L’Encyclopédie/1re édition/BALANCE

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BALANCE, s. f. est l’une des six puissances simples En Méchanique, servant principalement à faire connoître l’égalité ou la différence de poids dans les corps pesans, & par conséquent leur masse ou leur quantité de matiere.

Il y a deux sortes de balance, l’ancienne & la moderne.

L’ancienne ou la romaine, appellée aussi peson, consiste en un levier qui se meut sur un centre, & qui est suspendu près d’un des bouts. D’un côté du centre on applique le corps qu’on veut peser ; de l’autre côte l’on suspend un poids qui peut glisser le long du levier, & qui tient la balance en équilibre ; & la valeur du poids à peser s’estime par les divisions qui sont marquées aux différens endroits où le poids glissant est arrêté.

La balance moderne, qui est celle dont on se sert communément aujourd’hui, consiste en un levier suspendu précisément par le milieu : il y a un plat ou bassin suspendu par une corde à chacun des deux bouts du levier : dans l’un & l’autre cas le levier est appellé jugum, traversant ou fléau, dont les deux moitiés qui sont de l’un & de l’autre côté de l’axe se nomment brachia, ou les bras ; la partie par où on le tient trutina, anse ou chasse ; la ligne sur laquelle le levier tourne, ou qui en divise les bras, s’appelle l’axe, ou essieu ; & quand on la considere relativement à la longueur des bras, on ne la regarde que comme un point, & on l’appelle le centre de la balance ; les endroits où se placent les poids se nomment points de suspension, ou d’application.

Le petit style perpendiculaire au fléau, & qui fait connoître, ou que les corps sont en équilibre, ou qu’ils pesent plus l’un que l’autre, s’appelle l’aiguille, en Latin examen.

Ainsi dans la balance romaine le poids qui sert à contrebalancer ceux qu’on veut connoître, est le même, mais s’applique à différens points ; au lieu que dans la balance ordinaire le contrepoids varie, & le point d’application est toûjours le même.

Le principe sur lequel la construction de l’une & l’autre balance est fondée est le même, & se peut comprendre par ce qui suit.

Théorie de la balance. Le levier AB (Voy. Plan. de Méchan. fig. 9.) est la principale partie de la balance : c’est un levier du premier genre, & qui au lieu d’être posé sur un appui en C, centre de son mouvement, est suspendu par une verge, qui est attachée au point C ; de sorte que le méchanisme de la balance dépend du même théorème que celui du levier. Voy. Levier.

Donc comme le poids connu est à l’inconnu, ainsi la distance depuis le poids inconnu jusqu’au centre du mouvement est à la distance où doit être le poids connu, pour que les deux poids se tiennent l’un l’autre en équilibre ; & par conséquent le poids connu fait connoître la valeur du poids inconnu.

Car comme la balance est un vrai levier, sa propriété est la même que celle du levier ; savoir, que les poids qui y sont suspendus, doivent être en raison inverse de leurs distances à l’appui, pour être en équilibre. Mais cette propriété du levier que l’expérience nous manifeste, n’est peut-être pas une chose facile à démontrer en toute rigueur. Il en est à peu-près de ce principe comme de celui de l’équilibre ; on ne voit l’équilibre de deux corps avec toute la clarté possible que lorsque les deux corps sont égaux, & qu’ils tendent à se mouvoir en sens contraire avec des vîtesses égales. Car alors il n’y a point de raison pour que l’un se meuve plûtôt que l’autre ; & si l’on veut démontrer rigoureusement l’équilibre lorsque les deux corps sont inégaux, & tendent à se mouvoir en sens contraire avec des vîtesses qui soient en raison inverse de leurs masses, on est obligé de rappeller ce cas au premier, où les masses & les vîtesses sont égales. De même on ne voit bien clairement l’équilibre dans la balance que quand les bras en sont égaux & chargés de poids égaux. La meilleure maniere de démontrer l’équilibre dans les autres cas, est peut-être de les ramener à ce premier, simple & évident par lui-même. C’est ce qu’a fait M. Newton dans le premier livre de ses Principes, section premiere.

