Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/921-930

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Fascicules du tome 2
pages 911 à 920

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 921 à 930

pages 931 à 940


autres. La corneille avertit des malheurs à venir. La Font. Il y a en Angleterre beaucoup de corneilles toutes blanches. Morton, Hist. nat. de Northampton.

Corneille emmentelée, est celle qui est en partie noire, en partie grise, qui a la couleur depuis le cou, jusqu’à la moitié du corps, différente du reste. Cornix partim atri, partim cinerei coloris.

Il y a plusieurs autres espèces de corneilles, La corneille de bois, appelée Freux, Graie, ou Grosse. Cornix frugilega. La corneille bleue, cornix cærulea, qui se voit en Misnie, ou en Allemagne. C’est un oiseau vorace qui n’est recommandable que par la beauté de ses couleurs. Son bec est noir, les cuisses brunes & courtes. Il a du bleu à plusieurs endroits de son pennage ; savoir à la queue, aux ailes, à la tête, autour du croupion, à la partie de dessus. Par endroits il est couvert, en d’autres il est mêlé d’une couleur verte. Le dos, le cou & le devant sont bruns, les grandes pennes des aîles sont noires. Corneille de mer. Voyez Corbeau de bois.

Il y a dans la Fauconnerie du Roi, des oiseaux & des Officiers pour le vol de la corneille.

On dit figurément d’un Auteur qui a fait quelque Ouvrage en ramassant ou en dérobant les pensées des autres, que c’est la corneille d’Esope, ou la corneille d’Horace, par allusion à la sable qu’ils rapportent de la corneille, qui se trouva sans plumes, quand les autres oiseaux eurent repris celles qu’elle leur avoit dérobées pour se parer. La Fontaine dit dans ses fables que ce fut au geai que cette avanture arriva.

La corneille est le symbole d’Apollon, le Dieu des Devins. Politien, dans ses Miscellan. c. 67. Quand elle est perchée, elle marque la foi conjugale. P. Jobert.

Corneille, terme de Botanique. s. f. Lysimachia. Plante qu’on appelle encore Lysimachie. On en connoît plusieurs espèces ; la plus ordinaire est celle qu’on nomme Lysimachia lutea major, forte Dioscoridis. C. B. & qu’on trouve au bord des ruisseaux & dans les endroits humides. Sa racine trace considérablement, & donne plusieurs tiges qui sont d’abord rougeâtres, & qui s’élèvent à la hauteur de trois à quatre piés, un peu velues, cannelées & noueuses par intervalle, de ces nœuds naissent trois, quatre, rarement cinq feuilles, qui environnent la tige ; elles sont plus ou moins larges, suivant la bonté du terroir ; pareilles en quelque manière par leur figure à celles du saule ordinaire, un peu plus larges, d’un vert-blanchâtre. L’extrémité des tiges est branchue, & est garnie de bouquets de fleurs jaunes, d’une seule pièce, découpées assez profondément en cinq parties, à peu-près de même grandeur que celles du millepertuis, & soûtenues par un calice verdâtre à cinq pointes, du milieu duquel s’élève un pistil qui enfile la fleur, & qui devient un fruit sphérique de la grosseur & figure d’un grain de coriandre. Ce fruit s’ouvre à sa pointe en plusieurs parties, & il contient plusieurs semences dans sa cavité. Cette plante porte le nom de Lysimachus, qu’on prétend avoir été son premier inventeur. La corneille est astringente. On assure sur plusieurs expériences, que l’on prétend certaines, que le jus de la corneille versé sur les plaies les plus dangereuses, les guérit en très-peu de temps.

CORNELIA. s. f. nom propre d’une famille des anciens Romains. Cornelia gens. La famille Cornelia, étoit une des plus grandes, des plus illustres & des plus étendues de Rome. Elle avoit plusieurs branches, les unes Patriciennes, & les autres Plébéïennes. Les Patriciennes étoient les Blasions, les Lentulus, les Scipions, les Cinna, les Sisenna, les Sulla, les Cossus, les Metula, les Dolabella & les Céthégus. Il y a beaucoup de médailles de la famille Cornelia, la plupart des Lentulus. Il ne faut point dire la famille des Corneliens, comme on fait dans le Moréri, mais la famille Cornelia ; nos Antiquaires parlent toujours ainsi. On peut dire aussi les Cornelius, la famille des Cornelius.

CORNÉLIE, s. f. nom propre de femme. Cornelia est le féminin de Corneille ou Cornelius, & les noms des femmes de la famille Cornelia.

Et je ne puis au calme abandonner ma vie,
Ou craindre des périls, qu’affronte Cornélie. Brebeuf.

Nos Antiquaires & nos Médaillistes disent aussi souvent Cornelia : on ne dit même Jamais autrement, quand on y joint un autre nom, Cornelia Salonina, & non pas Cornélie Salonina, quoiqu’on dise communément Salonine tout seul.

CORNELIUS, CORNELIA. Voyez Corneille, Cornelia, Cornélie.

CORNEMENT. s. m. maladie d’oreille qui fait croire au malade qu’il entend toujours un bruit de cornet. Tinnitus aurium. Le cornement d’oreille vient souvent d’obstruction. Ce mot n’est plus en usage. On dit tintement d’oreille.

CORNEMUSE. s. f. instrument rustique dont se servent les bergers pour faire danser. Uter symphoniacus, utriculus. La cornemuse est la même chose que la chalemie, à la réserve que la chalemie n’a point de petit bourdon. La cornemuse a deux parties. L’une est la peau de mouton qu’on enfle comme un ballon par le moyen d’un porte-vent qui est enté sur cette peau, qui est bouché par une soupape. L’autre partie consiste en trois chalumeaux ou flûtes. L’un s’appelle le gros bourdon, & le second petit bourdon, qui ne font sortir le vent que par leurs pates ; & le troisième chalumeau est fait à anches, & on en joue en serrant la peau sous le bras, quand elle est enflée, & en ouvrant & fermant avec les doigts les trous dont il est percé, qui sont au nombre de huit. Le petit bourdon a un pié de long, le porte-vent six pouces, le chalumeau treize pouces, y compris son anche, lesquels se brisent & se divisent par les nœuds, pour être plus portatifs. Sa peau est d’un pié & demi de long, & de dix pouces de large : ce qui est pourtant arbitraire. La cornemuse a trois octaves d’étendue. La cornemuse sert de dessus aux hautbois du Poitou.

On dit proverbialement & bassement, quand la cornemuse est pleine, on en chante mieux & plus volontiers.

☞ CORNEMUSEUR. s. m. qui joue de la cornemuse. Rabelais s’est servi de ce mot. On ne le dit plus.

CORNÉOLE. s. f. pierre précieuse. Voyez Cornaline.

Cornéole ou Coronéole. s. f. plante, espèce de genêt, qui rampe presque toujours sur terre. Sa racine est ligneuse. Ses feuilles naissent alternes le long des branches ; elles sont minces, longues, semblables à celles de l’hyssope. Sa semence est petite, de la figure d’un petit rein, & renfermée dans une gousse platte. On l’appelle aussi fleur à teindre, ou herbe à jaunir, parce que les Teinturiers s’en servent pour teindre les draps en jaune, & s’ils les plongent auparavant dans le pastel ou guède, ils les teignent en vert. En Latin genisia tinctoria Germanica.

☞ CORNER, v. n. sonner d’un cornet, d’une corne. Cornu canere. Les vachers cornent pour rassembler les vaches qu’ils menent aux champs.

☞ On dit en ce sens d’un homme qui sonne mal du cor, qu’il ne fait que corner.

Corner signifie aussi parler dans un cornet pour se faire entendre à un sourd. Il faut lui corner aux oreilles pour se faire entendre. Aurem alicui personare.

☞ On dit activement, mais dans le style familier seulement, corner une chose, une nouvelle par tout, par toute la ville, avec imprudence & importunité. Aliquid palam & ubique serere, disseminare, evulgare. On avoit fait cette confidence en secret, il l’est allé corner par-tout.

La fièvre de parler me brûle & me consume,
Et je n’en guéris point, que pendant quinze jours
Je ne l’aille corner dans tous les carrefours. R.

☞ En termes de chasse, corner les chiens, sonner du cor pour les exciter ou pour les rappeler. Voyez Cor. Corner requête, sonner du cor pour obliger les chiens à requêter de nouveau la bête, lorsqu’ils sont en défaut.

☞ On dit encore neutralement, corner aux oreilles de quelqu’un, lui suggérer quelque chose avec importunité. Il est venu à bout de le faire résoudre à cela, à force de lui corner aux oreilles.

☞ On dit figurément que les oreilles cornent, quand on a des bourdonnemens d’oreilles. Tintiunt aures : & que les oreilles doivent avoir bien corné à quelqu’un ; pour dire, qu’on a fort parlé de lui.

☞ On dit encore figurément, en parlant d’une personne qui entend de travers, que les oreilles lui cornent. Toutes ces phrases sont proverbiales & familières.

CORNET. s. m. petit cor de chasse qui est de cuivre, qui n’a quelquefois qu’un demi-cercle. Cornu. Quelquefois il a plusieurs tours ou cercles pour faire circuler la voix.

Cornet se dit d’un petit cor fait de corne, qui sert à augmenter le cri ou le son de la voix. Un cornet de vacher est fait d’une corne de vache. Cornu pastoritium. Un cornet de Postillon, cornu veredarii, lui sert à donner de loin le signal pour qu’on lui prépare des chevaux. Il faut un cornet pour parler à ☞ celui qui a l’oreille dure. Le son se conserve dans ces instrumens, parce qu’en traversant leurs parois, il ne peut se répandre circulairement & le son ainsi ramassé, frappe l’organe avec plus de force. Voyez Porte-voix.

