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on appointe les parties, c’est-à-dire que les parties doivent produire leurs pieces & fournir des écritures pour instruire l’affaire plus amplement.

En matiere criminelle, l’affaire commence par une plainte ou par une dénonciation ; on informe contre l’accusé, & sur l’information on décrete l’accusé, s’il y a lieu, & en ce cas il doit se représenter & répondre en personne ; quand l’affaire est légere, on la renvoie à l’audience.

Ces questions de droit doivent être décidées par les lois, & celles de fait par les titres & par les preuves. Dans les premiers tems de la monarchie, les François étoient gouvernés par differentes lois, selon celle sous laquelle ils étoient nés ou qu’ils avoient choisie ; car alors ce choix étoit libre. Les Francs suivoient communément la loi salique ; les Bourguignons la loi gombette ; les Goths qui étoient restés en grand nombre dans les provinces d’outre la Loire, suivoient les lois des Visigoths. Tous les autres sujets du roi suivoient la loi Romaine qui étoit le code Théodosien ; les Ecclésiastiques la suivoient aussi tous, & en outre le droit canonique.

Aux anciennes lois des Francs ont succédé les capitulaires, qui sont aussi tombés en non-usage.

Les provinces les plus voisines de l’Italie ont continué de se régir par le droit romain ; les autres provinces sont régies par des coutumes générales & particulieres. Voyez Coutume.

Outre le droit romain & les coutumes, on se regle par les ordonnances, édits & déclarations de nos rois, & par la jurisprudence des arrêts.

Les premiers juges doivent toujours juger à la rigueur & suivant la lettre de la loi ; il n’appartient qu’au roi, & aux cours souveraines dépositaires de son autorité, d’interpreter les lois.

Les formalités de la justice ont été établies pour instruire la religion des juges ; mais comme on abuse des meilleures choses, il arrive souvent que les plaideurs multiplient les procédures sans nécessité.

Dans les pays où la justice se rend sans formalités, comme chez les Turcs, les juges peuvent souvent être surpris. La partie qui parle avec le plus d’assurance est ordinairement celle qui a raison ; il est aussi très-dangereux qu’un juge soit le maître du sort des hommes, sans craindre que personne puisse le réformer.

La justice se rendoit autrefois gratuitement dans toutes sortes d’affaires ; elle se rend encore de même de la part des juges pour les affaires qui se jugent à l’audience ; mais par succession de tems on a permis aux greffiers de se faire payer l’expédition du jugement ; on a aussi autorisé les juges à recevoir de ceux qui gagnoient leur procès de menus présens de dragées & de confitures, qu’on appelloit alors épices, & dans la suite ces épices ont été converties en argent ; les juges n’en prennent que dans les procès par écrit ; il y a aussi des cas où ils ont des vacations. Voyez Épices, Vacations.

Le surplus de ce qui concerne cette matiere se trouvera aux mots Coutume, Droit, Juge, Jurisdiction, Loi, Procès, Procédures, &c. Voyez aussi Loyseau, Traité des seigneuries, le Traité de la police, liv. I. (A)

Justice d’apanage, est une justice royale qui se trouve dans l’étendue de l’apanage d’un fils ou petit-fils de France. Cette justice est exercée au nom du roi & du prince apannagiste, lequel a la nomination & provision des offices, à la différence du seigneur engagiste qui a seulement la nomination des offices des justices royales qui se trouvent dans le domaine engagé. (A)

Justice d’attribution, est celle qui n’est établie que pour connoître d’une certaine affaire, comme les commissions du conseil, les renvois d’u-

ne affaire à une chambre du parlement, ou bien

pour connoître de toutes les affaires d’une certaine nature, comme les cours des aydes, les élections, les greniers à sel, les tables de marbres & autres semblables. Voyez Juge d’attribution. (A)

Justices bailliageres, on entend ordinairement par-là celles qui ont un territoire fixe comme les bailliages, c’est en ce sens que l’on dit que les maîtrises des eaux & forêts sont bailliageres, pour dire que les officiers de ces jurisdictions ne peuvent anticiper sur le territoire les uns des autres.

En Lorraine on appelle justices bailliageres des justices seigneuriales qui ressortissent directement à la cour souveraine, sans passer par le degré des bailliages royaux, lesquels n’y connoissent que des cas royaux & privilégiés ; il y a une vingtaine de prevôtés & autres justices seigneuriales qui sont bailliageres. Voyez les Mém. sur la Lorraine, pag. 76. (A)

Justice basse ou plutôt Basse-justice, est une justice seigneuriale qui n’a que le dernier degré de jurisdiction.

On l’appelle aussi justice fonciere ou censiere ou censuelle, parce que le bas-justicier connoît des cens & rentes, & autres droits dûs au seigneur.

Le juge qui exerce la basse justice, connoît aussi de toutes matieres personnelles entre les sujets du seigneur jusqu’à la somme de 60 sols parisis.

Il connoît pareillement de la police, du dégât fait par les animaux, des injures légeres & autres délits, dont l’amende n’excede pas dix sols parisis.

Si le délit mérite une amende plus forte, le juge doit en avertir le haut-justicier, & en ce cas il prend sur l’amende qui est adjugée, six sols parisis.

Il peut faire arrêter dans son district tous les délinquans, & pour cet effet avoir sergent & prison ; mais il doit aussi-tôt faire conduire le prisonnier au haut-justicier avec l’information, & ne peut pas décreter.

Il connoît des censives du seigneur & amende de cens non payé ; il peut du consentement des parties faire faire mesurage & bornage entre elles.

Il peut demander au haut-justicier le renvoi des causes qui sont de sa compétence.

Dans quelques coutumes on distingue deux sortes de basses justices ; l’une qui est générale ou personnelle pour connoître de toutes causes civiles & criminelles entre les sujets du seigneur, jusqu’à concurrence de ce qui vient d’être dit ; l’autre qu’on appelle simplement jurisdiction basse, particuliere ou fonciere, qui ne regarde que la connoissance du fond qui reléve du fief ou de l’étroit fond, comme dit la coutume de Poitou, art. 18, c’est-à-dire des causes réelles qui regardent le fond du fief & droits qui en peuvent venir au seigneur, comme le payement des lods & ventes, la notification & exhibition des contrats & autres causes concernant son fief. Voyez Bouchart sur l’art. 18 de la coutume de Poitou.

L’appel de la basse-justice ressortit à la haute-justice. Voyez ci-après Justice seigneuriale & Justice fonciere. (A).

Justice capitale, est la principale jurisdiction d’une province, la justice supérieure ; c’est ainsi que Richard roi d’Angleterre, duc de Normandie & d’Aquitaine, & comte d’Anjou, qualifioit sa cour dans des lettres du mois de Septembre 1352, nisi coram nobis aut capitali justitiâ nostrâ. (A)

Justice de censier, est la même chose que justice censiere, ou censuelle : on l’appelle plus communément justice censiere, ou fonciere. Voyez Justice censiere & fonciere. (A)

Justice censiere ou censuelle, est une basse justice qui appartient dans quelques coutumes aux seigneurs de fiefs pour contraindre leurs censitaires au payement des cens & rentes seigneuriales, &