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Utilisateur:Sicarov/Dictionnaire de la Bible/Tome 3.2.a ISAÏE-JERCAAM

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Letouzey et Ané (Volume IIIp. 941-942-1257-1258).

M

xxxviii ; IV Reg., xx, 1-11, et durant l’invasion de Sennachérib. Is., xxxvi-xxxvii. À partir de ces graves événements, le prophète rentre dans l’obscurité, et se tient à l’écart de la scène politique. Sa mission providentielle auprès des monarques de la Judée était accomplie.

IV. Milieu histobiqde.

Pour bien comprendre l’action d’Isaïe et en suivre les diverses phases, il faut se placer, autant que l’on peut, dans le milieu historique où vécut le grand prophète.

I. la judée.

Le règne d’Ozias fut généralement prospère. Voir IV Reg., xv, 1-3, où Ozias est appelé Azarias ; II Par., xxvi, 4-5. Il fît des guerres heureuses et recouvra certaines villes perdues, IV Reg., xiv, 22 ; II Par., xxvi, 2 ; il remporta des victoires et construisit des fortifications, II Par., xxvi, 8 ; à l’intérieur il fortifia Jérusalem. II Par., xxvi, 15. Cependant il fut châtié de la lèpre parce qu’il usurpa les fonctions sacrées, IV Reg., xv, 5 ; II Par., xxvi, 16-22.— Son fils et successeur Joatham est aussi loué dans l’Écriture, IV Reg., xv, 34 ; II Par., xxvii, 2 ; il prospéra dans ses œuvres, II Par., xxvii, 2-4, et fut heureux dans ses guerres contre les Ammonites, ꝟ. 5 ; cependant il ne fréquentait pas le temple du Seigneur et le peuple se livrait au péché, ꝟ. 2 b. , — Achaz, son fils, fut un roi impie, IV Reg., xvi, 3-4 ; II Par., xxviii, 2-4 ; aussi son règne fut-Il affligé de grandes calamités, comme nous le verrons pius loin.

— Ézéchias, qui lui succéda, remit en honneur la piété et la religion, IV Reg., xviii, 3-4 ; le culte divin, II Par., xxix, 3-11 ; aussi Dieu était-il avec lui et le faisait-il prospérer, IV Reg., xviii, 7 ; il régna 29 ans, ꝟ. 2 ; II Par., xxix, 1. Lui aussi pourtant connut les maux de l’invasion étrangère, comme nous le dirons plus loin.

II. l’Assyrie. — Deux grandes puissances, l’Assyrie et l’Egypte, se disputaient, à l’époque d’Isaïe, l’empire du monde. Is., xix, 23-24. Dans ce conflit continuel, les Assyriens, race guerrière et dure à la peine, obtenaient presque toujours la prépondérance. Dans leurs invasions, ils courbaient impitoyablement sous leur joug de fer tous les royaumes situés entre l’Euphrate et les frontières nord-est de l’Egypte ; aussi la plupart de ces peuples, pour secouer le joug des Assyriens et se soustraire à leur lourde domination, étaient-ils naturellement portés à implorer le secours de l’Egypte, et cette dernière était toujours disposée à combattre les progrès de l’Assyrie, dont l’expansion sans bornes était un danger pour sa propre existence. — Isaïe fut contemporain de quatre rois d’Assyrie dont nous donnons ici les dates usuelles : Théglathphalasar III (743-727) ; Salmanasar IV (727-722) ; Sargon (722-705) ; Sennachérib (705-681) ; il fut aussi probablement contemporain d’Assarhaddon (681-668). Tous ces monarques eurent plus ou moins des démêlés avec les rois d’Israël et de Juda. Théglathphalasar III intervint sous Achaz ; irrité des impiétés de ce roi, Dieu le livra aux mains de Rasin, roi de Syrie, qui le conduisit prisonnier à Damas, II Par., xxviii, 5 ; il le livra aussi aux mains de Phacée, roi d’Israël, qui fît de grands ravages dans le royaume de Juda, ꝟ. 5-6 ; dans ces graves conjonctures, l’impie Achaz repousse le secours de Dieu que lui offrait Isaïe, vii, 5-13, et se tourne vers Théglathphalasar, dont il se déclare tributaire, IV Reg., xvi, 7 ; Théglathphalasar attaqua Damas, dont il tua le roi Rasin, envahit la Judée et conduisit en captivité beaucoup de Juifs et d’Israélites, IV Reg., xv, 29-30 ; xvi, 9-10 ; II Par., xxviii, 19-20 ; les Iduméens et les Philistins avaient déjà châtié l’impie Achaz et ravagé son royaume. II Par., xxviii, 17-18. — Salmanasar IV voulut détruire le royaume d’Israël et assiégea Samarie ; le roi de ce royaume, Osée, implora le secours des Égyptiens ; Sargon s’empara de Samarie et transporta les Israélites en captivité. IV Reg., xvii, 3-6 ; xviii, 9-11. — Les armées de Sargon et de ses successeurs, Sennachérib et Assar haddon, traversèrent plusieurs fois la Palestine pour aller attaquer l’Egypte. L’empire des pharaons opposa à ces attaques des monarques assyriens une vive résistance, qui fut malheureusement paralysée par les divisions intestines dont il souffrait. Ce qu’il faut surtout retenir de ces derniers événements, c’est le siège et l’attaque de Jérusalem par Sennachérib, le tribut qu’est obligé de lui payer le roi Ézéchias, et enfin l’extermination de l’armée assyrienne par l’ange du Seigneur. IV Reg., xxviii, 13-16 ; II Par., xxxiii ; Is., xxxvi-xxxvii ;

/II. l’Egypte. — Les rois d’Egypte de cette époque, d’origine éthiopienne, sont : Sua, que les textes égyptiens appellent Sabak et les Grecs Sabacon, et Tharaca. Le premier avait fait alliance avec Osée, roi d’Israël, contre les Assyriens, IV Reg., xvii, 4 ; Sua marcha trop tard au secours d’Osée, et, lorsqu’il arriva en Palestine, Samarie avait déjà succombé sous l’assaut de Salmanasar. Ce roi fut battu par Sargon à Raphia. Les Égyptiens furent aussi battus par Sennachérib à Altakou. Quant à Tharaca, il fut attaqué au sein même de son royaume par Assarhaddon, successeur de Sennachérib. - IV. autres peuples. — D’autres peuples de moindre importance, Phéniciens, Tyriens, Araméens, Moabites, Ammonites, Arabes, Iduméens et Philistins, subirent nécessairement le contre-coup de ces guerres entre les deux puissants empires, et l’invasion du vainqueur. Dans ce duel presque continuel, ils devenaient la proie du plus fort. C’est surtout des Assyriens qu’ils eurent à souffrir. Ninive pesait sur eux de tout son pouvoir, et l’on sait, par l’histoire et les inscriptions, combien était dure la domination de la puissante cité. (Dieu se servait des Assyriens pour exécuter ses desseins, et c’est pourquoi le nom d’Assur revient si souvent dans la première partie des prophéties d’Isaïe. Cf. Knabenbauer, Comment, in Is. proph., t. i, Paris, 1887, p. 1-8 ; G. Rawlinson, Five great monarchies, 2e édit., t. ii, p. 130 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1806, t. iii, p. 497-595 ; t. iv, p. 1-75 ; JE. Schôpfer, Histoire de l’Ancien Testament, trad. franc, par J.-B. Pelt, t. ii, Paris, 1897, p. 205-213.

V. Table chronologique, avant J-C.

Théglathphalasar III. 745-727

Dernière année du régne d’Ozias et vocation

d’Isaïe 740

Déposition et mort de Phacée, roi d’Israël, 734 ou 733-732 Prise de Damas par Théglathphalasar III… 732

Salmanasar IV… 727 ou 726-722

Sargon 722-705

Prise de Samarie et fin du royaume du Nord. 722 ou 721 Sfège et prise d’Azot par l’armée de Sargon.. 711

Sargon défait Mérodach-Baladan et entre à

Babylone 710

Sennachérib 704 ou 705^681

Sennachérib défait Mérodach-Baladon …. 703

Campagne de Sennachérib contre la Phénicie,

la Palestine et Juda 701

Assarhaddon CS1-CC8

Destruction dé Ninive par les Mèdes et les Babyloniens 608 ou C07

Succès de Cyrus dans l’Ouest et l’Asie centrale 549-538 Prise de Babylone et délivrance des Juifs par Cyrus 533

Cf. Driver, An introduction to tlte literature of tke Old Testament, 7e édit., Edimbourg, 1898, p. 205 ; D. Karl Marti, Dos Buch Jesaja, Tubingue, 1900, p. xx ; Rost, Die Keilschrifltexte Tiglalh-Pilesers III, 1893, p. xxix, xxxv.

VI. Mort d’Isaïe. —. Une tradition très ancienne et assez répandue fait vivre Isaïe jusqu’au temps du roi Manassé ; il aurait péri de la mort la plus cruelle durant la persécution suscitée par ce roi. TV Reg., zxi, 16. Son corps aurait été scié en deux avec une scie en

bois. Pour le condamner à mort, le roi Manassé aurait pris pour prétexte les paroles mêmes du prophète : « J’ai vu le Seigneur assis sur un trône. » Is., vi, 1. Le roi prétendait que ces paroles étaient en contradiction avec ce que dit Moïse de Jéhovah : « Nul homme ne me verra sans mourir. » Exod., xxxiii, 20. La tradition relative à son genre de mort fut admise par la majorité des Pères. Cf. S. Justin, Dial. cum Tryph., 120, t. vi, col. 756. Tertullien, De patientia, xiv, t. i, col. 1270 ; Chronicon pasch., t. xcii, col. 305, 381 ; Origène, In Is. Hotnil., i, 5, t. xiii, col. 223, où il appelle cette tradition juive : verisimilem quidem nec tamen veram, probablement à cause du motif donné par les Juifs, à savoir qu’Isaïe avait été scié parce qu’il violait la loi. In Matth., t. x, 18, t. xiii, col. 882 ; In Matth., Comment., Ser. 28, t. xiii, col. 1637 ; Épist. ad Jul. Afric, 9, t. xi, col. 65 ; S. Jérôme, In Is., lvii, 1, t. xxiv, col. 516-548. Cette tradition d’origine juive s’est conservée aussi dans le Talmud, traité Yebamoth 496, et dans le Targum sur II [IV] Reg., xxi, 16, Sanhédrin, 103 6. Cf. A. Rohling, Der Prophet Jesaja, p. 1 ; Carpzov, Introd. in V. T., t. iii, p. 96-98. La tradition qu’Isaïe fut scié avec une scie en bois dérive d’un apocryphe, VAscensio Isaise, 63 ; cf. édit. Lurenca, v, 11. C’est en vertu de cette même tradition que la plupart des Pères ont appliqué à Isaïe l’expression de l’Épttre aux Hébreux, xi, 27, secti sunt. Ils y ont vu une allusion au supplice d’Isaïe. Pour d’autres détails très incertains, cf. Pseudo-Épiphane, De vit. proph., t. xlHi, col. 397, 419. La date de la mort d’Isaïe est inconnue, bien qu’on’soit porté à la placer en 690. La tradition plaçait son tombeau à Panéas dans le pays de Basan : c’est de là que ses reliques auraient été transportées à Constantinople, en 442, sous le règne de l’empereur Théodose II. Cf. Acta sanet., t. ii, Julii, p. 250. Le martyrologe romain fait mention d’Isaïe et de son genre de mort au 6 juillet. Cf. Baronius, Ad martyrol. rom., 6 Julii.

VII. Autres ouvrages attribués a Isaïe.

Outre ses prophéties, Isaïe avait encore. écrit une histoire du roi Ozias, II Par., xxvi, 22 ; la vision d’Isaïe, dont il est question, II Par., xxxii, 32, contenant une histoire du règne d’Ézéchias, est regardée par certains auteurs comme formant une partie du Livre des rois de Juda et d’Israël, aujourd’hui perdu ; généralement on est plus incliné à croire qu’il s’agit là de la partie des prophéties faites au temps d’Ézéchias. Is., xxviii-xxxix. On a aussi attribué à Isaïe un ouvrage apocryphe : V Ascension d’Isaïe ; cf. Fabricius, Codex pseudepigraphus Veteris Testamenti, 2e édit., Hambourg, 2 in-8o, 17221733, t. i, p. 1087 ; R. Laurence, Ascensio Isaix vatis cumversione latine, in-8o, Oxford, 1819 ; Greswell, An exposition of the parables, 5 in-8o, Oxford, 1834, t. v, part, ii, p. 80.

VIII. Place d’Isaïe parmi les prophètes. — Isaïe est incontestablement le plus grand des prophètes, soit à cause de l’importance de ses révélations, soit à cause des qualités de son style. Il vécut à une des époques les plus troublées de l’histoire, et eut à remplir une mission, qui ne fut jamais confiée à aucun autre prophète. Aussi ne faut-il pas s’étonner des éloges qu’on lui a décernés à maintes reprises. Le plus grand et le plus autorisé de tous les éloges lui a été adressé par le Saint-Esprit lui-même par la bouche de l’auteur de l’Ecclésiastique, xlviii, 25-28 : « Isaïe est un grand prophète, qui marcha fidèlement dans les voies de Dieu ; de son temps le soleil rétrograda : il prévit les derniers événements, et consola ceux qui pleuraient dans Sion : il annonça les choses futures et cachées, avant leur réalisation. » Les Pères de l’Eglise ont fait écho à ces paroles de l’Ecclésiastique. L’auteur de la Synopsis Scripiurm Sacrse, t. xxviii, col. 363, parmi les œuvres de saint Athanasc, xix, 38, dit que < la plupart de ses prophéties sont l’Évangile

lui même ». Eusèbe l’appelle le plus grand des prophètes : ’Haaîaç npooffzwv [isyurroç. Detn. evang., v, 4, t. xxii, col. 370 ; voir aussi ii, 4, col. 127. Saint Isidore de Péluse déclare qu’Isaïe était doué de la plus grande perspicacité : ô SiopattxwTaTo ;. Epist., t. I, ep. xui, t. lxxviii, col. 208. Théodoret l’appelle « le divin », & 8eiÔT<xToç. In Is., Argum. , t. lxxxi, col. 216. Saint Jérôme dit qu’« il n’est pas tant prophète qu’évangéliste ». Prsef. ad Paulam et Eustoch., t. xxviii, col. 771 ; voir aussi Prolog, in Is., t. xxiv, col. 18. « Il me semble, dit saint Cyrille de Jérusalem, qu’Isaïe était orné non seulement de la grâce de la prophétie, mais aussi des dons apostoliques ; il était à la fois prophète et apôtre. » In Is., Proœm., t. lxx, col. 14. Saint Ambroise conseillait à saint Augustin de lire Isaïe, parce qu’« il a été, au-dessus de tous les autres, le prophète de l’Évangile et de la vocation des nations ». De Civ. Dei, XVIII, xxix, 1, t. xli, col. 585. Cf. aussi Conf., ix, 5, t. xxxii, col. 769 ; Joséphe, Ant. jud., X, ii, 2 ; J. Eadie, À biblical Cyclopœdia, in-8o, Londres, 1870, p. 343. V. Ermoni.

    1. ISAIE (LE LIVRE D’)##


2. ISAIE (LE LIVRE D’). — I. CARACTÈRE DU LIVRE. — Le livre d’Isaïe, dans sa forme actuelle, est une simple collection de prophéties faites dans des circonstances diverses, et par conséquent à différentes époques. Il ne forme pas un tout suivi, une composition où tout s’enchatne avec ordre et méthode ; ce n’est pas une œuvre conçue et exécutée d’un seul jet ; c’est plutôt un recueil. C’est du reste là le caractère des écrits prophétiques en général. L’esprit prophétique ne s’accommode pas facilement d’un ordre rigoureusement symétrique ; il obéit à l’inspiration, au souffle divin, et le souffle divin est libre dans ses mouvements. — De ce que le livre d’Isaïe est un recueil, on aurait tort pourtant de soutenir qu’il ne présente aucun ordre. En soutenant cette thèse, Luther, et quelques critiques rationalistes qui ont marché sur ses traces, Koppe, Eichhorn, Hitzig, Ewald, sont tombés dans une exagération manifeste. L’exégèse de nos jours, plus critique et aussi plus sévère, ne conteste plus ce point, qu’un examen attentif et minutieux de la forme littéraire du Livre a établi d’une manière satisfaisante.

II. Éditeur du recueil.

L’arrangement et la disposition des matériaux doivent être attribués à Isaïe lui-même. Nulle raison, quoi qu’en disent les auteurs rationalistes, ne nous porte à admettre le contraire, et à refuser au grand prophète le mérite d’avoir disposé ses oracles dans l’ordre actuel. Au surplus une raison d’analogie nous donne le droit de penser et de croire qu’Isaïe est l’auteur de l’arrangement du livre : on peut retenir, comme un principe général de critique littéraire, que les livres prophétiques, quels qu’en soient le contenu, l’étendue et les tendances, ont été mis en ordre par les auteurs dont ils portent le nom, à moins que des raisons sérieuses ne nous forcent à soutenir le contraire. C’est ainsi que, de l’aveu de tous les critiques, Ézéchiel a disposé, dans le recueil biblique, la collection de ses prophéties telle que nous l’avons aujourd’hui. Jérémie nous apprend lui-même qu’il a écrit et publié deux fois ses propres prophéties. Jer., xxxvi, 2, 28, 32. Nous devons donc conclure qu’Isaïe fit de même pour ce qui concerne les siennes. Enfin le titre des prophéties d’Isaïe, i, 1, n’est nullement limitatif : il ne fait aucune distinction ; dès lors, comme il nous donne le droit de conclure à l’authenticité de toutes les prophéties, il nous donne aussi celui de conclure à leur arrangement par Isaïe lui-même. — Les critiques qui ont nié qu’Isaïe fût l’auteur de la disposition actuelle, et qui nous parlent de compilateur et de compilation, s’appuient sur deux raisons : 1o Le manque d’unité littéraire ; le livre d’Isaïe, disent-ils, manque d’unité littéraire ; par conséquent beaucoup de prophéties ne sont pas d’Isaïe lui-même, et la disposition actuelle est l’œuvre d’un compilateur. — Ce reproche n’est pas fondé, comme on le verra plus loin

aux paragraphes sur l’unité littéraire et l’authenticité des prophéties d’Isaïe. — 2o La place de certaines prophéties, xxxvi-xxxix ; la place naturelle de ces oracles, dit-on, n’est pas le livre d’Isaïe, mais le IV » livre des Rois, xviii-xx, d’où elles furent extraites par le compilateur du livre d’Isaïe. — Leur place est aussi dans le prophète à cause de certains détails touchant son œuvre prophétique, et l’accomplissement de quelques-unes dé ses prédictions les plus remarquables. Driver, Introduction, p. 226-227. L’auteur de l’histoire des Rois a pu assurément les tirer du livre d’Isaïe.

III. Division.

Le livre’d’Isaïe se divise en deux parties principales : i-xxxix et xl-lxvi. La première partie embrasse d’une manière générale des oracles sur des sujets variés, faits également à des époques diverses, 30us les règnes d’Ozias, de Joatham, d’Achiaz et d’Ézéchias. La seconde partie est surtout messianique, s’il faut la caractériser d’un mot unique et synthétique ; elle s’occupe presque exclusivement de l’avènement du Rédempteur du monde.

