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sonnes pour les chats, les souris, les araignées, &c. aversion qui va quelquefois jusqu’à les faire évanoüir à la vûe de ces animaux.

Porta, (mag. natur. 20. 7.) & Mersenne, (Quæst. comment. in Genes.) en rapportent d’autres exemples, mais fabuleux & absurdes : un tambour, disent-ils, de peau de loup, fera casser un tambour de peau de brebis ; les poules s’envolent au son d’une harpe garnie de cordes faites des boyaux d’un renard, &c. Voyez d’autres exemples plus réels d’antipathie sous les art. Musique, Tarentule, &c. M. Boyle parle d’une dame qui avoit une grande aversion pour le miel ; son Medecin, prévenu qu’il entroit beaucoup de fantaisie dans cette aversion, mêla un peu de miel dans une emplâtre qu’il fit appliquer au pié de la dame. Il se repentit bientôt de sa curiosité, quand il vit le fâcheux dérangement que l’emplâtre avoit produit, & que l’on ne put faire cesser qu’en ôtant cette emplâtre. Le docteur Mather raconte, qu’une demoiselle de la nouvelle Angleterre, s’évanoüit en voyant quelqu’un se couper les ongles avec un couteau, quoiqu’elle ne fût nullement émûe en les voyant couper avec une paire de ciseaux. Philos. transact. n°. 339.

Nous pourrions accumuler ici beaucoup d’autres exemples d’antipathie, dont les auteurs sont remplis, & dont nous ne voudrions pas assûrer généralement la vérité. Il nous suffit que l’existence des antipathies soit un fait certain, & reconnu pour tel.

Les Péripatéticiens enseignent que les antipathies proviennent de certaines qualités occultes qui sont inhérentes dans les corps. Voyez Occulte, Péripatéticien, &c. Voyez aussi Sortilege.

Les Philosophes modernes plus sages, avouent qu’ils en ignorent la cause. Quelques-uns ont prétendu l’expliquer, en regardant notre corps comme une espece de clavecin, dont les nerfs sont les cordes. Le degré de tension des nerfs, différent dans chaque homme, occasionne, disent-ils, un ébranlement différent de la part du même objet ; & si cet ébranlement est tel qu’il produise une sensation desagréable, voilà l’antipathie. Mais comment un degré de tension plus ou moins grand, & peut-être quelquefois peu différent, produit-il dans deux hommes des sensations tout opposées ? voilà ce qu’on n’expliquera jamais. Il ne s’agissoit que d’avoüer son ignorance un peu plûtôt. (O)

* Antipathie, haine, aversion, répugnance, s. f. La haine est pour les personnes ; l’aversion & l’antipathie pour tout indistinctement, & la répugnance pour les actions.

La haine est plus volontaire que l’aversion, l’antipathie & la répugnance. Celles-ci ont plus de rapport au temperament. Les causes de l’antipathie sont plus secretes que celles de l’aversion. La répugnance est moins durable que l’une & l’autre. Nous haïssons les vicieux ; nous avons de l’aversion pour leurs actions ; nous sentons de l’antipathie pour certaines gens, dès la premiere fois que nous les voyons : il y a des démarches que nous faisons avec répugnance. La haine noircit ; l’aversion éloigne des personnes ; l’antipathie fait détester ; la répugnance empêche qu’on imite. V. les Synon. Franç.

Antipathie, terme de Peinture. V. Ennemi.

* ANTIPATRIDE, (Géog. anc.) il y a eu deux villes de ce nom, l’une en Palestine, du côté de Jaffa, vers la mer, maintenant ruinée ; l’autre en Phénicie, sur la côte de la Méditerranée, à seize milles de Jaffa.

