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différence troisieme ou du troisieme ordre, & ainsi des autres.

Différence, (Medecine.) διαφορὰ ; ce terme est employé dans la théorie de la Medecine, pour exprimer la connoissance par laquelle on distingue une maniere d’être en santé d’une autre, une maniere d’être malade d’une autre.

Les actions dans lesquelles consiste l’exercice des fonctions de l’homme sain, sont différentes entr’elles ; par conséquent il y a aussi de la différence entre les lésions de ces fonctions.

On ne doit pas rechercher ces distinctions jusqu’à la subtilité ; mais il est utile de faire autant de classes de maladies, & de méthodes de les traiter, qu’il y a de classes de fonctions dans les différentes parties du corps humain considéré dans l’état naturel ; qu’il y a de différences dans cet état naturel, respectivement à l’âge, au sexe, au tempérament, à la saison, au climat.

Ces différences, soit dans la santé soit dans la maladie, sont ou essentielles ou accidentelles à l’individu dans lequel on l’observe. Voyez Santé, Maladie, Physiologie, Pathologie. (d)

DIFFÉRENTIEL, adj. On appelle dans la haute Géométrie, quantité différentielle ou simplement différentielle, une quantité infiniment petite, ou moindre que toute grandeur assignable. Voyez Quantité & Infini.

On l’appelle différentielle ou quantité différentielle, parce qu’on la considere ordinairement comme la différence infiniment petite de deux quantités finies, dont l’une surpasse l’autre infiniment peu. Newton & les Anglois l’appellent fluxion, à cause qu’ils la considerent comme l’accroissement momentané d’une quantité. Voyez Fluxion, &c. Leibnitz & d’autres l’appellent aussi une quantité infiniment petite.

Calcul différentiel ; c’est la maniere de différentier les quantités, c’est-à-dire de trouver la différence infiniment petite d’une quantité finie variable.

Cette méthode est une des plus belles & des plus fécondes de toutes les Mathématiques ; M. Leibnitz qui l’a publiée le premier, l’appelle calcul différentiel, en considérant les grandeurs infiniment petites comme les différences des quantités finies : c’est pour quoi il les exprime par la lettre d qu’il met au-devant de la quantité différentiée ; ainsi la différentielle de x est exprimée par dx, celle de y par dy, &c.

M. Newton appelle le calcul différentiel, méthode des fluxions, parce qu’il prend, comme on l’a dit, les quantités infiniment petites pour des fluxions ou des accroissemens momentanés. Il considere, par exemple, une ligne comme engendrée par la fluxion d’un point, une surface par la fluxion d’une ligne, un solide par la fluxion d’une surface ; & au lieu de la lettre d, il marque les fluxions par un point mis au-dessus de la grandeur différentiée. Par exemple, pour la fluxion de x, il écrit ẋ ; pour celle de y, ẏ, &c. c’est ce qui fait la seule différence entre le calcul différentiel & la méthode des fluxions. V. Fluxion.

On peut réduire toutes les regles du calcul différentiel à celles-ci.

1°. La différence de la somme de plusieurs quantités est égale à la somme de leurs différences. Ainsi d (x + y + z) = d x + d y + d z.

2°. La différence de xy est y d x + x d y.

3°. La différence de xm, m étant un nombre positif & entier, est m xm-1 d x.

Par ces trois regles, il n’y a point de quantité qu’on ne puisse différentier. On fera, par exemple, . Voyez Exposant. Donc la différence (regle 2) est (regle 3.) . La différentielle de est

. Car soit , on a & & . De même  ; donc la différence est , & ainsi des autres.

Les trois regles ci-dessus sont démontrées d’une maniere fort simple dans une infinité d’ouvrages, & sur-tout dans la premiere section de l’analyse des Infiniment petits de M. de l’Hopital, à laquelle nous renvoyons. Il manque à cette section le calcul différentiel des quantités logarithmiques & exponentielles, qu’on peut voir dans le I. volume des œuvres de Jean Bernoulli, & dans la I. partie du traité du calcul intégral de M. de Bougainville le jeune. On peut consulter ces ouvrages qui sont entre les mains de tout le monde. Voyez Exponentiel. Ce qu’il nous importe le plus de traiter ici, c’est la métaphysique du calcul différentiel.

Cette métaphysique dont on a tant écrit, est encore plus importante, & peut-être plus difficile à développer que les regles mêmes de ce calcul : plusieurs géometres, entr’autres M. Rolle, ne pouvant admettre la supposition que l’on y fait de grandeurs infiniment petites, l’ont rejettée entierement, & ont prétendu que le principe étoit fautif & capable d’induire en erreur. Mais quand on fait attention que toutes les vérités que l’on découvre par le secours de la Géométrie ordinaire, se découvrent de même & avec beaucoup plus de facilité par le secours du calcul différentiel, on ne peut s’empêcher de conclure que ce calcul fournissant des méthodes sûres, simples & exactes, les principes dont il dépend doivent aussi être simples & certains.

M. Leibnitz, embarrassé des objections qu’il sentoit qu’on pouvoit faire sur les quantités infiniment petites, telles que les considere le calcul différentiel, a mieux aimé réduire ses infiniment petits à n’être que des incomparables, ce qui ruineroit l’exactitude géométrique des calculs ; & de quel poids, dit M. de Fontenelle, ne doit pas être contre l’invention l’autorité de l’inventeur ? D’autres, comme M. Nieuwentit, admettoient seulement les différentielles du premier ordre, & rejettoient toutes celles des ordres plus élevés : ce qui n’a aucun fondement : car imaginant dans un cercle une corde infiniment petite du premier ordre, l’abscisse ou sinus verse correspondant est infiniment petit du second ; & si la corde est infiniment petite du second, l’abscisse est infiniment petite du quatrieme, &c. Cela se démontre aisément par la Géométrie élémentaire, puisque le diametre d’un cercle qui est fini, est toûjours à la corde, comme la corde est à l’abscisse correspondante. D’où l’on voit que les infiniment petits du premier ordre étant une fois admis, tous les autres en dérivent nécessairement. Ce que nous disons ici n’est que pour faire voir, qu’en admettant les infiniment petits du premier ordre, on doit admettre ceux de tous les autres à l’infini ; car on peut du reste se passer très-aisément de toute cette métaphysique de l’infini dans le calcul différentiel, comme on le verra plus bas.

M. Newton est parti d’un autre principe ; & l’on peut dire que la métaphysique de ce grand géometre sur le calcul des fluxions est très-exacte & très-lumineuse, quoiqu’il se soit contenté de la faire entre-voir.

Il n’a jamais regardé le calcul différentiel comme le calcul des quantités infiniment petites, mais comme la méthode des premieres & dernieres raisons, c’est-à-dire la méthode de trouver les limites des rap-