste, au carrosse, au messager, afin que celui à qui on l’envoie ne le paye pas. Litterarum, aut rei cujusvis pretium, tabellario, veredario, solvere. Quand on écrit à son Procureur, il faut affranchir les lettres. Quand on envoie quelques mémoires au Libraire du Mercure Galant, il faut affranchir les paquets. Cette expression vient de ce que quand on a payé le port d’une lettre ou d’un paquet à l’endroit d’où on l’envoie, le commis de la poste met dessus, franc, pour marquer que le port est payé.

Affranchir, se dit au figuré, comme synonyme de délivrer, en parlant des diverses passions qui nous agitent, & qui nous tiennent dans une espèce d’esclavage. L’Evangile nous a affranchis de la tyrannie du péché. Le fidèle est affranchi de toute crainte. Il est aussi réciproque. Heureux qui s’affranchit du pouvoir de l’amour. Corn. On dit aussi dans le même sens, être affranchi du pouvoir de la fortune. Être affranchi de soucis, de soins, d’inquiétudes, d’affaires, d’embarras, & généralement de tout ce qui peut causer de la peine à l’esprit. M. Genest a dit de Luther :

Il déchire l’Église, Il s’acharne contre elle :
Et voulant s’affranchir des droits qu’elle a sur nous,
Il se les attribue & les prodigue à tous.

Affranchir la pompe, se dit en termes de Marine, lorsqu’en faisant jouer la pompe, on tire l’eau plus vîte qu’elle n’entre. Ainsi la pompe est franche, quand il n’y a plus d’eau dans le vaisseau.

AFFRANCHI, IE. part. Manumissus, liberatus.

AFFRANCHISSEMENT. s. m. Manumission, action par laquelle on affranchit un esclave. Manumissio. Voyez Affranchi & Manumission.

Affranchissement, signifie aussi l’exemption qu’un Seigneur accorde à quelqu’un de quelques charges ou impositions réelles ou personnelles. Immunitas. Affranchissement d’une terre. Lettre d’affranchissement.

Affranchissement, se prend aussi figurément pour toute sorte de délivrance. Liberatio. Ces pertes, que la nature préoccupée s’imagine faire par la mort, ne sont, à en bien juger, qu’un affranchissement d’un état, où le bien ne balance point le mal. Abad. Le premier pas que doivent faire ceux qui se consacrent à Jésus-Christ par les vœux de la Religion, est celui d’un affranchissement de toute appréhension de la mort. Ab.de la Tr.

AFFRES. s. f. pl. (l’a est long). Grand effroi causé par la vision de quelque objet terrible. Pavores. Les affres de la mort, Pavores mortis. Il n’est guère en usage que dans cette phrase. Affray, & Affraiment, se trouvent au même sens dans les Loix communes, ou Droit coutumier d’Angleterre. Harr. Ce mot vient de affari, quando quis nec loqui, nec affari potest præ timore. D’autres croient qu’il vient du son & du mouvement naturel qu’on fait dans le frémissement & dans le frisson, qui s’explique par fri & fre : car en effet, ce qui donne de l’horreur & de la peur, donne une espèce de frisson. D’autres le dérivent du mot Grec φρήν & de α privatif, comme qui diroit, insensé & privé de jugement. Quelques-uns dérivent ce mot de Affricosus, comme qui diroit, qui vient d’Afrique, qui est le pays des monstres.

AFFRÉTEMENT. s. m. Terme de Marine. C’est la convention pour le louage d’un vaisseau. Navis conductio. Ce mot se dit sur l’Océan. Sur la Méditerranée on dit Nolissement. L’acte qu’on passe, quand on prend un vaisseau à louage, s’appelle Chartepartie.

AFFRÉTER. v. a. Prendre un vaisseau à louage. Navim conducere. Le propriétaire du navire fréte, ou donne à louage ; & le marchand chargeur affréte, prend à louage.

AFFRÉTEUR. s. m. Celui qui prend le vaisseau à loyer. Navis conductor. Ce mot vient de fretum, détroit de mer.

AFFREUSEMENT. adv. D’une manière affreuse. Terribilem in modum. Quand on est en colère, on regarde affreusement son ennemi. Torve intueri. L’usage de ce mot est assez borné ; & bien des gens voudroient qu’en sa place on dît d’une manière affreuse, ou qu’on se servît de quelqu’autre adverbe, comme de grandement, d’extrêmement, d’horriblement, &c. Il est extrêmement gros, il est horriblement laid, plutôt que, il est affreusement gros, il est affreusement laid. Ce seroit le plus sûr, & c’est en effet le plus ordinaire.

AFFREUX, EUSE. adj. Qui cause des affres, qui est horrible, qui fait peur, qui donne de l’effroi. Terribilis, horribilis, horrendus. Ce mot affreux veut le datif quand il est suivi d’un nom, & l’infinitif, quand il est suivi d’un verbe, en y ajoutant la particule à. La mort est quelque chose d’affreux à tout le monde, & plus encore aux méchans qu’à tous les autres. Tout n’est qu’or & que pourpre dans votre armée, celle des Macédoniens au contraire est affreuse à voir. Vaug. Il se met aussi quelquefois sans régime. L’Afrique a des monstres & des déserts affreux. Les mourans ont des regards affreux. Il a la mine affreuse. Arn. Sa fin fut affreuse. Boss. C’est l’avarice qui a rendu les hommes assez hardis, pour mépriser tout ce que la mort a d’affreux dans un naufrage. Bouh. M. de Caseneuve fait venir ce mot d’Afer Africain, à cause de la noirceur des Africains, qui les rend affreux. Voyez Affres, son primitif.

