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fievres humorales que les anciens appelloient synoques putrides, & qui se terminent par coction purulente. Voyez Synoque. 3°. Les fievres que les mêmes anciens nommoient bilieuses ou ardentes, parce qu’étant accompagnées de chaleur brûlante, & d’une soif intolérable, ils jugeoient qu’elles dépendoient plus d’une bile vicieuse que du sang corrompu. Voyez Fievre ardente.

Mais les fievres véritablement & régulierement critiques, sont celles qui procurent une coction purulente, dont les progrès sont marqués par des signes qui annoncent sûrement, & à jour préfix, des évacuations salubres. Toute fievre continue, qui ne se termine pas avant la quatrieme exacerbation, ou avant le septieme jour, dont la cause n’est pas indomtable, & qui n’est pas compliquée à d’autres maladies ou accidens, capables d’empêcher ses propres effets, se guérit par cette coction & par ces évacuations critiques.

Fievre dépuratoire, est celle dont la nature tempere tellement les symptomes, qu’elle chasse la matiere fébrile bien préparée dans un certain tems, soit par transpiration ou par coction.

On peut compter trois sortes de fievres dépuratoires, 1°. les fievres simples dépuratoires par elles-mêmes, comme la fievre éphémere, la fievre synoque sanguine ou non putride, &c. 2°. les fievres dépuratoires qui cessent heureusement par les évacuations sans coction ni crise ; 3°. les fievres dépuratoires dont la cause seroit indomtable par la coction, & incapable d’expulsion par les excrétoires naturels, & qui se guérissent par des dépôts, par des eruptions extérieures, où de telles causes trouvent des issues qui en procurent l’évacuation. Cette voie est même ordinaire dans plusieurs maladies qui se terminent par des éruptions à la peau ; telles sont les fievres scarlatines, la petite vérole discrete, la rougeole bénigne, &c. Mais dans d’autres maladies cette voie est fort incertaine, comme lorsque les dépôts ou les éruptions arrivent irrégulierement aux parties intérieures, ou aux parties extérieures, ou en même tems aux unes & aux autres ; telles sont les pustules ichoreuses, & les dépôts sanieux dans les petites véroles confluentes.

Fievre diarrhétique, voyez Fievre cathartique.

Fievre dyssentérique, febris dyssenterica : on nomme fievres dyssentériques, celles qui sont jointes à des tranchées douloureuses dans le bas-ventre, suivies de déjections muqueuses & sanglantes avec exulcération des intestins ; la dyssenterie est l’affection morbifique qui a donné le nom à cette fievre.

Cause prochaine. Une matiere active, acre, tenace, caustique, peut-être analogique dans ses effets, avec les parties sur lesquelles elle agit, transportée dans les couloirs des intestins qu’elle irrite & qu’elle ronge, produit ce genre de fievre qu’on voit fréquemment dans les constitutions épidémiques.

Ses signes. Alors la fievre dyssentérique se fait connoître par un frisson suivi de chaleur, de vives douleurs d’entrailles, de tenesme, de déjections glaireuses & sanguinolentes, de soif, de dégoût, de langueur, de défaillances, de sueurs froides, & de l’exolution des forces.

Prognostics. Les pellicules d’intestins qu’on trouve dans les selles, l’inflammation à la langue, les aphthes dans la gorge, les évacuations qu’on fait sans s’en appercevoir, le délire, les convulsions, le froid des extrémités, & le hoquet qui survient alors, annoncent une fin prochaine de cette fievre, par la destruction de la machine.

Cure. La méthode curative doit tendre à diminuer l’inflammation, corriger l’acrimonie de la matiere caustique, évacuer les humeurs morbifiques, adou-

cir les entrailles, consolider l’exulcération, & arrêter

le flux de ventre invétéré.

On remplit ces indications par la saignée, les vomitifs, les purgatifs, entre lesquels l’ipécacuanha, la rhubarbe, & le simarouba sont les principaux ; il faut les donner à petites doses, & en calmer les effets par des parégoriques. Les lavemens seront composés de choses grasses & onctueuses, comme de décoctions de mauve, de guimauve, ou de bouillons de tripes : on se servira des mêmes décoctions en fomentations sur le bas-ventre ; on usera pour boisson & alimens d’eau de poulet, de ris, d’orge, ou de lait de chevre coupé ; les tisannes seront émulsionnées, & quelquefois acidulées. Enfin si les astringens deviennent nécessaires, on les employera prudemment, graduellement, & on y joindra le laudanum liquide. Consultez ici l’article Dyssenterie, & sur la dyssenterie, consultez Degnerus.

La meilleure cure pophylactique dans les épidémies qui produisent cette fievre d’une maniere fatale, est de fuir la contagion, se tenir le ventre libre, user de régime & d’alimens adoucissans, éviter de respirer les exhalaisons des excrémens.

Observation. La fievre dyssentérique est une des plus fréquentes & des plus cruelles épidémies des camps ; on en trouvera la diagnose, la prognose, & le traitement dans l’ouvrage anglois du docteur Pringle, sur les maladies d’armées. Je remarquerai seulement, que les principaux moyens pour en arrêter le progrès, sont de décharger les hôpitaux autant qu’il est possible, de renouveller continuellement l’air des infirmeries par un ventilateur, d’en balayer toutes les ordures avec grand soin, de remettre les malades dans des églises, dans des baraques, des maisons ruinées, où ils ne communiquent point ensemble, de ne point confiner au lit ceux qui en peuvent sortir, de tenir très-propres leurs chambres, leurs hardes, leurs bassins, & tous les ustensiles dont ils se servent ; enfin sur toutes choses, de couvrir chaque jour les privés d’une nouvelle terre ; car c’est principalement de l’exhalaison putride des latrines publiques des camps, que dépend la contagion & la propagation de ce mal funeste.

Fievre endémique, ainsi dite de ἐν, & δῆμος, peuple. Les fievres endémiques sont celles qui regnent tous les ans avec des symptomes assez semblables dans un même pays, & qui y sont plus fréquentes que dans un autre, à cause du climat, de l’air, de l’eau, de la situation du lieu, de la maniere de vivre des habitans. Voyez Endémies. Consultez Hippocrate de aëre, locis, & aquis ; & si vous voulez parmi les modernes, Wintringham’s (Clifton) a treatise of endemic diseases. London, 1718. 8°.

Fievre éphémere, ephemera, la plus simple des fievres continues, dont le commencement, l’état, & le déclin, se font ordinairement dans l’espace de 12, 24, ou au plus de 36 heures. Voyez Ephémere.

Fievre éphémere britannique, nom vulgaire qu’on a donné à la suette, espece de peste qui passa en Angleterre en 1485, & qui emportoit les malades en 24 heures. Voyez Suette.

Fievre épiale, epialis febris, ἠπίαλος, ἠπιαλώδεις, fievre, dit Galien, dans laquelle le malade ressent une chaleur extraordinaire, & frissonne en même tems. Les anciens latins lui donnent le nom de quercera, c’est-à-dire qui produit de violens frissons.

C’est, suivant nous, cette affection morbifique de la fievre qui consiste dans le frisson, lequel persiste avec le sentiment de chaleur. On en peut indiquer pour cause générale une acrimonie irritante que les forces vitales ne peuvent pas chasser.

L’acrimonie de la cause de la fievre produit souvent un genre de chaleur, ou plûtôt une sensation de chaleur, qu’il ne faut pas confondre avec la cha-