Soient, dit-il, (fig. 3. n°. 4. Méch.) OK, OL, des bras de levier inégaux, auxquels soient suspendus les poids A, P ; soit fait OD= à OL, le plus grand des bras, la difficulté se réduit à démontrer que les poids A, P, attachés au levier LOD, sont en équilibre. Il faut pour cela que le poids P soit égal à la partie du poids A qui agit suivant la ligne DC perpendiculaire à OD ; car les bras OL, OD, étant égaux, il faut que les forces qui tendent à les mouvoir, soient égales, pour qu’il y ait équilibre. Or l’action du poids A, suivant DC, est au poids A, comme DC à DA, c’est-à-dire, comme OK à OD. Donc la force du poids A suivant . Et comme cette force est égale au poids P, & que OL =OD, on aura , c’est-à-dire, que les poids A, P, doivent être en raison des bras de levier OL, OK, pour être en équilibre.

Mais en démontrant ainsi les propriétés du levier, on tombe dans un inconvénient : c’est qu’on est obligé alors de changer le levier droit en un levier recourbé & brisé en son point d’appui, comme on le peut voir dans la démonstration précédente ; de sorte qu’on ne démontre les propriétés du levier droit à bras inégaux que par celles du levier courbe, ce qui ne paroît pas être dans l’analogie naturelle. Cependant il faut avoüer que cette maniere de démontrer les propriétés du levier est peut-être la plus exacte & la plus rigoureuse de toutes celles qu’on a jamais données.

Quoi qu’il en soit, c’est une chose assez singuliere que les propriétés du levier courbe, c’est-à-dire dont les bras ne sont pas en ligne droite, soient plus faciles à démontrer rigoureusement que celles du levier droit. L’auteur du traité de Dynamique, imprimé à Paris en 1743, a réduit l’équilibre dans le levier courbe à l’équilibre de deux puissances égales & directement opposées : mais comme ces puissances égales & opposées s’évanoüissent dans le cas du levier droit, la démonstration pour ce dernier cas ne peut être tirée qu’indirectement du cas général.

On pourroit démontrer les propriétés du levier droit dont les puissances sont paralleles, en imaginant toutes ces puissances réduites à une seule, dont la direction passe par le point d’appui. C’est ainsi que M. Varignon en a usé dans sa Méchanique. Cette méthode entre plusieurs avantages, a celui de l’élégance & de l’uniformité : mais n’a-t-elle pas aussi, comme les autres, le défaut d’être indirecte, & de n’être pas tirée des vrais principes de l’équilibre ? Il faut imaginer que les directions des puissances prolongées concourent à l’infini ; les réduire ensuite à une seule par la décomposition, & démontrer que la direction de cette derniere passe par le point d’appui. Doit-on s’y prendre de cette maniere pour prouver l’équilibre de deux puissances égales appliquées suivant des directions paralleles à des bras égaux de levier ? Il semble que cet équilibre est aussi simple & aussi facile à concevoir, que celui de deux puissances opposées en ligne droite, & que nous n’avons aucun moyen direct de réduire l’un à l’autre. Or, si la méthode de M. Varignon pour démontrer l’équilibre du levier est indirecte dans un cas, elle doit aussi l’être nécessairement dans l’application au cas général.

Si l’on divise les bras d’une balance en parties égales, une once appliquée à la neuvieme division depuis le centre, tiendra en équilibre trois onces qui seront à la troisieme de l’autre côté du centre ; & deux onces à la sixieme division agissent aussi fortement que trois à la quatrieme, &c. L’action d’une puissance qui fait mouvoir une balance, est donc en raison composée de cette même puissance, & de sa distance du centre.

Il est bon de remarquer ici que le poids presse également le point de suspension, à quelque distance qu’il en soit suspendu, & tout comme s’il étoit attaché immédiatement à ce point ; car la corde qui suspend ce poids en est également tendue à quelque endroit que le poids y soit placé.