I. subdivision de la première partie.

La première partie se subdivise en quatre sections ou groupes ; 1o i-vi ; après un court prologue, ce groupe comprend les oracles relatifs au peuple de Dieu, datant du temps d’Ozias et de Joatham ; 2o vii-xii ; ce groupe contient les prophéties de l’époque d’Achaz, et qui ont pour objet principal la venue du Messie, d’Emmanuel ; c’est pour cela que ces chapitres portent le nom de Livre d’Emmanuel ; 3o xiii-xxvii, prophéties contre les nations étrangères ; 4o xxviii-xxxix, prophéties faites sous le roi Ezéchias, et qui s’étendent jusqu’à l’extermination de l’armée de Sennachérib par l’ange du Seigneur. Cf. Vigouroux, Man. bibl., 11e édit., t. ii, p. 621 ; Knabenbauer, Comment, in Is. proph., Paris, 1887, t. i, p. 1112 ; Trochon, Isaîe, Paris, 1878, p. 17.

II. SUBDIVISION DE LA SECONDE PARTIE.

La seconde

partie se subdivise en trois sections ou séries de discours, divisés par groupes de neuf, c’est-à-dire que chaque série embrasse neuf discours : 3 X 3. Cf. Rûckert, Uebersetzung und Erlâuterurig hebrâischer Propheten, 1831. Le tout nous donne donc 27 discours, c’est-à-dire un nombre de discours égal au nombre des chapitres de la seconde partie du livre, quoiqu’il n’y ait pas toujours correspondance entre les chapitres et les discours. — i T ° Série ; xl-xlvhi : l" Discours, xl ; 2 « , xli ; 3o, xliixliij, 13 ; 4o, xliii, 14-xliv, 5 ; 5 « , xliv, 6-23 ; 6e, xuv, 24-xlv ; 7e, xlvi ; 8o, xlvii ; 9 « , xlviii. — 2o Série : xlixlvii. Ier Discours, Xlix ; 2o, L ; 3e, li ; 4o, lii, 1-12 ; 5o, lii, 13-liii ; 6% liv ; 7e, lv ; 8e, lvi, 1-8 ; 9o, lvi, 9-lvii. — 3’Série : lviii-lxvi : 1 « Discours, lviii ; 2e, lix ; 3e, lx ; 4 « , lxî ; 5o, lxii ; 6o, lxiii, 1-6 ; 7’, lxiii, 7-lxiv ; 8 « , lxv ; 9o, lxvi. Cf., pour différentes autres divisions et subdivisions, Trochon, Isaîe, p. 14-16 ; B. Neteler, Dos Buch Isaias aus dem Urtext ûbersetzt, in-8o, Munster, 1876 ; A. Kohling, Der Prophet Jesaja ; in-8o, Munster, 1872.

m. principe de ce classement. — Les critiques ne sont pas fixés sur le principe qui a présidé à ce classement. Saint Jérôme, J. H. Michælis, Rosenmuller, Hengstenberg se prononcent pour l’ordre chronologique ; Vitringa et Jahn sont partisans de l’ordre logique. Enfin Gesenius, Delitzsch et Eeil admettent un ordre en partie chronologique, en partie logique. C’est cette troisième opinion qui semble se rapprocher le plus de la vérité. On se convainc en effet par une simple lecture du livre que, quoique l’auteur dans le groupement des sections et des parties ait tenu compte de l’ordre logique on de la diversité des matières, c’est cependant l’ordre chronologique qui domine l’ensemble et se manifeste d’une manière assez sensible : « La chronologie, dit Hengstenberg, est le principe suivant lequel les prophéties d’Isaïe sont arrangées, » Christotogy of tlw Old Testament translatée from the german by E. Meyer, in-8o, Edimbourg, 1872, t. ii, p. 2. Si ce principe est trop

exclusif, il n’en reste pas moins prépondérant. Certains auteurs regardent même comme « assez vraisemblable que le prophète ait réuni d’abord les chap. i-xii, c’est-à-dire les prophéties du temps d’Ozias, de Joatham et d’Achaz, puis les chap. xiii-xxiii et xxrv-xxxix, datant du temps d’Ézéchias, et enfin les chap. xl-lxvi qui sont de la fin de sa vie ». Vigouroux, Man. bibl., t ii, p. 604.

IV. Analyse du livre.

I. argument général. — Tout dans les prophéties d’Isaïe tend au salut du peuple d’Israël et, par voie de conséquence, de l’humanité entière. Le prophète montré avec la plus grande clarté et une force irrésistible quels sont les obstacles qu’il faut éviter dans la vie privée et publique et ce que doivent faire les particuliers et les nations pour obtenir le salut de Dieu ; comment on doit s’y préparer, et comment on doit le désirer et le chercher ; il décrit enfin l’excellence de ce salut, et la béatitude que procurera le règne messianique. C’est, à proprement parler, l’œuvre de la Rédemption future qui forme comme le nerf et le point central de ce livre admirable. Tout converge vers ce but, le laisse entrevoir dans le lointain et l’indique d’une manière de plus en pIhs pressante à l’esprit du lecteur. Knabenbauer, In Is., t. i, p. 11, § m.

II. première partie, i-xxxix. — Premier groupe : Prophéties du temps d’Ozias et de Joatham, i-vi. — Ce premier groupe se subdivise en quatre parties. — 1o Prologue, î. Ce prologue, forme comme une introduction à tout le livre ; il nous indique en effet au début même, i, 1, le titre, « vision, » le sujet, « sur Juda et Jérusalem-, » et la date, « pendant les jours d’Ozias, de Joatham, d’Achaz et d’Ézéchias, rois de Juda. » Leimot vision, hazôn, c’est-à-dire « révélation », qu’on trouve toujours employé au singulier, a un sens collectif, équivalent à celui de recueil ou collection de « visions ». Le centre autour duquel gravitent toutes ces révélations, c’est Juda et Jérusalem. — Les ꝟ. 2-31 peuvent être regardés, comme la préface de tout le livre ; bien qu’on admette parmi les catholiques que cette préface a été composée par Isaîe lui-même, on en ignore pourtant la date précise. Les y. 2-4 sont une plainte contre l’ingratitude du peuple juif ; le ꝟ. 6, qui retrace le déplorable état d’Israël, a été appliqué par la liturgie catholique à la passion du Sauveur. Les ꝟ. 7-8 se rapportent certainement à un temps où le royaume de Juda était ravagé par une armée étrangère ; mais quelle est cette invasion ? Le royaume de Juda eut à subir, du temps d’Isaïe, trois invasions : a) à la fin du règne de Joatham ; b) sous Achaz, par les Israélites et les Syriens ; cf. IVReg., xv, 37 ; xvi, 5 ; Is., vii, 1 ; c) sous Ezéchias, par les Assyriens. Cf. IV Reg., xviii, 13 ; Is., xxxv, 1. Il est difficile de rapporter Is., i, 7-8 à la première invasion, car en somme, malgré certaines défaillances, le règne de Joatham fut assez heureux ; il est plus vraisemblable que ce passage vise la deuxième invasion sous Achaz. — Malgré les bénédictions de Dieu durant les règnes d’Ozias et de Joatham, et les calamités, des invasions étrangères, le peuple de Juda n’a pas été ému : il est resté froid et impassible. Dieu n’a donc qu’à donner libre cours à sa justice, et à faire fondre sur le peuple les châtiments qu’il mérite ; il le purifiera par les tribulations, mais il conservera un noyau choisi. Is., i, 9-31. Pour ce qui concerne ꝟ. 9, cf. Gen., xix, 24 ; Rom., ix, 29. La péricope 25-31, où le prophète annonce que le peuple sera enfin délivré et rétabli dans un état plus heureux., se rapporte, d’une façon particulière, à la venue du Messie, le vrai libérateur.

2o Prophéties sur Juda, u-iv. — Ces deux chapitres forment un tout complet et, pour ainsi dire, isolé ; le commencement et la fin de ce morceau se correspondent exactement ; la prospérité de Sion sous le règne messianique, H, 2-3, et iv, 5-6. D’abord un court prologue, h, 1, où le mot verbum a le sens de « vision ». Toutes les nations accourront à la montagne de Sion, ii, 2-4 ; cf. Michée, contemporain d’Isaïe, iv, 1-3. Suivent

les menaces : la maison de Jacob sera rejetée à cause de son idolâtrie, de son avarice et de ses autres crimes, il, 5-10 ; les orgueilleux seront humiliés et Dieu exalté, jꝟ. 11-12. — Nouvelles menaces : les Juifs seront abandonnés à cause de leurs péchés, iii, 1-3 ; ils tomberont sous la domination d’enfants et d’hommes efféminés, ꝟ. 4 ; ils se précipiteront les uns contre les autres, mais ils ne pourront trouver de chef, ꝟ. 5-7. Le peuple se trouve dans un état lamentable, mais la faute en est à ses chefs, qui ont exercé sur lui toute sorte d’exactions. Lé prophète s’élève vivement contre les iniquités des chefs du peuple, ꝟ. 8-15 ; il adresse de vifs reproches aux femmes juives, aux filles de Sion, à cause de leur vanité, de leur orgueil et de leur luxe, ꝟ. 16-24. Cf. E. Fontenay, Les bijoux anciens et modernes, in-8o, Paris, 1887. Il revient aux menaces contre les hommes de Sion, ꝟ. 25-26 ; les hommes manqueront dans Juda ; les veuves et les femmes seront tellement nombreuses, que sept prieront à la fois un homme de les prendre pour épouses, iv, 1. Cependant, au milieu de cette désolation, le germe du Seigneur sera dans la gloire et la magnificence, ꝟ. 2 ; enfin les restes d’Israël, après avoir été purifiés de leurs souillures, seront sauvés et mis en sûreté, ꝟ. 3-6. — Cette prophétie présente deux particularités : premièrement, c’est la seule qui commence par une promesse : « Et il y aura, s> il, 2 ; secondement, les mots « dans les derniers jours », il, 2, désignent toujours, dans le langage prophétique, les temps messianiques.’3o Parabole de la vigne, v. — Sous l’image de la vigne stérile et dévastée, le prophète prédit le châtiment des Juifs, v, 1-7 ; description de leurs vices : avarice, convoitise, ivrognerie, mépris de Dieu, ꝟ. 8-12 ; c’est pour cela que le peuple est conduit en captivité, ꝟ. 13 ; que l’enfer engloutira Israël, t, 14. Les orgueilleux seront humiliés, Dieu exalté et le juste heureux, ꝟ. 1517. Malheurs (vas) contre les pécheurs de toute espèce, j^. 18-24 ; ils seront brûlés, et leurs rejetons déracinés parce que la. colère du Seigneur s’est allumée contre son peuple. Il lèvera un étendard qui servira de signal aux nations étrangères ; un peuple viendra des extrémités de la terre et ravagera la Judée, ꝟ. 25-30. Pour la parabole de la vigne, cf. Jer., ii, 21 ; Matth., xxi, 3343 ; Marc., xii, 1-12 ; Luc, xx, 9-16.

4o Vocation d’Isaïe au ministère prophétique, vi. — Après avoir vu Dieu assis sur un trône de gloire, entouré de séraphins qui chantent 7 les louanges du Très-Haut, le prophète condamne amèrement son silence, vi, 1-5 ; un séraphin vole vers lui, et lui purifie les lèvres avec un charbon, ꝟ. 6-7 ; aussitôt, il s’offre à Dieu pour aller prophétiser où il lui plaira de l’envoyer, ꝟ. 8. Il prédit l’aveuglement de Juda et la désolation de ses villes, ꝟ. 9-11 ; cf. Matth., xiii, 14 ; Marc, iv, 12 ; Luc, viii, 10 ; Joa., xii, 40 ; Act., xxviii, 26 ; Rom., xi, 8 ; en dernier lieu, il annonce la multiplication et la conversion de ceux qui auront survécu, ꝟ. 12-13. — La vocation d’Isaïe au ministère prophétique a donné lieu à bien des conjectures. « Les interprètes ont examiné : 1. quel a été l’objet de cette vision prophétique ; 2. quelle en est la scène ; 3. quelle en est la nature. — 1. Selon quelques-uns, l’objet de la vision a été le Père, selon d’autres Dieu le Fils, et selon d’autres la Sainte Trinité. Ce dernier sentiment est plus probable, attendu que l’Église, dès le premier siècle, a reconnu une allusion aux trois personnes divines dans les mots Sanctus, sanctus, sanctus, et dans cette interrogation : Quem mittam (unité de substance), et quis ibit nobis (pluralité des personnes) ? — 2. La scène s’est passée, selon les uns, dans le Temple de Salomon ; selon d’autres, dans le ciel montré à l’imagination du prophète sous des formes semblables à celles du temple. — 3. On peut admettre une apparition réelle, comme celles dont furent honorés tant d’autres avant Isaïe. Cependant Cornélius a Lapide, après saint Augustin, soutient que

tout s’est passé dans l’imagination du prophète, et ce sentiment paraît bien plus probable. » Le Hir, Les grands prophètes, ih-12, Paris, 1877, p. 54-55.

Deuxième groupe : prophéties du temps d’Achaz, ou Livre d’Emmanuel, vii-xii. — Ce groupe embrasse quatre prophéties : une formule particulière, qui indique le commencement de chaque prophétie, vii, 1 ; vii, 10 ; vm, 1 ; viii, 5, rend cette division toute naturelle. Ce sont comme quatre discours : — 1o Préparation à la prophétie d’Emmanuel, vii, 1-9. Les prophéties contre Samarie et contre Damas servent de préparation. Jérusalem est menacée par les rois de Syrie et d’Israël, Rasin et Phacée ; on annonce que l’armée syrienne est campée sur le territoire d’Éphraïm, ꝟ. 2 a, ou peut-être que les deux peuples sont alliés pour une action commune, ^’.5 ; à cette nouvelle le roi et le peuple sont saisis de crainte, ꝟ. 2 b. Cf. IV Reg., xvi, 5. Isaïe console Achaz et relève son courage en l’assurant que ses ennemis ne réussiront pas dans les projets qu’ils avaient formés de se rendre maîtres de Juda et d’y établir comme roi le fils de Tabéel ; il lui déclare en même temps que, dans soixante-cinq ans, Éphraïm, le royaume des dix tribus, cessera de former un peuple à part et que Samarie deviendra la capitale d’Éphraïm, ꝟ. 3-9. — 2’Prédiction de la naissance d’Emmanuel, ꝟ. 10-25. Le prophète fait connaître d’ahord les circonstances de la prophétie. Achaz, abattu et effrayé par l’approche de. l’ennemi, paraissait disposé à appeler à son secours le roi d’Assyrie, Théglathphalasar. Isaïe l’engage à mettre uniquement sa confiance en Dieu et lui déclare que, comme gage de la protection divine sur son royaume, il peut demander à Dieu un signe, c’est-à-dire un miracle ; le roi s’y refuse, ꝟ. 10-13. Isaïe donne alors ce signe de sa propre initiative : ce signe c’est la naissance du Fils de la Vierge ; en même temps il lui donne l’assurance que, dans l’espace de deux ou trois ans, Juda sera délivré de la Syrie et d’Israël, mais qu’il sera châtié par un autre instrument des vengeances divines : le roi d’Assyrie, ꝟ. 14-17. Un événement prochain, l’invasion de la Judée par les armées de l’Egypte et de l’Assyrie, confirme la vérité de l’oracle ; ces armées ravageront toute la Palestine, comme un rasoir coupe tous les poils sur lesquels il passe, ꝟ. 18-20. Désolant tableau des ravages causés par cette invasion : les champs seront dévastés, la terre ne produira plus que des ronces et des épines, ꝟ. 21-25.

3o Signe prochain de la délivrance de Juda ; promesse du fils d’Isaïe, viii, 1-4. Dieu ordonne à Isaïe d’écrire sur un grand livre les mots : Mahêr-iàldl-hâs-baz ; à ce sujet le prophète choisit deux témoins : le prêtre Urie, . et Zacharie, fils de Barachie, ꝟ. 1-2. Le prophète a un fils qu’il nomme des mots écrits sur le grand livre, ꝟ. 1 : Mahêr-sâlâlrhâs’-baz, qui signifient : « qu’on se hâte de piller, de prendre le butin » (Vulgate : Accéléra spolia, detrahere ; festina prxdari), avant que l’enfant sache parler, c’est-à-dire dans un an et demi ou deux ans, Damas et Samarie auront succombé sous les coups du roi des Assyriens, ꝟ. 3-4. Cf. IV Reg., xv, 29 ; xvi, 9 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., Paris, 1896, t. iii, p. 521-526. — 4o Triomphe du peuple de Dieu sur ses ennemis au temps d’Achaz, viii, 5-xii. Ce triomphe est le symbole d’un triomphe plus grand qui arrivera au temps du Messie. Israël et Juda seront punis pour avoir placé leur confiance dans le secours de l’étranger ; ils seront opprimés par les Assyriens. Cependant Emmanuel viendra un jour les consoler au milieu des ténèbres et des tristesses où ils sont plongés ; il leur naîtra un enfant, et cet enfant affermira à jamais le trône chancelant de David ; son empire aura une très grande, étendue, viii, 5-ix, 7. Cet enfant ne paraîtra toutefois sur la terre que lorsque les enfants de Jacob, et en particulier Éphraïm, auront subi les plus durs châtiments : la verge du Seigneur frappera sur Israël, et n’épargnera personne, rx, 8-x, 4. Après s’être servi

d’Assur comme d’un instrument pour accomplir ses desseins, Dieu brisera sa puissance, laquelle représente tous les ennemis de son peuple ; le reste d’Israël se convertira ; la tige, qui sortira de Jessé, changera la face du monde, et Sion chantera à son Dieu un cantique d’actions de grâce, x, 5-xii.

Troisième groupe : prophéties contré les nations étrangères, xm-xxvii. — Ces prophéties forment comme le complément de la prophétie d’Emmanuel, et sont probablement, dans leur généralité, de la même époque que celles du deuxième groupe. Elles portent un nom particulier, maèsd’, onus, xiii, 1. Ce mot peut signifier simplement « prophétie. » Cf. Jer., xxiii, 33-39 ; Zach., xii, 1 ; Mal., i, 1. Isaïe le prend toujours dans le sens d’une annonce de mauvais augure, d’un oracle plein de menaces ; Is., xiii, 1 ; xiv, 28 ; xv, 1 ; xvii, 1 ; xix, 1 ; xxi, 1, 11, 13 ; xxii, 1 ; xxiii, 1 ; xxx, 6. Onus est la traduction du mot massd’donnée par saint Jérôme ; la raison qu’il en donne est la suivante : ubicumque præpositum [onus] fuerit, minarum plena sunt qute dicuntur. In Is., xiii, t. xxiv, col. 155. Cf. aussi InHabac, Prol., t. xxv, col. 1273 ; C. Rohart, De oneribus biblieis contra Gentes, in-8 1’, Lille, 1893, c. i, p. 15-39. — Ces prophéties se divisent en deux parties : — i. Contre les peuples étrangers, xm-xxiii ; elles s’étendent à peu prés à tous les peuples connus des Hébreux, et sont au nombre de treize : 1. Contre les Chaldéens, héritiers des Assyriens, xm-xiv, 23. — 2. Contre les Assyriens, xiv, 24-27. - 3. Contre les Philistins, xiv, 28-32. — 4. Contre les Moabites, xv-xvi. — 5. Contre Damas et Israël, xvii. — 6. Contre l’Ethiopie, qui dominait en Egypte à l’époque d’Isaïe, xviii. — 7. Contre l’Egypte, xix-xx. — 8. Contre Babylone, xxi, 1-10. — 9. Contre Duma (Gen., xxv, 14 ; I Par., i, 30), .xxi, 11-12. —10. Contre l’Arabie, xxi, 13-17. — 11. Contre Jérusalem, xxii, 1-14. — 12. Contré Sobna, préposé du temple, xxii, 15-25. — 13. Contre et en faveur de Tyr, xxiii. — 2. Prophéties eschatologiques, xxiv-xxvii ; elles concernent la fin du monde ; cf. aussi Zach., ix-xiv. Cette partie se subdivise en trois sections : — 1. Jugement et catastrophe de la terre, xxiv.