AFFRIANDER. v. a. Accoutumer à la friandise. Allectare, prolectare. Il ne faut pas donner aux enfans trop de douceurs, cela les affriande. Vous m’affriandez à votre bonne chère. Vaug.

On dit en Fauconnerie, affriander l’oiseau, lorsqu’avec de bon pât, soit de pigeonneaux, ou de poulets, on le fait revenir sur le leurre.

Affriander, signifie au figuré, attirer par quelque chose d’utile. Allicere, illicere. Le gain affriande les Joueurs. Il n’est que du style simple & familier.

AFFRIANDÉ, ÉE. part.

☞ AFFRIOLER. v. a. C’est au propre attirer par quelque chose d’agréable au goût. On affriole les oiseaux qu’on veut prendre. On est affriolé par la bonne chère.

☞ Au figuré, c’est attirer par quelque chose d’utile. On affriole les jeunes filles par les fleurettes, par les présens, &c. Dans l’une & l’autre acception il est du style très-familier.

AFFRIOLÉ, ÉE. part.

AFFRITER. v. a. Terme de Cuisine, mettre une poêle en état de frire comme il faut. Tout tient à une poêle neuve qui n’est point encore affritée. On affrite avec des pois, des féves, & autres choses qui ne tiennent pas à la poêle.

AFFRODILLE. s. f. ou ASPHODELE. Plante. Asphodelus, hasta regia. Cette plante a une tige droite comme une pique, ou hache royale, Voyez Asphodelle.

AFFRONT. s. m. Injure qu’on fait à quelqu’un par paroles ou par voies de fait. Injuria, contumelia. Les affronts à l’honneur ne se réparent point. Corn. Il n’y a que le Christianisme qui puisse nous faire souffrir patiemment un affront. Un démenti est un sanglant affront. ☞ Sénéque dit que la douleur qu’on ressent d’un affront, est la marque d’un cœur foible & bas. S. Evr.

☞ On dit essuyer un affront, le recevoir. Boire, avaler un affront, le souffrir patiemment. Sorbere, contumeliam, ac concoquere. Ne pouvoir digérer un affront, c’est en garder le ressentiment. Comment pourriez-vous digérer un si cruel affront ?

☞ L’affront, dit M. l’Abbé Girard, est un trait de reproche ou de mépris lancé en face de témoins : il pique & mortifie ceux qui sont sensibles à l’honneur. L’insulte est une attaque faite avec insolence ; on la repousse ordinairement avec vivacité. L’outrage ajoute à l’insulte un excès de violence qui irrite. L’avanie est un traitement humiliant qui expose au mépris & à la moquerie du public.

Ce mot vient de l’Italien affronto. Ménage. Pasquier a observé que ce mot n’étoit pas ancien de son temps.

Affront, se dit aussi de la honte que nous recevons nous-mêmes par notre faute ou par celle de ceux qui nous touchent. Un Général d’Armée reçoit un affront, quand il lève le siège de devant une place. Un criminel qu’on exécute, fait un affront à toute sa famille. Sa mémoire lui fait affront.

AFFRONTAILLES. s. f. pl. Terme de Coutume. Les confins de plusieurs fonds aboutissans aux côtés d’un autre fonds.

☞ AFFRONTER. v. a. Dans le sens propre, faire front en attaquant hardiment, attaquer avec hardiesse, avec intrépidité. Hostem adoriri fortiter. Nous allâmes affronter l’ennemi jusque dans son camp. Alexandre alloit affronter l’ennemi en plein jour & à découvert.

☞ Au figuré, affronter la mort, affronter les hasards, les dangers, c’est s’exposer hardiment à la mort, aux hasards, aux dangers. Adire pericula. Où est le Soldat qui n’affronte pas le danger en présence de son Prince ? Abl.

Vous allez de la mort affronter la présence. Rac.

☞ AFFRONTER, dans un sens odieux, signifie aussi tromper, sous prétexte de bonne foi. Fraudare, defraudare. Ce banqueroutier a affronté tout le monde. C’est un coquin qui affronte en vendant de mauvaises marchandises qui ont de l’apparance.

☞ AFFRONTÉ, ÉE. part. Périls affrontés. Gens affrontés par un marchand.

Affronté, en termes de Blason, se dit des animaux qui sont posés vis-à-vis l’un de l’autre, dont les têtes se regardent dans un écu. Deux lions affrontés sont ceux qui sont front contre front. Gemini leones adversis frontibus picti. On le dit aussi quand il n’y a que leurs têtes ainsi disposées. On le dit même, quand ils sont en des quartiers différens, encore qu’il y ait d’autres pièces entre deux. Il portoit d’or à deux lions affrontés de gueules. On dit aussi en termes d’Antiquaires : têtes affrontées.

AFFRONTERIE. s. f. Action d’affronter. Fraus, fraudatio. Il y a un très-grand nombre de gens qui ne vivent que d’affronterie. Servez-vous rarement de ce mot. Apparemment que sa ressemblance avec effronterie n’a pas peu contribué à le bannir presque de l’usage ordinaire.

AFFRONTEUR, EUSE. adj. & s. m. & f. Celui ou celle qui affronte. Fraudator, Sycophanta. Paris est plein de devins, de donneurs d’avis, de faux chimistes, qui sont tous des gueux, des filous & des affronteurs.

AFFUBLEMENT. s. m. Voile, vêtement, habillement, tout ce qui couvre, cache, enveloppe la tête, le visage, le corps. Velamentum, Amictus. Ce mot ne peut avoir d’usage que dans le comique, ou dans le style familier.