☞ En termes de Blason, on reconnoît trois sortes de cornets, les uns tout simples, sans viroles, attaches, ni autres garnitures, Cornu mutilum ; les autres sont mornés & virolés, armillatum ; d’autres sont enguichés, cornu cujus os alterius coloris est ; pendus, pendulum ; attachés ou liés, ligatum. Et toutes ces garnitures sont souvent de différens émaux.

Cornet est aussi un instrument de guerre des Anciens. Cornu. Végèce, L. II. c. 22, nous apprend que les Légions avoient des trompettes, des cornets & des buccines ; que lorsque les cornets sonnoient, il n’y avoit que les Enseignes qui obéissoient, & non les soldats ; que quand les Enseignes devoient marcher seules sans les soldats, on ne sonnoit que des cornets, comme on ne sonnoit que des trompettes quand il étoit question de faire marcher les soldats seuls, sans les drapeaux, pour quelque faction ou quelque ouvrage ; que c’étoient les cornets & les buccines qui sonnoient la charge de la retraite ; & que pendant le combat les trompettes & les cornets sonnoient ensemble, Voyez Vigenère sur César, fol. 179. col. 4.

Cornet à bouquin, instrument de Musique qui sert à soûtenir un grand chœur dans un lieu vaste & étendu, comme dans les Cathédrales. Musicum, symphoniacum cornu. Le cornet à bouquin est une espèce de grande flûte qui a sept trous, dont le septième est inutile. Il y en a de tous droits, faits d’une seule pièce de bois de cormier ou de prunier. D’autres sont courbés & de deux pièces. On les couvre de cuir pour les conserver. Le dessus est de deux piés de long, & la basse de quatre. Le diamètre de sa pate est d’un pouce, celui de son bocal d’une ligne, & celui de chaque trou de quatre lignes. Il a l’étendue d’une octave. On peut jouer sur le cornet jusqu’à cent mesures sans respirer, parce qu’il dépense moins de vent qu’on ne fait avec la bouche, par la respiration ordinaire.

Cornet est aussi un des principaux jeux de l’orgue. Il y a le grand cornet, qui a cinq tuyaux sur touche, & dix-neuf touches parlantes sans les dièses. Le petit cornet est un jeu qui a un troisième clavier séparé de celui du positif & du grand corps de l’orgue, lequel on appelle aussi cornet séparé, & n’a-que dix-neuf touches qui jouent. Il a cinq rangs de tuyaux sur marche. Le premier est bouché, & est à cheminée d’un pié de long. Le second est aussi d’un pié, mais ouvert : le troisième d’environ huit pouces & demi : le quatrième d’un demi-pié, & le cinquième de cinq pouces ouverts, & on les accompagne du bourdon & du prestant : ce qui fait sept tuyaux.

Cornet d’écot, est un autre jeu qui a un quatrième clavier séparé dans les grandes orgues, qui a aussi cinq tuyaux sur marche, & dix-neuf touches qui jouent.

On appelle aussi cornets, plusieurs petits vaisseaux qui sont ordinairement de corne. Un cornet pour jouer aux dés & au trictrac. Pyrgus, fritillum. Représentez-vous l’inquiétude d’un joueur qui voit sa mort ou sa vie sortir de son cornet. Boil.

Un cornet d’écritoire, est la partie de l’écritoire où on met l’encre. Scriptorium cornu, atramenti scriptorii vasculum. Un cornet de corne. Un cornet de plomb, de cuivre, d’argent. Vasculum corneum, æreum, argenteum.

On dit aussi des cornets de papier, lorsqu’on tortille du papier en pointe pour y enfermer quelque chose. Papyraceus, chartaceus cucullus. Un cornet de dragée, un cornet de poivre. Les Canonniers ont aussi des cornets pour tenir le pulverin de l’amorce, fait d’une grande corne de bœuf.

Cornet, terme de Monnoie, cornet d’essais d’or, c’est un bouton d’or tiré des coupelles, que l’on bat sur le tasseau ou enclume, afin de l’étendre & de le rendre mince autant qu’il le peut être, c’est à-dire, environ de la grandeur d’un grand sou, & roulé ensuite en manière de cornet, sans le presser. Auri volumen.

Cornet à ventouser, c’est un instrument dont on se sert pour appliquer des ventouses. Cucurbita Chirurgica.

Cornet de fayance ou de porcelaine. Vasa fictilia faventina ou porcelana quæ fritilli figurant imitantur. C’est un vaisseau de fayance ou de porcelaine, qui est fait en forme de cornet à jouer, & dont on se sert pour parer les coins des cabinets ou de ceux des cheminées. Les cornets de porcelaine sont bien plus chers que les autres.

Cornet d’épice, en termes de Marine, est une espèce de broche de fer dont on se sert pour épicer une corde.

Cornet de mât, terme de Marine, est une espèce d’emboîtement de planches vers l’arrière du mât de divers petits bâtimens, où s’emboîte le pié du mât.

Cornet est aussi une espèce de pâtisserie faite de farine & de sucre, qu’on cuit entre deux fers comme une gauffre, & qu’on tortille en forme de cornet d’épice, de cornet de dez. Libi genus pyrgi in morem conformatum. Les cornets de métier pour le peuple se font seulement avec du miel.

Cornet de pourpre, est une espèce de pourpre ou de poisson servant aux teintures, qu’on appelle autrement porcelaine. En Latin buccina, en Grec, κηρυκινη à cause de sa figure.

Cornet. s. m. terme de Conchyliologie. Voyez Volute.

☞ CORNETER. v. a. Ce mot s’est dit pour ventouser. Cucurbitulam admovere.

CORNETIER. s. m. ou refendeur de cornes. C’est un artisan qui refend les cornes de bœufs, qui les redresse avec des fers chauds & autres instrumens, & les revend aux peigniers, pour en faire des peignes, & aux Patenôtriers pour en faire des chapelets. Sector cornuum.

CORNETTE. s. f. ce mot se disoit autrefois de toute sorte d’habillement de tête ; & on appeloit cornette de Moine, leur capuchon ; cornette d’Avocats, de Docteur, le chaperon qu’ils portoient autrefois sur leur tête. Capitis tegumentum. La partie de devant de ce chaperon, ou bourlet, s’entortilloit sur le haut de la tête, & ce nom lui vient de ce qu’après avoir fait quelques touts, les extrémités formoient sur la tête comme deux petites cornes. C’est encore maintenant une marque de magistrature, & on la porte pendante sur l’épaule, & le chaperon par derrière, comme les Consuls, ou Echevins en quelques endroits. Epomis. Le Doge de Venise porte aussi une cornette, qui est un bonnet fait en pointe. On regardoit comme un grand désordre en 1495, que les Ecclésiastiques commençassent à la manière des Séculiers, de porter des chapeaux sans cornettes. Il fut ordonné qu’ils auroient des chaperons de drap noir, avec des cornettes honnêtes, & que s’ils étoient trop pauvres, ils auroient du moins des cornettes attachées à leurs chapeaux, & cela sous peine de suspension, d’excommunication, & de cent sous d’amende. Lobineau, T. I, p. 845.

Cornette ne se dit plus maintenant, en langage ordinaire, que des coëffes, ou linges, que les femmes mettent la nuit sur leurs têtes, & quand elles sont en déshabillé. Linea mulieris mitella. On l’appelle cornette, des deux bouts de cette coëffure, qui ressemblent à des cornes.

Vous avez de riches manteaux,
Vous avez de belles cornettes,
Vous faites d’affiquets nouveaux
Toujours d’inutiles emplettes :
Mais de jeunesse, Isis, d’embonpoint & d’attraits,
N’en ferez-vous jamais ? Coulange.

CORNETTE, en termes de Guerre, est un étendart de Cavalerie, ou de Dragons. Equestris turmæ vexillum. La cornette est un étendart carré, qui se porte au bout d’une lance par le troisième Officier de la compagnie. Celle de la Mestre de Camp est blanche. C’est pour cela qu’on appelle le premier régiment de Cavalerie légère, le régiment de la cornette blanche. Dans les compagnies de Chevaux-Légers, de Dragons & de Mousquetaires, il y a des cornettes.

Cornette. s. m. Officier de Cavalerie ou de Dragons qui porte l’étendart de la compagnie, & qui la commande en l’absence du Capitaine, & du Lieutenant. Turmæ vexillarius. Ce mot vient à cornu, parce qu’on met les cornettes de Cavalerie sur les aîles, qui forment une espèce de pointe, ou de corne de l’armée. En ce sens il est masculin.

Cornette se prend aussi quelquefois pour la compagnie entière qui marche sous la Cornette. Equitum turma. On a levé trente Cornettes de Cavalerie ; pour dire, trente compagnies. On leva quinze cornettes. P. Daniel.

Cornette, en termes de Marine, est le pavillon du Chef d’escadre, qui est carré & blanc. Vexillum navale. Il le porte au mât d’artimon, quand il est en corps d’armée, & au grand mât, quand il commande en chef. Le battant de la cornette doit avoir quatre fois la hauteur du guindant. Elle doit être fendue par le milieu des deux tiers de sa hauteur.

Cornette, en termes de Fauconnerie, est la houppe ou tiroir de dessus le chaperon de l’oiseau. Apex.

Cornette est aussi le nom qu’on donne à une sorte de fer. Le fer cornette a huit ou neuf piés de long, trois pouces de large, & quatre à cinq lignes d’épaisseur.

Cornette est aussi une sorte de fleur sauvage, qui croît parmi les blés quand ils sont mûrs, & qui ressemble à la violette. Il y a aussi des cornettes cultivées, & ces sortes de cornettes sont simples, doubles, violettes, incarnates, panachées, en un mot, de toutes couleurs. La cornette, comme un arbrisseau, a plusieurs petites branches, qui portent quantité de fleurs faites comme les godets des clochettes doubles. Elle est violette par les bords, & tire au rouge : elle a une bonne odeur ; & comme elle vient de graine, on la resème tous les ans. Morin.