— 2. Chant de triomphe, xxv-xxvii, 6 ; a) sur la ruine de la cité qui opprimait le monde, xxv, 1-8 ; 6) sur la ruine de Moab, xxv, 9-12 ; c) sur la restauration d’Israël, xxvi ; d) sur la fertilité de la vigne bénie de Jéhovah, xxvii, 2-6. — 3. Dieu punit et sauve Israël, xxvii, 7-13. Il existe un enchaînement régulier entre les di verse s prophéties de ce groupe ; les prophéties contre les nations suivent une marche assez naturelle : « Le cycle de ces prophéties s’ouvre par Babylone, qui devait être l’héritière de la puissance de Ninive et l’ennemi le plus redoutable de Juda, xm-xiv, 27 ; viennent ensuite les plus proches voisins des Juifs, les Philistins à l’ouest, xiv, 28-32 ; les Moabites à l’est, xv-xvi ; le royaume schismatique d’Israël au nord, avec son confédéré, le royaume syrien de Damas, xvii ; de là, Isaïe passe aux peuples plus éloignés, à l’Egypte et l’Ethiopie, au sud-ouest, xviii-xx ; à Babylone, siège de l’idolâtrie, à l’est, xxi, 1-10 ; il se rapproche alors de nouveau de Jérusalem, et, passant par l’Idumée, xxi, 11-12, et l’Arabie, xxi, 1317, arrive jusqu’à la ville sainte, xxii, 1-14 ; là, il poursuit de ses menaces prophétiques Sobna, préposé du temple, et lui annonce qu’il aura pour successeur Éliacim, xxii, 15-25 ; enfin ses regards s’arrêtent sur Tyr, la ville insulaire de la Méditerranée. » Vigouroux, Man. 616î., ll « édit., t. ii, p. 648. Quant aux prophéties eschatologiques, elles sont comme la conclusion des premières ; « Les jugements particuliers que Dieu porte contre chaque peuple dans les oracles contre les Gentils aboutissent ici au jugement final, comme les fleuves divers qui se jettent. dans le même océan, et le salut dont on vient de voir poindre l’aurore brille maintenant dans tout l’éclat de son midi. » Frz. Delitzsch, Der Prophet Jesaia, 1866, p. 271.

Quatrième groupe : prophéties du temps d’Ézéchias relatives au peuple de Dieu, xxviii-xxxix. — Ce groupe se subdivise en deux parties : 1o Oracles concernant exclusivement le royaume de Juda et Jérusalem, xxviiixxxv ; —2o Épisode de la vie d’Ézéchias ; Isaïe intervient directement de la part de Dieu auprès du roi, pour l’instruire, l’exhorter et lui dévoiler l’avenir, xxxvi-xxxix.

— Ces deux parties se relient de la manière suivante : l’invasion de la Palestine par Sennachérib, roi d’Assyrie, est le plus grand événement du règne d’Ézéchias ; dès lors elle est comme le centre de toutes ces prophéties. Les chapitres xxviii-xxxv annoncent les maux que les Assyriens causeront à Jérusalem ; l’inutilité du secours de l’Egypte sur lequel Juda avait fondé des espérances ; enfin la délivrance de la ville par Dieu. Les chapitres xxxvi-xxxvii sont la conclusion de ces prophéties ; ils nous montrent comment s’accomplissent les prédictions des chapitres précédents, et comment Sennachérib, dont l’armée venait d’être exterminée par l’ange du Seigneur, dut se retirer sans avoir pu exécuter ses menaces. Par analogie avec ces événements, Isaïe joint quelques prophéties faites à l’occasion de la maladie d’Ézéchias, xxxviii, et à l’occasion de l’ambassade de Mérodach-Baladan, xxxix. Cf. IV Reg., xviii, 13-xx ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6o édit. t : iv, p. 1-65 ; Cylindre de Taylor, col. iv, lig. 8-11, 20-41 ; G. Smith, History of Sennachérib, 1878, p. 60-61, 62-64 ; Josèphe, Ant. jud., X, l, 4 ; Maspero, Rist, anc., t. iii, p.. 292-295 ; J. Meinhold, Die Jesajærzâhlungen Jesaia 36-39, in-8o, Gœttingue, 1898. — 4™ partie, xxviii-xxxv. Elle se divise en deux sections : — 1. La première section embrasse cinq discours contenus dans six chapitres, xxviiixxxiii. Ces cinq discours commencent tous par la menace Vee ; xxviii, 1 ; xxix, 1 ; xxx, 1 ; xxxi, 1 ; xxxiii, 1. Toutefois le sujet en est le même : l’invasion de la Judée par Sennachérib, considérée comme un châtiment divin ; la réprobation des moyens humains employés pour triompher de l’ennemi ; la promesse du triomphe par le règne messianique ; — 2. La seconde section embrasse les chapitres xxxiv-xxxv ; elle n’est que le développement de la dernière pensée : le triomphe futur par le règne messianique ; elle est donc comme la conclusion de la première section. Le prophète montre le Seigneur jugeant tous les peuples, et particulièrement l’Idumée, symbole des ennemis de l’Église. Sion règne sur toutes les nations par le Christ. — 2o partie, xxxvixxxix ; Nous y voyons Ézéchias aux prises avec Sennachérib et son messager Rabsacés, sa maladie, sa guérison et son cantique d’actions de grâces.

III. SECONDE partie, xl-lxvi. — 1o Date. — Cette seconde partie date des derniers jours, de la fin de la vie d’Isaïe. Le vieux prophète, arrivé presque au terme de sa carrière, fait entendre les derniers accents, et prononce les derniers oracles sur les temps à venir.

2o Sujet.

« Les prophéties contenues dans ces

trois sections [de la 11e partie] ne sont que des variations d’un même thème, mais elles ont cependant chacune une pensée particulière et une modalité propre, annoncée du reste dès les premiers mots. Elles ont pour sujet principal de consoler le peuple et de l’exhorter à la pénitence, en lui annonçant le salut qui est proche. De plus, dans chaque section, le prophète établit un contraste et une sorte d’antithèse qu’il met au premier plan ; dans la première, xl-xlviii, c’est la lutte de Jéhovah et des idoles, d’Israël et des païens ; dans la seconde, xlixlvii, c’est l’opposition entre les souffrances du serviteur de Jéhovah [le Messie] dans le présent, et sa glorification dans l’avenir ; dans la troisième, c’est la contradiction d’Israël lui-même, hypocrite, impie, apostat d’une part, et, de l’autre, fidèle, malheureux, persécuté. La 1™ section annonce la délivrance de la captivité de Babylone : cette délivrance est l’accomplissement des prophéties, la honte et la ruine des idoles et de leurs adorateurs. La

seconde nous montre les humiliations profondes du serviteur de Jéhovali devenant la source de sa gloire (cf. Luc, xxiv, 26) et élevant en même temps Israël lui-même à la hauteur de sa vocation divine. Enfin ce n’est pas sans raison que Hahn a trouvé le résumé des idées principales des trois sections dans les trois propositions du ꝟ. 2 du chap. XL : Compléta est malitia ejus, dimissa est iniquitas illius, suscepit de manu Domini dupliciapro omnibus peccatis suis. La fin de la captivité de Babylone est, en effet, l’idée-mère de la première section ; l’expiation du péché par le sacrifice volontaire du serviteur de Jéhovah, l’idée-mère de la seconde, et la gloire, surpassant de beaucoup les souffrances expiatrices, l’idée-mère de la troisième. La promesse s’élève ainsi par degrés dans les discours 3x9 (voir III, II, col. 947), jusqu’à ce qu’elle atteigne enfin son apogée, lxv-lxvi, où le temps et l’éternité se confondent ensemble. » Frz. Delitzsch, Der Prophet Jesaia, p. 383-384. — « Mais ce roi terrestre (Cyrus) ne fera que peu de choses, comparativement à ce qu’il y a à faire : un autre joug, bien plus pénible que celui de Babylone, pèse sur Israël et sur l’humanité entière : c’est le joug du péché. Un libérateur paraîtra, plus puissant que Cyrus et que tous les rois de la terre ; il délivrera son peuple de la servitude du péché et fondera un royaume dans lequel entreront tous ceux qui voudront le servir et reconnaître son empire. Ce ne sera qu’une partie du peuple, au reste, qui retournera à Jéhovah et sera une semence sainte (Is., vi, 13 ; x, 22). Cest à ce faible reste que Jéhovah adresse d’une manière toute particulière ses prophéties sur l’œuvre qu’accomplira son serviteur… Les chapitres xl-xlviii mettent en lumière la majesté de Jéhovah qui se manifeste par la délivrance matérielle de son peuple ; mais déjà apparaissent les promesses de la délivrance spirituelle. La personne du serviteur de Dieu forme le centre et le point culminant dans les chapitres xlixlvii. Enfin nous contemplons les résultats de l’œuvre du Serviteur et la félicité de ses élus, lxiii-lxvi. » E. Schmutz, Le serviteur de Jéhovah, d’après Isaïe, xl-lxvi, in-8o, Strasbourg, 1858, p. $1-$2.

3o Style.

« Relativement au langage, il n’y’a rien

de plus achevé, de plus lumineux dans tout l’Ancien Testament que cette trilogie de discours d’Isaïe. Dans les chapitres i-xxxix, le langage du prophète est généralement plus concis, plus lapidaire, plus plastique, quoique déjà, là aussi, son style sache prendre toutes sortes de couleurs. Mais ici, xl-lxvi, où il n’est plus sur le terrain du présent, où, au contraire, il est ravi dans un lointain avenir comme dans sa patrie, le langage lui-même prend en quelque sorte le caractère de l’idéal et je ne sais quoi d’éthéré- ; il est devenu semblable à un large fleuve, aux eaux brillantes et limpides, qui nous transporte comme dans l’éternité, sur ses flots majestueux et en même temps doux et clairs. Dans deux passages seulement, il est dur, trouble, lourd, c’est liii, et liv, 9-lvii, 11o. Le premier reflète le sentiment de la tristesse, le second celui de la colère. Partout, du reste, se manifeste l’influence du sujet traité et des sentiments qu’il produit. Dans lxiii, 7, le prophète prend le ton du (efillàh (ou de la prière) liturgique ; dans lxiii, 19 b lxiv, 4, la tristesse entrave le cours de sa parole ; dans lxiv, 5, comme dans Jérémie, iii, 25, on entend le ton du Viddui (la confession) liturgique. » Delitzsch, Jesaia, p. 384.

4 « Contenu. — Cette seconde partie est d’une incomparable élévation au point de vue du contenu. On s’en convaincra par un simple aperçu. Elle débute par une prophétie semblahlé aux paroles de saint Jean-Baptiste. Is., XL, 3-4 ; Marc., i, 3. Son commencement est donc le même que celui de l’Évangile de saint Marc. Elle se termine par l’annonce de la création d’un nouveau ciel et’d’une nouvelle terre ; par là elle ressemble à l’Apoca lypse qui se termine de la même façon. Is., lxv, 17 ; lxvi, 22 ; Apoc, xxi, 1. Le milieu de cette partie, lii, 13-uii, annonce les souffrances et la gloire du Christ ; ces souffrances de l’Homme-Dieu sont décrites avec autant d’éloquence et de clarté que dans les épltres de saint Paul. L’auteur de cette seconde partie réunit donc en lui l’évangéliste (au commencement de sa prophétie), l’apôtre (au milieu), le prophète (à la fin). « Isaïe a légué à Israël ses sublimes discours pour qu’ils pussent le consoler au milieu de la captivité de Babylone. On les a comparés aux derniers discours que prononça Moïse dans la plaine de Moab et qui ne us ont été conservés dans le Deutéronome ; bien mieux encore, aux discours de Notre-Seigneur, après la Cène, que nous lisons dans l’Évangile de saint Jean. Par leur élévation, leur profondeur, ils comptent en effet parmi les plus belles pages de nos Saints Livres, et il a été donné au seul serviteur de Jéhovah, quand il a paru visiblement au milieu des hommes, d’en briser tous les sceaux et de nous en dévoiler tous les mystères. » Vigouroux, Manuel biblique, t. ii, p. 659 ; Delitzsch, Jesaia, p. 384-385.

5o Première section : le vrai Dieu et les faux dieux, xl-xlviii. — 1o discours : Introduction, xl. Ce discours nous fait connaître l’objet même de la mission du prophète, qui est de consoler son peuple et lui annoncer le salut, en rappelant ses pensées et son attention sur la puissance de Dieu et la gloire du règne messianique. Les y. 1-Il sont le prologue des 27 discours : les ꝟ. 3-8 prédisent la mission de saint Jean-Baptiste. Cf. Matth., iii, 3 ; Marc, i, 3 ; Luc, iii, 4 ; Joa., i, 23. L’idolâtrie est une vraie folie ; les Juifs ne doivent compter que sur le secours du Seigneur, xl, 12-31. — 3e discours, xli. Dieu maître de l’univers et de l’avenir. Le prophète montre aux païens que le Seigneur est le maître de l’univers, et appelle Cyrus du nord-est, ꝟ. 2, 25 ; les succès de Cyrus seront une preuve de la supériorité de Dieu sur les idoles ; ils seront la ruine de l’idolâtrie et le salut de son peuple, ꝟ. 1-20 ; Dieu annonce à l’avance ce qu’il veut accomplir, ꝟ. 21-24, pour que chacun sache qu’il est le souverain maître de tout, et que l’avenir lui appartient, ꝟ. 25-29. — 3’discours, xlii, 1-xliii, 13. Il s’agit du serviteur de. Dieu et du médiateur d’Israël ; le prophète commence par introduire le serviteur de Dieu, ou le Messie, xlii, 1. Ce serviteur sera doux et pacifique, ꝟ. 23 ; il apportera à tous le salut et la rédemption, ꝟ. 7, 16 ; par conséquent, Israël doit se convertir et chercher de nouveau son Dieu et son Sauveur, xlii, 18-xliii, 13.

— 4e discours, xliii, 14-xliv, 5. Israël sera vengé et délivré de ses ennemis ; Dieu vengera Israël des Chaldéens, en renversant l’empire de Nabuchodonosor et la puissance des Chaldéens, xliii, 14-15 ; autrefois il délivra son peuple de la servitude d’Egypte ; ce prodige, il va le renouveler, ꝟ. 16-21, et cela non à cause des mérites de son peuple, mais par pure bonté, par grâce, ꝟ. 22-28 ; Dieu répandra sur les Juifs son esprit et ses bénédictions, et Israël prospérera et sera heureux, xliv, 1-5. — 5e discours, xliv, 6-23. Le prophète établit un contraste entre Dieu et les idoles. Dieu est le commencement et la fin de tout, l’alpha et l’oméga, xliv, 6. Cf. Apoc, i, 8, 17 ; xxii, 13. Israël ne doit pas craindre, mais avoir confiance en Dieu qui lui annonce à l’avance ce qu’il se propose de faire, xliv, 8 ; les dieux des Gentils trompent leurs adorateurs parce qu’ils ne sont que de vaines images, ꝟ. 9-17 ; les païens sont tellement aveuglés qu’ils ne voient pas le néant des idoles qu’ils fabriquent de leurs mains, jfr. 12-20 ; il exhorte Israël à revenir à Dieu qui l’a comblé de bienfaits, ꝟ. 21-23. — & discours, xliv, 24-xlv. Le prophète nomme Cyrus, l’oint du Seigneur, le futur libérateur d’Israël ; Dieu accomplira ses promesses, il relèvera Jérusalem, et ouvrira les portes de Babylone à Cyrus, son oint, lequel sera son instrument et restaurera la ville sainte, xliv, 24-28 ; Jéhovah conduira Cyrus comme par la main, et le fera marcher de succès en

succès ; rien ne résistera devant lui, afin que l’univers reconnaisse la puissance de Jéhovah et que les bénédictions célestes descendent sur la terre, xlv, 1-8 ; Israël doit donc se soumettre au Seigneur, et ne pas craindre Cyrus, qui est l’instrument des desseins de la Providence, ꝟ. 9-14 ; Israël reconnaît son Dieu et la vanité des idoles, ꝟ. 15-17 ; la promesse s’accomplira et les Gentils eux-mêmes se convertiront et confesseront Dieu, t- 12-21 ; tous les peuples doivent se convertir à Dieu, ꝟ. 22-26.

— 7e discours, xj.vi. Isaïe prédit la chute des dieux de Babylone ; les dieux de Babylone, parmi lesquels Bel et Nabo sont expressément nommés, seront brisés, ꝟ. 1-2 ; Dieu exhorte Israël à le reconnaître et montre à nouveau la vanité des idoles, t. 3-7 ; que les adorateurs des idoles le remarquent et comprennent que Dieu sait et gouverne tout, ꝟ. 8-11 ; que les endurcis eux-mêmes comprennent que le salut est proche, t- 12-13. — 8’discours, xlvii. Prédiction de la chute de Babylone ; la superbe ville tombera à cause de son orgueil, sera réduite en esclavage ; sa honte sera dévoilée, et elle sera condamnée à tourner la meule, ꝟ. 1-5 ; ce châtiment lui est infligé à cause de sa cruauté à l’égard du peuple juif, }. 6-7 ; elle expiera sa faute et son arrogance, et ses magiciens, en qui elle a mis sa confiance, seront impuissants à la sauver, }. 8-15. — 9e discours, xlviii. Juda sera délivré de la captivité de Babylone ; Dieu fait savoir à ceux qui n’ont que le nom d’Israélites que lui seul, et non les idoles, a annoncé et accompli les choses futures, ꝟ. 1-8 ; il a éprouvé son peuple, mais il le délivrera à cause de son nom et de sa gloire, ꝟ. 9-11 ; qu’Israël écoute donc son Dieu, qui fait des promesses et les exécute, ꝟ. 12-16 ; Israël ne peut être heureux et prospère qu’en restant fidèle à Dieu, ꝟ. 17-19 ; quiconque se convertira sera délivré ; quant aux impies, il n’y aura point de paix pour eux, ?. 20-22. — Comme on le voit, les trois derniers discours concernent Babylone.

