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força, le luxe & la débauche ; & dans l’endroit où l’on se battoit encore, le meurtre & le carnage. Alibi prælia & vulnera, alibi popinæ, simul cruor & strues corporum juxta scorta & scortis simile.

On a remarqué que César régla à cette bataille la disposition de son armée sur le modele de la disposition que Cyrus avoit faite à la bataille de Thimbrée ; & c’est à cette disposition qu’il dut sa victoire complette.

Presque tous nos auteurs ne font que louer la modération & la clémence que César fit paroître après sa victoire. Quoiqu’il fut élevé par Marius son oncle, nous disent-ils, il sacrifia ses ressentimens à l’établissement de sa domination, & pardonna à tous les partisans de Pompée. Mais Dion n’en parle point sur ce ton-là. Voici ses propres paroles, l. XLIX : Equites & senatores qui Pompeio favissent supplicio dæfecti, paucis exceptis. Legionarios milites ingenuos Cæsar in suas legiones adscripsit ; servos dominis reddidit, ut pœnas darent ; qui non inveniebant dominos suos, in crucem acti. « Tous les sénateurs & les chevaliers qui lui avoient été attachés, furent punis de mort, à l’exception d’un très-petit nombre. Ses légions furent incorporées dans celles d’Octavien : on donna les esclaves à leurs maîtres pour les punir ; & ceux qui ne trouvoient point de maîtres moururent en croix ».

Ainsi la liberté de Rome, si précieuse aux premiers Romains, & qui avoit été si long-tems sous la garde de la pauvreté, de la tempérance, & de l’amour de la patrie, fut ensevelie par César dans les champs de Pharsale. Tout plia depuis sous sa puissance ; & deux ans après le passage du Rubicon, on le vit entrer dans Rome triomphant, & bientôt justement assassiné au milieu d’une république dont il étoit devenu le tyran. (D. J.)

PHARUSES, les, Pharusii, (Géog. anc.) peuples de la Lybie, selon Strabon, l. XVII. & Etienne le géographe. Pomponius Mela, l. III. c. x. les met au-dessus des Nigrites, & les étend jusqu’à l’Ethiopie, Pline, l. V. c. viij. dit que ces peuples étoient Perses d’origine, & qu’ils accompagnerent Hercule lorsqu’il entreprit de passer dans le jardin des Hespérides. (D. J.)

PHASES, s. f. en Astronomie, se dit des diverses apparences de la lune, de vénus, de mercure & des autres planetes, ou des différentes manieres dont elles paroissent éclairées par le soleil. Voyez Planete.

Ce mot est formé du grec φαινω, je parois, je brille.

La variété des phases de la lune est fort remarquable, quelquefois elle croît, quelquefois elle décroît, quelquefois elle est courbée en forme de corne, puis paroît comme un demi cercle, ensuite elle paroît bossue, & reprend enfin une face circulaire pleine. Voyez Croissant, Bossu, Dichotomie, Faux, &c. Quant à la théorie des phases de la lune. Voyez Lune.

Pour celles de vénus, on n’y découvre aucune diversité à la vue simple. mais on y en remarque avec le télescope : Copernic prédit que les siecles à venir découvriroient que vénus éprouveroit les mêmes changemens que la lune : Galilée fut le premier qui accomplit cette prédiction, en dirigeant son télescope sur vénus, il observa que les phases de cette planete étoient semblables à celles de la lune, que tantôt elle étoit pleine, tantôt en croissant. Voyez Venus.

Mercure fait voir les mêmes apparences, toute la différence entre celles-ci & celles de la lune, est que quand ces planetes sont pleines, le soleil est entre elle & nous, au lieu que quand la lune est pleine, nous sommes entr’elle & le soleil. Voyez Mercure.

