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du tronc, de petites protubérances qui sont les premieres ébauches des bras & des jambes. Au bout de trois semaines, le corps du fœtus s’est un peu augmenté ; les bras & les jambes, les mains & les piés s’apperçoivent. L’accroissement des bras est plus prompt que celui des jambes, & les doigts des mains se séparent plûtôt que ceux des piés.

A un mois le fœtus a plus de longueur, la figure humaine est décidée, toutes les parties de la face sont déjà reconnoissables, le corps est dessiné, les hanches & le ventre sont élevés, les membres sont formés, les doigts des piés & des mains sont séparés les uns des autres, les visceres sont déjà marqués par des fibres pelotonnées. A six semaines le fœtus est plus long, la figure humaine commence à se perfectionner ; la tête est seulement, proportion gardée, plus grosse que les autres parties du corps. A deux mois il est plus long, & encore plus à trois, & il pese davantage. Quatre mois & demi après la conception, toutes les parties de son corps sont si fort augmentées, qu’on les distingue parfaitement les unes des autres ; les ongles même paroissent aux doigts des piés & des mains. Il va toûjours en augmentant de plus en plus jusqu’à neuf mois, sans qu’il soit possible de déterminer les dimensions de ses parties. Tout ce qu’il y a de certain, c’est que le fœtus croît de plus en plus en longueur, tant qu’il est dans le sein de sa mere, & qu’après la naissance il croît beaucoup plus dans les premieres années que dans les suivantes, jusqu’à l’âge de puberté.

Nous prenons le terme de neuf mois pour le terme ordinaire que l’enfant reste dans le sein de sa mere ; car différentes observations nous ont appris que des enfans nés à 6, 7, 8, 10, 11 & 13, ont vécu ; que d’autres ont resté 4 & 6 mois, y étant morts, sans s’y gâter, & même 23 mois, deux ans, trois ans, quatre ans, seize ans, vingt-six & quarante six ans, après avoir à la vérité souffert quelques altérations, mais sans que la santé de la mere ait paru dérangée. Voyez Scenckius, Bartholin, & les autres observateurs ; & même si nous en voulions croire Krantzius, Aventin, Wolff, il en est sorti un au bout de deux ans du ventre de la mere, tout parlant & en état de marcher. Quelle philosophie !

Nous regardons aussi la matrice comme le lieu dans lequel le fœtus se trouve plus ordinairement renfermé, dans quelqu’endroit de cette partie que puisse s’attacher son placenta, qu’on a en effet vû attaché dans différens endroits des parois intérieures de la matrice (voyez Accouchement) ; cependant quelques observateurs, & même des observateurs dignes de foi & capables d’observer, nous disent en avoir trouvé de développés dans les ovaires, dans le pavillon, dans les trompes, dans le bas-ventre, &c. Voyez les mémoires de l’académie royale des Sciences ; les œuvres anatomiques de feu M. Duverney medecin ; les miscell. natur. curios. &c.

Il est plus ordinaire de voir des femmes n’avoir qu’un enfant à la fois, qu’un plus grand nombre ; & lorsqu’elles en portent deux, trois, quatre & cinq, on les trouve très-rarement sous la même enveloppe, & leurs placentas, quoiqu’adhérans, sont presque toûjours distincts. Les observations sur le plus grand nombre d’enfans que les femmes ayent eu à la fois, méritent d’être discutées ; c’est ce qu’on verra à l’artic. Œconomie de la Nature, où on entrera dans quelque détail sur la fécondité des différens individus ; du reste est-il bien constant qu’une fois qu’un fœtus est développé dans la matrice, il puisse encore s’y en développer une autre par le même moyen ? c’est ce qui paroît confirmé par des observations qui seront examinées à l’article Superfétation. Mais quoiqu’on ait des exemples de fruit renfermé dans un autre fruit, d’œuf contenu dans un autre œuf ;

