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de petites tumeurs de différentes especes, de la couleur des tégumens, ou d’une couleur différente.

Puisque les exanthemes, proprement dits, paroissent essentiellement sur la peau ; il s’ensuit donc que la matiere morbifique, qui les forme, a son siége dans les vaisseaux cutanés, & que cette matiere est de nature à ne pas y couler librement, & à y faire naître conséquemment des obstructions, soit parce que le fluide, qui est propre à ces vaisseaux, a trop de consistance, pêche par épaississement ; soit parce qu’il y a pénétré par erreur de lieu, errore loci, une humeur plus grossiere qui en a dilaté, forcé les orifices, & en a engorgé le canal trop étroit, pour les recevoir dans l’état naturel (voyez Erreur de lieu) ; soit parce qu’ils ont été resserrés, retrécis par quelque cause que ce soit : ces différentes causes, propres à produire des exanthemes, peuvent être internes & externes ; ainsi après de grandes sueurs, qui ont fait perdre au sang ses parties les plus fluides, il se forme des pustules prurigineuses par des humeurs privées de véhicule, épaissies, arrêtées dans les vaisseaux cutanés : il se forme des taches rouges ou pourprées, sur la surface du corps, lorsque le sang a perdu sa consistance au point que ses globules rouges puissent pénétrer dans les vaisseaux secrétoires de la peau, où ils ne pourroient pas être admis, lorsque le fluide a sa consistance actuelle : les matieres acres, qui sont portées dans les vaisseaux cutanés, ou qui sont appliquées au-dehors sur les tégumens, peuvent aussi produire des exanthemes en causant des constrictions, des irritations dans les tuniques de ces vaisseaux, qui en diminuent la capacité, y arrêtent les humeurs : dans ces trois sortes de cas, il y a toûjours défaut de méabilité dans les fluides, soit par une mauvaise qualité qui leur est propre, soit par l’état contre nature des solides qui les contiennent, soit par le concours du vice des parties contenues & contenantes. Voyez Tache, Pustule, Gale, &c.

Les exanthemes fébriles sont ceux qui méritent le plus d’attention, parce qu’ils sont le plus souvent formés d’un dépôt de matiere critique, que la fievre porte dans les vaisseaux de la peau : cette matiere s’y arrête & les obstrue, parce qu’elle n’est pas assez atténuée pour couler librement dans toute leur étendue : il conste, par des observations faites sur des cadavres, qu’il se fait aussi quelquefois de semblables dépôts critiques, qui forment des especes d’exanthemes sur la surface des parties internes ; dans ces cas la fievre ne se termine pas par le retour de la santé ni par la mort, mais elle dégénere en une autre maladie : il est évident par conséquent, que la cause efficiente de cette éruption exanthémateuse, est la nature ou la force de la vie, qui fait circuler les humeurs dans les vaisseaux, qui sépare de la masse les fluides viciés, & qui les porte dans des vaisseaux proportionnés à leur densité, à leur mobilité, & au degré de mouvement avec lesquels ils se présentent à leur orifice ; ce qui s’opere conséquemment par un méchanisme semblable à celui des secrétions : les exanthemes sont différens, selon la différente nature de la matiere morbifique, quelquefois ils sont rouges, parce qu’ils sont formés par un sang inflammatoire, épais, qui engorge les vaisseaux cutanés, & d’autres fois ils sont jaunâtres ou de couleur de la peau, parce que la matiere de l’engorgement est un fluide séreux ou lymphatique, qui pêche de même par l’épaississement : c’est aussi de ces différences que les fievres exanthémateuses prennent leurs différens noms ; telles sont les scarlatines, les pétéchiales rouges, pourprées, les miliaires, la rougeole, la petite vérole. Voyez chacun de ces mots en son lieu, sur-tout le dernier, & l’article de la Fievre éruptoire. (d)

EXARQUE, s. m. (Hist. ecclés.) titre de dignité ecclésiastique dans les premiers siecles de l’Eglise.