6o Deuxième section : le serviteur de Jéhovah dans ses humiliations et sa gloire, xlix-lvii. — i" discours, xlix. Le serviteur de Dieu annonce qu’il a été constitué maître de tous les peuples ; il se présente comme le restaurateur d’Israël et l’auteur de la conversion des Gentils, ꝟ. 1-13 ; il console Sion, qui se croit abandonnée de Dieu, mais qui sera glorifiée après avoir été délivrée de ses maux, J. 14-26. Cf. Act., xiii, 47, et Is., xlix, 6 ; II Cor., vi, 2, <>t Is., xlix, 8. — 8> discours, l. La synagogue sera répudiée par sa faute ; les Juifs incrédules seront rejetés à cause de leurs péchés ; cependant la puissance de Dieu ne sera pas diminuée, jr. 1-5 ; le serviteur de Dieu annonce les tourments qu’il endurera pour sauver son peuple, }. 6-7 ; cf. Matth., xxvi, 27 ; sa gloire sera rehaussée, t. 8 ; que chacun écoute le Sauveur et mette sa confiance en lui, ꝟ. 9-10 ; il prédit le châtiment des impies, ꝟ. 11. — 3’discours, u. Israël obtiendra le salut final ; la condition du salut pour Israël c’est la foi, laquelle sera récompensée par les plus grandes consolations, ꝟ. 1-8 ; réconforté, Israël demande à Dieu de le sauver, comme il l’a fait autrefois en Egypte, ꝟ. 9-11 ; le Seigneur s’engage de nouveau à le sauver, $ 12-16 ; le prophète exhorte son peuple au courage et à la patience, jr. 17-23. — 4 « discours, lii, 1-12. Rétablissement de Jérusalem ; Dieu veut que la ville sainte soit rétablie ; qu’elle se relève donc pleine de joie et de confiance, y. 1-6 ; qu’elle se réjouisse à la vue de ceux qui lui apportent la nouvelle de son salut, jꝟ. 7-9 ; Dieu lui-même sera l’auteur de la restauration de la ville, jt. 10-12. — 5o discours, lii, 13-liii. Passion de Notre-Seigneur ; le serviteur de Jéhovah sera exalté et plongé dans les plus profondes humiliations, lii, 13-15 ; cf. Phil., ii, 7-10 ; il sera anéanti parce qu’il est la victime expiatoire, lui, 16 ; par son dévouement, il obtient notre pardon et se couvre de gloire, ꝟ. 7-12 ; le Messie sera l’innocence même qui s’offre volontairement en sacrifice, }. 7, 9 ; cf. Matth., xxvi, 63 ; Luc, xii, 50 ; Joa., x, 18 ; se chargeant

de crimes, lui, 5, 6, 8, 11, 12 ; cf. Matth., viii, 17 ; Act., viii, 32-33 ; I Cor., xv, 3 ; confondu avec les scélérats, lui, 12 ; cf. Marc, xv, 28 ; Luc, xxii, 37 ; opérant notre salut par ses humiliations et ses souffrances, lui, 2, 3, 4, 5 ; cf. Marc, xi, 12 ; I Pet., ii, 24 ; priant pour ses bourreaux eux-mêmes, lui, 12 ; cf. Luc, xxiii, 34 ; et entrant ainsi dans la gloire, lui, 8, 9, 11, 12 ; cf. Phil., il, 7-10 ; S. Jérôme, In Is., LUI, t. xxiv, col. 504514. — 6’discours, liv. Gloire de Jérusalem et de l’Église dont elle est la figure ; Jérusalem, stérile pendant la captivité, devient d’une extraordinaire fécondité par là grâce de Dieu ; le Seigneur contracte avec son peuple une nouvelle alliance, ꝟ. 1-10 ; Jérusalem se relève de ses ruines, reprend ses anciennes splendeurs et devient invincible par la puissance et la protection de Dieu, h 11-17. Cf. Procope de Gaza, In Is., liv, t. lxxxvii, part, ii, col. 2354 ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Is., t. v, tom. ii, t. lxx, col. 1191. — 7 « discours, lv. Abondance des biens spirituels apportés par le Messie ; le serviteur de Jéhovah invite ses convives au festin qu’il leur a préparé, et ne leur demande que d’accepter la grâce qu’il leur offre, jꝟ. 1-2 ; cf. Joa., vil, 38 ; il promet une alliance nouvelle ; si le peuple obéit à Dieu, Dieu tiendra toutes ses promesses et glorifiera Israël, ir. 3-5 ; que chacun cherche Dieu, fasse pénitence de ses péchés, renonce à ses pensées pour suivre celles de Dieu, et de la sorte il sera comblé de toute sorte de biens, ꝟ. 6-13. — 8’discours, lvi, 1-8. Conséquences morales de l’œuvre de la Rédemption ; Dieu exhorte tous les hommes à garder ses commandements ; désormais personne ne sera exclu du royaume de Dieu ; on entrera au royaume de Dieu, non parce qu’on est descendant d’Abraham, mais parce qu’on pratique la vertu et les commandements du Seigneur, ꝟ. 1-8. Cf. Procope de Gaza, In Is., lvi, t. lxxxvii, part, ii, col. 2563-2566. — 9e discours, lvi, 9-lvii. Coup d’oeil sur la situation présente et prédiction de l’avenir ; le présent est triste, les pasteurs d’Israël oublient leurs devoirs ; les loups peuvent envahir la bergerie sans que les chiens aboient ; les peuples étrangers, représentés sous l’image de bêtes sauvages, dévorent le peuple de Dieu ; les bergers, les chefs ne font rien pour parer au mal, lvi, 9-12 ; le juste a le bonheur d’échapper par la mort à ces calamités, lvii, 1-2 ; le peuple est aussi coupable que ses chefs, puisqu’il se livre à l’idolâtrie et à d’autres crimes, ꝟ. 3-10 ; c’est pourquoi il sera humilié, }. 11-13 ; quant à ceux qui se convertiront, ils jouiront de la paix, et seront récompensés après avoir expié leurs péchés, ꝟ. 14-18 ; Dieu en effet donne la paix aux justes, mais la refuse aux impies, ꝟ. 19-21.

7o Troisième section : le royaume messianique, Lvmlxvi. — i" discours, lviii. Du vrai et du faux culte ; le jeûne et toutes les œuvres extérieures, sans la rénovation intérieure, n’ont aucune valeur, ꝟ. 1-6 ; pour être récompensé il faut pratiquer les commandements de Dieu et les vertus, ꝟ. 7-14 ; cf. Matth., v, 1 ; Procope de Gaza, In Is., lix, 1, t. lxxxvii, part’, ii, col. 2599 ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Is., t. v, tom. iii, t. lxx, col. 1279 ; Eusèbe de Césarée, In Is., lix, t. xxiv, col. 483. — S » discours, nx. La nouvelle alliance, fruit du repentir d’Israël ; les péchés du peuple l’empêchent d’être sauvé, jr. 1-8 ; Israël a’-oue ses crimes et reconnaît la justice du châtiment divin, ꝟ. 9-15 ; Dieu sera miséricordieux envers ceux qui se repentent, et établira une nouvelle alliance, ꝟ. 16-21. — S’discours, lx. La gloire de Jérusalem figure de l’Église ; Jésus-Christ, soleil de justice, se lève sur Jérusalem ; à sa vue tous les peuples accourent à Sion, la cité sainte, ꝟ. 1-9 ; cf.’S. Cyrille d’Alexandrie, In Is., t. lxx, col. 1322 ; gloire incomparable et somptueuses richesses de Jérusalem, }. 10-17* ; sa justice et sa sainteté la rendront encore plus belle et lui attireront la paix et le bonheur, ꝟ. 17 b 22. — 4o discours, lxi. La félicité de Jérusalem, œuvre

du Messie : le Messie annonce qu’il vient guérir les maux de ceux qui le cherchent sincèrement, jꝟ. 1-3 ; Israël recouvrera son ancienne splendeur, et toutes les nations le serviront, ꝟ. 4-6 ; cf. Ezech., xix, 6 ; 1 Pet., ir, 9 ; Apoc, i, 6 ; la malédiction se change en bénédiction, $. 7-9 ; le serviteur de Dieu est heureux d’annoncer ces bonnes nouvelles, t. 10-11. — 5 « discours, lxii. Gloire prochaine de Jérusalem ; le prophète ne se taira pas jusqu’à ce que le Juste paraisse, ꝟ. 1-3 ; Sion reviendra l’objet de la prédilection de’Dieu, jJ. 4-5 ; les sentinelles de Jérusalem rappelleront à Dieu sa promesse jusqu’à ce qu’il l’ait accomplie, ji. 6-9 ; le salut est proche ; que tous se préparent, car le Sauveur vient, ꝟ. 10-12. — ê° discours, lxiii, 1-6. Jugement contre l’id’umée et les ennemis de l’Église ; Isaïe, dans ce discours, voit le Seigneur venant en grande pompe de l’Idumée ; ses vêtements sont rouges du sang de ses ennemis ; il les a tous vaincus et brisés dans sa colère, comme le raisin est foulé dans le pressoir. Cf. IV Reg., viii, 20 ; xiv, 7, 22 ; Il Par., xxi, 10, 16 sq. ; Amos, i, 6, 11 ; Joël, iii, 19 ; I Mach., v, 63 ; Jer., xlix, 7-22 ; Lam., iv, 21 ; Ezech., xxv, 12-14 ; xxxv ; Abd., 8 ; Ps. cxxxvii (Vulgate cxxxvi) ; Jbsèphe, De bell. jud, , IV, ix, 7. — 7o discours, lxiii, 7-lxiv. Prière d’Israël captif. Ce prologue ravive le soutenir des miséricordes divines, lxiii, 7 ; dans le passé, les Israélites ont été infidèles et n’ont pas correspondu aux bontés de Dieu ; c’est pourquoi Dieu a été obligé de les châtier, t- 8-14 ; puisse Dieu avoir pitié d’Israël, son peuple, j>. 15-19, et le délivrer de ses ennemis ! lxiv, 1-H ; cela est facile à sa puissance ; grandeur des bienfaits de Dieu pour ceux qui l’attendent, t- 3-4 ; cf. I Cor., ii, 9 ; ses péchés rendent Israël indigne des miséricordes de Dieu, mais Dieu doit venger l’honneur de son sanctuaire et se souvenir qu’il est le père de son peuple, ji. 5-22. — 8’discours, lxv. Réponse de Dieu à la prière de son peuple ; Dieu répond d’abord aux plaintes de son peuple en lui rappelant ses ingratitudes et son endurcissement, ꝟ. 1-7 ; il est toujours bien disposé pour ceux qui reviennent sincèrement à lui, ꝟ. 8-10 ; les adorateurs des faux dieux seront détruits sans merci, jJ. 1116 ; quant aux justes, ils seront comblés de biens, ji. 17-25.

— 9* discours, lxvi. Les impénitents exclus du royaume des cieux ; le Seigneur n’a pas besoin d’une maison fabriquée de main d’homme : le ciel est sa demeure ; il Tejette les pécheurs et leurs sacrifices, jJ. 1-6 ; annonce de l’extension et de la gloire de l’Église : bonté de Dieu à l’égard de ses enfants, ꝟ. 7-14 ; il jugera et punira les nations infidèles et les Juifs endurcis, ꝟ. 15-18 ; quelques Israélites restés fidèles prêcheront sa gloire parmi les Gentils et ceux-ci se convertiront et fourniront des prêtres au Seigneur, ꝟ. 19-21 ;, Dieu formera un nouvel Israël, qui vivra à jamais, semblable à un nouveau ciel, et à une nouvelle terre ; châtiment éternel des impies, J.22-24. Cf. Marc, ix, 43, 45, 47 ; S. Cyrille de Jérusalem, In h., t. lxx, col. 1450.

V. Unité du livre.

La critique rationaliste a fortement contesté et attaqué l’unité du livre d’Isaîe. Comme on peut le supposer, ce travail de critique littéraire était un acheminement vers la négation soit de l’authenticité, soit de l’intégrité du livre, car ces, questions sont étroitement connexes entre elles, et de la solution de l’une dépend en grande partie la solution de l’autre. Nous n’insisterons pas beaucoup sur l’unité, pour n’avoir pas à nous répéter à propos de l’authenticité ou de l’intégrité, où nous nous arrêterons davantage à la suite de toute la critique moderne. Qu’il nous suffise donc de faire quelques considérations générales sur ce sujet, et d’exposer les principales preuves. L’unité du livre d’Isaîe se prouve : 1o par l’unité du sujet ; 2o par l’unité du but ; 3o par l’unité du langage.

1o L’unité du sujet.

L’auteur développe dans tout

l’ouvrage un même sujet, comme on s’en convainc par une lecture attentive. Le snjet du livre parait. être ces

paroles, I, 27 : Sion in judicio redimetur, et reducent eam injustitia. — Cette pensée capitale, généralisée et étendue à toutes les nations, est comme le centre des prophéties d’Isaîe. L’analyse que nous venons de faire suffirait déjà à le démontrer. Pour le prouver directement, il nous reste à synthétiser les résultats et les données : dans le premier groupe de la première partie, l’auteur s’occupe surtout de l’établissement du pouvoir de Dieu dans tout l’univers ; mais pour que ce pouvoir puisse s’établir, il est nécessaire d’écarter tous les obstacles ; ce sera l’œuvre du jugement de Dieu : Juda et Jérusalem seront châtiés ; la nécessité, la légitimité de ce châtiment sont prouvées. par la parabole dé la vigne ; le jugement de Dieu établit la nécessité du salut messianique. — Le deuxième groupe nous place au temps de l’impie Achaz ; le prophète offre le secours de Dieu que l’impie monarque repousse. Isaïe lui annonce alors que le royaume de David sera humilié, et que le peuple sera opprimé par celui-là même en qui il avait mis sa confiance : le roi des Assyriens. Ce sera un temps de ruines et de calamités. Mais au milieu de ces épreuves apparaît le consolateur, le sauveur Emmanuel, qui établira son règne après avoir triomphé de tous ses ennemis. Le prophète exhorte donc le peuple à mettre en Dieu toutes ses espérances. Le règne d’Emmanuel sera un règne de paix et de justice ; les desseins de Dieu se seront accomplis : Sion in judicio redimetur. — Le troisième groupe applique cette loi aux nations étrangères : Babylone se dresse et synthétise les puissances hostiles à Dieu ; Babylone sera anéantie. Cette ruine sera une voie de salut pour tous les peuples ; les autres nations subiront le même sort ; les nations voisines : Philistins, Moabites, Damas et Israël ; les nations éloignées : Éthiopiens, Égyptiens au sud ; Babyloniens au nord ; Édomites et Arabes à l’orient ; Tyr à l’occident. Tous les peuples ont vécu dans l’oubli de Dieu ; par conséquent tous seront jugés et punis par Dieu, et ainsi se réalisera pour tous les peuples la parole : Sion in judicio redimetur. — Le quatrième groupe insiste sur cette pensée qu’il faut mettre toute sa confiance en Dieu, et qu’il est inutile d’attendre la délivrance du secours humain. Jérusalem sera pressée par les Assyriens- : ce serait une folie de placer son espoir dans les Égyptiens ; le secours de Dieu délivrera Israël de ses ennemis ; mais au préalable il faut que la justice de Dieu s’exerce, et son jugement s’accomplisse ; la délivrance et le salut viendront après : Sion in judicio redimetur. Cf. Knabenbauer, In 1$., t, i, p. 12-15. — La seconde partie développe au fond ce même thème : la délivrance, redimetur, soit par l’exil bahylonien, soit par le Messie. La première série de discours nous montre que Dieu peut opérer la délivrance parce qu’il est tout-puissant, tandis que les faux dieux sont vains et impuissants ; elle nous parle de’la première délivrance de l’exil par le secours de Cyrus, redimetur. — La deuxième série de discours nous conduit à la délivrance messianique ; seul le Messie apportera le salut : redimetur. Enfin la troisième série nous montre la délivrance réalisée, le salut accompli dans le règne messianique : redimetur. Knabenbauer, In h., t ii, p. 2-5.

2o L’unité du but.

Le but auquel tendent toutes ces

prophéties, c’est la montagne de Dieu, centre de ralliement de tous les peuples, ii, 2-3 ; lxyi, 20. Cette montagne à laquelle accourront tous les peuples de la terre figure le règne de Dieu ; en effet le règne de Dieu aura son centre sur la montagne de Sion, à Jérusalem, xxiv, 23 ; xxvii, 13 ; xlix, 18 ; lii, 1 ; liv, 1 ; lx, 1.

3o L’unité du langage.

On constate dans tout le

livre une grande unité de langage et d’idées. Nous reviendrons longuement sur ce point ; qu’il nous suffise pour le moment de jeter quelques jalons : les chapitres i et lix nous dépeignent l’hypocrisie des Juifs et le dégoût qu’elle inspire à Dien ; les chapitres xi et lxv contiennent la promesse d’un avenir heureux dû à la venue

du Messie ; vi, 1, et iii, 13, affirment l’identité entre le Seigneur et le serviteur de Jéhovah ; dans VI, 1, « le Seigneur est assis sur un trône haut et élevé ; » et lii, 13, on lit : « Voici que mon serviteur comprendra, il sera exalté, haut et très élevé. » Trochon, lsaïe, p. 10 ; Kay, Introduction, p. 16.

VI. Unité d’auteur. — Cette question a donné lieu à de vives discussions, à de longues recherches et à de minutieuses analyses du texte d’Isaïe. Nous ne pouvons pas suivre toutes les phases par lesquelles a passé l'évolution de la critique rationaliste sur ce point, d’autant plus que nous serons obligé d’y revenir, et de nous livrer à un examen plus complet et plus détaillé de la question. Nous nous bornerons à présent à exposer et réfuter les conclusions de la grande majorité des critiques rationalistes :

1o Exposé du système rationaliste.

La plupart des

critiques rationalistes distinguent trois auteurs qu’ils appellent : Proto-Isaïe, Deutéro-Isaïe, Trito-Isaïe. Le Proto-Isaïe, vivant au viiie siècle avant J.-C, identique, à lsaïe le prophète, serait l’auteur d’une grande partie des prophéties des chapitres 1-xxxv..— Le Deutéro-Isaïe, au VIe siècle avant J.-C, serait l’auteur des chapitres xliv, à l’exception de quelques fragments ; cet auteur est inconnu ; on assuré en tout cas qu’il n’a pas vécu parmi les exilés à Babylone. Duhm pense qu’il a écrit dans quelque localité du Liban ou de la Phénicie ; Ewald et Bunsen croient qu’il vivait en Egypte. — Le TritoIsaïe, au milieu du Ve siècle avant J.-C, serait l’auteur des chapitres lvi-lxvi ; il aurait écrit à Jérusalem peu de temps avant la première arrivée de Néhémie, c’est-àdire avant 445 avant J.-C. D. Marti Jesaja, p. xiv, xv,

XIX-XXII.

2o Réfutation de cette théorie.

Cette théorie ne

saurait être admise. L’unité d’auteur découle rigoureusement de l’unité du livre. Nous avons prouvé (voir V, col. 957) que le livre d’Isaïe porte l’empreinte d’une profonde unité dans le sujet et les idées. Cette unité ne s’explique que par l’unité d’auteur. Il est moralement impossible en effet que trois auteurs principaux, écrivant à des époques différentes, et assez espacées entre elles, vin » sie.de, vie siècle, milieu du v » siècle, aient pu coordonner vers une fin unique une si grande masse de matériaux, une multitude considérable d’idées, et aient exprimé leurs pensées dans un langage identique. Ce serait contraire à toutes les règles de la critique. Il faut donc conclure que l’unité du livre et l’unité d’auteur sont indissolublement liées entre elles, et que, puisque nous n’avons qu’un livre, nous n’avons aussi qu’un auteur.

VII. Authenticité du livre.

I. authenticité lu livre en général. — Je ne connais aucun auteur qui ait nié radicalement l’authenticité des prophétie ? d’Isaïe, c’est-à-dire qui ait soutenu qu’il n’y a rien d’Isaïe dans le livre. Aucun rationaliste même parmi les plus avancés n’a été assez hardi pour aller jusqu'à cette extrémité. Nous n’avons donc qu'à résumer les principaux arguments en faveur de l’authenticité en général.

1o L’insertion dans le canon.

Aussi loin qu’on

peut remonter dans l’histoire du canon de l’Ancien Testament, on trouve lsaïe tel que nous l’avons aujourd’hui. Le livre tout entier dans le canon porte le nom d’Isaïe. C’est à lui qu’il est attribué comme à son véritable auteur.

2o Soin avec lequel on conservait les prophéties.


