Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume I/YASNA/Hâ71.
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux, (I. La Liturgie (Yasna et Vispéred) (Annales du Musée Guimet, tome 21), p. 429-437).
HÂ 71 (SP. 70)
Ce Hâ est désigné dans le manuscrit Pt4 sous le titre Visp Yasht, « Yasht de tout ». Il tient ce titre du mot vîspa « tout, tout entier » qui se retrouve dans la plupart des invocations du Hâ, devant le nom de l’être invoqué, et qui a pour objet d’empêcher qu’aucune parcelle ou aucun membre de la divinité ne perde sa part de sacrifice. Ces formules répondent donc, dans l’intention sinon dans la forme, au Dique deæque omnes du rituel latin, aux viçve devâs du rituel indou.
Ces invocations sont enseignées par Zoroastre à Frashaoshtra. Frashaoshtra, son beau-père, fut en effet un de ses premiers disciples (voir XXVIII, 8 ; XLIX, 8 ; XLVI, 16 ; LI, 17 ; Dînkart, IX, 24, 17) ; il fut aussi un des premiers apôtres, et c’est auprès de lui que vinrent chercher la foi les deux saints du Mâzandarân, Spiti et Erezrâspa, fils d’Uspâsnu, qui sont les deux grands Dastùrs des deux Karshvares du nord (Dînkart, IX, 21, 24 ; cf. Yasht XIII, 121).
Le Zôt verse de la coupe supérieure une goutte de zôhr sur l’Evanghin du Barsom, en s’y prenant de telle sorte qu’elle tombe dans la coupe inférieure ; puis il remet les deux coupes l’une sur l’autre, prend le Barsom dans les deux mains et dit 1[1] :
1. Le saint Frashaoshtra demanda au saint Zarathushtra ;
des saints.
le Bien, donne-moi en récompense, ô Armaiti, la gloire, la fortune et la vie que donne Vohu Manô » (2 fois).
A chacun de ces deux Ahunvars le Zôt prend la coupe supérieure et en verse deux gouttes sur l’Evanghin de telle sorte qu’elles tombent dans la coupe inférieure.
Rituel indien : Au mot gavê, le Zôt touche la table avec le bout du Barsom ; aux mots tàish shyaothanaish, avec la tête 44[44] ; au mot yâish, il touche la coupe à zôhr avec le bout du Barsom ; au mot fraêshyàmahî, avec la tête ; aux mots at ahyâi, il touche la soucoupe placée sur le Hâvan avec le bout du Barsom ; aux mots ashâ, avec la tête.
Rituel irani ; « Au mot gavé, laver le datûsh (pp. 137-138) d’un bout à l’autre (datûsh Barsôm bûn od rôishà halalûntan) ;
« au mot adâish, faire passer (?) un des deux fràgâm derrière le datûsh à gauche ; au mot tâish, faire passer l’autre frâgâm à droite » (je ne saisis pas le sens exact de l’opération. — êvtâk frâgâm min akhari Barsôm datûsh min yadâ hôi lâlâ vitârishn ; zagê datîgar min akhari Barsôm datûsh min yadâ dashan lâlâ vitârishn) ;
« au mot mazdâo, poser le bout du Barsom sur l’urvis (bûni Barsôm ol urvîs anakhtûnishn) ;
« au mot vakhshat, poser la tête du Barsom sur l’urvis » ; puis retourner et poser le bout sur l’urvis » (rôishâ î Barsôm ol urvis anakhtûnishn udatigar bâr bûni Barsôm ol urvîs anakhtûnishn).
Ce nîrang est la contre-partie du nîrang initial de l’âb-zôhr, Hà LXIII, Appendice.
a
- ↑ 1. Pt4 : danâ jîvâk âp âmak (lire âpi jâmak ?) madam sari Barsom rêjét, « ici il verse sur le Barsom l’eau de la coupe » (?).