CORNEVILLE. Abbaye de Chanoines Réguliers, située sur la Rile, deux lieues au dessus du Pont-Audemer, & fondée en 1143. Descript. Géogr. & Hist. de la Haute-Norm. t. 2, p. 319.

CORNEUR. s. m. celui qui corne.

La nuit venue, arrive le Corneur.
Il leur cria d’un ton à faire peurLa Font.

Mais quand verrez Chansonniers, faiseurs d’Odes,
Rauques corneurs de leurs vers incommodes,
............
Direz alors en voyant tel gibier,
Ceci paroit citoyen du bourbier. Voltaire.

CORNICHE. s. f. ☞ ornement d’architecture, en saillie, qui est au dessus de la frise, & qui sert de couronnement à toutes sortes d’ouvrages d’architecture. Corona. La corniche se mesure depuis la frise jusqu’à la cymaise inclusivement. Les piédestaux ont aussi leurs corniches en saillie. La corniche est différente selon les cinq ordres d’Architecture. La corniche Toscane, est celle qui a le moins de moulures, & qui est sans ornemens. Tuscana. La corniche Dorique, est celle qui est ornée de mutules, ou de denticules. Dorica. La corniche Ionique, est celle qui a quelquefois ses moulures taillées d’ornemens avec des denticules. Ionica. La corniche Corinthienne, est celle qui a le plus de moulures, de modillons, quelquefois des denticules, Corinthia. La corniche Composite, est celle qui a des moulures taillées, des denticules, & des canaux sous son plafond. Composita.

On appelle Corniche de couronnement, celle qui est la dernière d’une façade, qu’on nomme entablement, & sur laquelle pose l’égoût, ou chêneau d’un comble. Ornamenta. Corniche d’appartement, toute saillie qui dans une pièce d’appartement sert a en soûtenir le plafond ou le cintre, & à couronner le lambris de revêtement. Projectura. Corniche architravée, celle qui est confondue avec l’architrave, la frise en étant supprimée. Junctum coronæ epistylium. Corniche mutilée, celle dont la saillie est retranchée & coupée au droit du larmier, ou réduite en plate bande avec une cymaise. Coronæ mutila projecturâ carens. Corniche en chamfrein, celle qui est la plus simple, & qui n’a point de moulures. Corona pura. Corniche continue, celle qui dans toute son étendue, & ses retours, n’est interrompue par aucun corps, & rentre dans elle-même. Continua. Corniche coupée, celle qui ne régne pas de suite, mais qui est interrompue dans son cours par quelque corps. Secta, interrupta. Corniche circulaire, celle du dehors, ou du dedans de la tour d’un dôme. Circularis. Corniche cintrée, celle qui dans son élévation est tournée en arcades. Arcuata. Corniche rampante, celle d’un fronton pointu. Acclivis. Corniche de placard, celle qui couronne la décoration d’une porte, ou d’une croisée de menuiserie, ou de marbre. Corona plana. Corniche volante, toute corniche de menuiserie chamfreinée par derrière, qui sert à couronner un lambris, ou à soûtenir un plafond.

Corniche se dit aussi de toutes ces petites saillies qui avancent en maçonnerie & en menuiserie, quoiqu’il n’y ait point de colonnes. Ornamenta. La corniche d’une cheminée. La corniche d’un buffet, d’une armoire. Corona.

CORNICHON. s. m. petite corne. Corniculum. Cette vache n’a encore que des cornichons. Il se dit aussi des chevillures du cerf.

On appelle aussi cornichons, de petits concombres que l’on coupe avant qu’ils parviennent à une certaine grosseur, & qu’on fait confire avec du sel & du vinaigre. Abortivus cucumis & cornu in morem incurvus. Liger dit que Pline appelle les cornichons, cornicula.

On appelle encore cornichon, au jeu de boule, une grosse boule que l’on jette la première, pour servir de but. Globulus metæ inserviens. Ce terme est apparemment en usage dans quelques Provinces. On dit ici but, boule servant de but.

CORNICHON va devant, sorte de jeu, à qui ira plus vîte en ramassant quelque chose ; & comme dit Montagne ; parmi tant d’admirables actions de Scipion l’ayeul, il n’est rien qui lui donne plus de grace que de le voir nonchalamment & puérilement baguenaudant, amasser & choisir des coquilles, & jouer à cornichon va devant, le long de la marine avec Lælius son ami intime. Montagne, L. I, C. 13. Mascur. p. 447.

CORNICULAIRE. s. m. Cornicularius. Nom d’un Officier de guerre chez les Romains. C’étoit comme le Lieutenant du Tribun militaire, qu’il soulageoit dans l’exercice de sa charge. Les Corniculaires faisoient les rondes à la place des Tribuns, visitoient les corps-de-garde, & ils étoient à peu-près ce que sont aujourd’hui les Aide-Majors dans nos troupes. Le nom de Corniculaires fut donné à ces Officiers, parce qu’ils avoient un petit cor, corniculum, dont ils se servoient pour donner les ordres aux soldats. Suétone, dans le Livre des Grammairiens illustres, Valere Maxime, L. VI, c. 1, & plusieurs autres Auteurs, parlent des Corniculaires : il en est aussi parlé dans le Droit.

On trouve aussi dans les Notices de l’Empire un Huissier, ou Greffier, nommé Corniculaire. Son office étoit d’accompagner par tout le Juge, & de le servir ; d’écrire les sentences qu’il prononçoit. Exceptor, Commentariensis, Cornicularius. Voyez Godefroy sur la L. 10, Theodos. de Cohort. & Juret sur Symmaque, L. X, Epitre 56.

☞ Les Corniculaires, cornicularii, étoient une sorte d’Huissiers qui se tenoient à l’un des coins du parquet, où le magistrat rendoit la Justice, pour empêcher que personne n’y entrât. Cornicularii, quia cornibus secretarii prætoriani præerant. Ant. Grec. & Rom.

Ce nom, pris au premier sens, vient, selon Saumaise, de corniculum, qui signifie le cimier d’un calque ; & en effet Pline nous apprend qu’on mettoit sur les calques des cornes de fer, ou d’airain, & que cela s’appeloit cornicula. D’autres le tirent du petit cor qu’avoit cet Officier. Cela est plus vraisemblable. Dans le second sens, on prétend qu’il est dérivé de corniculum, un cornet à mettre de l’encre.

CORNIER. adj. m. terme qui se dit des pilastres qui font l’encognure d’un bâtiment, ou qui sont dans un angle. Angulata parastatarum commissura. On le dit aussi des poteaux, ou grandes pièces de bois qui sont dans les angles des panneaux de charpenterie. Angulare lignum, angularis tignorum commissura. Les Selliers appellent aussi corniers, les quatre quenouilles ou pilliers qui soûtiennent l’impériale d’un carrosse.

Cornier, en termes des Eaux & forêts, se dit des chênes & gros arbres qui sont choisis & marqués par autorité de Justice, pour marquer les bornes des ventes & des coupes de bois, tant taillis que de haute futaie. Ils sont d’ordinaire dans les angles des plans & figures que font les arpenteurs de ces coupes, & s’appellent piés corniers. Arborariæ cæsionis terminus, flipes.

On appelle en Charpenterie le canal de tuille, ou de plomb, qui est le long d’un angle de deux toits, ou bâtimens, la jointure cornière. Imbricatæ & angulares compluviorum colliquiæ.

Cornier. Arbre. Voyez Cornouiller.

CORNIÈRE. s. f. terme de Blason, qui signifie un anse de pot qui se trouve dans plusieurs Ecus, & entre autres dans celui de Lîle-Adam, Prévôt de Paris. Ansula.

Cornière, terme de Marine. Les cornières sont ce qu’on appelle aussi alonges de poupes, qui sont les dernières pièces de bois qui sont posées sur l’arrière vaisseau, & qui forment le haut de la poupe. Summa & extrema puppis.

CORNIERES. s. f. pl. terme d’Imprimerie. Ce sont quatre équières de fer attachés aux quatre angles de ce qu’on appelle le coffre dans la presse des Imprimeurs, pour y tenir la forme par le moyen de quelques coins de bois.

Ce mot vient de corne, qui a signifié un angle ; car on dit encore la corne droite de l’autel, à cause qu’autrefois on mettoit des cornes ou des anses à ces angles afin de le transporter ou le faire mouvoir plus facilement : & c’est pour cette raison que Moïse en fit mettre à l’autel des parfums. Dans le Blason ces anses de fer qui étoient aux cornes des autels, ont retenu le nom de cornières.

CORNILLAS. s. m. le petit d’une Corneille. Cornicis pullus.

CORNIOLE. s. f. plante. Voyez Tribule aquatique, c’est la même chose.

☞ CORNIPETE. adj. qui donne des coups de corne. Rabelais. De cornu & petere.

CORNO. s. m. ou CORNE. C’est le nom du bonnet ou roque du Doge de Venise. Le Doge n’ote jamais son corno, qu’au moment de l’élévation de l’Hostie, ou lorsqu’il reçoit visite d’un Prince du sang Royal, ou d’un Cardinal. Misson. En Italie nul ne met la couronne sur ses armes ; le Doge seul y met la Couronne Ducale, qu’on appelle autrement le corne.

CORNOUAILLE. Cornubia. Province d’Angleterre, ainsi appelée, dit-on, parce qu’elle a la figure d’une corne, qui n’est point recourbée. Cette Province est baignée au midi par la mer de Bretagne, & au nord par celle d’Irlande. La Cornouaille est un pays fort fertile. C’est dans la Cornouaille que sont les plus riches mines de l’étain fin. Il n’y a point de villes dans toute la Cornouaille. La Cornouaille est pleine de montagnes. Les anciens Bretons s’y maintinrent contre les Anglo-Saxons. Edouard III l’érigea en Duché ; & depuis ce temps-là, ç’à toujours été un des apanages du fils aîné des Rois d’Angleterre.