AFFUBLER. v. a. Cacher, envelopper sa tête, son visage, ou son corps de quelque habillement, de quelque voile. Amicire, obtegere, involvere. Les Moines & les Hermites s’affublent d’un froc. Dans les cérémonies des obsèques des Princes, les parens sont affublés de grands chaperons de deuil. Cette femme étoit affublée dans sa cappe pour n’être pas connue. Il y a de bons auteurs qui prétendent que le mot d’affubler n’est plus en usage que pour signifier se couvrir, se vêtir, sans avoir égard à la tête. Au moins est-il certain qu’être affublé se trouve pour être couvert, être vêtu.

Le moindre de leurs valets
Est affublé d’écarlate. Main.

O qu’il est indignement
Affublé d’une soutane ! Id ;

Nicod dérive ce mot de insula, qui signifie une ancienne coiffure. On dit encore en Picardie, défuler ; pour dire, se décoiffer, ôter son chapeau. Du Cange le dérive de Affibulare, mot de la basse latinité qui vient de fibula:c’étoit une boucle, ou agraffe servant à attacher les habits longs qui couvroient & enveloppoient tout le corps ; comme on a dit clavi, & laticlavi, des vêtemens honorables ainsi attachés.

☞ On s’en sert plus ordinairement avec le pronom personnel. S’affubler d’un manteau.

On dit au figuré, s’affubler de quelqu’un ; pour dire, en être coiffé & entêté. Efferri studio alicujus viri aut rei. Les disciples de Platon étoient affublés des opinions de leur maître. Les gens foibles se laissent affubler par des directeurs & par des flatteurs. Ce mot, en quelque sens qu’on le prenne, ne se peut dire qu’en raillant, ou dans le style familier.

AFFUBLÉ, ÉE. part. Qui est couvert, qui est enveloppé de quelque voile, de quelque habillement. Opertus, amictus, involutus.

☞ AFFUSION. s. f. En Pharmacie, est l’action de verser une liqueur chaude ou froide sur certains médicamens. Les infusions & préparations de certaines substances, doivent se faire de cette façon pour n’en pas dissiper les parties volatiles.

AFFÛT. s. m. Machine de bois servant à soutenir le canon, ou à le transporter ailleurs. Tormenti bellici lignea compages, pes, fulcimentum, sessibulum, vehiculum. L’affût d’un canon de navire, ou de casemate, consiste en deux roues sans rais, d’une seule pièce de bois. L’affût d’un canon qui va en campagne consiste en deux fortes roues, qui portent deux longues & fortes pièces de charpente, qu’on nomme flasques, dans lesquelles est comme enchâssé le canon, qui se meut sur ses tourillons comme sur un centre en équilibre. On y ajoute un avant-train composé de deux moindres roues, quand on le fait marcher. Les mortiers ont aussi leurs affûts, dont les roues sont comme celles des canons des vaisseaux ou des casemates.

Affût de bord, est le nom qu’on donne aux affûts des canons qui servent sur les vaisseaux.

Affût Turc. Les affûts des canons Turcs sont différens des nôtres, en ce que les roues des premiers sont pleines, & que celles des nôtres sont à jour, & liées par des rayons qui vont du centre à la circonférence. Le Dictionnaire militaire explique mal cette différence.

Affût, en termes de Chasse, est un lieu caché, où l’on se met avec un fusil pour attendre le gibier au passage, Venatoris, insidiæ, specula. On va le soir à l’affût, & le matin à la rentrée.

☞ On dit figurément & proverbialement, qu’un homme est à l’affût ; pour dire, qu’il est au guet, qu’il épie l’occasion de faire quelque chose, de parler à quelqu’un. Esse in speculis.

AFFÛTAGE. s. m. Soin qu’on prend du canon pour le pointer, le disposer à tirer. Tormenti bellici ad emissionem comparatio.

Affûtage, se dit dans le métier de Chapelier, de la façon que l’on donne à un vieux chapeau, soit en le remettant à la teinture, soit en le redressant sous les plombs, soit en lui donnant le lustre.

Affûtage, signifie aussi la façon que l’on donne aux outils tranchans, en les passant & aiguisant sur le grès, pour les faire mieux couper.

Affûtage, se dit aussi chez les ouvriers, d’un assortissement de tous les outils dont ils ont besoin. Omnia artis alicujus instrumenta, supellex. On le dit encore des pièces qu’on applique aux fontaines jaillissantes pour en diversifier le jet.

AFFÛTER. v. a. Disposer le canon à tirer, le mettre en mire. Tormentum ad emissionem disponere, librare.

Affûter, signifie aussi chez les ouvriers, aiguiser les outils. Acuere, exacuere.

☞ Les Peintres & les Dessinateurs disent aussi affûter les crayons ; pour dire, aiguiser les crayons.

Affûter, se dit mieux des bois & des crayons que des métaux. On aiguise un instrument neuf, & celui qui a servi ; on n’affûte que celui qui a servi. Aiguiser, c’est donner la forme convenable à l’extrémité d’un instrument qui doit être pointu. Affûter, c’est réparer cette forme altérée par l’usage.

☞ On dit figurément s’affûter, dans le même sens qu’être à l’affût, se préparer, se disposer à faire quelque chose, épier l’occasion. Ils s’affûtent pour nous jouer quelque tour. Il est très-familier.

AFFÛTÉ, ÉE. adj. On dit qu’un artisan est affûté de tous ses outils, quand il a près de lui tous ceux dont il a besoin pour travailler. Comparatus ab omnibus instrumentis, ab omni artis suppellectile.