Les anciens Juifs apportaient un soin tout particulier à conserver les différentes prophéties et à les attribuer à leur auteur respectif. Nous avons des exemples de ce fait dans des prophéties d’une minime étendue, telles que la prophétie d’Abdias. De même dans les livres historiques les différentes prophéties sont attribuées à leurs auteurs : il en est ainsi de Lamech, Gen., v, 29 ; de Noé, Gen., ix, 25-27 ; d’Isaac, Gen., xxvii, 27-29 ;

de Jacob, Gen., xlix ; de Balaam, Num., xxiv ; de Moïse, Deut., xviii, 18 ; de Josué, Jos., vi, 26 : de Nathan, II Reg., vil, 5-16 ; de Michée, III Reg., xxii, 17 ; de Jonas. IV Règ., xiv, 25. Ils conservaient aussi avec le plus grand soin les livres attribués aux prophètes ; ainsi des livres de Samuel, Nathan et Gad, I Par., xxix, 29 ; du livre d’Ahias le Silonite, II Par., ix, 29 ; de ceux de Séméias et d’Addo, U Par., xii, 15 ; de celui de Jéhu, II Par., xx, 34 ; d’Hozaï, II Par., xxxiii, 19. Nous devons donc conclure par analogie qu’il en est de même du prophète lsaïe ; Dès lors qu’on attribue ces prophéties à lsaïe, il faut conclure qu’elles sont de lui. On n’a aucune raison de faire une exception à la règle générale en ce qui concerne lsaïe. — La chose est d’autant plus frappante que quelquefois, dans la Bible, on mentionne des livres sans nommer leur auteur, parce qu’il est inconnu. Prov., xxiv, 23 ; xxx, 1. Puisque ceux qui ont fait la collection des Livres Saints ont inséré dans le recueil ces prophéties sous le nom d’Isaïe, c’est qu’ils étaient certains que de fait lsaïe en est l’auteur. Cf. Knabenbauer, In Is., t. i, p. 16-17.

3o Les livres postérieurs.

On trouve dans les livres

postérieurs des allusions aux prophéties d’Isaïe, et même des imitations de son style et de son langage. Ces allusions et ces imitations s'étendent à toutes les parties. Nous bornerons nos rapprochements à Jérémie, à Ezéchiel, et aux deutérocanoniques :

A. — Jérémie et lsaïe.

Jérémie. lsaïe.

u, 21… v, 1.

vi, 13… lvi, 11.

v, 20… i, 11.

vu, 13… lxv, 12.

vin, 10.. lvi, ' 11.

Jérémie. lsaïe.

XXX, 10.. xLiii, l ; XLrv, 2.

xxxi, 6.. ii, 3.

xl vi, 27, 28. xliii, 1 ; xliv, 2.

XLvm, 29. xv, 6.

…. 33. … 10.

xvii, 5… xxx, 2 ; xxxi, 1… 37…2. xviii, 6.. xlv, 9. …. 44. xxiv, 18.

xxiii, 5.. iv, 2 ; xlv> 8. li, 8… xxi, 9.

B. Ezéchiel et lsaïe.

Ezéchiel.

lsaïe.

Ezéchiel. lsaïe.

VII, 18.

xv, 2.

xxxiv, 23. xl, H.

xvii, 7.

. LVIII, 7.

xxxvi, 20. lii, 5.

xxix, 6.

xxxvi, 6.

xxxvii, 24. xxxvi,

6.

xxxii, 7.

xiii, 10.

C. — Les deutérocanoniques et lsaïe.

Deutérocan. lsaïe. Deutérocan. lsaïe.

Sap., i, 7. vi, 3. Sap., ix, 13… xl, 13.

Id., ii, 6. xxii, 13 ; lvi, 12. Id., xiir, 11… xliv, 12.

Id., iii, 14. lvi, 3.

4o Le Nouveau Testament.

Les prophéties d’Isaïe

sont très souvent citées dans le Nouveau Testament. Le résultat général est celui-ci : sur les soixante-six chapitres d’Isaïe, il y en a quarante-sept qui sont cités ou auxquels il est fait allusion dans le Nouveau Testament, lsaïe lui-même est expressément nommé vingt-deux fois dans le Nouveau Testament, à savoir : Matth., iii, 3 ; iv, 14 ; viii, 17 ; xii, 17 ; xiii, 14 ; xv, 7 ; Marc, i, 2 ; vii, 6 ; Luc, iii, 4 ; iv, 17 ; Joa., i, 23 ; xii, 38, 39, 41 ; Act., viii, . 28, 30 ; xxviii, 25 ; Rom., ix, 27, 29 ; x, 16, 20 ; xv, 12. Cf. Alexander, Commentary on Isaiah, édit. J. Eadie, 2 in-8o, Edimbourg, 1865, t. i, p. 1.

II. AUTBENTICITÉ DE LA PREMIÈRE PARTIE, I-XXXIX. —

L’authenticité totale n’a jamais été niée, mais on a rejeté comme inauthentiques certaines parties. Nous aurons : occasion de revenir sur ce point à propos de l’intégrité, , car en réalité c’est plutôt de celle-ci qu’il s’agit.

1o Résumé historique des attaques.

C’est à la fin du

xviiie siècle que commencèrent les premières attaques contre l’authenticité des prophéties d’Isaïe. Pour ce qui

concerne la première partie on admet généralement que les chapitres i-vi sont l’œuvre d’Isaïe ; quelques auteurs pourtant soutinrent que ii, 2-4, appartiennent à un auteur plus ancien qu’Isaïe. Le Hollandais Roorda fit entendre une note discordante ; pour lui dans les chapitres i-vi, il n’y a que ii, 2-4, qui soient d’Isaïe ; tout le reste appartient à Michée ; cf. Alexander, Isaiah, t. i, p. 16. — Gesenius soutint que vil, 1-16, n’est pas probablement d’Isaïe, parce que le prophète y est mentionné à la troisième personne ; Der Prophet Jesaia, Leipzig, 18211829. Hitzig réfuta cette opinion et fut suivi en cela par la plupart des critiques ; Der Prophet Jesaia, in-8o, Heidelberg, 1839. — Koppe prétendit que la chapitre su est un cantique d’une date postérieure à Isaïe ; Jesaias neu libers, von Lovilh, 4 in-8o, Leipzig, 1779-1781. Ewald reprit cette hypothèse ; Die Propheten des alten Bundes erklârt, 2 in-3°, Stuttgart, 1840-1841 ; elle fut rejetée par Umbreit, Jesaia, 2e édit., in-8, Hambourg, 1842. — Bertholdt attribua à Jérémie les chapitres xv-xvi ; Hist. Kritische Einleitung in die Bûcher des A. und N. Testaments, 6 in-8o, Erlangen, 1812-1829 ; Ewald et Umbreit les assignent à un prophète inconnu plus ancien qu’Isaïe ; Hitzig, Maurer, Commentarhis gram.-criticus in V. T., 4 in-8o, Leipzig, 1835-1847, et Knobel, Der Prophet Jesaia, 4e édit., revue par L. Diestel, in-8o, Leipzig, 1872 (dans le Kurzgefasstes eoceg. Handb.), les attribuent à Jonas. — Eichhorn rejette le chapitre xix ; Die hebràische Propheten, 3 in-8o, Gœttingue, 1816-1819 ; Gesenius doute de l’authenticité des ji. 18-20 de ce même chapitre ; Koppe attaqua eelle des 11. 18-25 ; Hitzig pensa que les ꝟ. 16-25 sont l’œuvre du prêtre Onias. — On rejeta assez universellement les dix premiers versets du chapitre xxi, sous prétexte qu’ils ressemblent trop aux chapitres xiii et xrv. — Suivant Movers, le chapitre xxiii est l’œuvre de Jérémie ; Krit. Untersuchungen ûber die biblische Chronik ; Ein Beitrag zur Einleitung in das A. T., in-8o, Bonn, 1834 ; Eichhorn et Rosenmûller, Scholia in V. T., 3e édit., 3 in-8o, 1829-1834, déclarent que ce chapitre appartient à un auteur inconnu plus ancien qu’Isaïe ; pour Ewald, il est d’un disciple d’Isaïe.

— La prophétie, contenue dans les chapitres xxiv-xxvi, a été, d’après Knobel, écrite en Palestine vers le commencement de l’exil de Babylone ; au dire de Gésénius, « lie a été écrite à Babylone vers la fin de la captivité et par l’auteur des chapitres xl-lxvi ; Gromberg place sa composition après le retour de l’exil ; Krit. Geschichte der Reîigions-Ideen des A. T., in-8o, Berlin, 1829 ; Ewald la place au contraire avant l’invasion dé l’Egypte par Caihbyse ; pour Vatke, elle aurait été écrite dans la période des Machabées ; Die biblische Théologie wissenschaftlich dargestellt, in-8o, Berlin, 1835 ; pour Hitzig, « ’est en Assyrie, peu de temps avant la chute de Ninive.

— D’après Koppe, les chapitres xxviii-xxxiii contiennent diverses prophéties de divers auteurs ; pour Hitzig, ce sont des prophéties successives d’un seul et même auteur.

— Quant aux chapitres xxxiv-xxxv, ils sont, d’après Rosenmûller et de Wette, Einleitung in die Bibl. Allés und Neues Test., t. i, in-8o, Berlin, 1848-1852, l’œuvre de l’auteur des vingt-sept derniers chapitres ; Ewald, au contraire, déclara cette attribution impossible. Cf. Trochon, Isaïe, p. 3-5. Nous de poursuivrons pas plus loin cette exposition des diverses positions prises par la critique rationaliste. — Qu’il nous suffise de résumer les conclusions généralement admises aujourd’hui dans le camp de la critique négative. On rejette comme inauthëntiques les fragments suivants : xm-xiv, 23 (prophétie contre Babylone) ; xv-xvi, 12 (prophétie contre Moab) ; xxi, 1-10 (prophétie contre Babylone ravagée par les Mèdes et les Perses) ; xxrv-xxvii (prophéties contre les nations étrangères) ; xxxiv-xxxv (prophéties sur la ruine de l’Idumée et ( la venue du Libérateur) ; enfin quelques critiques, en moins grand nombre, rejettent aussi Je chapitre xxjii (prophétie contre Tyr) ; cf. E. Reuss, La


Bible, 1877 ; Wellhausen, dans VEncyclopxdid britannica, 9e édit., t. xvi, p. 535 ; W. R. Smith, The prophets of_Israël and their place in history to the close of the 8o> century B. C, 1882, 2e édit., 1895, p. 91, 392 ; Dillmann, 5e édit. refondue du commentaire de Knobel, 1890 ; Kuenen, Einleitung, 2e édit., t. ii, 1889, p. 28-157 ; T. K. Cheyne, Introduction to the book of Isaiah, 1895, p. 121, 147 ; Frz. Delitzsch, Messian. Weissagungen in gesch. Folge, 1890, traduction anglaise, Edimbourg,

1891, § 44 ; Kirkpatrick, The doctrine of the prophets,

1892, p. 475 ; Smend, dans la ZeiUchrift fur die Alttest. Wissenschaft, 1884, p. 161 ; Driver, Intr. to the Lit, of Ihe old Test., 7e édit., 1898, p. 213, 214, 216, 217, 218220, ’225, 226 ; Marti, Jesaja, p. 117, 133, 161, 177, 182, 242 ; tous ces auteurs sont dans l’ensemble hostiles à l’authenticité des fragments énumérés.

2. Démonstration de l’authenticité de la première partie. — Les preuves qui établissent l’authenticité de la première partie sont assez nombreuses. Nous ferons valoir les plus importantes :

1o Divergence entre les auteurs.

L’esquisse historique

que nous venons de dessiner montre bien à quelles conclusions diverses et parfois opposées sont arrivés les critiques. Si l’on excepte quelques points, pour tout le reste ils sont en complet désaccord ; ils ne s’entendent ni quant à l’auteur, ni quant au lieu, ni quant à la date des fragments dont ils nient l’authenticité, et qu’ils se refusent à attribuer à Isaïe lui-même. Cette divergence de vues, ce grand nombre d’opinions sont déjà une preuve, négative il est vrai, en faveur de l’authenticité.

2o Répétitions dans les auteurs postérieurs.

Beaucoup

des oracles de la première partie d’Isaïe sont répétés dans les auteurs postérieurs, ainsi :

A. » - Prophétie contre Babylone, xm-xrtr, 23. — Is., xiii-xiv, 23, se trouve répété dans Jer., l-li. Cf. Keil, Lehrbuch der histor. krit. Einleitung, 2e édit., § 67, 10.

— Is., xiii, 3, est répété dans Soph., i, 7. — Is., xiii, 2022 ; xxxiv, 11, et Soph., ii, 13-15.

B. — Prophétie contre Moab, xv-xvi, 12. — On peut admettre sans inconvénient qu’Isaïe a emprunté cet oracle à un auteur plus ancien. Lui-même semble le laisser entendre dans la réflexion qui sert comme de conclusion à l’oracle, xvi, 13-14 : « Hoc verbum, quod locutus est Dominus ad Moabea : tune : Et nunc locutus est Dominus dicens, etc. » L’oracle n’en serait pas moins authentique dans ce sens que de fait il a été prononcé par Isaïe, mais ce serait la répétition d’une prophétie antérieure. Cf. Knabenbauer, In Is., t. i, p. 17.

C. — Prophétie contre Tyr, xxiii. — Gesenius et de Wette ne trouvent pas convaincantes les raisons de ceux qui rejettent l’authenticité de cette prophétie. D’autres auteurs protestants la regardent comme authentique ; Ainsi Keil, op cit. ; Dreschsler, Der Prophet Jesaja ; m" part., Stuttgart, 1845, 1849 ; Frz. Delitzsch, Jesaja, 3= éd., Leipzig, 1879 ; Nâgelsbach, Der Prophet Jesaja, Bielefeld et Leipzig, 1877.

D. — Oracles contre les nations étrangères, xxivxxvii. — Ces oracles se retrouvent dans des auteurs postérieurs. On peut s’en assurer par le tableau ci-dessous :

Isaïe. Jérémie.

xxiv, 1-12, 19, 20, 23… iv, 23-26.

IU., ±0. Id., 1.

ld., 4. viii, 13.

Ézéchiel.

xxvi, 21. …. xxiv, 8.

xxvii, 1 xxix, 3.

Nahum.

xxiv, 1 ii, 10.

Cf. Scholz, Commun tar zum Bûche des l’roph. Jeremia, p. 62, 125, 166 ; Keil, toc. cit.

IH. - 31 965

    1. ISAIE##

ISAIE (LE LIVRE D’)'

E. — Prophéties sur là ruine de Vldumée, xxxivxxxv. — Ces oracles sont aussi connus des prophètes postérieurs, comme on peut le constater par, 1e tableau suivant :

IsaTe. Jérémie. Isaïe. Ézéchiel.

xxxiv, 5-8. xli, 10. xxxiv 3… xxxii, 5, 6.

lbid., 6… xxv, 31 ; li, 40. Ibid., 6-7. xxxix, 17-19.

lbid :, 2… JMd., 33, 34.

Ibid., 7… l, 27. Sophonie.

lbid., 1Z. Ibid., 39. 761d., 6, H. I, 7-8 ; ii, 14.

Ibid., 16. li, 60-62,

3o Enchaînement.

Les chapitres dont on conteste l’authenticité s’enchaînent avec ceux qui les précèdent, de telle façon que, si on les sépare, et les uns et les autres deviennent inintelligibles. C’est un tout qui se tient et se suit, et dont les parties ne peuvent ni être détachées ni exister séparément. On n’a qu’à lire attentivement la première partie d’Isaïe, sans préjugé et sans idée préconçue, pour se convaincre de ce fait. Qu’il nous suffise d’en donner un seul exemple : assez souvent le sujet de ces chapitres contestés dépend des précédents et y revient. Cf. xxiv, 13, et xvii, 5-6 ; xxiv, 16, et xxi, 2 ; xxvii, 9, et xvii, v ; xxvii, 2 et v, 7.

4o Identité de style et d’idées.

Ces prophéties, par le style, les idées, les métaphores et les sentiments, se rapprochent beaucoup des oracles, regardés comme authentiques par tout le monde. On voit que l’auteur est pénétré des mêmes idées, qu’il se sert assez souvent des mêmes images et des mêmes comparaisons, et qu’il emploie parfois les mêmes expressions ; cf. Herbst-Welte, Hist. krit. Einleitung, t. ii, p. 9, 33 ; Scholz, Einleitung, 8, iii, p. 313-380 ; Horne, An introduction, t. ii, p. 814 ; Himpel, dans la Tûbing. theolog. Quartalschrift, 1878, p. 477, 491 ; Knabenbauer, In Is., 1. 1, p. 17, 18.

3. Objections des adversaires.

1o Objection philosophique. — Ces oracles, dit-on, prédisent l’avenir d’une - manière étonnante ; il est donc impossible qu’ils soient d’Isaïe : ce sont des vaticinia po’st eventùm : « Une prophétie où Cyrus est nommé par son nom, Is., xliv, 28 ; xlv, 1 ; une autre où les Mèdes et les Perses sont appelés pour la destruction de Babylone, qui a traité Israël sans humanité, Is., xiii, 1-xiv, 23, dit M. Nôldeke, ne çont pas naturellement l’œuvre d’Isaïe, qui ne pouvait connaître d’avance ni l’exil du peuple à Babylone, ni la délivrance de cet exil par Cyrus, roi des Mèdes et des Perses. » Noldeke, Histoire littéraire de l’Ancien Testament, trad. Derenbourg et Soury, 1873, p. 312 ; cf. aussi Bleek-Kamphausen, Einleitung, § 201. — Réponse.

— Cette objection repose sur un principe philosophique faux, à savoir : l’impossibilité de prédire l’avenir ; on conclut de là qu’il ne peut pas y avoir des vaticinia ante eventum. Ce principe est faux en lui-même, puisque Dieu est assez puissant pour prévoir et manifester l’avenir ; il est aussi anti-critique, car ce genre de questions : possibilité ou impossibilité de la prophétie, n’est pas du domaine de la critique ni même de l’exégèse. — Au surplus, ce principe conduirait logiquement à rejeter toutes les prophéties de l’Ancien et du Nouveau Testament.

2o Objection littéraire.

