Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/174

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fût gardé à vue, et qu’on ne pût lui écrire les choses les plus simples qu’en courant quelque risque ? N’est-ce pas encore là un des effets de cette guerre maudite ?

Un de mes étonnements est que le roi de Prusse ait pu envoyer un détachement de son armée à celle de ses alliés. Depuis Mithridate, on n’a jamais résisté si longtemps : il fut vaincu par des Romains ; mais le Mithridate d’aujourd’hui est le seul Romain que je connaisse. Son poëme sur l’Art de la guerre est très-bien traduit en italien. Il est plus aisé de traduire ses vers que d’imiter ses exemples.

Je me mets aux pieds de Votre Altesse sérénissime et à ceux de toute votre auguste famille, avec le plus profond et le plus tendre respect.


Le vieux Suisse V.

P. S. La grande maîtresse des cœurs m’a-t-elle entièrement oublié ? Je ne doute pas que Votre Altesse sérénissime n’ait un ministre à Paris ; mais si elle n’en avait pas, elle me permettra de lui recommander un Genevois nommé Cromelin, dont je réponds comme de moi-même. Elle en serait quitte, je crois, pour 1,200 livres de France par an, ou à peu près, et elle serait fidèlement servie. Son Altesse sérénissime permet-elle qu’on insère ici cette lettre pour Mme  de Bassevitz ?


4430. — À MADAME LA COMTESSE DE BASSEVITZ[1].
Ferney, 22 janvier 1761.

· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · Une Polonaise, en 1722, vint à Paris, et se logea à quelques pas de la maison que j’occupais. Elle avait quelques traits de ressemblance avec l’épouse du czarowitz. Un officier français, nommé d’Aubant, qui avait servi en Russie, fut étonné de la ressemblance : cette méprise donna envie à la dame d’être princesse ; elle avoua ingénument à l’officier qu’elle était la veuve de l’héritier de la

  1. Je donne ce morceau, quoique ce ne soit qu’un fragment, parce que le sujet est très-intéressant, et que la lettre à Schouvalow, du 21 septembre 1760, rend ce fragment précieux.

    Le Journal de Paris, du 19 juillet 1782, d’où je l’ai extrait, dit que Mme  la comtesse de B… vivait encore à D***, dans le Mecklembourg. C’est aussi à Mme  de Bassevitz qu’est adressée une lettre du 25 décembre 1761. (B.)

    — Il est assez longuement question de Mme  d’Aubant ou d’Auban dans la Correspondance littéraire de Grimm, juin et novembre 1777. Voyez ci-dessus les lettres 4264 et 4325.