Affûté, se dit aussi figurément d’une personne qui est venue préparée & disposée à dire ou à faire quelque chose. Ils étoient trois ou quatre Juges affûtés pour faire gagner le procès à cet homme-là.

Nicod dérive tous ces mots de fustis, bâton.

AFFÛTIAU. s. m. Terme populaire, pour signifier, bagatelle, brimborion, affiquet, &c.

AFI.

AFICHIER & AFICHER. Vieux mot, qui veut dire ; attacher, mettre son application.

Celui qui en trésors s’afiche. R. de la R.
Le cuer est mal affiché.

AFIERT. Vieux mot, qui veut dire, convient, appartient : Voyez Borel, Nicod, le Songe du Verdier, & les Stances chrétiennes, où il est dit :

Faites à mon nez l’honneur
Qui afiert à tel Seigneur.

Borel dit qu’affertir veut dire appartenir.

AFILIATION. Voyez Affiliation.

AFILIER. Voyez Affilier.

AFIN. Conjonction qui dénote l’intention, & signifie, pour, à dessein. Ut, ad. Elle est toujours suivie d’un de, ou d’un que. Quand elle est suivie d’un de, elle régit l’infinitif. Cet Abbé prêche afin d’obtenir un Evêché, afin de parvenir à l’épiscopat. Et quand cette conjonction est suivie d’un que, elle régit le subjonctif : afin que vous y mettiez ordre. Afin que je voie la fin de mon procès. Elle régit même bien souvent deux constructions différentes dans une même période : j’ai tenu cette conduite, afin de faire voir mon innocence à mes Juges, & que l’imposture ne triomphe pas de la vérité. Vaug. Il est vrai que M. Corneille, dans ses notes, n’approuve pas tout-à-fait cette dernière façon de parler ; mais elle est trop usitée & trop utile, pour la rejeter. Je veux vous le donner chez vous, afin de le guérir avec plus de commodité, & qu’il soit vû de moins de monde. Mol. Au reste, pour avec l’infinitif, est bien plus en usage qu’afin de & qu'afin que. Quand on est obligé de se servir d’afin que, & qu’on veut le répéter dans une même période, on ne répète que la seconde partie, la première étant sous-entendue. Ils livreront le Fils de l’homme aux Gentils, afin qu’ils le traitent avec outrage, & qu’ils le fouettent & le crucifient. Port-R. Ménage dérive ce mot de ad finem.

☞ Ces deux conjonctions, pour, & afin, dit M. l’Abbé Girard, sont synonymes dans le sens où elles signifient qu’on fait une chose en vûe d’une autre : mais pour marque une vûe plus présente ; afin en marque une plus éloignée. On se présente devant le Prince pour lui faire sa cour. On lui fait sa cour afin d’en obtenir des grâces.

Pour regarde plus particulièrement un effet qui doit être produit. Afin regarde proprement un but où l’on veut parvenir.

☞ Les filles d’un certain âge font tout ce qu’elles peuvent pour plaire, afin de se procurer un mari.

AFIOUME. s. m. Sorte de lin qui vient du Levant par la voie de Marseille.

AFR.

AFRA. Château de Barbarie en Afrique. Afra. Il est dans le royaume de Darka.

☞ AFRAISCHER, ou AFRAÎCHER. v. n. Terme de Marine dont les Matelots se servent, pour dire, que le vent devient plus fort. Le vent afraische. Et pour marquer le désir qu’ils ont qu’il s’élève un vent frais, ils disent afraische.

AFRICAIN, AINE. s m. & f. & adj. Qui est d’Afrique, qui appartient à cette partie du monde. Afer, Africanus. Annibal, Asdrubal, Térence, Tertullien, S. Cyprien, S. Augustin, sont d’illustres Africains.

Africain a été le surnom de P. Cornélius Scipion, qui prit Carthage, la détruisit, & défit pour jamais Rome d’une si terrible ennemie. C’est en récompense d’un service si considérable, qu’on lui donna le surnom d’Africain, comme on donna à son frere celui d’Asiatique. Nous avons des médailles où l’on voit d’un côté la tête de Scipion nue, avec ces mots : P. Scipio Afric. & de l’autre, Scipion dans un char à quatre chevaux, & Cart. Subact. Africain a encore été le surnom d’un Historien & Chronologiste fameux du IIIe siècle, natif de Palestine, dont nous n’avons plus rien que les fragmens que nous en ont conservé Eusébe & Syncelle. Il se nommoit Julius Africanus, qu’il ne faut point confondre avec Sextus ou Cestus Africanus, comme ont fait Eusébe, & après lui Photius & Syncelle. Quand on parle de Scipion, on ajoute toujours l’article, Scipion l’Africain. Quand on parle des deux autres, on ne met jamais d’article, Jules Africain, ou seulement Africain ; le plus souvent même en parlant françois on retient leurs noms latins, Julius Africanus, ou seulement Africanus. Quand on dit simplement Africain, ou Africanus, c’est de Jules qu’on parle, & non pas de Sextus. Voyez Marmol, Liv. I. Ch.1, 2, 3, 4, 5.

Il y a aussi un Saint nommé Africain. Voyez Afrione.

Africain. s. m. Terme de Fleuriste. Renoncule jaune doré, marqueté de nacorat, sur un fond jaune.

AFRICAINE. s. f. Flos Africanus. Fleur d’Afrique, œillet d’Inde. Il y a un grand nombre d’espèces de cette plante. Gérard en compte quatre espèces. Dictionn. de James. Voyez Œillet d’inde.