On sent bien au reste que nous faisons ici abstraction du poids de la corde, & que nous ne la regardons que comme une ligne sans épaisseur ; car le poids de la corde s’ajoûte à celui du corps qui y est attaché, & peut faire un effet très-sensible, si la corde est d’une longueur considérable.

Une balance est dite être en équilibre, quand les actions des poids sur les bras de la balance pour la mouvoir, sont égales, de maniere qu’elles se détruisent l’une l’autre. Quand une balance est en équilibre, les poids qui sont de part & d’autre sont dits équipondérans, c’est-à-dire, qui se contrebalancent. Des poids inégaux peuvent se contrebalancer aussi : mais il faut pour cela que leurs distances du centre soient en raison réciproque de ces poids ; ensorte que si l’on multiplie chaque poids par sa distance, les produits soient égaux : c’est sur quoi est fondée la construction de la balance romaine, ou peson. Voyez Romaine, ou Peson.

Par exemple, dans une balance dont les bras sont fort inégaux, un bassin étant suspendu au bras le plus court, & un autre au plus long bras divisé en parties égales : si l’on met un poids dans le bassin attaché au plus petit bras, & qu’en même tems on place un poids connu, par exemple une once, dans le bassin attaché au plus long bras, & qu’on fasse glisser ce bassin sur le plus long bras jusqu’à ce que les deux poids soient en équilibre ; le nombre des divisions entre le point d’appui & le poids d’une once, indiquera le nombre d’onces que pese le corps, & les sous-divisions marqueront le nombre de parties de l’once. C’est encore sur le même principe qu’est fondée la balance trompeuse, laquelle trompe par l’inégalité des bras ou des bassins : par exemple, prenez deux bassins de balance dont les poids soient inégaux dans la proportion de 10 à 9, & suspendez l’un & l’autre à des distances égales, alors si vous prenez des poids qui soient l’un à l’autre comme 9 à 10, & que vous mettiez le premier dans le premier bassin, & l’autre dans le second, ils pourront être en équilibre.

Plusieurs poids suspendus à différentes distances d’un côté, peuvent se tenir en équilibre avec un poids seul qui sera de l’autre côté ; pour cet effet, il faudra que le produit de ce poids par sa distance du centre, soit égal à la somme des produits de tous les autres poids multipliés chacun par sa distance du centre.

Par exemple, si on suspend trois poids d’une once chacun à la deuxieme, troisieme, & cinquieme division, ils feront équilibre avec le poids d’une once appliqué de l’autre côté du point d’appui à la distance de la dixieme division. En effet, le poids d’une once appliqué à la deuxieme division fait équilibre avec le poids d’un cinquieme d’once appliqué à la dixieme division. De même le poids d’une once appliqué à la troisieme division fait équilibre à d’once appliqués à la dixieme division, & le poids d’une once à la cinquieme division fait équilibre au poids d’une demi-once à la dixieme division ; or un cinquieme d’once avec d’once & une demi-once, font une once entiere. Donc une once entiere appliquée à la dixieme division, fait seule équilibre à 3 onces appliquées aux divisions 2, 3, & 5, de l’autre côté du point d’appui.

Donc aussi plusieurs poids appliqués des deux côtés en nombre inégal, seront en équilibre, si étant multipliés chacun par sa distance du centre, les sommes des produits de part & d’autre sont égales ; & si ces sommes sont égales, il y aura équilibre.

Pour prouver cela par l’expérience, suspendez un poids de deux onces à la cinquieme division, & deux autres chacun d’une once à la deuxieme & à la septieme ; de l’autre côté suspendez deux poids d’une once aussi chacun à la neuvieme & dixieme division. Ces deux tiendront en équilibre les trois autres ; la démonstration en est à peu près la même que de la proposition précédente.