Le Cap de Cornouaille, Cornubiæ caput, ou comme on l’appeloit anciennemment, Bolerium, & Antivesteum promontorium. Cap d’Angleterre le plus occidental de la Cornouaille, & même de toute l’Angleterre. C’est pour cela que les Anglois le nomment Land Ends, c’est-à-dire, Bout de la terre.

Cornouaille, en France. C’est l’Evêché de Quimper-Corentin. Curiosolitum ager, Curiosolitæ, dans Pline Curiosulites, ou Curiosuelites ; Cornu Galliæ. Ce pays est sur la côte méridionale de Bretagne du côté de l’occident. Quimper-Corentin est la principale ville du pays de Cornouaille. Baudrand aux mots Cornouaille & Quimper.

Cornouaille se dit figurément & burlesquement du pays habité par les cornards. Il y a des fous qui veulent à toute force que le Parlement leur donne des Lettres-Patentes de Bourgeoisie dans le pays de Cornouaille. Ecole du Monde. Gareau, en parlant de sa femme dans la dernière Scène du Pédant Joué, dit : Par ma fiquette, al me boutit à cornnaille en tout bian & tout honneur. C’est vraisemblablement de-là que M. le Noble a tiré cette expression, ou de l’une des deux Provinces qui portent le nom de Cornouaille, la première en Angleterre, & l’autre en France, dans la basse Bretagne.

CORNOUILLE. s. f. fruit rouge & acide qui croît sur le cornouiller, & qui mûrit en Septembre. Cornum. Les Cornouilles sont raffraîchissantes, dessicatives & astringentes. On s’en sert dans la dyssenterie & dans la diarrhée. On en fait une gelée semblable au cotignac, qu’on confit avec du sucre, & qui est fort bonne pour resserrer. On les confit aussi dans la saumure comme des olives,

CORNOUILLER. s. m. arbre qui porte des cornouilles. Cornus. Il y en a un mâle & un femelle, ☞ suivant le langage ordinaire ; mais il est évident que cette distinction est mal appliquée ici, puisque chaque espèce, comme on va le voir, est mâle & femelle tout ensemble.

Le cornouiller mâle est un arbre assez haut & fort branchu ; son écorce est rougeâtre, cendrée, son bois est blanc, ferme, solide & dur ; ses fleurs viennent par petits bouquets, elles sont petites, toutes jaunes, composées de quatre à cinq pétales pointues ; ses fruits qui viennent ensuite sont ovales, approchant des olives, verts au commencement, & d’un goût acerbe ; mais en mûrissant, ils deviennent rouges comme du sang, & aigre-doux : ils renferment un noyau osseux qui est très-dur, divisé en deux loges, qui renferment chacune une semence ou amande oblongue ; ses feuilles ressemblent à celles du pommier commun, ou du coignier ; elles sont fort dessicatives, & propres à sonder les plaies. On emploie le bois de cornouiller, à cause de sa dureté, à faire des roues de moulin. Il faut prendre garde à ne pas mettre des ruches de mouches à miel auprès de cet arbre ; car si elles goûtent sa fleur, elles prennent un flux de ventre dont elles meurent. Ce mot vient de cornu, corne, à cause que le noyau de cornouiller est très-dur.

Le cornouiller femelle a ses feuilles semblables à celles du mâle : son bois est dur & osseux, ne cédant point à celui du mâle ; ses verges sont plus minces, fortes & nouées ; ses fleurs sont en ombelles odorantes, blanches, composées de quatre pétales ; ses fruits sont des baies grosses comme des pois, vertes d’abord, puis noirâtres. Elles sont de très-mauvais goût. Cornus femina ou virga sanguinea.

☞ On distingue plusieurs autres espèces de cornouillers, qui diffèrent, ou par la culture, ou par leurs fleurs, ou par leurs fruits.

CORNU, UE. adj. qui a des cornes. Cornutus. Le bœuf, le bouc, sont des animaux cornus.

Les forêts en tremblerent ;
Faunes cornus vers leurs trous s’envolèrent. R.

Cornu se dit figurément de plusieurs choses qui ont des ongles ou des pointes. Un pain cornu ; une pièce de terre cornue. Parmi le peuple, on donne quelquefois cette épithète à un cocu.

En Logique, on appelle un dilemme, argument cornu, parce que les deux parties dont il est composé, pressent également l’adversaire. Utroque ferit. Argumentum cornutum. Par exemple, un Général qui a ôté à ses soldats les moyens de s’enfuir, leur dit, pour les engager à se bien battre : il faut vaincre ou mourir.

On dit proverbialement & figurément : à mal enfourner, on fait des pains cornus ; pour dire, qu’il faut bien commencer une affaire, pour en attendre un bon succès. On dit aussi métaphoriquement ; qu’un avis est bien cornu ; pour dire, qu’il n’est guère raisonnable. ☞ Des raisons cornues ; des raisonnemens cornus ; de méchantes raisons ; des raisonnemens qui ne concluent point : des visions cornues, des idées folles & extravagantes. Tout cela est du discours familier, Illepidus, absurdus.

J’aime mieux mettre encor cent arpens au niveau,
Que d’aller follement égaré dans les nues
Me lasser à chercher des visions cornues. Boil.

Cornu. s. m. terme de monnoie. Cornutus. Petit cornu, parvus cornutus. Monnoie de France que l’on battit sous Philippe IV. Il y avoit des cornus parisis. Les premiers pesoient 21 grains, & avoient 3 deniers 18 grains de loi, & valoient 1 denier tournois. Les autres étoient de 20 grains & de 3 den. 12 grains de loi, & valoient un denier parisis. Voyez du Cange, au mot Moneta.

CORNUAU. s. m. poisson de mer qui ressemble beaucoup à l’alose, & qui remonte la Loire avec elle, mais un peu plus court, & qui n’est pas si bon à manger. Les paysans & artisans en mangent pendant toute la saison,

CORNUE, s. f. terme de Chymie est un vaisseau de terre, ou de verre, qui a un cou recourbé auquel on joint un récipient. Ampulla cornuta. Lorsqu’elle est de verre on la lutte, c’est-à-dire, qu’on l’enduit de pâte de l’épaisseur d’un pouce, afin qu’elle puisse résister au feu. La cornue sert à tirer les esprits & les huiles des bois, des gommes, des terres minérales, & des autres choses qui exigent un grand feu. On l’appelle autrement retorte ou matras courbe.

CORNUELLE, s. f. plante. Voyez Tribule aquatique : c’est la même chose.

CORNUET. s. m. sorte de pâtisserie avec un peu de lavande, & qui a été ainsi nommée, parce qu’elle a la figure de deux petites cornes, disposées en compas à demi ouvert. Elle est en usage dans quelques endroits de la Champagne, où l’on en mange, surtout pendant le Carême. Les cornuets sont excellens, dépecés dans la sauce de la carpe à l’étuvée.

CORNUFICIA, nom propre d’une famille Romaine, Cornuficia gens. La famille Cornuficia étoit une famille plébéïenne, parce que l’on trouve Quintus Cornuficius sur les médailles pour Junon Conservatrice, sospita. M. Patin conjecture que cette famille étoit peut-être originaire de Lanuvium, aujourd’hui Civita Livinia, où Junon Conservatrice, Juno Sospita, étoit honorée.

CORO, s. m. droit qui se paie au Roi d’Espagne, pour l’or & l’argent qui se tirent des mines du Chily & du Pérou.

Coro, ville de l’Amérique méridionale, capitale de la province de Venezuela, dont on lui donne quelquefois le nom..

COROGNE, ville d’Espagne, dans le Royaume de Galice. Corunna, Crunna. Le port de la Corogne est fort bon. Quelques Géographes prennent la Corogne pour [’ancien Coronium, appelé aussi Adrobicum ; d’autres pour le Flavium Brigantium des Anciens. Il faut écrire & prononcer en françois Corogne, quoique quelques-uns de nos Auteurs écrivent comme en espagnol, Coruna ou Corunna.

COROLITIQUE. adj. m. & f. En Architecture, on appelle colonne corolitique, celle qui est ornée de feuillages, ou de fleurs tournées en ligne spirale à l’entour de son fût, ou par couronnes ou par festons. Intexta frondibus aut floribus columna.

☞ COROLLAIRE. s. m. Le mot latin corollarium signifie proprement le par-dessus, ce qu’on donne outre le poids & la mesure. Corollaire est un terme didactique, qui signifie ce qu’on ajoûte par surabondance, pour augmenter la force des raisons dont on s’est servi pour prouver une proposition, & qui suffisoient par elles seules. Il sert à renchérir. Ainsi l’on dit à toutes les raisons qu’on vient de détailler. On peut ajouter pour corollaire, &c.

☞ Le mot corollaire a une signification particulière en Mathématique, & signifie proprement une conséquence qu’on tire d’une ou de plusieurs proportions démontrées.

☞ COROLLE. s. f. Corolla. Terme de Botanique, pétale ou nectarium, feuille des fleurs qui envelope immédiatement les organes de la fructification. Voyez Pétale, Nectarium.

Corolla æqualis, lorsque les pétales, qui forment une fleur, sont égaux & qu’ils ont une même figure. Corolla inæqualis, lorsque les pétales sont de même figure, mais de grandeur inégale.

Corolla regularis, lorsque les pétales se ressemblent, & irregularis, lorsque les pétales du lymbe tout différens en grandeur, figure & proportion.

Corollula de Linnæus est la même chose que le fleuron & demi-fleuron de Tournefort.

COROMANDEL. La côte de Coromandel est une partie de la côte orientale de la Peninsule de l’Inde deçà le Gange. Coromandelis, Coromandelis ora, Coromandelis regnum. Quelques-uns disent Coromandel ou Corobander, mais ce dernier mot n’est point en usage, au moins en notre langue.