AFRICANISME. s. m. Terme dont on se sert pour signifier des expressions barbares & des mots forgés dont quelques auteurs Africains se sont servis. On trouve quantité de ces sortes d’Africanismes dans les ouvrages de S. Augusin ; il dit lui-même qu’il le faisoit exprès, pour se mieux faire entendre du peuple. M. Bingham croit que l’on doit attribuer à cette condescendance le grand nombre d’Africanismes qui se trouvent dans les ouvrages de S. Augustin. De la Roche.

AFRIGNE. s. m. Nom propre d’homme. Africanus. S. Africain, vulgairement S. Afrigne, plus communément encore S. Efrique, & par corruption S. Frique & San-Frique, étoit Evêque de la ville de Comminge en Gascogne au VIe siècle. Baill.

AFRIQUE. Africa. Troisième partie du monde, au midi de l’Europe. Elle est bornée au septentrion par la mer Méditerranée ; à l’occident & au midi par l’Océan ; & à l’orient par le détroit Arabique. Les Anciens Géographes la bornent tous à l’orient par le Nil ; & ce qui est entre le Nil & la mer-Rouge, ils le donnent à l’Asie, Africa ab orientis parte Nilo terminatur, pelago à cæteris. Mela. L.1.ch.4. Voyez Marmol Liv. I, ch. 1, 3, 4, 5. Diego de Torrez. Hist. des Chérifs, ch. 12, & la description d’Afrique de Jean Léon l’Africain, qui se trouve dans les Navigations & Voyages recueillis en Italie par Ramusio. On n’est point d’accord sur l’origine & sur la signification de ce mot. Quelques Auteurs prétendent qu’elle est ainsi nommée du mot Arabe Iphrik, qui vient du verbe Faraka, divisit, il a divisé, ou séparé ; & l’on apporte deux raisons de cette étymologie : la première, est que cette partie de la terre est séparée de toutes les autres, soit par la mer, soit par le Nil, qui, comme je l’ai dit, en faisoit autrefois les bornes du côté de l’orient. L’autre est, qu’un certain Iphric, qui a regné dans ces contrées, lui a laissé son nom. Marmol, L 1, ch. 1. se déclare pour cette étymologie. D’autres disent que ce nom vient du mot hébreu עפר aphar, qui signifie poussière, parce que le pays est extrêmement aride & sabloneux. Josephe, au Liv. I de ses Antiquités Judaïques, c. l6, prétend que ce nom lui vient d’Ophre, fils de Mandane, & petit-fils d’Abraham, qui s’empara, dit-il, de la Lybie, & dont les descendans la posséderent, & la nommerent de son nom, Afrique. Servius & Isidorius disent que Africa, ou Aphrica, est la même chose que Aprica, comme qui diroit, exposée au soleil. Quelques Grammairiens dérivent ce nom de l’α privatif, & de φρίχη Horreur, comme qui diroit, une terre qui ne fait point frissonner, qui n’a jamais de froid, ni d’hiver. Dans Eusèbe, Liv. IX, de la Prép. & dans Josephe, Liv. I des Ant. ch. 16. Alexandre Polyhistor rapporte le sentiment d’un certain Cléodémus, qui prétendoit que parmi les enfans qu’Abraham avoit eus de Cetthura, il y en avoit un nommé Apher, & un autre nommé Aphran ; que l’un avoit donné son nom à la ville d’Afra, & l’autre à l’Afrique. Solin & Cédrénus prétendent que ce nom lui vient d’Afer fils d’Hercule. D’autres prétendent qu’il lui vient d’Ophir fils de Jectan, ou de l’autre Ophir dont parle l’Ecriture, & que l’Afrique est la terre d’Ophir si fameuse par le commerce qu’y faisoit Salomon. Bochart, dans son Chanaan, L. I, ch. 15, rejette toutes ces étymologies, & prétend que ce nom vient de פרך pharach, qui, en Syriac & en Arabe signifie Frotter ; & d’où s’est formé פרוך pheruch ou פרוך pherich, qui signifie un épi de blé ; que de-là est venu le nom Africa, comme si l’on avoit voulu dire, une terre d’épis, parce que ce pays est fertile en blé. Quoiqu’il n’y ait rien d’assuré sur l’origine de ce nom, j’aimerois beaucoup mieux le faire venir d’Ophir, non pas de celui qui donna son nom à la terre où Salomon envoyoit ses flottes, mais d’un autre que l’Ecriture place à l’entrée de l’Afrique, & qui probablement s’avança dans ce pays. La raison est, 1o Que dans ces premiers temps les terres n’ont point pris leur nom des qualités qu’elles avoient, mais de ceux qui les occupoient. 2o Parce que ç’a été la coutume de donner le nom de ceux qu’on rencontroit d’abord à l’entrée, à tout le pays qu’ils avoient derrière eux. L’Afrique s’étend depuis le 35e degré de latitude septentrionale, jusqu’au 35e de latitude méridionale, & depuis le troisième degré de longitude, jusqu’au 83e.

Sur les Médailles, l’Afrique est coiffée d’une tête d’Eléphant, dont la trompe avance au dessus du front ; de la même manière que Bérénice & Cléopatre, Reines d’Egypte, le sont aussi quelquefois.

On appelle en particulier Afrique, une province de l’Afrique sur les côtes de la Méditerranée, entre la Mauritanie à l’occident, & la Cyrénaïque à l’orient ; c’est la partie orientale de ce que nous appelons aujourd’hui Barbarie. Les Arabes n’appellent Afrique, Afrikiaf, que cette province ; car l’Afrique en général, qui passe pour la troisième partie du monde, ils l’appellent Magreb, ou plutôt Macreb, qui veut dire Occident.