Pour qu’une balance soit juste, il faut que les points de suspension soient exactement dans la même ligne que le centre de la balance, & qu’ils en soient également distans ; il faut aussi que les bras soient de longueur convenable, afin qu’on s’apperçoive plus aisément s’ils sont égaux, & que l’erreur qui peut résulter de leur inégalité, soit au moins fort petite ; qu’il y ait le moins de frottement qu’il est possible autour du point fixe ou centre de la balance. Quand une balance est trompeuse, soit par l’inégalité de ses bras, soit par celle de ses bassins, il est bien aisé de s’en assûrer : il n’y a qu’à changer les poids qui sont dans chaque bassin, & les mettre l’un à la place de l’autre ; ces poids qui étoient auparavant en équilibre, cesseront alors d’y être si la balance est trompeuse. Voyez Appui

Balance de M. de Roberval, est une sorte de levier, où des poids égaux sont en équilibre, quoiqu’ils paroissent situés à des extrémités de bras de leviers inégaux. Voyez Levier.

Balance Hydrostatique, est une espece de balance qu’on a imaginée, pour trouver la pesanteur spécifique des corps liquides & solides. Voyez Gravité, ou Pesanteur specifique.

Cet instrument est d’un usage considérable pour connoître les degrés d’alliage des corps de toute espece, la qualité & la richesse des métaux, mines, mineraux, &c. les proportions de quelque mêlange que ce soit, &c. la pesanteur spécifique étant le seul moyen de juger parfaitement de toutes ces choses. Voyez Poids, Métal, Or, Alliage, &c.

L’usage de la balance hydrostatique est fondé sur ce théorème d’Archimede, qu’un corps plus pesant que l’eau, pese moins dans l’eau que dans l’air, du poids d’une masse d’eau de même volume que lui. D’où il suit que si l’on retranche le poids du corps dans l’eau, de son poids dans l’air, la différence donnera le poids d’une masse d’eau égale à celle du solide proposé.

Cet instrument est représenté dans les Planches d’Hydrostatique, fig. 34. & n’a pas besoin d’une description fort ample. On pese d’abord dans l’air le poids E, qui n’est autre chose qu’un plateau garni ou couvert de différens poids, & le poids qu’on veut mesurer, lequel est suspendu à l’extrémité du bras F, ensuite on met ce dernier poids dans un fluide, & on voit par la quantité de poids qu’il faut ôter de dessus le plateau E, combien le poids dont il s’agit a perdu, & par conséquent combien pese un volume de fluide égal à celui du corps.

Pour peser un corps dans l’eau, on le met quelquefois dans le petit sceau de verre IK, & alors on ne doit pas oublier de couler le plateau R sur le petit plateau quarré H, afin que le poids de ce plateau, qui est égal à celui du volume d’eau, dont le seau occupe la place, puisse rétablir l’équilibre.

A l’égard des gravités spécifiques des fluides, on se sert pour cela d’une petite boule de verre G, de la maniere suivante.

Pour trouver la pesanteur spécifique d’un fluide, suspendez à l’extrémité d’un des bras F un petit bassin, & mettez dedans la boule G ; remplissez ensuite les deux tiers d’un vaisseau cylindrique OP, avec de l’eau commune : lorsque vous aurez mis la boule dedans, il faudra mettre sur le plateau E, de petits poids, jusqu’à ce que les bras E, F, demeurent dans une position horisontale.

Ainsi l’excès du poids de la boule sur celui d’un égal volume d’eau, se trouvera contrebalancé par les poids ajoûtés au plateau E, ce qui la fera demeurer en équilibre au milieu de l’eau. Or concevons à présent cette boule ainsi en équilibre, comme si elle étoit réellement une quantité d’eau congelée dans la même forme : si à la place de l’eau qui environne cette partie congelée, nous substituons quelqu’autre liqueur de différente pesanteur, l’équilibre ne doit plus subsister, il faudra donc pour le rétablir, mettre des poids sur celui des plateaux E, F, de la balance qui sera le plus foible.

