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on sait, est un objet d’aversion pour la plûpart des oiseaux. Pour le rendre plus propre à exciter la curiosité du milan qu’on veut attirer, on peut lui ajouter une queue de renard, qui le fait paroître encore plus difforme. Le milan s’approche de cet objet extraordinaire, & lorsqu’il est à une distance convenable, on jette les oiseaux qui doivent le voler : ces oiseaux sont ordinairement des sacres & des gerfauts. Lorsque le milan se voit attaqué, il s’éleve & monte dans toutes les hauteurs ; ses ennemis font aussi tous leurs efforts pour gagner le dessus. La scène du combat se passe alors dans une région de l’air si haute, que souvent les yeux ont peine à y atteindre.

Le vol du héron se passe à-peu-près de la même maniere que celui du milan ; l’un & l’autre sont dangereux pour les oiseaux qui, dans cette chasse, courent quelquefois risque de la vie : ces deux vols ont une primauté d’ordre que leur donnent leur rareté, la force des combattans, & le mérite de la difficulté vaincue.

Le plus fort des oiseaux de proie employé à la volerie, est sans doute le gerfaut : il joint à la noblesse & à la force, la vîtesse & l’agilité du vol ; c’est celui dont on se sert pour le lievre ; cependant il est rare qu’on prenne des lievres avec des gerfauts sans leur donner quelque secours ; ordinairement, avec deux gerfauts qu’on jette, on lâche un mâtin destiné à les aider ; les oiseaux accoutumés à voler ensemble, frappent le lievre tour-à-tour avec leurs mains, le tuent quelquefois, mais plus souvent l’étourdissent & le font tomber : la course du lievre étant ainsi retardée, le chien le prend aisément, & les gerfauts le prennent conjointement avec lui.

Le vol pour corneille a moins de noblesse & de difficultés que ceux pour le milan & le héron ; mais c’est un des plus agréables ; il est souvent varié dans ses circonstances : il se passe en partie plus près des yeux, & il oblige quelquefois les chasseurs à un mouvement qui rend la chasse plus piquante. La corneille est un des ciseaux qu’on attire presque sûrement avec le duc, & lorsqu’on la juge assez près, on jette les oiseaux : dès qu’elle se sent attaquée, elle s’éleve, & monte même à une grande hauteur : ce sont des faucons qui la volent ; ils cherchent à gagner le dessus ; lorsque la corneille s’apperçoit qu’elle va perdre son avantage, on la voit descendre avec une vîtesse incroyable, & se jetter dans l’arbre qu’elle trouve le plus à portée : alors les faucons restent à planer au dessus : la corneille n’auroit plus à les craindre, si les fauconniers n’alloient pas au secours de leurs oiseaux, mais ils vont à l’arbre, ils forcent par leurs cris la corneille à déserter sa retraite, & à courir de nouveaux dangers ; elle ne repart qu’avec peine, elle tente de nouveau & à diverses reprises les ressources de la vîtesse & de la ruse, & si elle succombe à la fin, ce n’est qu’après avoir mis plus d’une fois l’une & l’autre en usage pour sa défense.

Le vol pour pie est aussi vif que celui pour corneille, mais il n’a pas autant de noblesse à beaucoup près, parce que la pie n’a de ressource que celle de la foiblesse. Ce vol ne se fait guere comme ceux dont nous avons parlé de poing en fort, c’est-à-dire que les oiseaux n’attaquent pas en partant du poing ; ordinairement on les jette amont, parce qu’on attaque la pie lorsqu’elle est dans un arbre. Les oiseaux étant jettés, & s’étant élevés à une certaine hauteur, sont guidés par la voix du fauconnier, & rentrent au mouvement du leurre. Lorsqu’on les juge à portée d’attaquer, on se presse de faire partir la pie, qui ne cherche à échapper qu’en gagnant les arbres les plus voisins : souvent elle est prise au passage, mais quand elle n’a été que chargée, on a beaucoup de peine à la faire repartir ; sa frayeur est telle qu’elle se laisse quelquefois prendre par le chasseur plutôt que de

s’exposer à la descente de l’oiseau qu’elle redoute.