ANTIPERISTALTIQUE, adj. de ἀντὶ, contre, & περισταλτικὸς, comprimant, (Anatomie.) C’est dans les intestins un mouvement contraire au mouvement péristaltique. V. Vermiculaire. Le mouvement péristaltique est une contraction des fibres des intestins du haut-en-bas, & le mouvement antipéristaltique en

est une contraction du bas-en-haut. Voyez Intestins. (L)

ANTIPÉRISTASE, s. f. dans la Philosophie de l’école, est l’action de deux qualités contraires, dont l’une par son opposition excite & fortifie l’autre. Voyez Qualité.

Ce mot est Grec, ἀντὶ περίστασις, & se forme de ἀντὶ contra, contre, & περίσταμαι, être autour ; comme qui diroit résistance à quelque chose qui entoure ou assiége.

On définit l’antipéristase l’opposition d’une qualité contraire à une autre, par laquelle est augmentée & fortifiée celle à qui elle résiste ; ou l’action par laquelle un corps auquel un autre résiste, devient plus fort à cause de l’opposition qu’il essuie ; ou l’effet de l’activité d’une qualité augmenté par l’opposition d’une autre qualité.

C’est ainsi, disent les Philosophes de l’école, que le froid en bien des occasions augmente le degré de la chaleur, & l’humide celui de la secheresse. Voyez Froid & Chaleur. C’est ainsi que de la chaux vive prend feu par la simple effusion de l’eau froide. Ainsi le feu est plus vif en hyver qu’en été, par antipéristase ; & c’est la même cause qui produit le tonnerre & les éclairs dans la moyenne région, où le froid est perpétuel.

Cette antipéristase est, comme l’on voit, d’une grande étendue & d’un grand secours dans la Philosophie péripatéticienne : il est nécessaire, disent les partisans de cette Philosophie, que le froid & le chaud soient l’un & l’autre doüés de la faculté de se donner de la vigueur, afin que chacun d’eux la puisse exercer lorsqu’il est comme assiégé par son contraire, & qu’ils puissent prevenir par ce moyen leur mutuelle destruction ; ainsi en été le froid chassé de la terre & de l’eau par les brûlantes ardeurs du Soleil, se retire dans la moyenne région de l’air, & s’y défend contre la chaleur qui est au-dessus, & contre celle qui est au-dessous de lui ; de même en été quand l’air qui nous environne est d’une chaleur étouffante, nous trouvons la qualité contraire dans les soûterrains & dans les caves : au contraire en hyver quand le froid fait geler les lacs & les rivieres, l’air enfermé dans les soûterrains & les caves devient l’asyle de la chaleur ; l’eau fraîchement tirée des puits & des sources profondes en hyver, est non-seulement chaude, mais encore sensiblement fumante. M. Boyle a examiné cette opinion avec beaucoup de soin dans son histoire du froid. Il est certain qu’à priori, & la considérant en elle-même indépendamment des expériences alléguées pour soûtenir l’antipéristase, elle est métaphysiquement absurde ; car enfin il est naturel de penser qu’un contraire n’en fortifie point un autre, mais qu’il le détruit.

Il est vrai que pour soûtenir la prétendue force que la nature a donnée aux corps pour fuir leurs contraires, on allegue ordinairement que des gouttes d’eau se rapprochent en globules sur une table, & se garantissent elles-mêmes ainsi de leur destruction ; mais on explique aisément ce phénomene par d’autres principes plus conformes aux lois de la nature. Voyez Attraction. A l’égard de l’antipéristase du froid & de la chaleur, les Péripatéticiens nous les représentent environnés de leur contraire, comme si chacune de ces qualités avoit une intelligence, & prévoyoit qu’en négligeant de rappeller toutes ses forces, & de s’en faire un rempart contre son ennemi, elle périroit inévitablement ; c’est-là transformer des agens physiques en agens moraux. L’expérience aussi-bien que la raison est contraire à la supposition d’une antipéristase. Le grand argument que l’on allegue pour sa défense est la chaleur que contracte la chaux vive lorsqu’on la met dans l’eau froide. Mais qui pourroit voir sans en être surpris, à