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lit. Ses jugemens n’emportent point mort civile ni confiscation quand ils sont émanés du conseil de guerre : il n’en est pas de même quand ils sont émanés du prévôt de l’armée ou autres juges ayant caractere public pour juger selon les formes judiciaires.

Lorsque le condamné, après avoir subi quelque peine légere, a passé sous le drapeau, & est admis à rester dans le corps, le jugement rendu contre lui n’emporte point d’infamie.

La justice qui est exercée par le prevôt de l’armée sur les maraudeurs, & pour la police du camp, est aussi une justice militaire qui se rend sommairement.

On appelle aussi justice militaire, dans un sens figuré, une jurisdiction où la justice se rend sommairement & presque sans figure de procès, ou bien une exécution faite militairement & sans observer aucune formalité.

La plûpart des justices seigneuriales tirent leur origine de la justice ou commandement militaire. (A)

Justice moyenne, ou plûtôt Moyenne Justice, media justitia, mixtum imperium, est la portion de justice seigneuriale, qui tient le milieu entre la haute & la basse justice. Voyez ci-après Justice seigneuriale. (A)

Justice municipale est celle qui appartient à une ville, & qui est exercée par les maire & échevins ou autres officiers qui font les mêmes fonctions. On appelle aussi justices municipales celles qui sont exercées par des personnes élues par les citoyens entr’eux, telles que les jurisdictions consulaires. Les élections étoient aussi autrefois des justices municipales. Voyez Loyseau, traité des seigneuries, chap. xvj. & ci-devant Juge municipal. (A)

Justice ordinaire est celle qu’exercent les juges ordinaires ; c’est-à-dire une jurisdiction qui est stable & permanente, & qui est naturellement compétente pour connoître de toutes sortes de matieres, à la différence des justices d’attribution & de privilége, & des commissions particulieres, qui sont des justices ou jurisdictions extraordinaires. Voyez ci-devant Jurisdiction extraordinatire & Jurisdiction ordinaire. (A)

Justice-Pairie est celle qui est attachée à une pairie, c’est-à-dire à un duché ou comté-pairie. On comprend aussi quelquefois sous ce titre d’autres justices attachées à des marquisats, comtés & baronies, qui ont été érigées à l’instar des pairies.

Toutes ces justices-pairies ou à l’instar des pairies, ne sont que des justices seigneuriales attachées à des terres plus ou moins titrées. L’appel de leurs sentences se releve directement au parlement. Voyez Pairies.

Justice par pairs est celle qui est rendue par les pairs ou hommes de fief du seigneur auquel appartient la justice. Anciennement la justice étoit rendue par pairs ou par baillis : il y a encore en Picardie & en Artois plusieurs endroits où la justice est rendue par les hommes de fief ou par les hommes cottiers, selon la qualité de la justice. Voyez les établissemens de S. Louis, chap. lxxj. & les notes de M. de Lauriere, ibid.

Voyez aussi Hommes cottiers, Hommes de fief & Justice cottiere. (A)

Justice en pareage, ou, comme on dit plus communément, Justice en pariage ou de pariage, est lorsqu’une même justice est tenue conjointement par le seigneur dominant & par son vassal, qui s’associent mutuellement dans cette justice & dans tout ce qui en dépend, de maniere qu’ils y ont chacun un droit égal.

On trouve de tels pariages faits entre des seigneurs particuliers. Il y a aussi des justices tenues en pariage avec le roi.

On peut citer pour exemple de ces justices tenues en pariage, celle du bourg d’Essoye, coûtume de Chaumont en Bassigny. Ce pariage fut fait en 1233 entre Thibault, comte de Champagne, au lieu duquel est présentement le roi, & l’abbaye de Molesme, ordre de Saint Benoît. La charte de Thibault porte que l’abbé & les religieux de Molesme l’associent lui & ses héritiers comtes de Champagne, à perpétuité dans toute la justice qu’ils ont à Essoye sur les hommes & les femmes ; ils lui cedent la moitié des amendes & confiscations des abonnemens & tailles ; que le prevôt commun leur prêtera serment. Ce pariage fut confirmé en 1329 par Philippe de Valois : il a encore présentement son effet ; le prevôt d’Essoye est prevôt royal ; les religieux le nomment conjointement avec le roi ; leurs provisions sont sous le contre-scel de celles du roi.

On trouve un autre exemple d’une justice établie en pariage directement avec le roi ; le titre est du mois de Février 1306, passé entre Philippe le Bel & Guillaume Durand, évêque de Mende. C’est le roi qui associe l’évêque dans toute la justice du Gevaudan & dans toutes les commises qui pourroient survenir. L’évêque associe ensuite le roi dans tous les droits de justice qu’il pouvoit avoir au même pays & dans les commises & confiscations ; chacun réserve les fiefs & domaines dont il jouissoit ; ils excluent toute prescription de l’un contre l’autre ; enfin ils erigent une cour commune. Ce pariage a été confirmé par Philippe de Valois en 1344, par le roi Jean en 1350, Charles V. en 1367, 1369 & 1372, Charles VII. en 1437, Louis XI. en 1464, Charles VIII. en 1484, Charles IX. en 1574, Henri IV. en 1595, lequel entr’autres releve l’évêque de Mende de la prescription qui auroit pû courir pendant les troubles des regnes de ses prédécesseurs & des siens ; par Louis XIV. en 1643, & par Louis XV. à présent regnant, en 1720.

Il intervint Arrêt au parlement de Toulouse en 1601 sur la requête de M. le procureur général, lequel, en ordonnant l’exécution d’arrêts précédens de 1495 & 1597, ordonna l’exécution du pariage.

Il fut aussi rendu un arrêt au conseil du roi en 1641 sur la requête des agens généraux du clergé de France, qui ordonna que tous les contrats de pareage ou pariage passés entre les rois & les ecclésiastiques, seront exécutés & fidelement entretenus ; ce faisant, le roi releve lesdits ecclésiastiques de la prescription de 150 ans.

Voyez M. Guyot en ses observations sur le droit des patrons, p. 131 & suiv. & ci après au mot Pariage. (A)

Justice patibulaire, c’est le signe extérieur de la justice, ce sont les piliers ou fourches patibulaires, le gibet ou l’on expose les criminels qui ont été mis à mort.

Le haut-justicier a droit d’avoir une justice à deux piliers, le châtelain à trois, le baron à quatre, le comte à six.

Les dispositions des coutumes ne sont pourtant pas absolument uniformes à ce sujet, ainsi cela dépend de la coutume, & aussi des titres & de la possession. Voyez les coutumes de Tours, art. 58, 64, 72 & 74. Lodunois, chap. iv, art. 3, & chap. v, art. 6. Anjou, art. 43. Voyez aussi au mot Echelles patibulaires. (A)

Justice personnelle, signifie celle qui s’étend aux causes personnelles, à la différence de la justice fonciere, qui n’a pour objet que la perception des droits dus au seigneur.

On entend aussi quelquefois par justice personnelle celle qui a droit de suite sur les justiciables sans être restraintes aux personnes domiciliées dans un certain territoire ; l’exercice de chaque justice n’a pas