Afrique, est encore une ville d’Afrique sur la côte de la Méditerranée, que quelques-uns prennent pour l’ancienne Leptis, & Marmol pour Adruméte ; mais il s’est trompé : elle est à vingt lieues d’Adruméte, & c’est plutôt l’Aphrodisium des Anciens. Le Calife Mehedi l’ayant fortifiée, la nomma Méhédie. Des Corsaires de Sicile s’en étant saisis, l’appelerent ensuite Afrique, de ce nom lui est testé. Charles V la prit en 1550, & la ruina, Voyez Marmol, Liv. VI, ch. 26 & 28.

Il y en a aussi une de ce nom en Languedoc, généralité de Montauban. ☞ Il y a encore une montagne de ce nom dans la Bourgogne, au Bailliage de Dijon, au sud-ouest de cette ville.

☞ AFSLAGERS. s. m. pl. C’est ainsi qu’on appelle à Amsterdam les Officiers qui président aux ventes publiques.

AFTOMATES. Voyez Automate.

AGA.

AGA. Interjection admirative. Vieux mot qui vient d’un autre vieux mot, Agardez ; pour dire regardez, voyez un peu. M. Huet croit que ce mot est purement hébreu, & que c’est une abréviation de deux mots hébreux, qui signifient, Animadversio Authoris ; ainsi on a dit Aga, pour Animadverte. Il y a des provinces ou Aga est encore fort usité parmi le peuple.

AGA, ou AGHA. s. m. Terme d’Histoire & de Relation. Ce mot signifie dans la langue des Mogols, & dans celle des Khovarezmiens, un Homme puissant, un Seigneur, & un Commandant. Les Turcs se servent de ce mot pour signifier absolument un Commandant. Ainsi l’Aga des Janissaires est leur Colonel, & le Capi Aga est le Capitaine de la porte du Sérail. On donne par civilité à quelques personnes le titre d’Aga, quoiqu’ils n’aient aucune charge. Quand ce mot est en régime, c’est-à-dire, quand il y a un autre substantif après lui qui en dépend, & que dans nos langues occidentales nous mettrions au génitif, on dit Agassi, & non pas Aga. Aussi Capi Agassi, signifie l’Aga ou le Gouverneur des Pages ; Spahilar Agassi, l’Aga, ou le Général de la Cavalerie. Du Loir écrit Agha. Quatre principaux Eunuques, qui portent tous la qualité d’Agha, sont toujours auprès du Grand Seigneur. Le premier d’entre eux est nommé Capi Agha. Id. p. 89. Le second est le Khazinedar Bachi ; le troisième est le Kilerdgi Bachi ; ces trois Aghas suivent par-tout le Grand-Seigneur, mais le quatrième ne sort jamais de Constantinople, & pour cette raison il s’appelle Seray Agassi, l’Agha du Sérail. Id. p. 90.

☞ AGAÇANT, ANTE. adj. Qui agace, qui excite. Des regards agacans. Des manières agaçantes.

AGACE. s. f. Espèce de pie, qui a les plumes plus noires que les autres. Pica. Voyez. Pie. Ce mot vient de l’Italien Ragazza, qui signifie Garrula.

AGACEMENT. s. m. Incommodité, impression désagréable qui vient aux dents par le moyen de quelques acides. Dentium hebetatio. L’agacement se fait plutôt dans les gencives que dans les dents mêmes ; car si on frotte les gencives avec du vitriol, ou d’autres acides, il en résulte le même effet. Dans un combat que fit faire le Duc de Savoye en 1421, d’un ours contre des dogues, le Gouverneur lui frotta les dents avec du vitriol ; ce qui lui causa un tel agacement, qu’il ne put mordre les chiens.

☞ AGACER. v. a. Dans le sens propre. Causer aux dents une espèce de sentiment désagréable & incommode, tel que celui que causent les fruits verts & acides, quand on les mange. Hebetare. Le verjus agace les dents.

☞ Il signifie figurément, picoter, provoquer, exciter par paroles ou par actions. Provocare, Lacessere. Il l’a si souvent agacé, qu’il a été contraint de répondre.

Cher Tirsis, je me sens piquer
De vingt sonnets dont tu m’agaces.

☞ On l’emploie aussi figurément, pour dire, exciter, par des regards, par des manières attrayantes, par mille petites choses que fait ou dit une femme pour s’attirer l’attention de quelqu’un qui ne lui déplaît pas. Lacessere, provocare. C’est une chose bien agréable de se voir agacer par le mérite d’une jolie femme, quand elle n’a d’enjouement qu’autant qu’il en faut pour plaire. Corn.

Ménage dérive ce mot du latin acax, du verbe aceo, & de acaciare, qui sont factices ; d’où il prétend que sont venus agace, & agacer : d’autres du mot lacessere, prétendant qu’on a dit en quelques lieux acesser ; pour dire, Agacer. Il y a plus d’apparence qu’il vient de hegace, vieux mot celtique & bas-Breton, qui signifie, Agacer, ou hegasus signifie aussi, Contentieux. Autrefois on disoit aussi, Agacier dans le même sens.

AGACÉ, ÉE. part. Hebetatus, Lacessitus, Provocatus.

AGACERIE. s. f. Terme par lequel on exprime les petites choses que dit ou fait une femme, & les petites manières dont elle se sert pour s’attirer l’attention de quelqu’un qui ne lui déplaît pas. Cette Dame si délicate jugea qu’il étoit temps de me donner de l’espérance, & de me faire penser, mais par les agaceries les plus décentes, que j’étois le mortel fortuné que son cœur avoir choisi. Crebillon le fils, égaremens du cœur & de l’esprit, p. 18.