que Bartholin nous apprenne que des rats ayent fait des petits qui en portoient d’autres, & qu’on ait vû en Espagne une jument faire une mule qui étoit grosse d’une autre mule : il paroîtra toûjours surprenant que des fœtus humains se soient trouvés fécondés des le sein de leur mere, & qu’ils soient accouchés d’enfans vivans peu de jours après leur naissance ; c’est cependant ce que paroissent confirmer Bartholin, Clauder, les miscell. natur. curios. le journal des savans, &c. Quoique ce cas soit des plus rares, pensera-t-on avec Bartholin, que la nature qui avoit en vûe de produire deux jumeaux, en a par certaines circonstances enfermé un dans l’autre, & qu’elle s’est conduite en ce cas comme quelques-uns la font agir dans la production d’enfans à deux têtes, à deux corps, à quatre bras, &c ? Voyez Monstre.

Pourquoi les enfans ressemblent-ils tantôt à leur pere, tantôt à leur mere ? Toutes les observations qu’on a eu occasion de faire dans l’économie de la nature, tant dans le regne végétal que dans le regne animal, font bien voir que cela a lieu, sans trop nous instruire du comment ni du pourquoi. C’est à-peu-près la même difficulté pour les différentes marques de naissance. Voyez Imagination & Génération.

Le fœtus situé dans la matrice y est donc comme le poisson au milieu des eaux, c’est-à-dire qu’on peut considérer tout son ensemble comme une espece d’œuf, rempli d’une liqueur dans laquelle le fœtus nage, & aux parois intérieures duquel il est arrêté d’un côté par une espece de cordon qui sort de son nombril, & qui est composé de vaisseaux qui se divisent & se subdivisent en un grand nombre de ramifications pour pénétrer ce côté des parois de l’œuf, passer à-travers, & s’aller implanter dans la matrice, de laquelle il tire par ce moyen sa nourriture.

Sept ou huit jours après la conception, si ce n’est plûtôt, le fœtus commence donc à être arrêté de cette façon à son cordon, s’augmente peu-à-peu, ne donne des signes de vie que plus d’un mois après la conception, plus ordinairement même à quatre mois ou quatre mois & demi, rarement plûtôt ni plus tard ; il s’accroît, placé qu’il est pour l’ordinaire (lorsqu’il est seul, que le placenta est attaché au fond de la matrice, & que d’autres causes d’équilibre ne changent pas cette situation), les piés en-bas, le derriere appuyé sur les talons, la tête inclinée sur les genoux, les mains sur la bouche, & il nage comme une espece de vaisseau dans l’eau contenue par les membranes qui l’environnent, sans que la mere en ressente d’incommodité ; mais une fois que la tête vient à grossir assez pour rompre cet équilibre, elle tombe en-bas, la face tournée vers l’os sacrum & le sommet vers l’orifice de la matrice, six, sept ou huit semaines, plus ou moins, avant l’accouchement. Voyez Accouchement.

La premiere des membranes qui paroît à l’extérieur de l’œuf, se nomme chorion ; & l’endroit de cette membrane qui soûtient le nombre presqu’infini des vaisseaux, dont les extrémités s’implantent dans la matrice, s’appelle placenta. Voyez Chorion & Placenta. En séparant le chorion, on découvre une autre membrane qu’on appelle amnios, qui, par conséquent, tapisse le chorion & le placenta, revêt le cordon ombilical, s’étend sur le corps du fœtus, ou au-moins se trouve continue à la membrane extérieure qui le couvre, & renferme immédiatement les eaux dans lesquelles le fœtus nage. Voyez Amnios.

Le cordon est composé de deux arteres & d’une veine qu’on nomme ombilicales, & d’un troisieme canal qu’on appelle ouraque, & qui, sans être creux dans l’homme, vient du fond de la vessie pour s’avancer jusqu’au nombril, où il semble se terminer ; tandis que creux dans les vaches, les brebis, les che-