Vraie cathédrale du peuple, aussi haute que sa voisine, la cathédrale de Dieu[1]. Si la première eût rempli sa destinée, si ces villes eussent suivi jusqu’au bout leur idée vitale, la maison de l’amitié eût fini par contenir tous les amis, toute la ville ; elle n’eût pas été seulement le comptoir des comptoirs, mais l’atelier des ateliers[2] le foyer des foyers, la table des tables, de même qu’en son beffroi semblent s’être réunies les cloches des quartiers, des confréries, des justices[3]. Par-dessus toutes ces voix, qu’il accorde et qu’il domine, se joue souverainement le carillon de la loi, avec son Martin ou Jacquemart. Cloche de bronze, homme de fer ; celui-ci est le plus vieux bourgeois de la ville, le plus gai, le plus infatigable, avec sa femme Jacqueline… Que chantent-ils nuit et jour, d’heure en heure, de quart en quart ? Un seul chant, celui du psaume : Quam jucundum est fratres habitare in unum !
Voilà l’idéal, le rêve ! un peuple travaillant dans l’amour… Mais le diable en est jaloux.
Il ne lui faut pas grand’place ; il aura toujours bien un coin dans la plus sainte maison. Au sanctuaire
- ↑ Voir dans la cathédrale la pierre de Jansénius, au milieu même du chœur, mais si ingénieusement dissimulée.
- ↑ C’est ce qui existait effectivement pour une partie des fabricants d’Ypres ; ils travaillaient dans la halle même : « L’étage principal contenait les métiers des tisserands de draps et de serge… Les différents locaux du rez-de-chaussée contenaient les peigneurs, cardeurs, fileurs, tondeurs, foulons, teinturiers…» (Lambin.)
- ↑ Droits de cloche, de ban, de justice, sont synonymes au moyen âge. Le carillon n’aurait-il pas été originairement la simple centralisation des cloches, c’est-à-dire des justices ? Les dissonances trop choquantes auront forcé à y mettre une harmonie quelconque, qui peu à peu se sera adoucie. App. 131.