CORONAIRE. adj. terme d’Anatomie, épithète qu’on donne à deux artères qui prennent leur origine de l’aorte, & qui portent le sang dans la substance du cœur : elles l’environnent par sa base comme une couronne, d’où vient qu’on les a ainsi appelées. Coronarius. Il y a aussi une veine répandue sur la partie extérieure du cœur, qu’on appelle coronaire : elle est faite de plusieurs branches qui viennent de toutes les parties du cœur, & va se rendre à la veine cave, où elle reporte le reste du sang qui a été apporté par les artères coronaires. La coronaire stomachique est une veine qui s’insère au tronc de la veine splénique, qui, en se réunissant au mésentérique, fait la veine porte. On doit à Barthélemi Eustache, natif de San Sévérino en Italie, la découverte de la valvule qui est à l’orifice de la veine coronaire.

Coronaire. s. m. Officier de Justice en Angleterre, dont la fonction est d’examiner avec douze assissans de la part de la Couronne, si un corps que l’on a trouvé mort a été tué & assassiné, ou s’il est mort de sa belle mort. Boyer. C’est-à-dire, de mort naturelle. Spelman l’appelle en latin Coronator ; & la vie de S. Richard, Evêque de Chicester, écrite par Rodulphe Bocking, Dominicain, Confesseur du Saint, Coronarius ; en anglois Coroner.

Ce mot vient de couronne, & s’est donné à cet Officier, parce que c’est un Officier de la Couronne, qui exerce sa charge de la part de la Couronne, c’est-à-dire, de l’Etat, du Public.

CORONAL, ALE. adj. terme d’Anatomie, qui se dit de l’os du front, qu’on appelle l’os coronal ou frontal, ou l’os de la poupe. Coronarius. On appelle aussi suture coronale, la jointure de l’os du front avec les os pariétaux, parce que c’est en cet endroit, qu’on pose les couronnes.

CORONÉ. s. m. terme d’Anatomie, qui signifie une éminence pointue de l’os. Apex. Il y en a de plusieurs sortes auxquelles on a donné des noms différens suivant la différence de leurs figures. Il y en a une à l’os pétreux, appelée styloïde, parce qu’elle est faite comme un stylet ; une autre appelée mastoïde, parce qu’elle ressemble à un mammelon ; une autre qui est à l’omoplate, appelée coracoïde, parce qu’elle ressemble au bec d’un corbeau. Enfin, il y en a à l’os sphénoïde, qu’on appelle ptérigoïdes, parce qu’elles ont la figure des aîles de chauve-souris.

CORONER. s. m. nom d’un Officier de Justice en Angleterre. Voyez Coronaire.

CORONILLE. s. f. arbuste ou petit arbrisseau qui pousse des branches ligneuses & dures. Coronilla. Ses feuilles sont petites, oblongues, charnues, rangées ordinairement cinq ou sept sur une côte. Ses fleurs naissent aux sommités des rameaux, petites, légumineuses & jaunes. Il leur succède des gousses assez déliées, composées de plusieurs pièces presque cylindriques, articulées bout à bout, & renfermant chacune sa semence oblongue, noire, d’un goût désagréable. Elle croît aux lieux sablonneux, & principalement en Espagne, où on l’appelle Coronilla del Rey. Ce nom de coronille lui vient de ce que ses fleurs sont disposées en manière de petite couronne. On se sert de ces fleurs pour amollir, pour résoudre & pour chasser les vents. On en met dans les lavemens, dans les fomentations & dans les cataplasmes. Lémery.

CORONIS. s. f. terme de Mythologie. Pausanias parle d’une Déesse de ce nom honorée à Sicyone. Elle n’avoir point de Temple, mais on lui sacrifioit dans celui de Pallas.

CORONOIDE. adj. m. & f. terme d’Anatomie coronaire, semblable à une couronne. Coronoïdes. L’apophyse coronoïde. La cause de ce que la bouche ne peut se fermer, quand la mâchoire est luxée, est que l’apophyse coronoïde glisse sous la racine antérieure de l’apophyse zygomatique, & qu’elle est pressée contre cet os. Pour réduire cette luxation, il faut presser par quelque moyen, l’apophyse coronoïde contre l’os de la mâchoire supérieure. Dem. Ac. d’Ed. T. I, p. 176, 177.

Ce mot est composé du mot latin corona, couronne, & du mot grec εἶδος, forme, figure coronoïde, qui a la forme, la figure d’une couronne.

COROSOL. s. m. fruit de la grosseur d’un melon, qui se trouve dans les Antilles, & qui est un peu pointu & recourbé par le bout d’enbas. Il a l’écorce verte, lissée & assez épaisse ; & il semble qu’on ait pris plaisir à tracer de petites écailles dessus avec une plume & de l’encre. Au milieu de chacune de ses écailles, il y a une petite pointe de même matière que l’écorce. Ce fruit est attaché au tronc aussi bien qu’aux branches. Toute la chair est d’une blancheur de neige, quoiqu’elle soit un peu filasseuse. Elle se fond dans la bouche, & se résoud en une eau qui a le goût de la pêche. Il est relevé par une petite aigreur fort agréable, & qui rafraîchit extrêmement. C’est un des plus excellens fruits de toutes ces Îles. On y trouve plusieurs graines noires, lissées & marquées de petites veines d’or. L’arbrisseau qui le porte est semblable au laurier, tant pour sa grandeur que pour ses feuilles. Les François l’ont appelé corosol ou corossolier, à cause qu’il a été apporté d’une Île que les Hollandois, par qui elle est habitée, appellent curaçao ou curassaro.

COROT. s. m. vieux mot, courroux.

COROURE. s. m. espèce de monnoie de compte, dont on se sert dans plusieurs endroits de l’Orient, particulièrement dans les Etats du Mogol, pour calculer les grandes sommes, comme on fait en France de millions & de milliars.

COROZA. s. m. poisson furieux qui se trouve dans la mer qui est entre le cap de Comorin, les Basses de Chilao & l’Ile de Zéilan, & que l’on appelle La Pescaria delle Perle, à cause de la pêche des perles qui s’y fait entre les mois de Mars & Avril. Ce poisson a deux rangs de dents affilées & fort longues autour de la langue, avec lesquelles il coupe le bras & la cuisse d’un homme. Les Plongeurs se servent de Magiciens pour se mettre à couvert de ce danger, si l’on s’en rapporte à Vincent le Blanc.

COROZAÏN qu’il faut prononcer en quatre syllabes, ne faisant point un diphtongue de aï. Corozaïn. Ancienne ville de la Galilée, dans la Terre-Sainte. C’étoit une des villes de la Décapole, sur le bord du Jourdain, à l’endroit où il entre dans le lac de Tibériade, vis-à-vis de Capharnaum. Corozaïn étoit de la demi-tribu de Manassé, établi au-delà du Jourdain. J. C. prêcha & fit beaucoup de miracles à Corozaïn. Malheur à toi, Corozaïn, malheur à roi, Betsaïde : car si les miracles qui ont été faits chez vous avoient été faits dans Tyr & dans Sidon, il y a long temps qu’elles auroient fait pénitence avec le sac & la cendre. Bouh. Matth. XI, 21. Le Port-R. écrit aussi Corozaïn, & non pas Corosaïn, comme M. Corneille. Le grec de l’Evangile l’appelle Corazin.

Drusius, sur S. Matth. XI, 21, dit que, selon quelques Auteurs, ce nom signifie hoc mysterium meum, & qu’il est composé de l’adverbe de comparaison כה, Choh, qui signifie sic, & se rend quelquefois par hoc, & de רון, mysterium meum ; mais il n’approuve pas, & avec raison, qu’on néglige le ן, nun, qui est à la fin. Il blâme encore ceux qui, comme Ortelius, mettent une m à la fin, Corozaïm, au lieu d’une n.

CORPORAL. s. m. terme de Liturgie, linge sacré, fin & délié, qu’on étend sous le calice en disant la Messe, pour recevoir les fragmens de l’hostie, s’il en tomboit quelques-uns. Corporale. Le Corporal étoit autrefois une grande nappe qui couvroit tout l’Autel. Le Corporal doit être de toile de lin, ou de chanvre sans aucun ornement, si ce n’est vers les bords. Il y en a qui disent que le Pape Eusèbe a le premier ordonné l’usage du Corporal ; d’autres disent que c’est Saint Silvestre. Voyez Alcuin, Burchard, Gavantus, Polidore Virgile. Philippe de Comines dit que le Pape envoya au Roi Louis XI le Corporal sur lequel chantoit Monseigneur Saint Pierre. C’étoit la coutume de porter un Corporal aux incendies, & de l’élever contre le feu, pour l’éteindre. Voyez D. Mabillon, Acta Sanct. Ben. sæc. VI, p. I, præf. §. V, n. 46, & Aimoin, LI, de Mirac. S. Benedicti, C. 9.

Ce mot vient de corpus, corps, dont on a fait corporale, comme de pectus, pectorale, & humerale de humerus. On a donné ce nom à ce linge, parce que c’est sur ce linge que se met, que repose le Corps de Notre Seigneur pendant le sacrifice de la Messe. Au reste, ce mot est très-ancien. On le trouve dans tous les Ordres Romains, dans le Sacramentaire de S. Grégoire, dans Saint Isidore, Epist. penult. dans les Capitulaires de nos Rois de l’an 810, n. 431 du Livre VIII, dans Amalaris, L. III, C. 19. Dans le Rit Ambrosien on l’appelle le linceul, Syndon, parce qu’on le regarde comme le linceul dans lequel N. S. fut enseveli.

