Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/161

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ration après un succès, ou de la grandeur d’âme après un échec ; ou bien si, devenu plus grand, il est meilleur et plus disposé à la réconciliation. De là ce mot d’Iphicrate :

« Quelle a été mon origine, et quelle mon élévation ![1] »

Et ce vers placé dans la bouche du vainqueur aux jeux olympiques :

Jadis, j’ai porté sur mes épaules le grossier bâton du portefaix.

Et encore ce vers de Simonide :

Celle qui eut pour père, pour mari et pour frères autant de tyrans.

XXXII. Mais, comme l’éloge se tire des actions accomplies et que le propre de l’homme sérieux est d’agir conformément à sa détermination, il faut s’efforcer de montrer son héros faisant des actes en rapport avec son dessein. Or il est utile qu’on le voie souvent en action. C’est pourquoi il faut présenter les incidents et les cas fortuits en les rattachant à ses intentions ; car, si l’on rapporte de lui une suite nombreuse d’actes accomplis tous dans le même esprit, il y aura là comme une marque apparente de sa vertu et de sa résolution.

XXXIII. La louange (ἔπαινος) est un discours qui met en relief la grandeur d’une vertu. Il faut donc que les actions soient présentées comme ayant ce même caractère. L’éloge (ἐγκώμιον) porte sur les actes. On y fait entrer ce qui contribue à donner confiance, comme, par exemple, la naissance et l’éducation, car il est vraisemblable que, issu de gens de bien, on est un homme

  1. Cp., plus haut, chap. VII, § 32.