AGACIN. s. m. Cors au pied. On ne le dit plus, Voyez Cors.

AGADEZ. Ville & royaume. Agadeza. La ville d’Agadez, capitale du royaume, auquel elle donne son nom, est aux confins de la Lybie, en Afrique. Le royaume d’Agadez s’avance plus au Levant que celui de Gualata, & s’étend beaucoup plus loin vers le nord, Agadezanum Regnum. Le roi d’Agadez est tributaire de celui de Tombut.

AGAG. Ville d’Afrique. Agaga. Elle est plus au septentrion que le lac de Zaïre. Agag est capitale d’un petit royaume qui porte son nom.

AGALARI. s. m. Terme de Relation. Page du Grand-Seigneur du premier ordre. Ephebus quarti, ou supremi ordinis. Ce mot signifie Favori en langue turque. Il se dit de ceux qui sont dans la quatrième chambre du Sérail du Grand-Seigneur, & qui approchent de plus près de sa personne pour son service, auquel ils sont immédiatement destinés. Souvent le Prince les favorise de présens de conséquence. De plus, afin que ces Agalaris puissent avoir de quoi fournir à la dépense qu’ils sont obligés de faire, lorsqu’en sortant du Sérail ils sont élevés à la charge de Beglerbeys, le Grand-Seigneur leur donne les dépêches pour les ambassades, qu’ils vendent à des Chiaoux, avec lesquels ils composent pour avoir plus ou moins part au présent que leur fera le Prince vers lequel ils sont envoyés. A. D. S. M. Tous les Agalaris ne sont pas également traités. Ils sont élevés aux charges & dignités de l’Empire à proportion qu’ils sont plus ou moins avant dans les bonnes grâces du Prince. Le moindre avantage qu’ils reçoivent de la libéralité de leur maître au sortir du Sérail, c’est d’être pourvus de la charge d’Aga, de Spahilar-Agassi, & de Capigi-Bassi. Les plus favorisés des Agalaris sont élevés à de plus hautes charges, comme celles de Capitan-Bassa, ou de Bacha du Grand-Caire, de Damas, ou autres lieux les plus considérables de l’Empire. Le Prince les honore quelquefois de la qualité de Musaïp. Lorsqu’un Agalari, que le Prince a élevé à la qualité de Bacha ou Beglerbey, est sur le point de sortir du Sérail, le Grand Seigneur l’envoie prendre à la porte par son Chicaia, ou Intendant de sa maison, avec grand nombre de chevaux pour lui faire honneur. Il le fait conduire à son hôtel, où il est reçu avec toute la civilité possible. Il lui fait de grands présens & fort bonne chère, pendant trois ou quatre jours, jusqu’à ce qu’il se soit pourvu de quelque logis dans la ville. Les Sultans & les Bachas lui font aussi des présens. Id.

Ces Agalaris sont pris du nombre des Ichoglans qui montent à la quatrième chambre, & servent aux principaux offices qui regardent immédiatement le service du Prince, & l’accompagnent par-tout lorsque les femmes ne s’y trouvent pas, & sont le Sechletar-Aga, le Silictar, le Chiodar-Aga, le Rechioptar, ou Rakduntac, le Materagi-Aga, l’Ibrietar, l’Ischiouptar, le Tubenter-Aga, le Chiamarci-Aga, le Camedir-Bassi, le Sarrigi-Bassi, le Munasungi-Bassi, le Turmachi-Bassi, le Berber-Bassi, l’Amangi-Bassi, & le Teskelagi-Bassi. Tous ces Officiers sont les plus âgés des Ichoglans, qui sont dans la quatrième chambre du Sérail au nombre de quarante. Ils se trouvent devant le Prince quand il sort de sa chambre. Il ne leur commande rien que par signes, qu’ils comprennent d’abord, & ils exécutent ses volontés avec une promptitude admirable. C’est eux qui reçoivent les viandes à la porte de la cour des mains du maître-d’hôtel de dehors, qu’ils se donnent de main en main, jusqu’à ce qu’elles soient portées en celles du maître d’hôtel de dedans, qui les sert au Grand-Seigneur. Ce Prince se plaît fort à l’entretien muet de ses Agalaris, qui n’oseroient l’entretenir que par signes. Il les fait monter à cheval, les voit s’exercer à la course, à sauter, à jeter la masse de fer, & à de semblables épreuves de leur force & de leur adresse. Id. Du Loir distingue cinq oda, ou chambres du Sérail, & met les Agalaris dans la cinquième. Voyez Oda.

AGALLOCUM. Voyez Aloès

AGAMÉDE. s. m. Frère du célèbre Trophonius, fut un habile Architecte : c’est lui qui bâtit, avec son frere, le temple d’Apollon à Delphes.

AGAN, PAGAN. Île de l’Océan oriental. Agana, Pagana. Elle est dans l’Archipel de Saint-Lazare. Magellan fut assassiné dans cette île, en allant chercher les Moluques.

AGANIPPE. s. f. Terme de Mythologie. C’est le nom d’une fontaine du mont Hélicon, en Béotie, dont les eaux avoient une vertu souveraine pour inspirer les Poëtes, d’où les Muses s’appeloient quelquefois Aganippides. Le cheval Pégase fit sortir de terre cette fontaine d’un coup de pied.

AGANIPPIDES. adj. f. pl. Surnom des Muses, parce que la fontaine Aganippe leur étoit consacrée.