- ↑ 2. paurvatare, pèshtar, peut-être : « ô maître », celui qui a la paurvatât de la religion (LVII, note 31) : ainsi l’entend la glose : âi pèsh-ài dîni lak matâ havâî, « c’est-à-dire tu es le chef religieux du pays ».
- ↑ 3. rathwàm framereti : l’énumération complète des ratus.
- ↑ 4. gàthanàm hañkereti : la consommation du service des Gàthas, de sorte qu’il n’y manque rien : cf. § 18.
- ↑ 5. Les §§ 2-3 sont reproduits en tête du Vp. XIII, XIV, XVI, XVIII, XIX, XX, XXIII, XXIV.
- ↑ 6. Ahura Mazda.
- ↑ 7. Ou peut-être en prenant ratufritim au sens objectif : « Nous offrons au saint,
maître de sainteté, l’adoration des maîtres la plus prompte à accourir » (la ratufriti
le plus efficace). - ↑ 8. Voir p. 22 et XXXVI, 5.
- ↑ 9. Voir I, 13.
- ↑ 10. vispemca afsmanem : voir Vp. XIV, 1, note.
- ↑ 11. Peut-être mieux : « entre tous les saints ». — ashaoni ashavahyô (cf. LIII, 4 b) yahmyàca ashavabyô ; traduit, olâ ahlav man dur ahlavàn pun ahlàyîh âshnàk « ce saint qui a renom de sainteté parmi les saints » (ou « à l’égard des saints » ). Cette traduction a plutôt l’air d’une glose. J’entends le texte : « saintes pour les saints, quelques saints que ce soit », yahmyà étant pris au sens indéfini.
- ↑ 12. Offrande est faite au Génie ; le Génie vient pour la prendre (voir LXII, note 33).
- ↑ 13. Voir LV, Introduction, et à l’Introduction générale, Analyse du Yasna.
- ↑ 14. aiwi-kareta, madani karînîtàr ; de aiwi-karet.
- ↑ 15. Cf. page 390, note 29.
- ↑ 16. hàvayèitî ; cf. Vd. VIII, 73, 231, texte et note.
- ↑ a, b, c et d 17. Cf. I, 16.
- ↑ 18. uruthmishca paiti-varsbajîsbca ; uruthmi, cf. X, 4, 10 ; paiti-varshaji, cf., 5, 12.
- ↑ 19. Voir Vispéred 1, 1, texte et notes.
- ↑ 20. Voir XVI, note 2.
- ↑ 21. Cf. LVIII, 1. Il s’agit des Gâthas.
- ↑ 22. Voir LIV, note 12.
- ↑ 23. Voir page 24.
- ↑ 24. Littéralement « les Questions d’Ahura », âhùirim frashnem, c’est-à-dire la chose demandée à Ahura et donnée dans ses réponses, la Révélation, ou comme dit le Commentaire, « l’Avesta et le Zend ».
- ↑ 25. tkaèshem, c’est-à-dire la loi civile, dâtistàn, définie vicîr dàtôbarîk « décision et jugement ». Cf. Vispéred I, note 49.
- ↑ 26. hvô ashava Zarathushtrô urvathem thràtârem isôit, cf. XLVI, 14 a (Zarathushtra kas tê asbava urvathô) et LI, 11 a ; Frashaoshtra sera cet ami : cf. XLVI, 16 ; LI, 17.
- ↑ 27. ashavanem tê ashaonat àfryêidliyài (Jm1 ; cf. K5, J2) mraomi urvathem urvathàt ; litt. « je dis toi, saint, à être aimé du saint, ami d’ami ». Geldner lit âfyêidhyài. Le pehlvi suppose une lecture * ùfyêidhyài : man ahlav lak min ahlavân khvêshîn li yamallûnam « toi qui es saint, je te dis approprié (?) des saints » : ufyêimi est en effet normalement traduit khvêshînam « je fais mien » (p. 147, note 7). Ma traduction est neutre entre âfryêidhyâi et * ùfyèidhyài ; si la première lecture est la vraie, il faudrait traduire « tu dois être béni ».
