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devant la prunelle de l’œil, laissée sur la cornée par une ulcération superficielle, suivant l’interprétation de Galien. Enfin, suivant le commun des Medecins, c’est une espece d’obscurité dans les yeux qu’on rapporte à l’amblyopie ou obscurcissement de la vûe.

OBSÉCRATION, s. f. (Belles-Lettres.) figure de Rhétorique par laquelle l’orateur implore l’assistance de Dieu ou de quelqu’Homme. Voyez Figure.

Ciceron fait un admirable usage de cette figure dans la harangue pour le roi Dejotarus, lorsqu’il dit à Céfar : Per dexteram te istam oro ; quam rege Dejotaro, hospes hospiti porrexisti ; istam inquam dexteram, non tam in bellis & in præliis, quam in promissis & fide firmiorem. De même Virgile dit :

Quod te per cœli jucundum lumen & auras,
Per genitorem oro, per spem surgentis luli
Eripe me his, invicte, malis
. Æneïd. VI.

OBSÉDER, voyez Obsession.

OBSEQUES, s. f. pl. (Usages.) derniers devoirs ou services, obsequia, qu’on rend à un mort : on trouvera, sous le mot Funérailles, la pratique de cette cérémonie chez plusieurs peuples du monde « Je ne crois pas, dit Lucien, après en avoir fait la peinture, que les monumens, les colonnes, les pyramides, les inscriptions, & les oraisons funebres à la mémoire des défunts, puissent leur servir là-bas d’attestations valables de vie & de mœurs ». La pompe des obseques regarde la coutume ou la consolation des vivans, & jamais le besoin des morts. Criton demandoit à Socrate comment il vouloit être enterré. Comme vous voudrez, répondit-il, ou comme vous pourrez, rien ne m’est plus indifférent. La religion chrétienne a eu raison de réprimer en plusieurs lieux la dépense des obseques ; car, comme le remarque l’auteur de l’Esprit des lois, qu’y a-t-il de plus naturel que d’ôter la différence des fortunes dans une chose & dans les momens qui égalisent toutes les fortunes. (D. J.)

OBSERVANCES, (Hist. ecclésiast.) ce sont des statuts, des ordonnances ecclésiastiques ; Tertullien de Oratione cap. xij. donne une excellente regle sur la conduite qu’il convient de tenir au sujet des observances : il faut, dit-il, rejetter celles qui sont vaines en elles-mêmes, celles qui ne sont appuyées d’aucun précepte du Seigneur ou de ses apôtres, celles qui ne sont pas l’ouvrage de la religion, mais de la superstition, celles qui ne sont fondées sur aucune raison solide, enfin celles qui ont de la conformité avec les cérémonies payennes. (D. J.)

Observance, (Hist. ecclésiast.) se dit en particulier d’une communauté de religieux qui sont obligés à l’observation perpétuelle de la même regle ; ce mot pris en ce sens signifie la même chose que congrégation ou ordre. Voyez Ordre.

Les Cordeliers prennent le nom de religieux de l’observance, de la grande & de la petite observance. Voyez Cordeliers.

Parmi les Bernardins, il y a des religieux de l’étroite observance, strictioris observantiæ, lesquels font toujours maigre. Voyez Bernardins.

OBSERVANTINS, s. m. pl. (Hist. eccles.) religieux cordeliers de l’observance : en Espagne il y a des Observantins déchaussés.

OBSERVATEUR, s. m. (Astronom.) on donne ce nom à un astronome qui observe avec soin les astres & les autres phénomenes célestes. Hypparque & Ptolomée ont été célèbres sous ce nom parmi les anciens. Albœtegnius qui leur a succédé l’an 882, & Vlugh-Beigh, petit-fils du grand Tamerlan l’an 1437, ont aussi mérité ce nom parmi les Sarrasins. En Allemagne les observateurs sont Jean Regiomontant en 1457, Jean Wermer, Bernard Walther en 1475, Nicolas Copernic en 1509, Tycho-Brahé en 1582,

Guillaume landgrave de Hesse, & Jean Hévélius dans le siecle précédent. En Italie Galilée & Riccioli ; en Angleterre Horocce, Flamstéed & Bradley ; & en France Gassendi, les Cassini, Delahire pere & fils, le chevalier de Louville, Maraldi, de Lille.