Ces poids qu’il aura fallu ajoûter dans la balance, seront la différence en gravité de deux quantités, l’une d’eau, l’autre de la liqueur qu’on a voulu examiner, & dont le volume est égal à celui de la boule de verre. Supposons donc que le poids du volume d’eau dont la boule occupe la place, soit de 803 grains ; si nous ajoûtons à ce nombre celui des grains qu’il aura fallu ajoûter sur le plateau auquel la boule est attachée, ou si nous ôtons de 803 grains le nombre de ceux qu’il auroit fallu mettre sur le plateau opposé, le reste sera le poids du volume du fluide égal à celui de la boule, & la gravité spécifique de l’eau sera à celle de ce fluide comme 803 est à ce reste ; enfin si on divise ce même reste par 803, le quotient exprimera la gravité spécifique du fluide, l’unité exprimant celle de l’eau.

Pour rendre ceci plus sensible par un exemple, supposons qu’on veuille savoir la gravité du lait : plongeant dans cette liqueur la boule telle qu’elle est attachée à la balance, on trouve qu’il faut mettre 28 grains sur le plateau auquel elle est suspendue, pour rétablir l’équilibre : ajoûtant donc 28 grains à 803, la somme sera 831 ; & ainsi la gravité spécifique du lait sera à celle de l’eau, comme 803 à 831. On peut donc par le moyen de la balance hydrostatique : 1°. connoître la pesanteur spécifique d’une liqueur : 2°. comparer les pesanteurs spécifiques de deux liqueurs : 3°. comparer les gravités spécifiques de deux corps solides ; car si deux corps solides pesent autant l’un que l’autre dans l’air, celui qui a le plus de pesanteur spécifique, pesera davantage dans l’eau : 4°. comparer la gravité spécifique d’un corps solide avec celle d’une liqueur ; car la gravité spécifique du corps est à celle de la liqueur, comme le poids du corps dans l’air, est à ce qu’il perd de son poids dans la liqueur. Voyez aussi Aréometre.

Le Docteur Hook a imaginé une balance hydrostatique qui peut être d’une grande utilité pour examiner la pureté de l’eau, &c. Elle consiste en un ballon de verre d’environ trois pouces de diametre, lequel a un col étroit d’une demi-ligne de diametre : on charge ce ballon de minium afin de le rendre tant soit peu plus pesant qu’un pareil volume d’eau, on le trempe ensuite dans l’eau après l’avoir attaché au bras d’une exacte balance, qui a un contrepoids à l’autre bras. Cela fait, on ne sauroit ajoûter à l’eau la plus petite quantité de sel, que le col du ballon ne s’éleve au-dessus de l’eau d’un demi-pouce plus qu’il n’étoit d’abord. En effet, l’eau devenant plus pesante par l’addition du sel, le ballon qui y étoit auparavant en équilibre, doit s’élever. Transact. Philosoph. n°. 197.

Plusieurs savans se sont donné la peine de rédiger en table les pesanteurs d’un grand nombre de matieres tant solides que fluides : on doit assûrément leur savoir gré de ce travail, & l’on en sent toute la difficulté, quand on pense aux attentions scrupuleuses, & au tems qu’on est obligé de donner à ces sortes de recherches : mais leurs expériences, quelque exactes qu’elles ayent été, ne peuvent nous servir de regle que comme des à-peu-près ; car les individus de chaque espece varient entr’eux quant à la densité, & l’on ne peut pas dire que deux diamans, deux morceaux de cuivre, deux gouttes de pluie, soient parfaitement semblables. Ainsi quand il est question de savoir au juste la pesanteur spécifique de quelque corps, il faut le mettre lui-même à l’épreuve ; c’est le seul moyen d’en bien juger. Au reste on sera sans doute bien-aise de trouver ici une table dressée sur des expériences fort exactes. Il suffit de dire qu’elles sont de M. Musschembroek. Les pesanteurs specifiques de toutes les matieres énoncées dans cette table, sont comparées à celles de l’eau commune, & l’on prend pour eau commune celle de la pluie dans une température moyenne ; ainsi quand on voit dans la table, eau de pluie 1,000, or de coupelle 19,640, air 1,001 , c’est-à-dire, que la pesanteur specifique de l’or le plus fin, est à celle de l’eau, comme 19 à-peu-près à 1, & que la pesanteur de l’air n’est presque que la millieme partie de celle de l’eau.