On jette amont de la même maniere, lorsqu’on vole pour champs & pour riviere, c’est-à-dire pour la perdrix ou le faisan, & pour le canard. Pour la perdrix on jette amont un ou deux faucons ; pour le faisan deux faucons ou un gerfaut : on laisse monter les oiseaux, & lorsqu’ils planent dans le plus haut des airs, le fauconnier aidé d’un chien, fait partir le gibier sur lequel l’oiseau descend. Pour le canard, on met amont jusqu’à trois faucons, & on se sert aussi de chiens pour le faire partir, & l’obliger de voler lorsque la frayeur qu’il a des faucons l’a rendu dans l’eau.

Outre ces vols, on dresse aussi pour prendre des cailles, des alouettes, des merles, de petits oiseaux de proie tels que l’émerillon, le hobereau, l’épervier ; mais ce dernier n’appartient pas à la fauconnerie proprement dite ; il est ainsi que l’autour & son tiercelet, du ressort de l’autourserie : les premiers sont de ceux qu’on nomme oiseaux de leurre ; les autres s’appellent oiseaux de poing, parce que sans être leurrés ils reviennent sur le poing.

On emploie à-peu-près les mêmes moyens pour apprivoiser & dresser les uns & les autres ; mais on porte presque toujours à la chasse les derniers sans chaperon ; ils sont plus prompts à partir du poing que les autres : on ne les jette point amont ; ils ne volent que de poing en fort, & font leur prise d’un seul trait d’aîle : par cette raison ils se fatiguent moins, & ils peuvent prendre plus de gibier : ainsi la chasse en est plus utile si elle est moins noble & moins agréable. On dit que le vol du faucon appartient principalement aux princes, & que celui de l’autour convient mieux aux gentilhommes. Article de M. Leroi.

Vol, en terme de Blason, se dit de deux aîles posées dos à dos dans les armoiries, comme étant tout ce qui fait le vol d’un oiseau : lorsqu’il n’y a qu’une aîle seule, on l’appelle demi-vol ; & quand il y en a trois, trois demi-vols. On appelle vol banneret celui qu’en met au cimier, & qui est fait en banniere, ayant le dessus coupé & quarré, comme celui des anciens chevaliers.

VOLAGE, adj. (Gram.) inconstant, léger, changeant : tous ces mots sont synonymes ; ce sont des métaphores empruntées de différens objets ; léger, des corps tels que les plumes, qui n’ayant pas assez de masse, eu égard à leur surface, sont détournées & emportées çà & là à chaque instant de leur chute ; changeant, de la surface de la terre ou du ciel qui n’est pas un moment la même ; inconstant, de l’atmosphere de l’air, & des vents : volage, des oiseaux : on dit des enfans qu’ils ont l’esprit & le caractere volage ; d’une femme qui change souvent d’objet, qu’elle est volage.

Volage, appel, (Jurisprud.) on appelloit ainsi autrefois ce que nous appellons aujourd’hui fol appel. Voyez Amende & Appel, Fol appel.

Volages, rentes, ou rentes volantes. Voyez Rente volage ou volante. (A)

VOLAILLE, signifie en général la même chose qu’oiseau, Voyez Oiseau.

Mais en prenant ce mot dans un sens plus particulier, il s’applique à ce que l’on appelle volaille, ou à cette espece de gros oiseaux domestiques ou sauvages que l’on éleve, ou que l’on poursuit à la chasse, pour être servis sur nos tables, comme les coqs d’inde, les oies, les coqs, les poules, & les canards sauvages ou domestiques, les faisans, les perdrix, les pigeons, les bécassines, &c. Voyez Chasse aux oiseaux.

Les oiseaux domestiques ; ou la volaille, est une partie nécessaire du fonds d’une ferme, elle rend de fort bons services, & il revient un profit très-con-