- ↑ 28. Citation en langue rajeunie de XLIV, 6.
hvô zi drvào yé drvàitê vahishtô) pour (hvô zi dregvâo yé dregvâitè vahishtô.
hvô ashava yahmâi ashava fryô) pour (hvô ashavà yahmài ashavà fryô. - ↑ 29. Les paroles que Zoroastre enseigne à Frashaoshtra sont les paroles mêmes d’Ahuraqui les a enseignées au Prophète. Le Commentaire hésite entre le Yasna et ce Fargart : cf. XIX, 11 (note 33), où la même hésitation se présente.
- ↑ 30. Ou « jusqu’au dernier moment de ta vie » (Comm.).
- ↑ 31. Contre-partie de XIX, 7 où l’âme de celui qui a mutilé l’Ahuna vairya est emportée loin du Paradis.
- ↑ 32. idha (ou mieux adha, Pt4 ; îtùn) anhô ashava, itûn havâ-ê ahlav.
- ↑ 33. Voir l’Introduction à la Gâtha Ushtavaiti I, p. 277.
- ↑ 34. Ou peut-être « à la pratique et à la bonne pensée », en prenant varezem, tr. kàmak, pour un dérivé de varez « agir », έργον.
- ↑ 35. Les ténèbres de l’enfer.
- ↑ 36. kbshayasca aniayavayâosca, shîn û mûyag ; shina açrupâta « chute de larmes » (Minôkhard, VI, 13 ; XLIV, 29) ; mûyaî keçatrotana « acte d’arracher les cheveux » (ibid.) ; khshaya paraît déjà dans les Gâthas. XXXI, 20 a, appliqué à l’âme qui gémit dans l’enfer (aîghash pun ravân shîn yahvûnît : cf. Ardâ Vîrâf XVI, 7, 9 ; LVII, 4). Peut-être amayava est-il simplement le « gémissement », car tel est le sens du persan xx xx mûya qui représente le pehlvi mùyag, et la traduction sanscrite keçatrotana sera due à un rapprochement étymologique avec mûi « cheveu ». — Cf. Études iraniennes, II, 169 sq.
- ↑ 37. astaremanàm, startîh (stard hêhôsh, sscr. manda).
- ↑ a et b 38. vàca hañkeretha, gavishn hangartîg « les paroles accomplies jusqu’au bout » :
cf. hankàrayêmi « je fais complètement du commencement à la fin » (page 6). — Cf. § 1 fin. avàurusta ; lecture du pehlvi incertaine : J2 srâyishn K2 anairnash (probablement anérangîh) ; traduction fausse amenée par confusion avec an-avaurukhti, Vp. IX, 2 (Sp. X, 10) ; Pt4 na-arng-sh. Je traduis d’après ava-ururaodha, pratyaskhalay— (1, 59. éd. sp.). Au moyen âge, des diables recueillaient toutes les syllabes que le prêtre passait dans la messe et elles étaient produites contre lui au jugement dernier (Hauréau, Acad, inscr. et belles-lettres, 2 mai 1890). Dans l’Islam afghan, le dernier vendredi de Ramazan est consacré à « la réparation des prières », c’est-à-dire à des prières destinées à racheter les omissions de l’année. Le sacrifice « aux paroles omises » répond ici au même objet. - ↑ 39. Cf. I, 15.
- ↑ 40. § 22 XXVI, 1.
- ↑ 41. § 24 LVII, 4.
- ↑ 42. § 25 = XXXV, 4.
- ↑ 43. Cité de XLVIII, 6.
- ↑ 44. Sur le sens des mots « bout » et « tête » [bûn et rôishâ), voir Hâ LXIII, note 5.
- ↑ 45. §§ 26-28 VIII, 5-7.
- ↑ 46. §§ 29-31 = : LX, 11-13.