AGANTE. Terme de marine, c’est-à-dire, prens. Ce mot n’est usité que parmi les matelots.

AGAPE. s. f. Terme de l’Histoire Ecclésiastique, qui signifioit dans la primitive église grecque, les festins que faisoient ensemble les premiers Chrétiens dans les églises, pour entretenir l’union & la concorde entre eux. Voici ce qu’en dit Tertullien, dans son Apologétique, pour en expliquer l’origine : le nom de nos soupers apprend la raison de leur établissement. On leur donne un nom qui signifie en grec, charité. Quelque dépense que l’on y fasse, on regarde comme un gain, une dépense que l’on fait par piété. C’est un rafraîchissement par lequel on soulage les pauvres. Chacun y mangeoit modestement ; & le repas finissoit par la prière.

Saint Paul, dans son Epître aux Corinth. Ch. 11, parle de ces Agapes, ou festins, que ceux de Corinthe faisoient dans l’église en l’honneur de celui de Jésus-Christ, lorsqu’il institua l’Eucharistie. Mais au lieu de le faire tout en commun, les riches faisoient leur souper à part ; & c’est ce que saint Paul reprend, lorsqu’il leur dit : De la manière donc que vous faites ces assemblées, ce n’est point manger la Cène du Seigneur ; car chacun prend & mange par avance le souper qu’il apporte, ensorte que les uns n’ont rien à manger, pendant que les autres font grand’chère. La Cène du Seigneur ne se prend pas en ce lieu-là pour l’Eucharistie, mais pour le festin ou souper qui l’accompagnoit, & que les premiers Chrétiens faisoient en mémoire du souper que Jésus-Christ fit avec ses Apôtres, lorsqu’il institua l’Eucharistie. Les Juifs nouvellement convertis faisoient ce festin avec beaucoup d’apparat, pour mieux représenter le festin de la Pâque légale. Les paroles de l’Apôtre semblent insinuer que ce festin se faisoit avant la Communion ; mais il y eut dans la suite des Ordonnances de l’Eglise, qui obligeoient les fidèles de recevoir l’Eucharistie à jeun ; & ainsi les Agapes ne se firent plus qu’après la Communion.

Quelques Auteurs ont cru que cette cérémonie ou coutume étoit empruntée des Paiens : Mos verò ille, ut referunt, Sédulius sur le Chapitre 11 de la I. Epître aux Corinth. de gentili adhuc superstitione veniebat. C’est même un reproche que Fauste Manichéen fait aux Chrétiens dans S. Augustin, d’avoir changé les sacrifices des Païens en Agapes. Christianos sacrificia Paganorum vertisse in Agapas. Mais si les Agapes tiroient leur origine des sacrifices, il seroit bien plus vraisemblable, que les premiers Chrétiens auroient suivi en cela ce qui se pratiquoit dans les sacrifices des Juifs. Le reproche d’un ennemi de l’Eglise, comme Fauste, à qui quelque ressemblance de ces festins à ceux des Païens ; avoit donné lieu de faire cette calomnie, ne prouve rien. C’est ainsi qu’une infinité de reproches, que nous font les Protestans, sont très-faux. Ces festins qui se faisoient dans les sacrifices sont fort anciens. On lit au Chap. 18 de l’Exod. v. 12. Jethro, beau-pere de Moyse, offrit des holocaustes & des sacrifices à Dieu, & Aaron, accompagné des Anciens des Israëlites, vint pour manger avec lui en la présence de Dieu. Après tout, il paroît plus vraisemblable que ces festins se faisoient en mémoire du repas que fit notre Seigneur la veille de sa mort avec ses disciples, avant l’institution de l’Eucharistie. Saint Paul, qui en savoit bien l’origine, semble le marquer par le mot Cœna, souper, & Dominica Cœna, souper du Seigneur, dont il s’est servi.

Il est encore parlé des Agapes, ou festins de charité, dans l’Epitre II. de saint Pierre, ch. 2. v. 13. où ce saint Apôtre, faisant le portrait de quelques faux Docteurs, dit qu’ils n’aiment que leurs plaisirs ; & que les festins qu’ils font, sont de pures débauches. On lit dans les plus anciens manuscrits Grecs le mot d’άγαπαι, & dans notre Vulgate, In conviviis suis luxuriantes. Selon cette ancienne leçon, ces impies faisoient leurs délices de ces festins qui n’avoient été établis par les premiers Chrétiens, que pour exercer leur charité envers leurs freres. Il est encore fait mention de ces Agapes au v. 12. de l’Epître de saint Jude. Ces festins religieux donnerent lieu aux Païens d’accuser les Chrétiens de commettre des impuretés, & de se mêler au hasard dans leurs assemblées. Ce mot d’Agape, qui en Grec signifie Amour, fortifioit le soupçon, & faisoit prendre ces repas de charité pour des banquets de dissolution. Le baiser de paix, par lequel finissoit la cérémonie, étoit une nouvelle raison qui confirmoit la médisance, & faisoit conjecturer, que cette marque d’affection fraternelle n’étoit pas tout-à-fait pure, ni tout-à-fait innocente. Pour faire cesser la calomnie, l’on ordonna d’abord que le baiser de paix se donneroit séparément entre les hommes, & de même entre les femmes, afin que le mêlange des deux sexes ne donnât plus lieu aux mauvais soupçons, & que la concupiscence ne pût avoir aucune part à cette salutation fraternelle. Il fut ensuite défendu de dresser des lits pour la commodité de ceux qui vouloient manger plus voluptueusement. Comme cette pratique pouvoit être