Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume I/Vispéred/Karda 3.

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Traduction par James Darmesteter.
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux (I. La Liturgie (Yasna et Vispéred) (Annales du Musée Guimet, tome 21)p. 452-456).


KARDA 3


Ce Karda se place entre les §§ 8 et 9 du Hâ XI, c’est-à-dire au moment où le Zôt va consommer le sacrifice de Haoma et boire la liqueur sacrée. Pour que le sacrifice profite à la communauté, il faut qu’elle soit tout entière présente ou soit supposée l’être. C’est pourquoi le Zôt appelle successivement toutes les classes de la société, en commençant par les sept prêtres invisibles qui l’assistent dans la personne du Râspî et qui viennent à tour de rôle se mettre à la place qui leur est assignée par leurs fonctions (voir dans l’Introduction générale, au Paragra, et la planche correspondante).

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Le Zôt.
A sa place 1[1] le Hâvanan 2[2] !

Le Râspî vient se mettre debout à la place assignée au Hâvanan, c’est-à-dire à droite du Zôt, près de la cuve, et dit :

Me voici 3[3] !
Le Zôt.
A sa place l’Atravakhsha !
Le Râspî se met sur la droite du Zôt, en face du feu, et dit :
Me voici !
Le Zôt.
A sa place le Frabaretar !
Le Râspî se met à gauche du Zôt et dit :
Me voici !
Le Zôt.
A sa place l’Aberet !
Le Râspî se met sur la gauche du Zôt, en face du feu, et dit :
Me voici !
Le Zôt.
A sa place l’Asnatar !
Le Râspî se met sur la droite du Zôt, entre le Hâvanan et l’Atravakhsha, et dit :
Me voici !
Le Zôt.
A sa place le Rathwishkare !

Le Râspî se met sur la gauche de Zôt, entre le Frabaretar et l’Âberet, et dit :

Me voici !
Le Zôt.


A sa place le Sraoshâvarez, très sage, aux paroles très droites.


Le Râspî se met en face du Zaotar, près du feu, et dit :


Me voici !


Le Zôt et le Ràspî ensemble :


2 (16). A sa place le prêtre ; à sa place le guerrier ; à sa place le laboureur !

A sa place le maître de maison ; à sa place le maître de bourg ; à sa place le maître de district ; à sa place le maître de pays !


3 (18). A sa place le jeune homme aux bonnes pensées, aux bonnes paroles, aux bonnes actions, à la bonne religion !

A sa place le jeune homme qui intercède 4[4] ; à sa place celui qui pratique le Hvaêtvadatha 5[5] !

A sa place le prêtre qui fait tournées dans le pays 6[6] ; à sa place le prêtre ambulant 7[7] qui obéit 8[8] !

A sa place le maître de maison : à sa place la maîtresse de maison !


4 (20). A sa place la femme riche en bonnes pensées, riche en bonnes paroles, riche en bonnes actions, bien instruite 9[9], soumise à son mari 10[10],

sainte, qui est telle que Spenta-Àrmaiti 11[11] et telle que les femmes 12[12], ô Ahura Mazda !

A sa place l’homme de bien, riche en bonnes pensées, riche en bonnes paroles, riche en bonnes actions, qui déploie la foi 13[13] ne déploie pas la perversité 14[14], et par les œuvres de qui le monde grandit en Bien 15[15].
5 (25). Pour chacun de vous tous, adorateurs de Mazda, nous proclamons un Ratu, nous établissons un Ratu, parmi les Amesha-Spentas et parmi les Saoshyants 16[16] les plus sages, les plus véridiques, les plus empressés, les plus intelligents. 17[17]

Nous proclamons la plus haute puissance de la Religion mazdénne Ratu du Prêtre, du Guerrier, du Laboureur 18[18].


Les deux paragraphes suivants s’intercalent dans le Vendidad Sade entre les §§ 15 et 16 du Yasua XI, c’est-à-dire après que le Zôt a bu le Parâhôm et avant la récitation du Fravarànê.

Le Zôt.
6 (30). Le désir du Seigneur… — que cet Àtravakhsha 19[19] me le dise !…
Le Râspi.
C’est la règle du bien. Que l’homme de bien qui la connaît la proclame !

Le désir du Seigneur… — que ce Zaotar me le dise !
Le Zôt.
C’est la règle du bien. Que l’homme de bien qui la connaît la proclame !
Le Râspi.


7 (31). O prêtre, sers-nous de Zaotar 20[20] !


Le Zôt.


Le désir du Seigneur… — que l’Âtravakhsha me le dise !


Le Râspi.