☞ Le peuple appelle Corporal un bas Officier de guerre qu’on appelle plus communément Caporal. Corporal est constamment l’ancien nom qui a été formé de celui de corps de garde, parce que ce bas Officier y commande au défaut d’autres Officiers. Ce mot est tiré du françois, au lieu que celui de Caporal qu’on y a substitué, & qui est seul en usage parmi les honnêtes gens, est pris de la langue italienne. Voyez les Dial. sur le nouveau langage, pag. 271

CORPORALIER. s. m. C’est la boîte où on serre les corporaux qu’on met sous le calice. Corporalium theca.

CORPORATION, s. f. ☞ Corps politique, espèce de communauté dont tous les membres ne forment qu’un corps, qui ont un sceau commun, & qui sont qualifiés pour agir, acquérir, attaquer ou être attaqués en justice au nom de tous. On a levé dans la corporation de Bristol cinq cens guinées pour les frais du repas, & l’on paroît disposé à ne rien épargner pour rendre la fête brillante. C’est un mot anglois qui ne feroit pas mal dans notre langue, ☞ d’autant plus que nous n’en avons point qui y réponde exactement. Le mot de communauté dit moins. M. Skiner harangua le Prince d’Orange à Oxford au nom de la corporation. Le Pour et Contre.

CORPORÉITÉ. s. f. terme Didactique, qualité de ce qui est corporel, qui constitue un Corps. Corporeitas. La corporéité de Dieu étoit l’erreur capitale des Anthropomorphites. Plusieurs Anciens ont cru la corporéité des Anges. Tertullien est fort éloigné de tenir la corporéité de Dieu. Il est manifeste que par corps, il n’entend autre chose que substance. Les Mahométans reprochent aujourd’hui aux Samaritains d’admettre la corporéité en Dieu. D’Herbelot.

CORPOREL, ELLE, qui a un corps. Corporeus, corporatus, corporalis. La substance se divise en corporelle, & spirituelle. Les objets corporels nous occupent malgré nous, parce qu’entrant par les sens, ils font une impression plus réelle. Jaq. La substance qui pense est trop au dessus de la substance corporelle, pour décider qu’il n’y a d’autre différence entr’elles qu’une modification, ou une situation différente des parties. Id.

Corporel se dit aussi de tout ce qui est relatif au corps, considéré sous cette relation. Qualités corporelles ; peine corporelle, &c.

On appelle plaisirs corporels, ceux qui n’affectent que les sens, à la distinction des spirituels, qui se font sentir à l’ame.

CORPORELLEMENT. adv. à la manière du corps, d’une manière corporelle, qui a rapport au corps. Corporum more. Les Jurisconsultes disent corporaliter. Jesus-Christ est réellement & corporellement dans le Sacrement de l’Eucharistie. Dieu s’est abaissé jusqu’à l’homme, il nous a parlé corporellement & sensiblement, lui, qui par sa nature ne parle point, & ne fait que vouloir, & que penser. Peliss. Punir corporellement. On a pris possession de ce bénéfice réellement, corporellement & de fait.

CORPORENCE. s. f. Madame du Noyer a employé ce mot pour CORPULENCE.

CORPORIFICATION. On dit aussi CORPORISATION. s. f. terme de Chimie. C’est une opération qui redonne aux esprits le même corps, ou du moins approchant de celui qu’ils avoient avant leur spiritualisation. Redintegratio corporis.

CORPORIFIER. v. a. On a dit aussi CORPORISER ; fixer & réduire en corps. In corpus cogere. Il est difficile de fixer & de corporifier le mercure. Les sels volatils se peuvent ramasser & corporifier.

Corporifier signifie aussi donner ou supposer un corps à ce qui n’en a point. Il y a eu des hérétiques qui corporifioient les Anges. Angelos corporeos, corporatos esse existimabant.

CORPORU, UE. adj. vieux mot qui signifie une chose qui donne beaucoup de prise, & a beaucoup de corps. Les navires sont plus éminens & plus corporus que les Galères. M. Du Bellay.

☞ CORPS. s. m. substance étendue, purement passive d’elle-même, capable de toute sorte de mouvement, de forme & de figure. Elle est composée, suivant les Péripatéticiens, de matière, de forme & de privation : suivant les Epicuriens & autres Corpusculaires, d’atomes entrelacés, accrochés les uns aux autres : suivant les Cartésiens, d’une certaine portion d’étendue. Corpus. Voyez Élément, Principe, Étendue.

Ce qui constitue le corps physique, ce sont les trois dimensions, longueur, largeur & profondeur. M. de Ville imprima en 1680 à Paris un Traité sur le sentiment de Descartes, touchant l’essence & les propriétés du corps, où il montre qu’il est opposé à la doctrine de l’Eglise ; que ce sont les mêmes principes que ceux de Calvin & des Calvinistes ; que ces hérétiques en concluent qu’il est impossible que le Corps de J. C. soit dans l’Eucharistie de la manière que l’enseigne l’Eglise Romaine ; & que la conclusion de Calvin seroit bonne, si le principe de Descartes étoit vrai. La pénétration des corps est absurde dans l’opinion des Cartésiens. C’est à eux à accorder cette doctrine avec ce que la Foi nous oblige de croire du mystère de l’Eucharistie. Il est aujourd’hui des Philosophes qui se persuadent & qui tâchent de persuader aux autres qu’aucun de nous n’est sûr métaphysiquement qu’il y ait des corps hors de nous, parce que, disent-ils, il se peut faire absolument & au moins par miracle, que les sensations que nous en avons soient dans nous, sans qu’aucun corps les produise, & par l’opération de Dieu, qui excite en nous ces perceptions. Il est clair que ces prétendus Philosophes ne devroient pas s’en tenir aux corps, & que s’ils pensent conséquemment, ils doivent y ajouter les âmes, & généralement tout ce qui existe hors de nous, & notre propre corps ; & toutes les âmes que nous imaginons exister dans ces hommes que nous croyons voir & entendre. Car je ne juge que cet animal que je m’imagine voir & entendre, est un animal raisonnable ou un homme, que par les raisonnemens & les opérations spirituelles, que je m’imagine lui entendre faire ; or Dieu peut aussi bien mettre en moi cette sensation ou cette perception, qu’il y peut mettre celle du corps dans lequel je suppose qu’est cette ame. Ainsi ces savans Philosophes prétendent que je ne suis sûr métaphysiquement que de l’existence de mon ame, & qu’à l’égard de tout le reste, tout ce que je crois être dans l’Univers corps & ames, n’existe & n’existera peut-être jamais, & que ce n’est qu’une illusion. En convenant avec eux que dans le cas particulier où je puis ne pas être sûr métaphysiquement qu’un autre être existe hors de moi, on ne peut s’empêcher de leur montrer, que s’ils reconnoissent un Dieu, leur proposition générale, comme ils l’avancent, est fausse, absurde, téméraire, & qu’elle détruit ce Dieu qu’ils prétendent reconnoitre. Car s’ils avouent qu’il y ait un Dieu, ils reconnoissent un être infiniment parfait, infiniment bon, infiniment vrai, qui n’est point un fourbe, & qui, comme il ne peut se tromper lui-même, ne peut aussi tromper personne. Cependant si de tout ce que je crois voir au monde, entendre, sentir, il n’en est tien, si rien de tout cela n’existe, si depuis 20, 50, 40, 50, 60, 80 ans, & plus que je crois voir ces choses, les sentir, les entendre, je ne les vois, ne les entens, ne les sens point, celui qui me les fait voir, sentir, entendre, qui excite en moi ces perceptions, qui à chaque moment de ma vie m’abusent, me trompent, me font illusion, n’est point un Dieu, & il faut ou renoncer à Dieu, ou renoncer à la proposition générale.

Et en effet, quoique dans un cas particulier il puisse se faire que l’être que je crois exister hors de moi, n’existe point ; il ne peut se faire néanmoins que l’état dans lequel le Créateur m’a mis, soit un état perpétuel d’illusion, & que généralement ou presque généralement ce que je crois voir, entendre, sentir hors de moi, n’existe nullement, que dans tous les momens depuis le commencement de ma vie jusqu’à la fin, ou du moins presque toujours, & pour ainsi dire habituellement & par état, toutes ou même presque toutes mes perceptions ne soient que des illusions, des tromperies. Cela, dis-je, ne peut se faire, & j’en fuis aussi sûr que je suis sûr que Dieu est infiniment bon, vrai, sage, qu’il n’est point un fourbe ni un trompeur ; j’en suis donc métaphysiquement sûr. Et à quelle fin raisonnable & sage Dieu pourroit-il en user ainsi ? Et si cette doctrine perverse alloit s’introduire, où en seroit la religion, & que deviendroient ses preuves ?

☞ Le corps naturel & sensible, c’est-à-dire, en tant qu’il est formé par les causes naturelles, & revêtu des qualités sensibles, est l’objet de la Physique. Le corps considéré par rapport aux trois dimensions est l’objet de la Géométrie.

Les corps naturels sont animés ou inanimés. Voyez Ame.