Observateur, (Phys. & Astr.) se dit en général de tous ceux qui observent les phénomenes de la nature ; il se dit plus particulierement des astronomes ou observateurs du mouvement des astres. Voyez Astronomie & Observation. (O)

Observateur, (Gram. Physiq. Méd.) celui qui observe. Voyez Observation. On a donné le nom d’observateur au physicien qui se contente d’examiner les phénomenes tels que la nature les lui présente ; il differe du physicien expérimental, qui combine lui-même, & qui ne voit que le résultat de ses propres combinaisons ; celui-ci ne voit jamais la nature telle qu’elle est en effet, il prétend par son travail la rendre plus sensible, ôter le masque qui la cache à nos yeux, il la défigure souvent & la rend méconnoissable ; la nature est toujours dévoilée & nue pour qui a des yeux, ou elle n’est couverte que d’une gase légere que l’œil & la réflexion percent facilement, & le prétendu masque n’est que dans l’imagination, assez ordinairement bornée, du manouvrier d’expériences. Celui là au-contraire, lorsqu’il a les lumieres & les talens nécessaires pour observer, suit pas-à-pas la nature, dévoile les plus secrets mysteres, tout le frappe, tout l’instruit, tous les résultats lui sont égaux parce qu’il n’en attend point, il découvre du même œil l’ordre qui regne dans tout l’univers, & l’irrégularité qui s’y trouve ; la nature est pour lui un grand livre qu’il n’a qu’à ouvrir & à considérer ; mais pour lire dans cet immense livre, il faut du génie & de la pénétration, il faut beaucoup de lumieres ; pour faire des expériences il ne faut que de l’adresse : tous les grands physiciens ont été observateurs. Les académiciens qui allerent déterminer la figure de la terre n’y réussirent que par l’observation ; le fameux Newton a vû tomber une poire d’un arbre sur la terre ; il n’a jamais détourné la nature pour l’approfondir & l’interprêter, ç’a été un des plus grands génies. M. *** qui sait tourner si joliment une expérience, est un très-mauvais physicien ; il n’a, dit-on, de l’esprit qu’au bout des doigts. Je ne suis pas surpris, que la prodigieuse quantité d’expériences qu’il y a, aient si peu éclairci la Physique, & que cette physique qui n’est fondée que sur des expériences ait été si inutile à la vraie philosophie ; mais je suis surpris que les Physiciens négligent l’observation, qu’ils courent après l’expérience, & qu’ils préferent le titre si facile à acquérir de faiseurs d’expériences à la qualité si rare, si lumineuse, & si honorable d’observateurs. Voyez Observation.

Ce qu’il y a encore de plus étonnant, c’est que nos moralistes soient si peu observateurs, ils composent dans leur cabinet des traités de morale sans avoir jetté un coup-d’œil sur les hommes ; remplis d’idées vagues, chimériques, ensevelis dans les préjugés les plus grossiers, les plus contraires à la vérité, ils se représentent les hommes tout autrement qu’ils sont & qu’ils doivent être, & dictent des regles, des arrêts qu’ils prétendent être émanés du sein de la divinité, dont l’exécution est très-souvent contraire à la raison, au bon sens, quelquefois impossible. Qu’il seroit à souhaiter qu’on observât, qu’on vît avec des yeux bien disposes & bien organisés les choses telles qu’elles sont ! peut-être se convaincroit-on qu’elles sont comme elles doivent être, & que vouloir les faire aller autrement, est une prétention imaginaire & ridicule ; mais le talent d’observateur est plus difficile qu’on ne pense, & sur-tout celui qui a pour objet les mœurs & les actions des