On prétend que ces’oracles ne sont ni dans le style ni dans le ton d’Isaïe. L’examen a porté surtout sur les chapitres xxiv-xxvii. Les principaux traits qu’on a relevés sont les suivants : a) d’après Isaïe les forces assyriennes sont détruites sur les montagnes de Juda, xiv, 25 ; ici au contraire, c’est toute la terre qui est bouleversée, xxiv, 1-12, 17-20 ; — 6) Isaïe parle toujours de « l’armée » ou du « roi » des Assyriens : ici au contraire le pouvoir oppresseur est une « grande ville », xxv, 2-3 ; xxvi, 5 ; — c) d’après Isaïe, le reste, qui échappera à la dévastation, et sera sauvé, appartient à Juda ou Jérusalem, iv, 3 ; xxxvii, 32 ; ici, au contraire,

les sauvés appartiennent aux régions les plus éloignées de la terre, xxiv, 14r-16 ; — d) le style est absolument différent de celui d’Isaïe ; il est moins naturel ; ainsi par exemple : combinaison de synonymes, souvent sans aucun lien, àtrjvSeTwi ;, xxiv, 3 ; répétition d’un mot, xxiv, 16 ; xxv, l b ; xxvi, 3, 5, 15 ; xxvii, 5 ; nombreuses allitérations et jeux de mots, xxiv, 1, 3, 4, 6, 16, 17, 18, 19 ; xxv, 6, 10 b ; xxvi, 3 ; xxvii, 7 ; tendance au rythme, xxiv, 1, 8, 16 ; xxv, 1, 6, 7 ; xxvi, 2, 13, 20, 21 ; xxvii, 3, 5 ; traits inconnus à Isaïe, xxiv, 16, 21, 22 ; xxv, 6 ; xxvi, 18-19 (la résurrection) ; xxvii, 1 (le symbolisme de l’animal) ; réflexion de xxvi, 7-10. Driver, Introduction, p. 220 ; T. K. Cheyne, Introduction to the book of Isaiah, p. 147. — Réponse. — a) Nous ne nions pas que ces chapitres ne présentent certaines particularités dans leur caractère littéraire ; mais ces différences et ces particularités s’expliquent très bien par la différence du sujet et des circonstances ; si l’on examinait attentivement, on trouverait des différences et des particularités de cette nature même dans les prophéties que la critique regarde comme authentiques. Pour qu’un auteur parle ou écrive différemment, il suffit qu’il ait à exprimer dés idées différentes ou qu’il se trouve dans des circonstances diverses ; — b) si ces prophéties présentent quelques dissemblances littéraires avec les autres, elles présentent aussi de nombreux points de contactetde nombreuses ressemblances ; par exemple : mize’âr, « petit, » xxiv, 6, et x, 25 ; zaît, « olive, » et’ôlêlôt, <n rameaux, » xxiv, 13, et xvii, 6 ; ’ôy, « malheur, » et jeu de mots sur bâgad, « prévariquer, » xxiv, 16 b, et xxxiii, 1 ; melûndh, « hutte, » xxiv, 20, et î, 8 ; mapèlâh, « chute, » xxv, 2, et xvii, 1 ; dâl, « mince, s et’ébeyôn, « pierre, » xxv, 4, et xi, 4 (seulement pour dâl) ; xiv, 30 ; fâyôn, « lieu aride, » xxv, 5, et xxxii, 2 ; Sàmir, « ronce, » et sait, « épine, » xxvii, 4, et ix, 17 ; makêhû, « plaie, frappant, » xxvii, 7, et x, 20 ; hammdnîm, « statues, » xxvii, 9, et xvii, 8 ; xxvii, ll b, et xvii, 7, 8, et xxii, Il b, mêmes pensées ; xxvii, 13, et xi, 11, grande dispersion.

/II. AUTBENTICITÉ DE LA SECONDE PARTIE, XL-LXVI.

— L’authenticité de la seconde partie d’Isaïe a été niée avec plus d’ensemble et moins d’hésitation par l’école critique. C’est presque un dogme pour l’école rationaliste que cette partie n’est pas d’Isaïe ; on s’accorde à la regarder comme postérieure à l’exil de Babylone. Doderlein, en 1775, fut le premier à nier ouvertement l’authenticité des chapitres xl-lxvi. Koppe, Ewald, Bertholdt, Hitzig, Knobel, Seinecke, Beck et Orelli, pour ne nommer que les principaux, marchèrent dans la même voie. Knabenbauer, In Is., t. ii, p. 13 ; Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 4e édit., t. v, « p. 107-125 ; Trochon, Isaïe, p. 7. Nous ne pouvons pas suivre toutes les oscillations de la critique. Qu’il nous suffise d’exposer l’état actuel.

1o État actuel de la critique.

Tous les critiques rationalistes s’accordent pour affirmer qu’Isaïe n’est pas l’auteur de ces chapitres. Mais quel en est l’auteur et à quelle époque ont-ils été écrits ? C’est ici que l’on ne s’entend plus. Dillmann suppose que les chapitres xl-xlviii ont été écrits au milieu des succès de Cyrus, vers l’an 545avant J.-C, les chapitres lvi-lxii entre 545 et 539538 ; les chapitres lxiii-lxvi ne seraient qu’un appendice, , traitant de questions qui s’élevèrent lorsque le rétour en. Palestine était imminent, et ajouté au reste des chapitres vers l’époque de l’édit de Cyrus ; le chapitre lxvi lui-même aurait été retouché par une autre main, notamment en ce qui concerne les ꝟ. 18-24 ; 5e édit. refondue du Commentaire de Knobel, 1890, p. 363, 364, 534. D’autres critiques n’ont pas voulu admettre ces conclusions. — On croit généralement que lvi, 9-lvh, 11o, et lix, 3-15, qui rappellent assez fidèlement les descriptions faites par Jérémie et Ézéchiel de la condition de Juda sous les derniers rois, ont été écrits à l’époque de : Jérémie ; l’auteur de xl-lxvi, trouvant qu’ils contenaient C0

une leçon appropriée à ses contemporains, les aurait incorporés, peut-être avec quelques légères modifications de forme, à son propre ouvrage, et les aurait adaptés à la situation de l’exil. Cf. Driver, Isaiah ; his Life and times, p. 187, 188. — Ewald soutint que les chapitres lviii-lix, ainsi que lvi, 9-lvii, 11 1, furent empruntés par le second lsaïe à un auteur contemporain d'Ézéchiel ; quant aux chapitres lxiii, 7-lxvi, ils auraient été ajoutés par l’auteur après le retour de la captivité. — Euenen, en 1889, restreignit la prophétie de la restauration aux chapitres xl-xlix ; lii, 1-12 ; et peut-être lii, 13-liii, 12 ; le reste supposerait un auteur ou des auteurs vivant en Palestine après le retour de la captivité : il en conclut donc que ces parties furent ajoutées, après 536 avant J.-C, soit par le second lsaïe, soit par des écrivains appartenant à la même école ; quant à lxiv, 10-11, il ferait allusion soit aux faits décrits par Néhémie, II Esd., i, 3, soit à des faits semblables postérieurs. Einleitung, 2e édit., § 49, 5-7, 11-15. — Cornill, Der Isr. Prophetismus, 2e édit., 1896, § 20, [3e édit.. § 24], 19, 20, pense que la plus grande partie des chapitres xlix-lxii suppose un auteur vivant en Palestine ; mais rien ne donne à entendre que cet auteur ait été différent de celui des chapitres xl-xlviii ; il trouve les traces d’une main postérieure dans les chapitres lxiii-lxvi. — Duhm et Cheyne, après une étude attentive et minutieuse des circonstances historiques, des idées et de la phraséologie, ont essayé de déterminer, d’une manière plus précise, et l’auteur et la date. Duhm réduit l'œuvre propre du second lsaïe aux morceaux suivants : xl, 1-4, 6-8, 9-11, 12-19, 20-31o ; xli, 1-4, 6-7, 8-29 ; xlii, 5-11, 13, 14, 25 ; xliii, 1-20°, 22-28 ; xiiv, 1-8, 21-28o ; xlv, 1-9, 11-13o, 14-25 ; xlvi, 1-5, 9-13 ; xlvii, 1-2, 3 b -14o, 15 ; xlviii, 1o (à Jacob), 3, 5o, 6-7°, 8o. 11-16o, 20-21 ; xlix, 7-26 ; l, 1-3 ; li, 1-10, 12-14, 17, 19-23 ; lii, 1-2, 7-12 ; liv, 1-14, 16-17o ; lv, 1-2, 3 b -6, 8-13. Il attribue les passages du « serviteur », Knechtsitûcke, xlii, 1-4 ; xlix, 1-6 ; l, 4-9 ; l1113-liii, 12, à un auteur différent, vivant en 500-450 av. J.-C. (second lsaïe) ; les chapitres lvi-lxvi au troisième lsaïe, vivant un peu après, au commencement de l'époque d’Esdras et de Néhémie, qui inspirait plus de sympathie que le second lsaïe, avait des attaches avec fécole d’Aggée « t de Malachie, et attachait une* grande importance aux observances rituelles ; ainsi lvi, 1-8, nous place à la même époque qu’Esdras, ix, 1-2 ; x, et Néhémie, ix, 2 ; x, 30-31 ; xiii, l'-3, 23-30 ; les chapitres lvi, 9lvii, 13o, font allusion aux persécutions et à l’idolâtrie pratiquée par les Samaritains et les Juifs infidèles, à la même époque ; lxv, 3-4, 11 ; lxvi, 5, 17, etc., visent également les mêmes adversaires des fidèles serviteurs de Jéhovah, dont le prophète annonce le sort futur dans lxv, 6-7, 11-12 ; lxvi, 4, 15, et ailleurs, dans lis, 16-20 ; les chapitres lviii-lix retracent les fautes religieuses de la même époque ; Dos Buch Jesaia, in-8o, Gœttingue, 1892. — Cheyne se rapproche beaucoup de Duhm, il en diffère pour certains détails ; ainsi dans l’analyse des chapitres xl-lv, il assigne les passages du « serviteur » et xl, 31 b ; xlii, 12 ; xlv, 10, 13 b ; xlvii, 3o ; li, 18 ; liv, 17 k ; lv, 3o, au second lsaïe, et lui refuse au contraire xlii, 24 b ; xliv, 21 b, 22 b ; xlv, 25 ; xlviii, 3 b, 16o. Il rapporte, comme Duhm, les chapitres LVi-Lxyi, à l’exception de lxiii, 7-lxiv, à l'époque d’Esdras et deNéhémie ; toutefois il les attribue, non à un individu, mais à une école d'écrivains qui visa à perpétuer l’enseignement du second lsaïe et à développer ses idées ; les chapitres lxlxii, il les regarde comme un appendice de l'œuvre du second Isa, ïe, traduisant les espérances qu’on eut, en 432 avant J.-C., à l’arrivée d’Esdras et de ses compagnons d’exil, avec de riches dons pour le temple ; lxiii, 7-lxiv, sont d’une date plus récente ; ils reflètent les émotions éprouvées par les pieux Israélites à la suite de la destruction du temple (lxiv, 10-11), et d’autres calamités censées être arrivées vers 347 avant J.-C. sous Arta xerxés Ochus ou Artaxerxès III. Cf. Driver, Introduction, p. 244-246.

2o Démonstration de l’autlienticilé de la seconde partie.

L’authenticité de la seconde partie d’Isaie est audessus de tout doute sérieux. Lesprincipales preuves sont :

i. La tradition juive et chrétienne. — La tradition juive est consignée dans le livre de l’Ecclésiastique et attestée par l’historien juif Josèphe. L’auteur de l’Ecclésiastique parle ainsi : « (Dieu) ne se souvint point de leurs péchés et il ne les livra pas à leurs ennemis, mais il les purifia par la main d’Isaïe, le saint prophète. Il rtnversa le camp des Assyriens et l’ange du Seigneur les écrasa ; car Ézéchias fit ce qui était agréable à Dieu et il marcha courageusement dans la voie de David son père, que lui avait recommandé lsaïe, le grand prophète et fidèle devant Dieu. En ces jours, le soleil retourna en arrière et il prolongea la vie du roi. (Eclairé) par un grand, esprit, il vit la fin des temps et il consola ceux qui pleuraient en Sion. Il montra l’avenir jusqu'à la fin des temps, et les choses cachées avant qu’elles arrivassent. » Eccli., xlviii, 23-28. Les paroles : « Il consola ceux qui pleuraient en Sion, » font évidemment allusion à Is., XL, 1 : « Consolez-vous, consolez-vous, mon peuple, dit votre Dieu » (le même verbe ans, nâham, est employé dans lsaïe et dans l’Ecclésiastique), et par conséquent attribuent à lsaïe lui-même les chapitres xl-lxvi ; cf. surtout Is., xl, 4, 22, 26 ; xlii, 9, 19 ; xliv, 26 ; xlv, 11 ; xlviii, 6 ; xlix, 13 ; li, 3, 12, 19 ; lu. 9 ; lvii, 18 ; lxi, 2, 3 ; lxvi, 10, 13. Josèphe nous rapporte que les Juifs, pendant la captivité, montrèrent à Cyrus le passage d’Isaïe où il est nommé. Ant. jud., XI, i, 1, 2. Cf. I Esd, i, 2, et Is., xliv, 26-28 ; xlv, 1-13 ; xlvi, 13. — La tradition chrétienne nous est conservée dans le Nouveau Testa, ment. Les quatre évangélistes, Matth., iii, 3 ; Marc, i, 2 ; Luc, iii, 4 ; Joa., i, 23 citent, comme appartenant à lsaïe, ce qui est dit du précurseur du Sauveur. Is., XL, 2, 4 ; cf. aussi Rom., x, 16, 20.

S. Impossibilité morale. — Si ces vingt-sept derniers chapitres ne sont pas d’Isaïe, on se trouve en face d’un phénomène moral inexplicable. Un ne peut pas expliquer en effet comment l’auteur des prophéties les plus remarquables de l’Ancien Testament aurait été ignoré des Juifs. Notons que la tradition n’a jamais hésité à attribuer ces prophéties à lsaïe ; elle n’a jamais eu le moindre doute à ce sujet. Si ces chapitres étaient d’un auteur ou d’auteurs autres qu’Isaïe, certainement" la tradition juive en aurait gardé le souvenir ; il est impossible qu’un groupe si imposant de prophéties se répande dans le peuple juif sous le nom et l’autorité d’Isaïe, et que personne ne découvre cette supercherie. Si les Juifs n’ont jamais protesté, ni réclamé, mais ont accepté en masse l’origine isaïenne de ces oracles, c’est que de fait ces oracles ont été prononcés par lsaïe lui-même.

3. Les auteurs postérieurs.

Les vingt-sept chapitres de la seconde partie d’Isaïe sont connus des prophètes postérieurs : A) de Jérémie. a) Ressemblances verbales. —. Jer., v, 25 et Is., lix, 1-2 ; Jer., iv, 18 et Is., lix, 3 ; Lam., iv, 14 et Is., lix, 2 ; Jer., viii, 15 et Is., lix, 9 ; Jer., xiii, 16 et Is., lix, 3 ; cf. aussi Jer., xiv, 19 ; xiv, 7 et Is., lix, 12 ; Jer., iii, 16 et Is., lxv, 17 ; Jer., xxxi, 33 et Is., Li, 7 ; Jer., xxxi, 35 et Is., li, 15 ; Jer., xlix, 23 et Is., lvii, 20 ; Jer., l, 2 et Is., xlviii, 20 ; xlvi, 1 ; Jer., iv, 13 : vii’osna îisissi et Is., lxvi, 15 : mbidsi

t ::- t - : t - :

Tn133nD, « son char est comme un tourbillon ; » Jer.,

xxv, 33 : niiv îVjn, « les tués de Jéhovah » et Is., lxvi,

16 : nin* fbbn. — 6) Ressemblances réelles. — Jer., x

(folie de l’idolâtrie), et Is., xl, 18-20, xli, 7 ; xliv, 9, 12-15 ; xlvi, 7 ; Jer., xxx-xxxi (promesses), et Is., xlviii, 21 ; xlix, 9 ; li, 15 ; liv, 7 ; lv, 3, 12 ; lviii, 11 ; lx, 18, 21 ; Jer., xxxi, 7-14, 20-25, et Is., xl ; xlii ; xlix ; lv ; lxii ; lxv. — B) De Nahum, i, 15, et Is., lii, 7 ; lii, 1. ;

Nah., iii, 7, et Is., li, 19. — C) De Sophonie. ii, 15, et Is., .xlvii, 8, 10. — Concluons : les trois prophètes, Jérémie, Nahum et Sophonie, sont antérieurs à la captivité de Babylone : on voit qu’ils connaissent la seconde partie d’Isaïe ; donc les oracles de cette seconde partie sont antérieurs à l’exil, et dès lors la position de la critique est fausse ; cf. von Himpel, dans k Theolog. Quartalschrift, 1878, p. 471, 511, 520 ; tfeinke, Messianische Weissagungen, t. ii, p. 488 ; Zschokhe, Historia sac. Ant. Test.. Z’édit., p. 269 ; Kaulen, Einleitung, 3e édit., part, ii, 1892, p. 360-361 ; Kueper, Vas Prophetenthum, p. 270-291 ; Keil, Einleitung, p. 247 ; Drechsler, Der Prophet Jesaja, iii, p. 403 ; Nâgelsbàch, Der Prophet Jesaja, p. xxx ; Seinecke, Der Evangelist des alten Testamentes, p. 34, 36, 38 ; Knabenbauer, In Is., t. ii, p. 10-11.

4. Caractère du style.

« Le style des chapitres xllxvi prouvé qu’ils ne sont pas de l’époque à laquelle on prétend les rapporter. Ils sont écrits dans une langue, non seulement irréprochable, mais parfaite. Or, à la fin de la captivité de Babylone, à laquelle on veut en placer l’origine, l’hébreu avait perdu son ancienne pureté, par le contact et [le mélange des étrangers, comme nous le voyons dans Ezéchiel et dans Daniel, et il ne retrouva plus son ancien éclat. » Vigouroux, Man. bibl, t. ii, p. 608.

5. Ressemblances littéraires entre les deux parties. — Elles sont très nombreuses, de sorte que l’on sent que les deux parties sont d’un seul et même auteur. — A) Mots. — Niqr’a, « être appelé, être connu, » i, 26 ; xxxii, 5 ; — xi.vii, 1, 5 ; xlviii, 8 ; liv, 5 ; lvi, 7 ; lxi, 6 ; lxii, 4, 12, etc. ; —, asir, « enchaîné, » x, 4 ; xxiv, 22 ; et xlii, 7 ; — îbelè maint, « écoulements des eaux, » xxx, 25 et xliv, 4 (pas ailleurs) ; — nà’âsûs « épine, ronce, » vii, 19 et lv, 13 (pas ailleurs) ; —’onég, « volupté, » xiii, 22 et lviii, 13 (pas ailleurs) ; — fa’âlûlîm, « crimes, » iii, 4 et lxvi, 4 (pas ailleurs) ; —’âbîr, « fort, » i, 24 et xlix, 26 ; lx, 16 ; — agmôn, « jonc, » ix, 13 ; xix, 15 et lviii, 5 ; — mê’àz, « dès lors, » seize fois dans toute la Bible, dont huit dans Isaïe, xiv, 8 ; xvi, 13 ; xliv, 8 ; xlv, 21 ; xlviii, 3, 5, 7, 8 ; —’éfe’éh, « vipère, » se trouve seulement dans Job, xx, 16 et Is., xxx, 6 et lix, 5 ; — bâ’âh, « chercher, . » xxi, 12 ; xxx, 13 et lxiv, 1 ; ne se trouve plus que dans Abd., 6 ; — ba-bôqér, ba-bôqér, « le matin, le matin, » xxviil, 19 et l, 4 ; — géza’, « coupé, » xi, l et xl, 24 ; ne se trouve plus que dans Job, xiv, 8 ; — limûd, « instruit, » yin,

16 et L, 4 (bis) ; liv, 13 ; ne se trouve plus que dans Jérémie ; ]— miné, mini, forme inusitée, ex, « de, » xxx, 11, (bis) et xlvi, 3 (bis) ; — siqêl, « écarter des pierres, » v, 2 etLxii, 10 ; nulle part ailleurs ; — mâiôs, « joie, »

17 fois dans l’Écriture, dont 10 dans Isaïe, viii, 6 ; xxiv, 8 (bis), 11 ; xxxii, 13, 14 et lx, 15 ; lxii, 5 ; lxv, 18 ; txvi, 10 ; — sârâh, « éloigner, apostasier, ».8 fois dans l’Écriture, dont quatre dans Isaïe, i, 5 ; xiv, 6 ; xxxi, 6 et lix, 13 ; —’oie’ii, « faisant, » solennelle appellation de Dieu, xvii, 7 ; xxvii, 11 ; xxix, 16 et xliv, 2 ; xlv, 18 ; li, 13 ; liv, 5 ; — sâhal, « hennir, r x, 30 ; xii, 6 ; xxiv, 14 et liv, 1 ; ne se trouve que cinq fois dans tout le reste de la Bible ; — sâmè’, « ayant soif, » se trouve dix fois dans la Bible, dont cinq dans Isaïe, xxi, 14 ; xxix, 8 ; xxxii, 6 et xliv, 3 ; lv, 1 ; — sânîf, « tiare, » m, 23 et lxii, 3 ; — sife’oni, « basilic, serpent, . » xi,

8 et lix, 5 ; — rahab, « orgueilleux, » appliqué à l’Egypte, xxx, 7 et li, 9 ; — iâiôn ve-Hmhdh, « joie et allégresse, » xxii, 13 ; xxxv, 10 et li, 3, 11 ; — Sdi-ôn, terme de comparaison pour indiquer une contrée agréable, xxxiii, 9 ; xxxv, 2 et lxv, 10 ; — Sdfêl, « être humilié, » ii, 9, 11, 12, 17 ; v, 15 ; x, 33 ; xiii, 11 ; xxv, 11, 12 ; xxvi, 5 ; xxrx, 4 ; xxxii, 18 et xl, 4 ; lvii, 9 ; — fiféréf, « ornement, s iii, 18 ; iv, 2 ; x, 12 ; xiii, 19 ; xx, 5 et xuv, 13 ; lii, 1 ; lx, 7, 19 ; lxii, 3 ; — nêsér, « rejeton, » xi, 1 ; xiv, 19 et lx, 21 ; ne se trouve plus que dans Dan., xi, 7.