Corps, à l’égard des animaux, se dit de ce qui est opposé au principe de la pensée, à l’ame. C’est cette partie de l’homme & des bêtes qui est composée de chair, d’os, de nerfs, &c. qui est matérielle. On ne peut assez admirer la Providence dans l’arrangement des corps, & dans les différens organes qui composent la machine des animaux. Que d’ordre, que de ressorts, que de liaisons ! Maleb. L’ame n’est point la forme du corps humain ; bien loin que la vie animale soit dépendante de l’ame, parce qu’elle cesse dès que l’ame en est séparée, il arrive au contraire que la demeure de l’ame dans le corps est dépendante de la disposition du corps, & qu’elle ne s’en sépare qu’après que l’ordre du corps est interrompu. Roh. L’ame & le corps sont trop disproportionnés, pour que les pensées de l’ame causent des mouvemens dans le corps : ainsi ces mouvemens réciproques ne pouvant être la cause directe l’un de l’autre, ils en sont l’occasion, ou la cause occasionnelle. Dieu, à l’occasion d’un mouvement du corps, imprime une pensée à l’ame ; & de même à l’occasion d’une pensée de l’ame, il imprime un mouvement au corps. Par conséquent Dieu est comme le médiateur de tout le commerce entre l’ame & le corps. C’est toujours Descartes qui parle selon ses principes, & dont les conséquences sont terribles. L’union entre l’ame & le corps est si étroite, qu’il ne se passe rien dans le corps dont l’ame ne soit aussi-tôt avertie. Val. Les Stoïciens entreprirent de persuader que les intérêts de leur propre corps leur étoient indifférens, & ils se retranchoient dans la partie spirituelle d’eux-mêmes. Son esprit, malgré le poids des années & des affaires, a conservé sa force & sa vigueur dans les ruines mêmes de son corps. Fléch. Dans la machine du corps de l’animal les Auteurs de la trituration comparent le cerveau à l’arbre du pressoir, le cœur au piston, les poumons aux soufflets, la bouche à la meule & aux pilons, l’estomac au pressoir, les boyaux au réservoir, ou à la meule. Nigrisoli, dans ses considerations sur la generation des corps vivans, traite au long des causes de la formation de nos corps, & de leur organisation.

☞ Le mot de corps, dans cette acception, peut être considéré sous différens points de vue, & devient susceptible de différentes épithètes.

☞ L’homme est composé de corps & d’ame, du corps & de l’ame. Constat ex mente & corpore simul unitis. Quand l’ame est séparée du corps, le corps s’appelle cadavre.

☞ Le corps considéré par rapport à la taille, à la conformation ou à la figure, est d’une taille petite, moyenne ou grande, d’une conformation bonne ou mauvaise, d’une figure gracieuse ou désagréable.

☞ Le corps considéré par rapport aux exercices dont il est capable, a plus ou moins de facilité à s’acquitter de certaines fonctions ; facilité qui dépend de la disposition des parties organiques, & résulte de la concurrence accidentelle des causes physiques. Le corps est souple, dénoué, agile, &c. ou il a les qualités contraires.

☞ Considéré par rapport à la santé, il est bien ou mal constitué, fort, robuste, rigoureux, foible, fluet, délicat. Corps exténué, cacochime, d’une mauvaise pâte.

☞ Dans la lutte, dans les combats, on se prend, on se saisit corps à corps, on se bat, on lutte corps à corps.

☞ On dit encore gagner quelque chose à la sueur de son corps, c’est-à-dire, en travaillant beaucoup. Traiter durement, délicatement son corps. Faire des folies de son corps, en parlant des personnes du sexe, la même chose que s’abandonner ; style familier. A corps perdu, façon de parler adverbiale, qui signifie sans crainte du danger. Il se jeta à corps perdu dans la mêlée ; à son corps défendant, mieux qu’en son corps défendant. Faire une chose à son corps défendant, contre son gré, pour éviter un plus grand mal.

Mais l’âge dans son ame a mis ce zèle ardent,
Et l’on sait qu’elle est sage à son corps défendant. Mol.

Corps se prend aussi par opposition à l’esprit. On dit, en ce sens, les plaisirs du corps ; pour dire, les plaisirs qui n’affectent que le sens. Si l’homme n’avoit point péché, l’ame & les corps ne seroient point importunés par des désirs déraisonnables. Port-R. Il est beau qu’il se trouve dans le Christianisme des âmes si détachées de la terre & d’elles-mêmes, qu’elles semblent indépendantes du corps auquel elles sont attachées, & qu’elles traitent comme leur esclave. Abad. Le corps tyrannise l’ame. Maleb. La rébellion du corps dont nous sommes les esclaves, vient du péché.

Quoi ! vous ne goûtez pas
Cette union des cœurs où le corps n’entre pas ? Mol.

Ce n’est qu’à l’esprit seul que vont tous les transports ;
Et l’on ne s’apperçoit jamais qu’on ait un corps. Id.

Corps, en termes d’Anatomie, se dit de plusieurs parties du corps de l’animal, que l’on désigne alors par des épithètes particulières. C’est ainsi qu’on dit, le corps calleux, les corps cannelés du cerveau, les corps caverneux de la verge, le corps glanduleux du foie, les corps mamillaires des reins, les corps papillaires de la langue, & ; pour dire, une matière, une substance calleuse, les substances cannelées du cerveau, &c.

Corps se dit aussi de la partie du corps humain qui est entre le cou & les hanches. On dit, en ce sens, un corps bien fait. Avoir le corps de travers. Il a le corps bien fait, mais les jambes trop courtes.

☞ On le dit plus particulièrement du tronc, de la capacité du corps. Pectus, stomachus, thorax, venter. Il a eu le corps percé de trois balles. Cet homme est fort gai quand il a une bouteille de vin dans le corps. Il fut tué d’un coup d’épée au travers du corps : il fut ouvert, on lui trouva un abcès dans le corps. Les Médecins divisent le corps en trois ventres, ou capacités, qui sont la tête, le thorax, & le bas-ventre. Ils appellent le reste les membres, ou les extrémités. Les Maîtres en fait d’Armes divisent le corps en trois parties, la haute comprend la tête, la gorge & les épaules ; la moyenne, la poitrine, l’estomac & le ventre supérieur ; & la basse est le ventre inférieur, & au dessous jusques vers les cuisses.

On dit figurément en ce sens, il faut voir ce que cet homme a dans le corps ; pour dire, tâcher à découvrir ses sentimens, ses opinions, ou lui tâter le pouls sur sa bravoure. Affectus animi, penitiores animi recessus.

Corps glorieux se dit de l’état d’un corps qui est dans la gloire céleste. Le corps glorieux est impassible.

On dit abusivement & familièrement en parlant d’une personne qui est long-temps sans éprouver les besoins corporels, que c’est un corps glorieux.

Corps se dit pour homme, personne, comme en latin caput ; mais il ne se dit que dans le style ou populaire ou familier, voilà un plaisant corps. O le plaisant corps ! Lepidum caput ! Il ne se dit guère qu’avec plaisant, & le Traducteur François du Spectateur Anglois n’a pas bien sû l’usage, quand il a dit, qu’il avoit entendu qu’on disoit de lui, voilà un bizarre corps ; il falloit dire un bizarre personnage.

☞ On dit aussi d’un homme qui n’a ni esprit ni vigueur, que c’est un pauvre corps.

Corps se dit aussi des habits, des armes qui servent à couvrir cette partie du corps qui va du cou jus qu’à la ceinture. Il faut essayer ce corps de pourpoint, ce corps de jupe. Thorax, tunicæ thorax. On dit un corps de cuirasse, en parlant de la cuirasse même sans les armures des bras & des cuisses. Lorica.

On dit, en termes de Palais, qu’un homme s’est obligé corps & biens ; pour dire, qu’il s’est soumis à tenir prison faute de payement. L’Ordonnance de 1567, a abrogé les contraintes par corps après les quatre mois, pour les dettes civiles. On peut seulement contraindre par corps pour dépens civils, lorsqu’ils excèdent 200 livres. Une femme, bien qu’il semble qu’elle ne puisse engager sa personne qu’à son mari, est prenable par corps, lorsqu’elle fait un commerce distinct & séparé de celui de son mari. On a jugé la contrainte par corps pour intérêts résultans d’un procès criminel contre une femme. C. B.

Un décret de prise de corps est une Ordonnance d’un Juge pour prendre prisonnier un criminel. Decreta rei comprehensio. On dit aussi une confiscation de corps & de biens : c’est une suite d’une peine capitale. Une séparation de corps & de biens, c’est la séparation d’habitation qu’on accorde à une femme contre son mari à cause de ses sevices. Un Geôlier répond d’un prisonnier qui est à sa garde corps pour corps.

Corps signifie quelquefois corps privé de la vie, cadavre. Ouvrir, embaumer, enterrer un corps, jetter de l’eau bénite sur un corps. Disséquer un corps, faire l’anatomie d’un corps.

On dit dans la même signification corps mort. Cadaver. Les Juges font des procès-verbaux de l’état des corps morts qu’ils enlèvent. Tertullien a écrit un beau Traité de la resurection des corps. Quand les corps ne pourissent point, on tient en Occident cela pour marque que ce sont des corps glorieux ; en Orient pour une marque qu’ils sont réprouvés, comme il paroît dans le Rituel des Arméniens.

Que de corps entassés ! que de membres épars,
Privés de sépulture !
Grand Dieu ! tes Saints sont la pâture
Des tigres & des léopards. Racine.

Corps se dit aussi des choses qui ont plus de force, de consistance, de solidité que d’autres. Les étoffes qui ont bien du corps durent plus que les autres. Pannus crassior. Un papier qui n’a guère de corps est sujet à boire. Papyrus tenuis. Les vins qui ont bien du corps se gardent plus long-temps.

Corps se dit aussi, dans un sens figuré, de ce qu’il y a de principal dans les ouvrages de l’art, de ce qui est comme la base, le fondement ; la principale partie sur laquelle posent les autres, & qui sont à son égard ce que les membres sont à l’égard du corps. Le corps d’un navire est le bâtiment considéré sans les ponts, les mâts, les voiles, les cordages, les agrès. Un corps de carrosse est la partie qui est suspendue. Un corps de luth, est la partie creuse, considérée sans manche. Le corps d’un édifice est la grosse maçonnerie prise sans la charpenterie, la menuiserie.

☞ On dit le corps du soleil, d’une planète, &c ; pour dire, son globe ou son disque. On a découvert des taches dans le corps du soleil. On voit des éminences & des creux dans le corps de la lune.

Corps se dit aussi d’un bâtiment de fond en comble, soit qu’il soit séparé ou joint avec un autre. Ædium regio, membrum. Il y a deux corps de logis dans cette maison qui sont joints par une galerie. Il a loué un corps d’Hôtel séparé. En Italie on fait les corps de logis doublés, à cause de la chaleur ; & en France, à cause de la commodité. Il a fait bâtir un avant-corps en sa maison, qui en fait un grand ornement.

