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dans les Gaules, y ont laissé plusieurs procédés utiles. L’art de bâtir en pisai (Voyez ce mot) de construire les caves & les citernes en béton (Voyez ce mot) la culture du lupin, &c. Columelle voyoit bien, & il laisse peu à dire après lui. Je regarde le lupin comme une des plantes précieuses pour les pays dont le sol est pauvre, maigre, caillouteux ou sablonneux. Il ne s’agit pas de considérer la récolte de son grain comme d’une grande utilité, sa qualité essentielle est d’être d’une grande ressource pour enrichir ces terreins, & leur fournir par sa décomposition cette terre végétale, cet humus qui sert à former la charpente des plantes. (Voyez le mot Amendement, & le dernier chapitre du mot Culture.)

Le lupin s’élève depuis dix huit pouces jusqu’à deux pieds, & se charge d’un grand nombre de feuilles. Il absorbe de l’atmosphère la plus grande partie de sa nourriture, & rend par conséquent à la terre qui l’a produit, beaucoup plus de principes qu’il n’en a reçu : dès-lors il devient un excellent engrais. Il est surprenant, qu’à l’exemple du Dauphiné, du Lyonnois, & de quelques autres provinces, sa culture ne se soit pas plus étendue.

L’époque des semailles, indiquée par Columelle, pouvoit être bonne à Rome, & l’est de même pour nos provinces méridionales ; mais dans celles du centre & du nord du royaume, il est plus prudent de le semer lorsqu’on ne craint plus les gelées. Les froids de l’hiver font souvent périr le lupin semé en automne, & il faut le semer de nouveau au printemps.

Les auteurs qui ont écrit sur la culture du lupin, s’accordent presque tous à dire qu’il se contente de légers labours, & même n’en conseillent pas d’autres. Je ne suis point de leur avis, parce que l’on manque le vrai but que l’on désire : celui de produire un bon engrais. Il y a une différence très-marquée entre la vigueur de la végétation du lupin qui croît dans un champ profondément sillonné, & celui d’un champ simplement égratigné. Le premier double & triple le produit du second.

Je conseille de donner deux bons labours croisés avant l’hiver, 1° afin d’enterrer le chaume de la récolte précédente, & lui donner le temps de pourrir : 2°. afin que le sol soit à même de jouir des bienfaits de l’hiver ; d’ailleurs, on aura moins de peine à soulever la terre après l’hiver. En février ou en mars, suivant le climat, c’est le temps de sillonner profondément la terre, & de multiplier les labours coup sur coup, afin d’être prêt à semer dès que le moment sera venu. On sèmera toujours sur un labour frais, & le grain sera couvert avec la herse passée à plusieurs reprises. Lorsque toutes les plantes du champ sont en pleine fleur, c’est le moment de labourer avec la charrue à versoir, & de faire un fort sillon. Les sillons doivent être serrés & près les uns des autres. Mais, afin de mieux enterrer toutes les plantes que le soc déracine, que le versoir couche, il faut que deux charrues, à la suite l’une de l’autre, passent dans la même raie. Les plantes sont mieux enfouies, & le labour est plus profond ; deux avantages réunis par la même opération. Comme à cette époque la plante est très-herbacée, qu’elle n’a point encore acquis la qualité ligneuse, sa pu-