On donnoit le nom d’exarque à l’évêque de la principale ville d’un diocèse, c’est-à-dire comme ce mot le signifioit alors, de plusieurs provinces ecclésiastiques ; c’est ce que les Latins appellent depuis primat, & les Grecs patriarche. Voyez Patriarche & Primat.

Il y avoit en Orient autant d’exarques que de diocèses : le premier étoit celui d’Asie, & résidoit à Ephese. Polycrate évêque de cette ville présida au concile d’Asie, tenu au sujet de la question de la pâque ; ce qui montre que l’exarchat de cette ville n’étoit pas fondé sur des conditions purement humaines.

Il ne nous reste pas de preuves si éclatantes dans l’antiquité de deux autres exarchats, Césarée en Cappadoce & Héraclée en Thrace. Nous voyons seulement que Firmilien évêque de Césarée, avoit attiré un grand nombre d’évêques de son parti contre le pape Etienne, dans la dispute sur la rébaptisation des hérétiques.

Le patriarche d’Antioche ayant travaillé long-tems à diminuer l’autorité des exarques, la fit abolir dans le concile de Chalcédoine. Il ne leur resta que la qualité d’exarques, avec un rang de distinction après les cinq patriarches, mais sans aucune jurisdiction sur les métropolitains de leur diocese. L’évêque de Constantinople s’empara aussi de la jurisdiction des exarques du Pont & de l’asie : ce dernier exarchat fut, à la vérité, rétabli par un édit du tyran Basilic ; mais l’empereur Zénon, presqu’aussitôt après, rendit au patriarche de Constantinople les droits dont il joüissoit sur cette province. Thomass. discipl. ecclés. part. j. liv. I. chap. viij.

Bingham, orig. ecclés. tom. I. liv. II. ch. vij. §. 2. remarque qu’on appelloit autrefois les patriarches exarques d’un diocèse, c’est-à-dire d’un grand gouvernement de la ville capitale duquel ils étoient évêques, & qu’on donnoit aux métropolitains le titre d’exarques d’une province ; d’où il conclut que l’exarque étoit la même chose que le patriarche, ce qui est vrai dans le fond, pour les tems qui ont précédé le concile de Chalcédoine ; mais depuis, le nom d’exarque n’a plus été qu’un vain titre, leurs honneurs & leur jurisdiction ayant été attribués aux patriarches.

Le nom d’exarque est encore usité parmi les Grecs modernes, pour signifier un député, un délégué ; par exemple, ceux que le patriarche envoye en diverses provinces, pour voir si l’on y a observé les canons ecclésiastiques, si les évêques font leur devoir, & si les moines sont dans la regle. Goar, in not. ad offic. Constantinop. (G)

Exarque, s. m. (Hist. anc.) dans l’antiquité étoit un nom que donnoient les empereurs d’Orient, à certains officiers qu’ils envoyoient en Italie en qualité de lieutenans ou plûtôt de préfets, pour détendre la partie de l’Italie qui étoit encore sous leur obéissance, particulierement la ville de Ravenne, contre les Lombards qui se sont rendus maîtres de la plus grande partie de l’Italie.

L’exarque faisoit sa résidence à Ravenne ; cette ville avec celle de Rome étoit tout ce qui restoit aux empereurs en Italie.

Le patricien Boethius, connu par son traité de consolatione philosophiæ, fut le premier exarque. Il fut nommé en 568 par Justin le jeune. Les exarques subsisterent pendant 185 ans, & finirent à Eutychius, sous l’exarquat duquel Astulphe ou Astolphe, roi de de Lombardie, s’empara de la ville de Ravenne.

Le pere Papebroch, dans son propylœum ad acta sanct. Maii, a fait une dissertation sur le pouvoir & les fonctions de l’exarque d’Italie à l’élection & à l’ordination du pape.