En Architecture, corps, signifie encore toute partie qui avance, & qui excède le nud du mur, & qui sert de champ & de fond à une décoration. On appelle corps de fonds celui qui porte dès le bas d’un bâtiment avec empatemens & retraite.

Corps se dit aussi figurément de plusieurs choses ramassés ensemble : premièrement de ce qui est enfermé en quelque enceinte. Le corps d’une ville, d’une forteresse, c’est-à-dire, la place elle-même considérée sans les dehors, sans les ouvrages qui l’accompagnent. Pars urbis, arcis intima, urbs ipsa. On n’avoit attaqué jusqu’ici que les dehors, maintenant on est attaché au corps de la place. Arx ipsa. Ce petit fort est hors de l’enceinte des murs, & détaché du corps de la place.

Corps se dit aussi de plusieurs Ouvrages de même nature, qui ont été recueillis, joints & reliés ensemble. Corpus. Gratien a recueilli les Canons de l’Eglise, & en a fait un corps, qu’on appelle le Corps Canonique. Le Corps du Digeste, du Code, & des Institutes. On a fait un corps des Poëtes Grecs, un de quelques Historiens Romains. Du Chêne a recueilli en un corps quantité de vieux Historiens François.

Corps de Doctrine, est la même chose que Systême. C’est un amas de principes & de conclusions qui renferme ce qui se peut dire, & ce qu’on doit savoir sur un sujet, sur une question.

On appelle le corps du livre, ce qui est en effet le principal & la substance du livre, à la distinction des Préfaces, Exordes, Epilogues, Gloses, Commentaires & Annotations qu’on y insère, & qu’on y mêle quelquefois. On dit aussi d’une pièce de théâtre que le corps en est fait, quand on en a fait le dessein, la distribution, & qu’il n’y a plus que les vers à faire.

En matière de devises, on appelle le corps, les figures qui en font le sujet : ce qu’on a peint pour marquer la pensée ; & l’ame est le mot qui donne l’explication.

Corps de délit, est l’existence d’un délit qui se manifeste évidemment, de manière qu’on ne peut douter qu’il n’ait été commis.

Il faut qu’il y ait un corps de délit qui soit constaté, avant qu’on puisse condamner un homme, qui sur de simples présomptions, quoique très-fortes, seroit accusé d’avoir commis un crime.

En termes de Chirurgie, on appelle corps étranger ou corps étrange tout ce qui survient au corps de l’animal contre sa nature, soit qu’il vienne de dehors, comme le plomb, la bourre, une écharde, &c. Les corps étranges empêchent la consolidation des plaies.

En termes de Manège, on dit qu’un cheval a du corps, quand il a beaucoup de boyau, beaucoup de flanc, quand il a les côtes amples & longues : & on dit qu’une telle nourriture fait bon corps ; pour dire, le rend sain & vigoureux ; qu’il a fait corps neuf, lorsqu’il a été bien purgé, qu’on l’a mis à l’herbe. Cette dernière expression se dit aussi d’un homme qui a eu une maladie qui a consumé toutes ses mauvaises humeurs, ou qui a été bien purgé.

Corps de Pompe, terme de Méchanique. C’est la partie la plus grosse du tuyau de la pompe, où le piston agit.

Corps se dit encore, en un sens figuré, de l’union de plusieurs personnes qui vivent sous le même gouvernement & suivent les mêmes loix, les mêmes coutumes. Un Royaume, un État est un corps politique. L’Eglise est un corps dont Jesus-Christ est le Chef invisible, & dont nous sommes les membres.

☞ Dans cette acception, le mot de corps se dit plus particulièrement de certaines compagnies qui existent dans l’État sous l’autorité publique. Ordo, corpus, cœtus. Cette sage compagnie ne crut pas qu’il fût de la dignité de son corps de se laisser émouvoir par les railleries. S. Evr. Dieu a établi un corps visible, qu’il anime de son esprit, & dans lequel il conservera toujours la vérité. Port-R. Les États sont composés du corps du Clergé, du corps de la Noblesse, du corps du Tiers-Etat. Le Parlement, les Cours Souveraines marchent en corps de Cour. On dit généralement des compagnies assemblées, que ce sont des corps politiques.

On dit aussi le corps de ville ; pour dire, les Officiers de la ville, qui sont le Prévôt des Marchands, les Echevins & les Conseillers de ville, & le Procureur du Roi. Civilis Magistratus.

Les six corps des Marchands à Paris, ce sont les Merciers, les Foureurs, les Epiciers, les Drapiers, les Bonnetiers & les Orfèvres. Les Marchands de vin prétendoient faire le septième corps.

Corps se dit aussi de toutes les autres Communautés. Le corps de l’Université. Academia universa. Le corps de Sorbonne, du Chapitre de Paris. Ils sont assemblés en corps de Chapitre. Ce Docteur est un des premiers hommes de son corps. Les Curés de Paris ne font point corps. Societas, corpus.

En termes de Géométrie, on appelle les corps réguliers, ceux dont toutes les faces & les angles sont égaux. Ils ne sont qu’au nombre de cinq : le Tétraëdre composé de 4 triangles, l’Octaëdre de 8, l’Isocaëdre de 10 triangles, le Dodécaèdre de 12 pentagones, & le cube de 6 quarrés.

Corps de Christ, nom d’un Ordre ou Congrégation Religieuse, Voyez Christ. Grégoire XIII, sur les instances qui lui furent faites par D. Jean Baptiste Vallati de Foligni, pour lors Général, réunit cet Ordre à celui du Mont Olivet. P. Hélyot, T. VI, C. 25

Corps, en termes de Guerre, signifie un certain nombre de Soldats, tant de pié que de cheval, unis & marchans ensemble sous un Chef ; on a fait sortir les garnisons pour en faire un corps d’armée. Exercitus, agmen. Des troupes rangées en bataille sont divisées en trois corps. Tripartitio. L’avant-garde, l’arrière-garde, & le corps de bataille. Prima acies, postrema, novissima acies, media acies. Le corps de bataille, tant sur mer que sur terre, est d’ordinaire la division du Commandant, laquelle fait le milieu de la ligne. Il y a aussi le corps de réserve, & des corps détachés. Subsidium, subsidiariæ cohortes, subsidiarii.

Corps se dit aussi des Régimens. Toute la Cavalerie se divise en Compagnies franches, & en corps de Régimens, qui sont plusieurs Compagnies, sous un même Chef. Equitatus. Les premiers corps d’Infanterie sont les Régimens des Gardes-Françoises & Suisses. Après marchent les six vieux corps, qui sont les Régimens de la plus ancienne création ; savoir, Picardie, Piedmont, Champagne, Navarre, Normandie & la Marine. Ensuite tout les six petits vieux corps, qui ont été établis peu de temps après. Pedestris exercitus, acies, peditatus.

Corps de garde, est un poste où on met des Soldats qui veillent à garder une porte, un passage, un travail, & à tenir en sûreté un quartier, un camp, une place, statio ; & on le dit tant des Soldats qui y sont postés, & qu’on relève de temps en temps, que du poste même, soit qu’il soit à l’air, soit qu’il soit à couvert. Excubiæ, excubitores. On avance un grand & petit corps de garde bien loin devant les lignes, afin d’être plutôt averti de l’approche des ennemis. Le corps de garde d’un vaisseau, est la partie qui se trouve sous le gaillart de l’arrière.

On appelle mots de corps de garde, railleries de corps de garde, plaisanteries de corps de garde ; des mots, des railleries, des plaisanteries grossières, basses, impudentes.

Corps de garde retranché, petit corps de garde retranché. C’est un réduit pratiqué dans la gorge d’un bastion, d’une demi-lune, d’un ravelin, &c. couvert d’un parapet, & environné d’un fossé, où les Soldats se retirent lorsqu’ils ne peuvent soûtenir l’assaut de la demi-lune. On pratique quelquefois de ces corps de garde dans le fossé. Alors on creuse en terre un espace à contenir un certain nombre de Soldats, qu’on relève d’un parapet où il y a de petits créneaux ou embrâsures pour tirer.

Corps. (Gardes du) sont les quatre Compagnies de Cavalerie qui servent à garder le Roi. Regis stipatores, corporis custodes. Et en général, Officiers du Corps, sont ceux qui servent auprès de sa personne sacrée. Le carrosse du Corps, le Cocher du Corps.

Corps, en termes de Fondeurs de caractère d’Imprimerie, se dit tantôt d’un corps entier de caractères, tantôt du corps d’une seule lettre.

Corps-mort, nom que les Matelots donnent à une pièce de bois mise de travers dans la terre, & où tient une chaîne pour amarrer les vaisseaux.

Corps se dit proverbialement en cette phrase, on l’a enlevé comme un corps saint. Voyez l’origine de ce proverbe aux mots Banquier, & Caorsin. Il y a plusieurs autres façons de parler où le mot de corps entre, tant au propre qu’au figuré, & qui sont en quelque sorte proverbiales. Par exemple, on dit d’un homme qui travaille beaucoup, mais dont le travail est ingrat, qu’il se tue le cœur & le corps. On dit qu’il fait litière de son corps ; pour dire, qu’il ne s’épargne point : & qu’il fait bon marché de son corps ; pour dire, qu’il s’expose facilement à toutes sortes de dangers. On dit qu’un homme a le diable au corps ; pour dire, qu’il est méchant & furieux. On le dit aussi pour signifier qu’il a beaucoup d’esprit & d’invention. Je ne sai où il prend tout ce qu’il dit & tout ce qu’il fait, je crois qu’il a le diable au corps. On dit d’un homme qui n’a ni esprit ni vigueur, que c’est un pauvre corps. Le pauvre corps ! On dit aussi d’un homme malicieux, que c’est un malin