Saturne a embarassé long-tems les Astronomes par son étrange diversité de phases : Hevelius & d’autres

la trouvent 1°, monosphérique, 2°, trisphérique, 3°, sphérico-ansé, 4°, elliptico-ansé, 5°, pointu-sphérique. Huyghens crut d’abord que ces phases prétendues ne venoient pour la plûpart que de l’imperfection des télescopes de ces observateurs, cependant il a remarqué lui même des variétés réelles dans la figure de cette planete, & les a expliquées. Ce grand homme avec le secours des meilleurs télescopes y remarqua trois phases principales : savoir, le 16 Janvier 1656, cette planete lui parut ronde ; le 13 Octobre il la vit comme si elle avoit des bras ; & le 17 de Décembre 1657, comme si elle avoit des anses.

Il expliqua ce, différentes irrégularités par la supposition d’un anneau lumineux dont saturne est entouré, & publia sa découverte dans son système de saturne, imprimé parmi ses autres ouvrages dans les recueils qu’on en a faits ; les différentes positions de cet anneau par rapport à notre œil, occasionnent ces irrégularités apparentes. Voyez Saturne & Anneau.

On observe aussi beaucoup de changemens sur le disque de jupiter. Voyez Jupiter & Bandes. Chambers. (O)

Les phases de la lune prouvent que la surface de cette planete est sensiblement sphérique, car en la supposant sphérique, on trouve que la plus grande largeur de la phase doit être à-peu-près comme le sinus verse de l’élongation au soleil ; or, suivant les observations d’Hevelius, les largeurs des phases suivent à peu près ce rapport. Voyez mes Recherches sur le système du monde. IIe partie, pag. 263 & 264.

Phase, (Géog. anc.) 1°. Phasis, grand & célebre fleuve de l’Asie qui traverse la Colchide, aujourd’hui la Mingrelie, & se rend dans la mer Noire. Hérodote le donne pour la borne entre l’Asie & l’Europe. M. de Lisle s’est trompé en soutenant que le Phase étoit le même que l’Araxe. Les Turcs l’appellent Frachs, & les gens du pays le nomment Rione.

On l’appelloit anciennement Areturus, & il ne prit le nom de Phasis, que depuis qu’un jeune homme s’y fut précipité ; ce jeune homme étoit fils d’Apollon & d’Ocyroë, fille de l’Océan. Après avoir tué sa mere qu’il avoit surprise entre les bras d’un amant, les furies le tourmenterent à un tel point qu’il se jetta dans l’Areturus.

Mais il n’y a rien qui ait fait autant parler du Phasis que l’expédition des Argonautes, puisque tous les Poëtes qui ont chanté cette expédition, ont été obligés de se souvenir du grand fleuve qu’il fallut que les Argonautes remontassent pour se rendre maîtres de la Toison d’or.

Cette riviere étoit encore célébre, parce qu’on trouvoit sur ses bords la plante nommée leucophyllus, qui étant cueillie avec quelques précautions, avoit la vertu d’empêcher les femmes de tomber dans l’adultere. Voyez Leucophyllus.

Pour revenir à la topographie du Phase, le P. Archange Lamberti, rebat. de la Mingrelie, & Chardin, qui tous deux ont parcouru les bords de ce fleuve, depuis son embouchure jusqu’à sa source, disent qu’il court d’abord rapidement dans un lieu étroit, mais que dans la plaine, son cours qui est d’orient en occident, devient très-imperceptible. Il se décharge dans la mer par deux embouchures qui sont éloignées de sa source d’environ 90 milles, & qui sont séparées par une île que forme cette riviere.

On ne trouve aujourd’hui dans cette île du Phase, aucun vestige du temple de Rhea, qu’Arrien dit qu’on y voyoit de son tems. On cherche avec aussi peu de succès les ruines de l’ancienne Sébaste, qu’on dit avoir été bâtie à l’embouchure du Phase. Tout ce qu’on y remarque de conforme à ce que les anciens ont écrit de cet endroit de la mer Noire, c’est qu’il y a beaucoup de phaisans, & qu’ils sont plus gros &