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fondée la manœuvre par laquelle on le sépare dans les fabriques de salpêtre. Voyez Nitre.

La forme des crystaux primitifs du sel marin est cubique ; ces cubes primitifs se disposent quelquefois de maniere à former des cubes plus considérables, tantôt parfaits, tantôt tronqués ; quelquefois exactement pleins, d’autres fois vuides ou creux dans quelqu’un de leurs côtés. Ce sont encore dans les évaporations bien ménagées des pyramides creuses & renversées, & plus ou moins aiguës, plus ou moins évasées. Voyez Crystalisation, & le mém. de M. Rouelle, acad. royale des Scienc. ann. 1744.

Le sel marin s’humecte sensiblement à l’air ; mais c’est principalement, si même ce n’est point absolument, à raison d’un peu d’eau mere qui leur reste presque toujours mêlée, & que je crois infecter son eau de crystalisation.

Le sel marin verdit un peu le sirop de violettes. Il est encore vraissemblable que c’est à raison de cette eau mere. Voyez Violettes, Teinture de.

Le sel marin décrepite au feu. Voyez Décrepitation.

Le sel marin jetté sur des charbons presque éteints, les ranime, en renouvelle l’embrasement, & produit même de la flamme, selon une observation de Stahl, qui en tire un merveilleux parti pour prouver l’influence de l’eau dans l’affaire de l’inflammation, dans la production de la flamme. Voyez Flamme. M. Pott, qui a rapporté fort au long dans sa Dissertation sur le sel commun, les essais de divers chimistes, & les siens sur le sel marin, traité avec les charbons, tant dans les vaisseaux fermés qu’à l’air libre, & qui a obtenu quelques légeres émanations & apparences d’une matiere phosphorique, semble insinuer que la production d’une pareille matiere peut bien contribuer au phénomene dont nous venons de parler. Cela peut être absolument, mais cela ne paroît point nécessaire ; l’eau dégagée & mise en vapeur par la décrépitation, en paroît une cause très suffisante.

Au reste, il faut se rappeller encore ici que le phosphore par excellence, le phosphore de Kunkel ou de Boyle, n’est point dû, au moins évidemment, à la combinaison de l’acide marin & du phlogistique, mais à celle du phlogistique & de l’acide microcosmique, dont l’analogie & la différence avec l’acide marin ne sont point encore constatées.

Le sel marin entre en fusion à un assez foible degré de chaleur ; il ne paroît pourtant pas qu’on puisse rapporter à la liquidité aqueuse celle qu’il contracte par l’action du feu. Voyez Liquidité, Chimie. Car 1°. Le degré de chaleur requis pour cette fluidification, est bien supérieur, quoique foible, à celui qui fait couler les sels très-aqueux, comme le sel de Glauber, le nitre, &c. 2°. La décrépitation qui précede la fusion, a dissipé l’eau nécessaire pour faire subir à un sel la liquidité aqueuse.

Il existe dans l’art une ancienne opinion sur la convertibilité du sel marin en nitre. Cette opinion a pris un nouveau crédit dans ces derniers tems ; on a même, dit-on, tenté cette transmutation par l’autorité du ministere, & sous la direction des plus habiles chimistes. Le succès de ces tentatives, si elles ont été réellement exécutées, n’a pas été publié ; & il a couru d’ailleurs quelques descriptions de procédés qui ne promettent rien aux vrais connoisseurs. V. Salpêtre.

On connoît assez la qualité antiseptique du sel marin, & l’usage qu’on en fait en conséquence pour assaisonner les viandes, & les préserver de la putréfaction. Il est à remarquer cependant qu’il doit être employé à haute dose ; car si on applique aux matieres animales putrescibles, une petite quantité de sel marin, non seulement il ne les préserve pas de la corruption, mais au contraire il en accélere la corrup-

tion. Beker avoit déjà fait mention de ce fait singulier,

que les expériences de M. Pringle confirment ; & qu’on auroit dû déduire il y a long-tems des observations domestiques les plus connues, si les savans savoient assez observer autour de soi. En effet, rien n’est si connu que cette observation, savoir qu’un bouillon non salé se conserve mieux & plus longtems, que celui auquel on a ajouté la dose ordinaire de sel ; qu’on peut garder pendant assez long-tems un ragoût à-demi fait, pourvû qu’on n’y ait pas mis le sel avant d’en interrompre la cuite.

C’est comme assaisonnant qu’on l’emploie aussi en Pharmacie, pour conserver certaines substances végétales, comme roses, &c. selon un usage établi dans les boutiques d’Allemagne. Voyez Conservation, Pharmacie. D’ailleurs plusieurs chimistes, depuis Paracelse jusqu’à Fr. Hoffman, ont recommandé de digérer dans une eau chargée de sel plusieurs substances végétales, dont on se proposoit de retirer par la distillation, des huiles essentielles. Il est assez généralement convenu qu’on obtient par cette méthode, des huiles essentielles plus limpides ; mais 1°. le fait même quoique avoué, mais sans examen contradictoire, n’est pas incontestable ; 2°. le sel marin a-t-il opéré matériellement, dans cette espece de dépuration ou rectification, ou n’a-t-il que suspendu, ou au contraire favorisé un certain mouvement de fermentation, auquel elle peut être dûe uniquement ? c’est ce qui n’est point décidé.

Le sel marin est une des matieres salines qui opere le plus efficacement le refroidissement des liqueurs dans lesquelles on le dissout. Voyez Refroidissement artificiel.

Le sel marin est employé comme fondant dans le traitement de plusieurs substances minérales ; il entre dans la composition de plusieurs flux. Voyez Flux.

Il est employé aussi dans les cemens : Voyez Cementation & Cement.

Il entre dans la composition de certaines préparations d’antimoine assez inutiles, & qui sont connues sous le nom de régules médicamenteux. Voyez sous le mot Antimoine.

M. Pott recommande de le faire entrer dans les mélanges de terres, dont on veut faire les vaisseaux qui acquierent, dans la cuite, une espece de vitrification, & qui deviennent propres par-là, à la distillation des acides minéraux. Cette addition peut être très-bonne ; & l’on doit en croire d’autant plus volontiers ce célebre chimiste, qu’il a plus qu’aucun autre, travaillé sur ce sujet, sur lequel il a publié des découvertes très-précieuses. Cependant nous avons en France d’excellens vaisseaux, des vaisseaux éminemment propres à contenir & à distiller les esprits les plus corrosifs, & dans la composition desquels n’entre point le sel marin. N’importe, le mélange indiqué par M. Pott fournit une richesse de plus.

On a sur le degré d’adhésion de l’acide marin à sa base, les observations suivantes.

Premierement, ceux qui ont travaillé avec plus de soin à rendre l’eau de mer potable par la distillation, tels que Boyle & M. Hales, ont observé qu’il s’élevoit avec l’eau, un peu d’acide dans un certain tems de cette distillation. Voyez Mer, eau de.

De l’eau commune cohobée plusieurs fois sur du sel marin, contracte une légere acidité.

Plusieurs eaux thermales salées, rougissent foiblement la teinture de tournesol ; leur chaleur naturelle équivaut à la digestion qui opere le dégagement d’un peu d’acide dans les expériences précédentes.

Le sel marin concret, étant exposé à un feu violent & à l’air libre, c’est-à-dire à la calcination, se volatilise, ou du moins se dissipe, soit sous sa forme immuée de sel marin, soit sous celle de produits inobservés jusqu’à présent ; mais il s’alkalise aussi en par-