B) Locutions et formules. — QedôS ISrd’êl, « Saint d’Israël, » i, 4 ; v, 19, 24 ; x, 20 ; xii, 6 ; xvii, 7 ; Xxx, 11, 12 ; xxxi, 1 ; xxxvii, 23 et xli, 14, 16, 20 ; xliii, 3, 14 ; xlv, 11 ; xl vii, 4 ; xlviii, 17 ; xlix, 7 ; liv, 5 ; lv, 5 ; lx, 9, 14 ; rare dans les autres livres de la Bible ; — nidhè Ièrâ’êl, « les chassés d’Israël, » xi, 12 et lvi, 8 ; ne se trouve plus que dans Ps. cxlvii, 2 ; — ydbês hdsîr, « grain aride, » xv, 6 et xl, 7, 8 ; — yemê qédérn, « les jours d’avant, » xxiii, 7 ; xxxvii, 26 et li, 9 ; — nâèâ’nés, « élever un signal, » v, 26 ; xi, 12 ; xiii, 2 ; xviii, 3 et xliv, 22, où le mot nâid’est remplacé par rûm ; de même dans lxii, 10 ; — se’ifè has-selâ’im, « écueils de pierres, » ii, 21 et lvii, 5 ; — pî Yehôvâh dibbér, « la bouche du Seigneur a parlé, » i, 20 et XL, 5 ; lviii, 14 ; ne se trouve nulle part ailleurs ; — sis nobêl, « fleur qui tombe, » xxviii, 1, 4 et XL, 7, 8 ; ne se trouve nulle part ailleurs ; -^ yo’mar Yehôvâh, « Dieu dit, » i, 11, 18 ; xxxiii, 10 et xl, 25 ; xli, 21 ; lxvi, 9 ; tournure propre à Isaïe.

C) Parallélisme. — Dans beaucoup de passages des deux parties il existe un parallélisme d’idées et même de mots, rvveuglement de l’esprit : vi, 10 ; xliv, 18. — Manifestation de la lumière divine, viii, 20 ; lviii, 8 ; cf. aussi ix, 1. — La félicité du royaume messianique dépeinte par les mêmes images, xi, 7-9 ; lxv, 25 ; aussi xi, 6. — De même xxviii, 5, et lxii, 3 ; xxix, 18 et xlii, 7 ; xxx, 26, et lx, 91. — Dévoiler, xxii, 8-9° et xlvii, 2-3°.

— Sion comparée à une tente, xxxiii, 20 ; liv, 2. — Le malheur comparé à l’ivresse, xix, 14 et li, 17 ; xxix, 9 et li, 21 : — Cantiques, xii, 1, 4-5 ; xxiv, 14 ; xxv, 1 ; et xlii, 10 ; xliv, 23 ; xlv, 8 ; 15 ; xlix, 13 ; li, 9 ; lii, 9 ; lxi, 10 ; lxiii, 7 ; lxvi, 10.

D) Répétition de la même idée et parfois des mêmes mots dans le même verset. — Cette propriété stylique se retrouve aussi dans les deux parties ; cf. i, 7 ; iv, 3 ; xiv, 25 ; xv, 8 ; — xl, 19 ; xlii, 15, 19 ; lui, 7 ; lv, 4 ; lviii, 2.

E) Ressemblances entre le chapitre l et les chapitres xl-lxvi. — Il existe tant de ressemblances entre le chapitre I et les chapitres qui composent la seconde partie, que ce point mérite d’être traité à part. — o) Ressemblances verbales. — Sàb, « celui qui se détourne, qui abandonne, » i, 27 et lix, 20 ; —’âzab, « abandonner, » I, 4, 28 et lxv, 11 ; — posa’, « prévariq%er, » i, 2,

28 et xliii, 27 ; xlvi, 8 ; xlviii, 8 ; lui, 12 ; lxvi, 24. — b) Ressemblances réelles : invocation du ciel et de la terre, i, 2 et xliv, 23 ; xlix, 13 ; — Israël représenté sous l’image d’un lépreux, I, 6 et lui, 2 (appliqué au serviteur de Jéhôvâh) ; — Dieu abhorre les prières des pécheurs, i, 15 et lix, 2, 3 ; — invitation à discuter avec Dieu, I, 18 et xli, 1 ; — promesse des biens terrestres, i, 19 et lv, 2 ; — confusion dans le culte des idoles, i,

29 et xlii, 17 ; lvii, 5 ; lxvi, 17.

3o Objections.

1. Objection philosophique. — Ces

chapitres annoncent trop clairement l’exil et la captivité de Babylone, et nomment le libérateur Cyrus ; Isaïe n’a pas pu prédire ces événements, d’autant plus qu’il a vécu dans la période assyrienne. — Réponse. — Comme nous l’avons déjà fait observer ailleurs, cette objection repose sur un faux principe philosophique : l’impossibilité de la prophétie. — Si cette objection était valable, tous les livres prophétiques de l’Ancien Testament seraient apocryphes, car tous contiennent des prophéties au sens strict du mot ; ainsi il faudrait supprimer Amos, qui prédit la ruine du tabernacle davidique et le châtiment des nations éloignées ; Osée, qui prédit la ruine du royaume d’Israël, l’exil et le retour ; Michée, qui prédit la ruine de Samarie, de Jérusalem, l’exil, le retour et la naissance du Messie à Bethléhem ; Nahum, qui prédit la chute de l’empire chaldéen. — De plus si cette règle était vraie, il faudrait conclure, comme l’observe à juste raison Nâgelsbàch, Jesaja, p. xxiii, que les chapitres lii-lv ont été écrits après la venue de Jésus-Christ, et que leur auteur avait lu les Épîtres ae saint Paul. ISAIE (LE LIVRE D’)

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3. Objections historiques.

On prétend les tirer de | l’évidence interne. — Première objection. — Le temps de l’exil est décrit comme présent, et la ruine de Juda et de Jérusalem comme passée, Is., xlii, 22-25 ; xliii, 28 ; xljv, 26 b ; xlvii, 6 ; xlix, 8 ; iii, 5 ; lviii, 12 ; lxi, 4 ; lxiii, -18 ; lxiv, 10-12. L’auteur a donc vécu dans la période exilienne et même après. — Réponse. — a) Il y a des indices certains que ces prédictions ont été faites avant l’événement, Is., xli, 21-29 ; xliii, 9 ; xlv, 21 ; xlvi, 9 ; xxviii, 5, 16. — 6) Cette manière de parler s’explique par ce qu’on appelle le présent prophétique ; les prophètes décrivent parfois les événements futurs comme présents ou passés, car, dans leur esprit ils voient ces événements comme s’accomplissant présentement ou comme déjà accomplis. — Isaïe, dans la seconde partie, n’annonce pas toujours d’ailleurs ces événements comme présents ; parfois il annonce la délivrance comme future, XL, 9 ; xli, 27 ; xliii, 19 ; — xlvi, 13, est un simple contexte. Quant à xlii, 9 ; xlviii, 3, 6, 7, 16, ils rappellent des prophéties faites autrefois et déjà accomplies comme un argument pour prouver que les nouvelles prophéties s’accompliront également.

Deuxième objection. — L’auteur décrit l’état de choses tel qu’il était au temps de l’exil et après : discordes entre les Babyloniens, xlix, 26 ; victoires remportées par Cyrus, xli, 2, 3, 25 ; l’Egypte, l’Ethiopie et Saba sont sa proie, xliii, 3 ; xlv, 14 ; conspiration des nations contre Cyrus sous Crésus, XL, 15 ; xli, 1, 5 ; li, 6 ; lix, 18 ; victoires de Cyrus, lxiii, 1. — Réponse. — Tous ces passages sont mal interprétés, et dès lors l’objection manque de fondement ; xlix, 26 ne fait nullement allusion aux discordes entre Babyloniens, puisque dans ce passage il n’est nullement question du temps de Cyrus, mais du temps qui suivit la restauration ; — xli, 2, 3, 25, ne rappellent pas des victoires déjà remportées, mais annoncent des victoires en général ; on voit, par le contexte et par xli, 1, 22, 23, 24, 26, que cette prophétie est donnée comme un argument de la vraie divinité ; — ce qui est dit, xliii, 3 ; xlv, 14, ne se rapporte nullement à Cyrus, parce que ce conquérant ne fit jamais d’expéditions en Egypte, en Ethiopie et à Saba ; — dans les autres passages allégués, il n’est pas non plus question des nations conspirant contre Cyrus sous Crésus ; XL, 15 déclare l’impuissance des nations contre la majesté divine ; xli, 1, elles sont appelées » à juger si c’est Dieu ou les idoles qui ont fait des fausses prophéties ; xli, 5, affirme d’une façon générale que les contrées même les plus éloignées trembleront, lorsque s’élèvera le héros d’Orient ; li, 6, est un passage trop obscur ; très probablement il s’agit là du salut apporté à la terre par le Christ ; — enfin dans lix, 18, et lxiii, 1, il n’est nullement question de Cyrus, mais de Dieu et de Jésus-Christ ; ce dernier passage annonce le salut messianique, déjà annoncé dans il, 2-4 ; XI, 4-7 ; XII, 1-6 ; xxx, 23-28 ; xxxii, 1-8 ; passages regardés comme authentiques par les rationalistes eux-mêmes.

Troisième objection. — L’auteur décrit avec tant de soin et d’exactitude les divers partis qui existaient parmi les exilés, les factions, les mœurs et la condition des exilés, qu’il se trouvait nécessairement au milieu d’eux, XL, .27 ; xlv> 9 ; xlvi, 6-7 ; xlix, 24 ; li, ; fô ; lvii, 5-8 ; lviii, 13 ; Lix. 3 ; lxvi, 5. — Réponse. — ? Ce groupe de passages est aussi mal interprété ; reprenons point par point en groupant les idées analogues : xlvi, 6-7, et lvii, 5-8, reprennent les idolâtres et montrent la folie de l’idolâtrie ; cela n’a aucune relation avec la période exilienne, mais vise l’idolâtrie pratiquée en Palestine même ; nous ne sommes donc pas à Babylone, mais en Palestine ; — ce que les impies disent, lxvi, 5, avait déjà été dit dans v, 19 ; il n’y a là aucun indice de la fin de l’exil ; — les reproches de lix, 3, se trouvent déjà dans i-v ; ii, 15-21 ; xxviii, 7 ; — lviii, 13, recommande l’observance du sabbat ; Jérémie le fit aussi avant l’exil,

Jer., xvii, 21-22 ; — si le prophète dans xl, 27 ; xlv, 9 ; xlix, 24 ; li, 12, console et réconforte les pusillanimes et les découragés, nous trouvons les mêmes sentiments dans la première partie ; là aussi, l’auteur soutient les pieux et les affligés et les exhorte à mettre leur confiance en Dieu ; de même dans i, 15 ; 23 ; iii, 15 ; v, 8-25 ; x, 12, il avait déjà parlé des iniquités commises.

Quatrième objection. — Tous les prophètes antérieurs à l’exil, et Isaïe lui-même, attendent l’amendement du peuple des souffrances et des peines de l’exil ; dans les chapitres xl-lxvi, au contraire, le peuple est représenté comme contumace, endurci, incrédule, apostat, chargé d’iniquités et n’offrant aucun espoir d’amendement, xlviii, 4, 8 ; lviii, 1 ; lix, 2, 12 ; lxiii, 17 ; lxiv, 7. Donc ces chapitres ne sont pas d’Isaïe. — Réponse. — Nous sommes encore ici en face d’une fausse interprétation ; il nous suffit de remettre les choses à point pour écarter cette objection ; xlviii, 4, 8, l’auteur décrit les mœurs du peuple à peu près dans les mêmes termes que les livres mosaïques ; cf. Exod., xxxii, 9 ; xxxiii, 3, 5 ; xxxiv, 9 ; Deut., ix, 6, 13 ; xxxi, 27 ; devrons-nous conclure que l’Exode et le Deutéronome ont été écrits durant ou après l’exil babylonien ? — lxiii, 17, et lxiv, 7, on pleure les péchés passés, et on en implore le par- : don ; — lviii, 1, et lix, 2, 12, reprennent les péchés déjà repris dans les chapitres I et v, ainsi que la feinte piété des contemporains comme dans I, 10-16 ; — il n’est pas vrai de dire que l’auteur de la seconde partie n’attend des souffrances de l’exil aucun amendement du peuple ; xlviii, 10, prouve le contraire. Le peuple sortit de l’exil de Babylone purifié et plus digne des bienfaits de Dieu.

Cinquième objection. — Tous les discours de cette partie s’adressent à des exilés tantôt pieux, tantôt impies ; l’auteur se demande quels sont ceux qu’il doit consoler et reprendre ; quels sont ceux qu’il doit exhorter à l’amendement, et auxquels il ordonne de s’éloigner de Babylone ; ces discours n’ont pu être prononcés par Isaïe qui a vécu et écrit 150 ans avant l’exil ; pour se convaincre de cela il suffit de se référer à xl, 18, 21, 25 ; xli, 10, 14 ; xlii, 18 ; xliii, 1 ; xliv, 2, 8, 22 ; xlvi, 8, 9, 12 ; xlviii, 1 ; L, 5 ; lvi, 6-12 ; lviii, 4 ; lxi, 1. — Réponse.

— a) On peut dire — et c’est là un principe général — que le prophète, en énonçant des règles de morale éternelles et immuables, les propose comme des vérités présentes, des axiomes actuels, parce que ces règles de leur nature sont valables pour tous les temps et pour tous les lieux ; donc, tout en les appliquant aux "exilés d’une manière éloignée et médiate, il a immédiatement et principalement en vue les nécessités et les besoins de son temps. — b) L’examen des passages allégués prouve en particulier que l’objection n’a aucune valeur ; examinons ces passages en les groupant : —. xl, 12, 21, 25, démontre la folie de l’idolâtrie ; on n’a qu’à lire ii, 8, 20, et xxxi, 7, pour y trouver les mêmes idées ; — xli, 10, 14 ; xliii, 1 ; xliv, -2, ’8, « ne crains pas, » ne s’appliquent pas seulement aux Juifs exilés, mais aussi aux Israélites contemporains d’Isaïe, qu’il s’agit d’encourager et de soutenir ; cf. viii, 17-18 ; x, 24 ; xii, 2 ; xxviii, 16 ; — même chose de xlii, 18 ; xlviii, 1 ; — xliv, 22 ; xlvi, 8, 9, 12, contiennent des exhortations à s’amender et à revenir à Dieu ; de pareilles exhortations se font dans tous les temps et se trouvent presque chez tous les prophètes ; — si lvi, 6-12, n’a pu être dit que pendant l’exil il faut conclure de même pour ii, 4-10 qui exprime les mêmes idées ; il rentre dans le rôle du prophète de décrire le futur comme accompli, et d’en tirer les conclusions morales qui en découlent naturellement ; c’est ainsi que le chapitre xii exhorte ceux qui verront les temps messianiques, à chanter un cantique de louange à Dieu ; que xiv, 4-21, décrit les sentiments de ceux qui ont vu la ruine de Babylone ; — dans l, ’5 ; lxi, 1, le prophète ne dit pas qu’il a été envoyé aux exilés : dans le premier de ces passages il s’agit de l’obéissance de

Notre-Seigneur envers son Fère ; cf.Matth., xx, 28 ; Luc, xxii, 27 ; Phil., ii, 7 ; dans le second, il est question des offices que remplira le Messie. Cf. Ps. xliv, 8 ; cxlvi, 4 ; Matth., v, 3, 5 ; xi, 5 ; Luc., iv, 18 ; Act., x, 38.

Sixième objection. — Les prières et les supplications de iii, 9 ; lxiii, 7 r LXlV, 11, par lesquelles l’auteur pleure les iniquités du peuple, gémit sur ses péchés, les confesse, en demande pardon à Dieu et implore la rémission et le salut, ne peuvent avoir été faites et ne conviennent qu'à l'époque de l’exil. — Réponse. — Ce genre de prières et de supplications rentre tout à fait dans le rôle et la mission des prophètes, car ces invocations servent avant tout à l’instruction des contemporains, à quelque époque que l’on appartienne, et aussi de la postérité ; on peut donc les faire dans tous les temps ; on les trouve du reste dans la première partie. Cf. viii, 17-20 ; xii, 1-6 ; xxiv, 15 ; xxv, 142 ; xxvi, 1-6.

Septième objection. — Lorsque jérémie fut déclaré coupable de mort, parce qu’il avait prédit la ruine de la ville et du temple, Jer., xxvi, 8-15, il n’allégua pas pour sa défense les prophéties de la seconde partie d’Isaïe, ce qu’il n’eût pas certainement manqué de faire si ces prophéties eussent existé de son temps ; les vieillards, Jer., xxvi, 17-24, passent, eux aussi, sous silence, les prophéties de la seconde partie, ce qui est encore inexplicable dans l’hypothèse de l’existence de ces prophéties. — Réponse. — a) On suppose ce qui est en question ; il n’est pas certain que Jérémie ne fasse pas allusion aux prophéties de la seconde partie d’Isaïe ; lorsque Jérémie parle des « discours de mes serviteurs les prophètes », Jer., xxvi, 5, rien ne prouve qu’il n’ait pas en vue Isaïe. — b) Bans les prophéties de la seconde partie, Isaïe ne parle pas tant de la destruction que de la restauration de la ville et du temple : dès lors, le recours de Jérémie à Isaïe dans ces circonstances eût manqué d'à-propos et d’opportunité. — c) Quant aux vieillards, qui défendent Jérémie, ils en appellent adroitement à Michée ; ils n’auraient pas pu en appeler opportunément à Isaïe ; de plus il n'était pas nécessaire qu’ils mentionnassent à cette occasion tous les oracles des prophètes antérieurs ; faudrart-il conclure du silence des vieillards que les oracles d’Osée, II, 11, 14 ; iii, 4 ; et d’Amos, IX, 1, n’existaient pas alors, puisque les vieillards ne s’y réfèrent pas ? — d) Enfin nous avons déjà montré dans les paragraphes précédents que Jérémie connaissait Is., xl-xlvi. S. Objections littéraires. — Elles sont de plusieurs espèces. — A) Descnptions et sentiments étrangers à haïe. — On prétend que la seconde partie contient des descriptions et des sentimentstoutà faitétrangersau caractère d’Isaïe. — Premier^ objection. — La seconde partie accuse une attente et un espoir exagéré de la délivrance, du retour de l’exil et de sa magnificence ; — il y est question d’un nouveau ciel et d’une nouvelle terre ; — on y parle de la splendeur de la ville restaurée, de la longévité des pieux, de la soumission des nations ; de pareils sentiments détonnent avec le caractère calme et modéré d’Isaïe. — Réponse. — a) C’est une règle générale que les descriptions messianiques sont, chez tous les prophètes, dans un style élevé et pleines de vives images ; dans les chapitres xl-lxvi, le prophète décrit, il est vrai, en termes parfois magnifiques la restauration, mais une restauration qui sera avant tout l'œuvre du Messie ; ce sont des prophéties messianiques ; on s’explique dès lors l'élévation des idées, la vivacité des sentiments et la beauté du langage. — 6) Toutes les descriptions qu’on objecte sont déjà préparées dans la première partie ; en effet, ce qui est dit dans lx, 19 ; lxv, 17 ; lxvi, 22, est déjà exprimé dans xi, 6-16, et surtout dans xxx, 26 ; —la splendeur future de Sion n’est pas seulement décrite dans wv, 12-17 ; lx, 1-7 ; lxvj, 12 ; les conditions en sont aussi indiquées danâ ii, 2 ; iv, 2-6 ; xi, 9 ; xviii, 7 ; xxiv, 23 ; sxv, 6 ; xxvi, 1-4 ; — ce qui est dit de la soumission et des hommages des nations dans xlix, 22 ; lit, 15 ; lx, 9 10 ; lxi, 5, avait été déjà affirmé dans ii, , 3 ; rx, 4-7 ; xi, 14 ; xiv, 2, 15 ; xxv, 9-12.