C’est la règle du bien. Que l’homme de bien qui la connaît la proclame !


Le Zôt.


[Spiegel, IV]. Me voici donc, comme Zaotar 21[21], prêt à chanter les Staota Yêsnya 22[22] à les réciter, les entonner, les offrir en sacrifice 23[23].


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  1. 1. Hâvanànem âstaya ; âstaya signifie littéralement « je mets debout, je fais se tenir » (yakoyamunîm, âstininîm).Voir Yt. XXIV, 15.
  2. 2. Sur les fonctions du Hâvanan et des autres prêtres, voir l’Introduction générale, Paragra.
  3. 3. vîsâi, litt. « j’obéis ».
  4. 4. ukhdhô-vacańhem, milyâ yamalalûn jâtakgûb « qui dit des paroles », c’est-à-dire qui parle pour autrui, qui fait jâdangôi (cf. Yasna X, note 61) : le jâdangôi est la quête de charité faite pour les pauvres (Anquetil, II, 576) ou pour une œuvre pie quelconque (Dabistân, I, p. 293 de la traduction anglaise). Un homme vient me dire : « Je n’ai point d’ouvrage, procurez-m’en » ; je m’adresse pour lui à quelqu’un qui lui en donne : j’ai fait jâdangôi. Le mérite est le même que si l’on avait donné soi-même (Saddar, 22). Le mot s’emploie aussi au sens général d’intercession, action d’exprimer pour autrui son désir (Minokh, II, 69) ; Bahman fait jâdangôi pour l'àme des morts, c’est-à-dire parle pour elle (Aogemaidê, 10).
  5. 5. Le mariage consanguin : voir Yasna XIII, Appendice.
  6. 6. daińhâurvaêsem, malâ vashtâr, litt. « qui fait des tournées dans le pays » ; le prêtre ambulant : voir Y. XLII, 6 et p. 94, note 75.
  7. 7. pairijathnem, pun madam rasishnîh « qui arrive ». Peut-être le mot désigne-t-il le prêtre étranger qui vient d’une autre province, par opposition au dainhàurvaêsa qui ne sort pas de son cercle.
  8. 8. humaim, hûfarmân ; cf. Vp. IX, 2 (Sp. X, 7) ; qui obéit à son supérieur (?).
  9. 9. hush-hâm-sâstàm, hû-âmûkht, bien instruite de ses devoirs.
  10. 10. ratukhshathràm, rat khûtâi « qui a son Ratu pour Seigneur » autrement dit « qui considère son mari (shûî) comme son Seigneur (khutâi) ».Les qualités de ratu et d’abu sont réunies dans le mari, qui est à la fois son maître spirituel (ratu) et son Seigneur (khshathra abu). — Pour un autre sens de ratukhshathra, voir Yasna LIV, note 12.
  11. 11. Litt. « qui est Speńta-Ârmaiti », c’est-à-dire qu’elle a les vertus de Speńta Ârmaiti, qu’elle est une Speńta-Armaiti sur terre.
  12. 12. Les êtres féminins du monde supérieur, ou les Fravashis, qui sont considérées comme les épouses ou les filles d’Ahura ; voir Y. XXXVIII, 1 ; Vp. II, n. 8.
  13. 13. Plus exactement « la profession de foi » ; visto-fraoreitim ; vistô, padtâk « manifeste », litt. « vu » ; fraoreiti, voir Y. XIII, fin.
  14. 14. evistô-kayadhem, afrâj padlak kdstârîh, aigh vinâskdrîh lâ padtâk ; cf. Yasna LVII, 15 et LXI, 2.
  15. 15. Cité du Yasna XLIII, 6 c : cf. Vp. II, 5.
  16. 16. Voir Yasna XIII, 3, note 12. — Pour les épithètes qui suivent, voir ibidem, notes 13, 14, 15.
  17. 17.
  18. 18. Même phrase Yasna XIII, 3 ; voir note 16.
  19. 19. yô àtruvakhshô ; c’est-à-dire le Râspi eu sa qualité d’Atravakhsha, qualité qu’il vient d’assumer dans sa dernière opération qui a été de jeter des parfums sur le feu : voir page 113, kiryâ du § 11.
  20. 20. tùm nô… zaostastè, pun zôtîh yakôyamûn « tiens-toi en qualité de Zôt » ; zaotastê semble être le locatif d’un thème abstrait zaola-sta. — C’est une invitation à réciter les Gâthas, la fonction spéciale du Zaotar étant cette récitation : de là la réponse du Zôt.
  21. 21. Voir la note précédente.
  22. 22. Cf. Yasna XIV, 1.
  23. 23. Voir p. 171, note 70.