Table alphabétique des matieres les plus connues, tant solides que fluides, dont on a éprouvé la pesanteur spécifique.
Acier flexible & non trempé 7, 738.
Acier trempé 7, 704.
Agate d’Angleterre 2, 512.
Air 0, 001 .
Albâtre 1, 872.
Alun 1, 714.
Ambre 1, 040.
Amiante 2, 913.
Antimoine d’Allemagne 4, 000.
Antimoine d’Hongrie 4, 700.
Ardoise bleue 3, 500.
Argent de coupelle 11, 091.
Bismuth 9, 700.
Bois de bresil 1, 030.
Bois de cedre 0, 613.
Bois de orme 0, 600.
Bois de gayac 1, 337.
Bois de ébene 1, 177.
Bois de érable 0, 755.
Bois de frêne 0, 845.
Bois de bouis 1, 030.
Borax 1, 720.
Caillou 2, 542.
Camphre 0, 995.
Charbon de terre 1, 240.
Cinabre naturel 7, 300.
Cinabre artificiel 8, 200.
Cire jaune 0, 995.
Cire rouge 2, 689.
Cire blanche 2, 500.
Corne de bœuf 1, 840.
Corne de cerf 1, 875.
Crystal de roche 2, 650.
Crystal d’Islande 2, 720.
Cuivre de Suede 8, 784.
Cuivre jetté en moule 8, 000.
Diamant 3, 400.
Ecailles d’huître 2, 092.
Encens 1, 071.
Eau commune ou de pluie 1, 000.
Eau distillée 0, 993.
Eau de riviere 1, 009.
Esprit-de-vin rectifié 0, 866.
Esprit-de-vin de térébenthine 0, 874.
Etain pur 7, 320.
Etain allié d’Angleterre 7, 471.
Fer 7, 645.
Gomme Arabique 1, 375.
Grenat de Boheme 4, 360.
Grenat de Suede 3, 978.
Huile de lin 0, 932.
Huile d’olive 0, 913.
Huile de vitriol 1, 700.
Karabé ou ambre jaune 1, 065.
Lait de vache 1, 030.
Litarge d’or 6, 000.
Litarge d’argent 6, 040.
Magnese 3, 530.
Marbre noir d’Italie 2, 704.
Marbre blanc d’Italie 2, 707.
Mercure 13, 593.
Noix de galle 1, 034.
Or d’essai ou découpé 19, 640.
Or de Guinée 18, 888.
Os de bœuf 1, 656.
Pierre sanguine 4, 360.
Pierre calaminaire 5, 000.
Pierre à fusil opaque 2, 542.
Pierre transparente 2, 641.
Poix 1, 150.
Sang humain 1, 040.
Sapin 0, 550.
Sel de glauber 2, 246.
sel ammoniac 1, 453.
sel gemme 2, 143.
sel polychreste 2, 148.
Soufre commun 1, 800.
Talc de Venise 2, 780.
Tartre 1, 849.
Turquoise 2, 508.
Verd-de-gris 1, 714.
Verre blanc 3, 150.
Verre commun 2, 620.
Vin de Bourgogne 0, 953.
Vinaigre de vin 1, 011.
Vitriol d’Angleterre 1, 880.
Yvoire 1, 825.

Cet article est en partie de M. Formey. (O)

* Balance, voyez Romaine, Fleau, Peson, Porte-Balance. La balance commune n’est autre chose qu’un fléau suspendu par le milieu, & soûtenant par ses extrémités des plateaux ou bassins attachés avec des cordes. Voyez fig. 5. du Balancier, une balance qui ne differe de la commune que parce qu’elle est plus petite, & qu’elle a un porte-balance ; f, f, le fléau ou traversin ; l, la languette ; p, un des pivots ; il a son correspondant ; b, le braié ; c, la chasse ; q, q, les deux bassins ou plateaux ; s, s, s, les cordes qui les soûtiennent ; r, r, les crochets ou anneaux qui embrassent les cordes.

