à Rome, n’étoient pas si distinctes & si naturelles qu’elles paroissoient dans la forme du gouvernement de la Grande-Bretagne. Il y avoit cet abus dans le gouvernement de la plûpart des républiques anciennes, que le peuple étoit en même tems & juge & accusateur. Mais dans le gouvernement dont nous parlons, le corps législatif y étant composé de deux parties, l’une enchaîne l’autre par sa faculté naturelle d’empêcher, & toutes les deux sont liées par la puissance exécutrice, qui l’est elle-même par la puissance législative. Voyez-en le détail dans l’ouvrage de l’esprit des lois, l. II. ch. vj. C’est assez pour moi de remarquer en général que la liberté politique est perdue dans un état, si le même homme, ou le même corps des principaux, ou des nobles, ou du peuple exercent les trois puissances, celle de faire des lois, celle d’exécuter les résolutions publiques, & celle de juger les crimes ou les différends des particuliers. (D. J.)
Puissances de l’Europe, (Politiq.) c’est ainsi qu’on nomme les divers états souverains de cette partie du monde. L’intérêt forme leurs nœuds, l’intérêt les rompt. Aujourd’hui alliées, demain engagées dans une guerre funeste, dont les peuples payent le jeu. (D. J.)
Puissance, (Jurisprud.) est le pouvoir que quelqu’un a sur la personne ou sur les biens d’autrui.
Toute puissance sur la terre a été établie de Dieu pour maintenir chaque chose dans l’ordre où elle doit être.
On distingue deux sortes de puissances, la spirituelle & la temporelle ou séculiere.
La puissance spirituelle est celle qui s’étend sur les personnes relativement aux choses purement spirituelles, telles que les sacremens. Celles-ci appartiennent aux ministres de l’Eglise, lesquelles n’ont, pour se faire obéir, que les armes spirituelles. Voyez Censure, Église, Excommunication, Interdit.
La puissance ecclésiastique, est celle qui appartient à l’Eglise ; elle comprend, outre la puissance spirituelle, celle que les princes ont donnée à l’Eglise dans certaines matieres qui ont quelque rapport aux choses spirituelles. Voyez Jurisdiction ecclésiastique.
La puissance temporelle est celle qui s’étend sur les personnes & les biens relativement à des intérêts temporels.
On divise la puissance temporelle en puissance publique & particuliere de plusieurs especes ; savoir, la puissance paternelle & la puissance maritale, celle des tuteurs, curateurs, gardiens, & autres administrateurs ; celle des maîtres sur leurs esclaves & domestiques ; ces diverses sortes de puissances particulieres sont les plus anciennes de toutes : le gouvernement domestique étant aussi plus ancien que le gouvernement politique.
L’union de l’autorité avec les forces forme ce que l’on appelle puissance publique.
La puissance souveraine ou publique est celle qui a le gouvernement d’un état ; elle se subdivise en puissance monarchique, puissance aristocratique & puissance démocratique. Voyez Monarchique & Royaume, Aristocratie, Etat & Démocratie.
L’objet de toute puissance publique est de procurer le bien de l’état au-dedans & au-dehors.
Les droits de la puissance publique consistent dans tous les droits de souveraineté.
Dans tous les états, celui ou ceux en qui réside la puissance publique, ne pouvant seuls en remplir tous les devoirs, ils sont obligés de se décharger sur différentes personnes d’une partie des fonctions attachées à cette puissance : tous les ordres émanent médiatement ou immédiatement de la puissance publique ;
ainsi ceux qui exercent quelque portion du gouvernement militaire, ou de celui de justice ou de finances, sont autant de dépositaires d’une partie de la puissance publique, & qui agissent au nom de cette puissance.
Le devoir de tous ceux qui ont quelque part à la puissance publique, est de maintenir le bon ordre, de faire rendre à chacun ce qui lui appartient, d’empêcher les abus qui peuvent troubler l’harmonie politique. Voyez la loi 215. au digeste de verb. signific. Richerius, de potestate eccles. & politicâ ; les loix civiles, tome II. & les mots Etat, Gouvernement, Souverain, Souveraineté ; les mots Puissance maritale, paternelle, Royale, &c.
Puissance de fief, est le droit que le seigneur du fief dominant a sur le fief servant, tant pour le saisir féodalement, faute d’homme droit & devoirs non-faits & non-payés, que pour le répandre par droit de retrait féodal, en cas d’aliénation de la part du vassal. Voyez Fief, Retrait féodal, Saisie féodal, Seigneur, Vassal.
Puissance des maîtres sur leurs domestiques, est l’autorité que les maîtres ont sur ceux qui les servent pour leur commander ou défendre de faire quelque chose. Les domestiques doivent avoir de la soumission & du respect pour leur maître, & ceux qui s’écartent du respect qu’ils leur doivent sont punis de la peine du carcan, ou autres peines plus séveres, selon la qualité du délit : les maîtres ne doivent point maltraiter leurs domestiques ; lorsqu’ils en reçoivent quelque sujet de mécontentement, ils ont seulement le droit de leur faire une réprimande, de leur ordonner de faire leur devoir ; ils peuvent aussi les congédier quand bon leur semble, même rendre plainte contr’eux, s’il y échet ; mais ils ne peuvent pas se faire justice eux-mêmes.
Les domestiques sont aussi libres de quitter leurs maîtres, lorsqu’ils le jugent à-propos, sauf les dommages intérêts du maître, au cas qu’ils se fussent loués pour un certain tems, & que par l’inexécution de la convention, le maître souffrît un dommage réel. Voyez le réglement du parlement de Rouen du 26 Juin 1722. rapporté dans les pieces justificatives du code rural, tome II.
La puissance des maîtres sur les esclaves est plus étendue que celles qu’ils ont sur de simples domestiques. Voyez ce qui en a été dit ci-devant aux mots Affranchissement, Esclure, Manumission
Puissance maritale, est celle que le mari a sur la personne, & les biens de sa femme.
La femme est naturellement & de droit divin dans la dépendance de l’homme : sub viri potestate eris, & ipse dominabitur tui. Genèse, c. iij. vers. 16.
Cette dépendance étoit telle chez les Romains, que la fille qui n’étoit plus sous la puissance paternelle & qui n’étoit pas encore mariée, demeuroit toujours sous la tutelle, soit de ses proches, soit des tuteurs, qui lui avoient été donnés par le juge ; telle étoit la disposition de la loi des douze tables.
La loi attilia ordonnoit que le préteur & les tribuns donnassent des tuteurs aux femmes & aux pupilles.
Mais il y avoit cette différence entre les tuteurs des pupilles & ceux des filles ou femmes puberes, que les premiers avoient la gestion des biens, au lieu que les tuteurs des femmes interposoient seulement leur autorité.
Or, de même que la femme non-mariée étoit en la puissance d’un tuteur, la femme mariée étoit en la puissance de son mari ; cela s’appelloit être en la main du mari ; & cette puissance maritale s’établissoit en la forme indiquée par Ulpien, tit. de his qui in manu sunt, in manum convenire, venir en la main du mari.
La maniere la plus solemnelle & la plus parfaite de