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tondu à dos, soit distingué par une lisiere, composée de douze filets teints en bleu ; & le froc en sort de trois quarts de large, ou de demi-aulne un seize, où il y aura aussi de l’agnelin tondu à dos, soit aussi désigné par deux entre-battes, l’une à la tête, l’autre à la queue, de chaque côté du froc ; chaque entre-batte de douze fils teints en bleu.

Il n’est permis d’y employer que des laines de France, & des agnelins tondus à dos.

Il est défendu de le fabriquer avec plis, peignons, bourres, moraines, & autres matieres de mauvaise qualité.

Le froc en foible pour doublure, doit avoir vingt-six portées de trente-deux fils chacune, dans des rots de la largeur au-moins de aulne plus , entre les lisieres, liteaux ou doublets, pour être au retour du foulon de demi-aulne, & ne peut excéder vingt-six aulnes de long.

Les lisieres, liteaux ou doublets de froc en foible de demi-aulne de large, sont de laine bege ou bleue de bon teint. Voyez les réglemens des manufactures.

Frocs ou Fros, (Jurispr.) sont des terres en friche, des lieux publics & communs à tous ; en quelques endroits, frocs sont les chemins publics. On écrit ailleurs fraux. Voyez ci-devant Fraux.

Il en est parlé dans l’ancienne coûtume d’Amiens, dans celles de Saint-Omer, de Teroüanne, Ponthieu, Artois. Voyez le glossaire de Ducange, au mot froccus. (A)

FROID, adj. qui sert à désigner dans les corps une qualité sensible, une propriété accidentelle appellée froid. Voyez l’article suivant.

Froid, s. m. (Physiq.) Le mot froid pris substantivement a deux acceptions différentes ; il signifie proprement une modification particuliere de notre ame, un sentiment qui résulte en nous d’un certain changement survenu dans nos organes, tel est le changement que l’on a quand on touche de la neige ou de la glace. On se sert aussi de ce même mot pour désigner une des propriétés accidentelles de la matiere, pour exprimer dans les corps l’état singulier dans lequel ils peuvent exciter en nous la sensation dont on vient de parler. Voyez Sensation & Perception. Voyez aussi Propriété & Qualité.

La sensation de froid est connue autant qu’elle peut l’être par l’expérience ; elle n’a pour nous d’autre obscurité, que celle qui est inséparable de toute sensation.

Pour développer la nature du froid, considéré dans les corps comme une propriété ou qualité sensible, il est nécessaire d’en exposer d’abord les principaux effets ; ils sont pour la plûpart entierement opposés à ceux que produit la chaleur. Voyez Chaleur & Feu. Les corps en général tant solides que fluides, se raréfient en s’échauffant, c’est-à-dire que la chaleur augmente leur volume & diminue leur pesanteur spécifique ; le froid au contraire les condense, il les rend plus compacts & plus pesans, ce qui doit être entendu, comme on le verra bien-tôt, avec quelques restrictions. Cette condensation est plus grande, quand le degré de froid qui l’opere est plus vif. Les corps les plus durs, tels que les métaux, le marbre, le diamant même, à mesure qu’ils se refroidissent, se réduisent comme les autres corps à un moindre volume. L’eau & les liqueurs aqueuses suivent cette loi, jusqu’au moment qui précede leur congelation ; mais en se gelant & lorsqu’elles sont gelées, elles semblent sortir totalement de la regle : elles se dilatent alors très sensiblement & diminuent de poids par rapport à l’espace qu’elles occupent ; plus le froid est violent, plus la dilatation qu’elles éprouvent dans cet état est considérable. Il y a beaucoup d’apparence, comme M. d’Alembert l’a remarqué (article Condensation), & comme

nous le ferons voir nous-mêmes à l’article Glace, que ce phénomene dépend d’une autre cause que de l’action immédiate du froid sur les parties intégrantes des liquides dont nous parlons. Les huiles se condensent toûjours par le froid, soit avant leur congelation, soit en se gelant, & sur-tout lorsqu’elles sont gelées. Les graisses, la cire, les métaux fondus (à l’exception du fer qui dans les premiers instans qu’il perd la liquidité qu’il avoit acquise par la fusion, se trouve, suivant les observations de M. de Reaumur, dans le même cas que les liqueurs aqueuses) ; tous ces corps, dis-je, & d’autres semblables rendus fluides par l’action du feu, à mesure qu’ils se refroidissent, se resserrent toûjours de plus en plus, & occupent constamment un moindre volume.

Le froid lie les corps ; il leur donne de la fermeté & de la consistance ; il augmente la solidité des uns, il diminue la fluidité des autres ; il rend même entierement solides la plûpart de ces derniers, lorsqu’il a atteint un certain degré, susceptible de plusieurs variétés déterminées par les circonstances, & qui d’ailleurs n’est pas le même, à beaucoup près, pour tous les fluides dont il est ici question. On ne sauroit nier au-moins qu’il n’accompagne toûjours la congelation. Le froid produit beaucoup d’autres effets moins généraux, qui paroissent se rapporter à ceux que nous venons d’indiquer.

Les Philosophes ne sont pas d’accord sur la nature du froid. Aristote & les Péripatéticiens le définissent une qualité ou un accident, qui réunit ou rassemble indifféremment les choses homogenes, c’est-à-dire de la même nature & espece, & les choses héterogenes, ou de différente nature ; c’est ainsi, disent-ils, que nous voyons pendant la gelée le froid unir tellement ensemble de l’eau, des pierres, du bois, & de la paille, que toutes ces choses semblent ne plus composer qu’un seul corps. Cette définition est opposée à celle que ces mêmes philosophes nous ont donnée de la chaleur, dont le caractere distinctif, selon eux, est de rassembler des choses homogenes, & de désunir les hétérogenes. Il y a dans cette doctrine beaucoup d’illusion & d’erreur : il est faux que le froid rassemble toûjours indifféremment toutes sortes de corps. Quand on expose dans nos climats du vin, du vinaigre, de l’eau-de-vie à une forte gelée, ces liqueurs se décomposent ; la partie aqueuse du vin, par exemple, est la seule qui se glace ; l’esprit conserve sa fluidité, & le tartre se précipite. On voit ici une vraie séparation de plusieurs substances, une entiere desunion. En second lieu, les mots d’accident, de qualité, & tous les autres semblables, n’éclaircissant rien par eux-mêmes, il faut y joindre des explications particulieres.

Epicure, Lucrece, & après eux Gassendi, & d’autres philosophes corpusculaires, regardent le froid comme une propriété de certains atomes ou corpuscules frigorifiques absolument différens par leur nature & leur configuration des atomes ignés, qui selon les mêmes philosophes sont le principe de la chaleur. Le sentiment de froid dépend de l’action de ces corpuscules frigorifiques sur les organes de nos sens. On verra dans la suite de cet article ce qu’il faut penser de cette opinion. Selon la plûpart des physiciens modernes, le froid en général n’est qu’une moindre chaleur. Ce n’est dans les corps qu’une propriété purement relative ; un corps qui possede un certain degré de chaleur est froid par rapport à tous les autres corps plus chauds que lui ; & il est chaud, si on le compare à des corps dont le degré de chaleur soit inférieur au sien. Les glaces d’Italie sont froides comparées à de l’eau dans son état ordinaire de liquidité ; mais par rapport aux glaces du Groënland, elles sont chaudes : l’eau bouillante est froide relativement au fer fondu. Suivant cette idée, nul corps,