La balance fine ou le trebuchet, ne differe de la balance commune, que parce qu’étant destinée à peser des matieres précieuses, où la moindre quantité de trop ou de trop peu, fait une différence considérable pour le prix ; elle est fort petite, & travaillée avec la derniere précision.

Balance sourde : celle-ci a les bouts de son fleau plus bas que son clou, & sa chappe soûtenue en l’air par une guindole ou guignole ; elle est d’usage dans les monnoies.

Balance d’essai, c’est la balance de la figure 5 enfermée dans une lanterne de verre avec son porte-balance, comme on voit figure 7 ; comme on y pese l’or & l’argent, on a pris la précaution de la lanterne, contre l’agitation que l’air pourroit causer à ses bassins.

Balance de chandelier : celle-ci quand elle est petite, a les bassins en forme de seaux, on y met la chandelle debout ; & quand elle est grande, ses bassins sont presqu’entierement plats, afin qu’on y puisse coucher la chandelle. C’est du reste la même chose que la balance commune.

En général, il y a autant de différentes sortes de balances possibles, que de moyens différens possibles d’établir & de rompre l’équilibre établi entre les différentes parties d’un levier, ou d’un corps qui en fait la fonction.

Balance, Libra (Astron.) est aussi un des douze signes du zodiaque, précisément opposé au bélier : on l’appelle balance, parce que les jours & les nuits sont d’égale longueur lorsque le soleil entre dans ce signe, ce qui arrive à l’équinoxe d’automne.

Le catalogue Britannique met les étoiles de la constellation de la balance au nombre de 46. (O)

Balance, s. f. (en Mytholog.) est le symbole de l’équité. La Justice la tient à sa main. Celle que représente le septieme signe du zodiaque fut à l’usage d’Astrée ; ce fut-là qu’elle déposa cette juste balance, lorsqu’elle se retira de la terre au ciel, à l’approche du siecle de fer.

Balance de Commerce, signifie une égalité entre la valeur des marchandises achetées des étrangers, & la valeur des productions d’un pays transportées chez d’autres nations.

Il est nécessaire que cette balance soit gardée parmi les nations commerçantes ; & si elle ne peut l’être en marchandises, elle le doit être en especes.

C’est par ce moyen qu’on connoît si une nation gagne ou perd par son commerce étranger ou par quelque branche de ce commerce, & par conséquent si cette nation s’enrichit ou s’appauvrit en le continuant.

Il y a diverses méthodes pour arriver à cette connoissance.

1°. La plus reçûe est de prendre une exacte notion du produit que rapportent à proportion les marchandises exportées ou envoyées à l’étranger, & les marchandises importées, c’est-à-dire celles qu’on a tirées de lui. Si les premieres excedent les dernieres, il s’ensuit que la nation qui a fait les exportations est en chemin de gagner, dans l’hypothese que l’excédent est rapporté en argent monnoyé ou non monnoyé ; & ainsi augmente le thrésor de cette nation. Mais cette méthode est incertaine, parce qu’il est difficile d’avoir un compte véritable des marchandises, soit importées soit exportées, les registres des douanes ne pouvant pas les fournir à cause des contrebandes qui se font particulierement de marchandises belles & rares, comme points, dentelles, joyaux, rubans, soies, toiles fines, &c. qu’on peut cacher en un petit volume ; & même des vins, eaux-de-vie, thé, &c. à quoi il faut ajoûter les divers accidens qui affectent la valeur du fonds soit sorti soit rentré, comme pertes faites sur mer, par marchés, banqueroutes, saisies, &c. D’ailleurs, pour ce qui concerne les négoces particuliers, il y a divers pays où les ouvrages de nos manufactures que nous y envoyons ne sont pas en grande considération ; cependant ce que nous en rapportons est nécessaire pour pousser notre commerce en général, comme le trafic en Norvege pour du mairein & des provisions navales. D’un autre côté le commerce de la compagnie des Indes orientales est beaucoup plus avantageux, parce que les marchandises importées excedent de beaucoup les marchandises exportées, que nous vendons beaucoup des premieres aux étrangers, & que nous en consumons beaucoup dans le royaume, par exemple, des indiennes & des soies au lieu des toiles & soies des autres pays, qui nous coûteroient plus cher.

2°. La deuxieme méthode est d’observer le cours du change ; car s’il est ordinairement au-dessus de la valeur intrinseque ou de l’égalité des especes étrangeres, nous perdons non-seulement par le change, mais encore par le cours général de notre commerce. Mais cette méthode est encore imparfaite, puisque nous trafiquons dans plusieurs pays où le cours du change n’est point établi.

3°. La troisieme méthode, qui est du chevalier Jos. Child, se prend de l’accroissement ou de la diminution de notre commerce & de nos navires en général ; car si ces deux points viennent à diminuer, quelque profit que puissent faire des particuliers, la nation perd, & elle gagne dans l’hypothese contraire. Cet auteur établit comme une regle infaillible, que dans toutes les parties du monde où le commerce est grand, continue sur ce pié & augmente de jour en jour aussi-bien que le nombre des navires, par succession de tems ce commerce doit être avantageux à la nation, même dans le cas où un gros commerçant se ruine ; car quoi qu’il puisse perdre, quelle multitude de gens qui gagnent par son moyen ! le roi, les officiers des doüanes, les charpentiers de vaisseau, brasseurs, boulangers, cordiers-manufacturiers, cordiers, porteurs, charretiers, mariniers, &c.

4°. Une derniere maniere est d’observer l’augmentation & la diminution de notre argent, soit monnoyé soit en lingots : mais celle-ci est la moins sensible & la moins palpable de toutes ; car l’argent paroît aux yeux du vulgaire plus abondant lorsqu’il en a moins affaire, & plus rare selon que les occasions de l’employer sont plus fréquentes & plus avantageuses : par ce moyen il semble que nous ayons plus d’argent lorsque nous avons moins de commerce : par exemple, quand la compagnie des Indes orientales a un grand débit à faire, l’argent se trouve pour l’ordinaire plus rare à Londres, parce que l’occasion engage les particuliers à en employer quantité qu’ils avoient amassé à cette intention. Ainsi un haut prix d’intérêt fera que l’argent paroîtra plus rare, parce que chacun aussi-tôt qu’il en peut rassembler quelque somme cherche à la placer. Child, Disc. sur le comm. ch. ix. Chambers, Dictionn. (G)

Balance, en termes de teneurs de livres à parties doubles, signifie l’état final ou la solde du grand livre ou livre de raison, ou d’un compte particulier.

Balance, se dit encore de la clôture de l’inventaire d’un marchand, qui se fait en crédit & en débit, dans lequel il met d’un côté, qui est la gauche, l’argent qu’il a en caisse, ses marchandises, dettes actives, meubles & immeublés ; & en crédit du côté de la droite, ses dettes passives & ce qu’il doit payer en argent ; & quand il a défalqué ce qu’il doit d’un côté de ce qu’il a d’effets d’un autre, il connoît, tout étant compensé & balancé, ce qui doit lui rester de net & de clair, ou ce qu’il a perdu ou gagné.

On se sert quelquefois du mot de bilan au lieu de balance, mais improprement. Bilan a une autre signification plus précise. Voyez Bilan.

Balance, signifie aussi la déclaration que font les maîtres des vaisseaux, des effets & autres marchandises dont ils sont chargés. Ce terme est en usage en ce sens parmi les marchands qui trafiquent en Hollande par les rivieres du Rhin & de la Meuse. (G)