Deuxième objection. — Jérusalem est appelée la titHe sainte, xlviii, 2 ; lii, 1 ; c’est là un indice de temps postérieurs ; à l'époque d’Isaïe, elle ne portait pas encore ce nom. — Réponse. — Dans Isaïe, il est très souvent question de Sion « montagne sainte ». Jérusalem ellemême est dite Ariel (= lion de Dieu, ou à cause de l’autel des holocaustes, cf. Ezech., xliii, 15, 16), xxrx, 2, 7 ; Dieu a sa fournaise dans Jérusalem, xxxi, 9 ; Jérusalem est la ville des solennités, xxxiii, 20, dans laquelle a habité la justice, i, 21 ; tous ceux qui seront demeurés dans Jérusalem seront appelés « saints », i, 3. Après cela, rien d'étonnant si Jérusalem est appelée la « ville sainte » dans la seconde partie ; au contraire, la chose est très naturelle.

Troisième objection. — L’auteur de la seconde partie s'élève vivement contre les idoles, et insiste avec beaucoup de force sur la démonstration de Dieu ; tout cela est un indice de l'époque exilienne ou post-exilienne. — Réponse. — Ces mêmes idées sont aussi développées dans la première partie ; ainsi dans i, 29 ; ii, 8, 9, 18-21 ; vin, 19 ; xvi, 12 ; xvii, 8 ; xix, l ; xxxi, 7, l’auteur attaque l’idolâtrie ; dans viii, 1, 16 ; xxx, 8 ; xxxiv, 16, il s’appuie sur la valeur des oracles pour démontrer Dieu.

Quatrième objection. — L’auteur de la seconde partie parle longuement du serviteur de Jéhovah, lui ; il décrit sa naissance, sa vie, sa passion et sa mort ; c’est là un thème tout à fait étonnant dans la bouche d’Isaïe.

— Réponse. — Il n’y a là rien d'étonnant ; l’idée du serviteur de Jéhovah est déjà préparée, insinuée dans la première partie, iv, 2 ; xi, 1-7 ; le chapitre lui ne fait que développer ces idées ; il est le commentaire du chapitre

XI.

Cinquième objection. — Dans la seconde partie, la restauration de la théocratie n’est nullement liée à un roi de descendance davidique : il en est tout autrement dans la première partie. — Réponse. — Celte affirmation est fausse ; même la seconde partie rappelle parfois Les anciennes promesses et les anciens oracles faits à David. Cf. lv, 3.

B) Idées théologiques., — On soutient aussi que la seconde partie contient des idées théologiques incompatibles avec les croyances et le caractère d’Isaïe. — Première objection. — La seconde partie semble nier la Providence ; Dieu ne s’occuperait pas des choses de ce monde, par exemple : XL, 27 ; xlvii, 10 ; xlix, 14. —Réponse. — Déjà, dans la première partie, les impies tiennent ce langage, xxix, 15 ; de pareilles idées, et des plaintes semblables sur les lèvres des affligés et des pusillanimes se rencontrent également dans d’autres livres de la Bible, parfaitement authentiques ; cf. Ps. xiii (hébreu, xiv), 1, "et le livre de Job ; voir aussi, pour des sentiments de ce genre, Is. ; xxvi, 17, 18.

Deuxième objection. — La seconde partie exprime sur.Dieii des idées bien plus élevées et plus parfaites que la première partie ; — a) dans la substance : Isaïe se contente de dépeindre la majesté de Dieu ; au contraire, les chapitres xl-lxvi exaltent son infinité et ses autres attributs : il est le créateur, le conservateur de tout l’univers, le distributeur de la vie, l’auteur de l’histoire, le consolateur, le Sauveur, xli, 4 ; — b) dans la forme : dans la première partie, les vérités sont uniquement affirmées ; dans la secondé partie, elles deviennent un objet de méditation et de raisonnement ; — de plus on constate de notables divergences : ainsi la préservation des rigueurs du jugement divin d’un reste fidèle est caractéristique d’Isaïe ; on la trouve formulée surtout dans vi, 13 ; xxxvii, . 31 -32 ; — dans xl-lxvi, elle n’est pas un élément distinctif de la doctrine du prophète ;-r la figure du roi messianique, si frappante et si expressive dans rx, 6-7, xi, 1-7, est absente de xl-lxvi.

— Réponse. — Cette objection, en apparence sérieuse,

n’est pas an fond solide. Si les idées sur Dieu formulées dans la seconde partie sont plus élevées et plus pures que celles de la première partie, c’est que les circonstances où le prophète parle sont différentes ; en effet, la première partie comprend des oracles se rapportant en grande partie à une époque troublée, agitée par les invasions étrangères ; la seconde partie, au contraire, s’occupe tout spécialement du Rédempteur, du libérateur, du Messie ; par conséquent, il est naturel que les idées sur Dieu et la divinité aillent en s’épurant et en se perfectionnant ; — de plus, ces idées se trouvent aussi dans la première partie ; cf. xii, 2 ; xvii, 7 ; xxv, 4 ; xxvi, 1 ; xxxi, 5. — Pareillement si la forme est plus rélléchie, cela se comprend sans peine ; dans la première partie, les idées messianiques ne sont, pour ainsi dire, touchées qu’en passant, d’une manière presque accidentelle, tandis qu’elles forment la base et la substance de la seconde partie ; — le reste qui demeure fidèle et échappe ainsi au jugement, se trouve aussi bien dans la seconde que dans la première partie ; — quant à la figure du roi messianique, toute la seconde partie ne fait que la développer et la mettre de plus en plus en relief.

C) Style. — On affirme aussi que le style des deux parties est différent ; celui de la seconde partie serait â la fois plus soigné et plus diffus ; on n’y trouverait pas les images familières à Isaïe. — Réponse. — a) On ne saurait nier qu’il n’existe certaines différences de style entre les deux parties ; les exégètes orthodoxes eux-mêmes le reconnaissent sans difficulté ; mais ces différences s’expliquent parfaitement par la diversité du sujet traité, l’âge du prophète (bien plus âgé dans la seconde partie), la complexité des questions, la diversité des circonstances. — 6) Dans les fragments de la première partie que la critique régarde comme authentiques, on constate également certaines différences de style. — c) Ces différences de style ne sont ni aussi grandes ni aussi nombreuses qu’on se plaît à le dire ; nous avons déjà montré les nombreuses ressemblances styliques entre les deux parties : « Malgré ces inévitables différences, l’impression que laisse la lecture de ces deux parties est celle d’une grande similitude de style. Cela n’a pas laissé d’embarrasser un certain nombre de critiques. Ainsi Augusti prétendait trouver dans l’imitation parfaite du style et de la manière d’Isaïe’à laquelle le prétendu auteur de la seconde partie est arrivé, la raison de l’addition traditionnelle de ces chapitres à ceux du prophète. » Trochon, Isaïe, p. 10.

D) Vocabulaire. — La critique a fait sur ce terrain une minutieuse enquête ; elle prétend que le vocabulaire de la seconde partie est tout à fait différent de celui de la première.

a) Mots. — On a dressé une liste de mots qu’on regarde comme propres à la seconde partie : ’Uni, « lies, côtes lointaines, » xl, 15 ; xli, 1, 5 ; xlii, 4, 10, 12, 15 ; xlix, 1 ; li, 5 ; lix, 18 ; lx, 9 ; lxvi, 19 ; ce mot se trouve aussi cinq fois dans la première partie et avec un sens analogue, si, 11 ; xx, 6 ; xxiii, 2, 6 ; xxiv, 15 ;

— miîpât, « jugement, » xlii, 1, 3, 4 ; li, 4 ; ce mot se trouve plusieurs fois dans la première partie, i, 17, 21, 27 ; iii, 14 ; iv, 4 ; v, 7, 16 ; ix, 7 (héb. 6) ; x, 2 ; xvi, 5 ; — sédéq, « justice, » ai, 2, 10 ; xlii, 21 ; xlv, 13, 19 ; li, 5 ; lviii, 2 ; il se trouve aussi dans la première partie, i, 21 ; ix, 6 ; xxxii, 16, 17 ; xxxiii, 15 ; —’ébéd, « serviteur, » qui se rencontre au moins trente fois dans la seconde partie, se trouve aussi dans la première partie, quoique dans un sens moins précis, xiv, 2 ; xx, 3 ; xxii, 20 ; xxiv, 2 ; xxxvi, 9, 11 ; xxxviii, 5, 24, 35 ; — sémafy, « croître, pousser ; » xliv, 4 ; lv, 10 ; lxi, 11 ; on le trouve aussi comme substantif dans la première partie, iv, 2, sémajf. Yehôvâh, « germe de Jéhovah’; »

— qâir’a, , « appeler, b vingt et une fois dans la seconde’partie, mais aussi plusieurs fois dans la première partie,

ꝟ. 13, 26 ; vi, 3, 4 ; vil, 14 ; viii. 3, 4 ; xxx, 7 ; — pdsaft, i résonner, » xliv, 23 ; xlix, 13 ; lii, 9 ; liv, 1 ; lv, 12 ; on le trouve aussi dans la première partie, xiv, 7 ; — bàhar, « c choisir, » xli, 8, 9 ; xuii, 10, 20 ; xliv, 1, 2 ; xlv, 4 ; lxv, 9, 15, 22 ; se trouve aussi dans la première partie, xiv, 1 ; — hâllal, « louer, » et tehilât, « louange, » xlii, 8, 10, 12 ; xliii, 21 ; xlviii, 9 ; lx, 6, 18 ; lxi, 3, 11 ; xlii, 7, 9 ; lxiii, 7 ; lxiv, 10 ; on le trouve aussi une fois dans la première partie, xiii, 10 ;

— bâfês, « vouloir, désirer, » xliv, 28 ; xlvi, 10 ; ’xlviii, 14 ; lui, 10 ; liv, 12 ; lviii, 3, 13 ; lxii, 4 ; se trouve aussi une fois dans la première partie, i, 11 ; — râfôn, « volonté, bienveillance, » xlix, 8 ; lvi, 7 ; lviii, 5 ; lx, 7, 10 ; lxi, 2 ; on ne le trouve pas dans la première partie ; — Sûè, « réjouir, » lxi, 10 ; lxii, 5 ; lxiv, 4 ; lxv, 18, 19 ; lxvi, 10, 14 ; se trouve aussi dans la première partie, xxxv, 1 ; —’éfe’s, e rien, » xl, 17 ;-xli, 12, 29 ; xlv, 6, 14 ; xlvi, 9 ; xlvii, 8, 10 ; lii, 4 ; Liv, 15 ; on le trouve, aussi dans la première partie, v, 8 ; xvi, 4 ; xxrx, 20 ; xxxry, 22 ; -^ qàséh, « extrémité, » se trouve aussi dans la première partie, v, 26 ; vii, 3, 18 ; xiii, 5 ; — berîf, « alliance, » se trouve également dans la première partie, xxiv, 5 ; xxviii, 15, 18 ; xxxiii, 8 ; — nifyam, « consoler, » se trouve treize fois dans la seconde partie, mais aussi dans la première, i, 24 ; xii, 1 ; xxii, 4 ; — yâëa’, « c sauver, » se trouve quatorze fois dans la seconde partie, mais aussi dans la première, xxv, 9 ; xxx, 15 ; xxxiii, 22 ; xxxv, 4 ; xxxvii, 20, 35 ; — y&sar, « former, » vingt fois dans la seconde partie^ mais aussi dans la première, xxii, 11 ; xxvii, 11 ; xxix, 16 ; xxx, 14 ; xxxvii, 26 ; — pésél, « idole, » dix fois dans la seconde partie, mais aussi dans la première, x, 10 ; xxi, 9 ; xxx, 22 ; — bàr’â, « créer, » XL, 26, 28 ; xli, 20 ; xlii, 5 ; xliii, 1, 7, 15 ; xlv, 7, 8, 12, 18 ; liv, 16 ; lvii, 19 ; lxv, 17, 18 ; on le trouve aussi dans la première partie, iv, 5 ; — zerô’a, « bras » [de Jéhôvàh], li, 5, 9 ; lii, 10 ; lui, 1 ; lix, 16 ; on le trouve aussi dans la première partie, xxx, 30 ; rsé’ôsâ’îm, « descendants, rejetons, » xlii, 5 ; xliv, 3 ; xlviii, 19 ; lxi, 9 ; lxv, 23 ; on le trouve aussi dans la première partie, xxii, 24, xxxiv, 1 ; — pê’êr, « orner, glorifier, » xliv, 23 ; xlix ; 3 ; lv, 5 ; lx, 7, 9, 13, 21 ; lxi, 3 ; on le trouve aussi dans la première partie, x, 15 ; —’af, « oui, » employé vingt-cinq fois dans la seconde partie, xl, 24 ; xlviii, 15 ; se trouve aussi dans la première partie, xxxii, 2.

6) Appositions au.-mot Jéhôvàh. — On a affirmé que dans la seconde partie le mot Jéhôvàh était suivi "de certains déterminatifs, qu’il n’avait pas dans la première ; mais on s’est trompé ; — « créateur du ciel » ou « de la terre », xl, 28 ; xlii, 5 ; xliv, 24 ; xlv, 7, 18 ; Li, 13 ; — « créateur » ou « façonneur d’Israël », XLin, 1, 15 ; xliv, 2, 24 ; xlv, 11 ; xlix, 5 ; — « ton sauveur, . » xlix, 26 ; lx, 16 ; —. « ton rédempteur, » xliii, 14 ; xliv, 24 ; xlviii, 17 ; xlix, 7 ; liv, 8. — Ces appositions sont plus nombreuses, il est vrai, dans la seconde partie, mais elles existent aussi dans la première, i, 24 ; ii, 10, 29.

c) Redoublements de mots dans un but emphatique. xl, 1 ; xliii, 11, 25 ; xlviii, 11, 15 ; li, 9, 12, 17 ; lii, 1, 11 ; lvii, 6, 14, 19 ; lxii, 10 ; lxv, 1, — Ces redoublements se rencontrent aussi dans la première partie, iii, 1 ; viii, 9 ; ix, 6 ; xviii, 2, 7 ; xxi, 9 ; xxviii, 10, 13, 16 ; xxix, 1.

d) Répétitions des mêmes mots. — On trouve ces répétitions dans des versets qui se suivent immédiatement ou à peu d’intervalle : XL, 12-14, fin du t. 13 et du ꝟ. 14, « il leur montra ; » ꝟ. 14, « il instruisit, il enseigna, il apprit ; » xl, 31 et xli, 1, « changer la force ; b xli,

6, « réconforter, » 7, « il réconforta, » 10, « j’ai réconforté ; » 8, 9, « je t’ai choisi ; b 13, 14, « je t’ai aidé, je t’ai porté secours ; » xlv, 4, 5, « tu ne m’as pas connu ; » 5, 6, « il n’y en a pas d’autre, il n’en est pas d’autre ; » l, 7, 9, « mon aide ; » lui, 3, deux fois, « méprisé ; » 3, 4, « nous avons pensé, nous avons cru ; »

7, deux fois, « . il n’a pas ouvert sa bouche ; » lviii, 3,

deux fois, « la Volonté ; » Lix, 8, deux fois, « la paix ; » lxi, 7, « double, le double. » — Ces répétitions se rencontrent aussi dans la première partie, quoique beaucoup moins nombreuses, i, 7, deux fois, « désolée, » mais en hébreu : ietnâmâh, iemàmâh ; xvii, 5, hébreu : Hbbôlîm, sibbôlim, « baie ; » xxxii, 17, 18, « paix. » ’e) Néologismes ou chaldaîsmes. — On dit encore que la seconde partie contient une masse de mots d’emploi tardif, qui ne peuvent pas appartenir à Isaïe. Or nous allons montrer que ces mots ne sont nullement l’indice d’une date postérieure, parce qu’on les trouve soit dans des auteurs antérieurs, soit dans des auteurs à peu près contemporains d’Isaïe : — hên, « si, >.Is., Liv, 15 ; cf. Gen., iii, 22 ; xxix, 7 ; Lev., xxv, 20 ; — sdb’d, « service militaire, » XL, 2 ; cf. Num., iv, 3, 23, 30, 35, 39, 43 ; Job., vii, 1 ; — seganîm, « gouverneurs, » xli, 25 ; cf. Jer., li, 23, 28, où il a la forme plurielle régulière en im, et Dan., ii, 48, où il a la forme chaldaïque du pluriel en în ; — tàfal}, « mesurer, mesure, » xlviii, 13 ; cf. Exod., xxv, 25 ; xxxvii, 12 ; III Reg., vii, 9, 26 ; Ps. (héb.) xxxix, 6 ; Lam., ii, 22 ; — mâtah, « étendue, » XL, 22 ; dn ne le trouve pas ailleurs sous cette forme, mais on trouve son équivalent uni à la préposition’ad : ’ad-mâfaï, « jusques à quand, » Exod., x, 3 ; I Reg., xvi, 1 ; ou bien tout seul mâfaï, Jer., xiii, 27 ; —’ôti pour’» /£, . « de moi, avec moi, » liv, 15 ; cf. Jos., XIV, 12 ; — de même’ô(âm pour’ofam, « eux, » Lix, 21 ; — gd’al dans le sens de « souiller » ; cf. Job, iii, 5 ; — kinâh, « surnommer, » xlv, 4 ; cf. Job, xxxii, 21, 22 ; — mâhâ’, « frapper, applaudir des mains, » LV, 12 ; cf. Ezech., xxv, 6 ; Ps. xcvm ; 8 ; — nâhar, « affluer, » employé comme verbe, lx, 5 ; cf. Ps. xxxiv, 6 ; — ndiaq, « allumer, » xliv, 15 ; cf. Ezech., xxxix, 9 ; Ps. lxvii, 21 ; — sd’dh, « voyager, » li, 14 ; Cf. Jer., il, 20 ; xlviii, 12 ; — hosén, « bras, sein, » xlix, 22 ; cf. Ps. cxxix, 7 ; Neh., v, 13 ; — Sâbdb, « retourné, lvii, 17 ; cf. Jer., iii, 14, 22 ; — bûl, « produit de l’arbre, fruit, » xliv, 19 ; cf. Job, XL, .20 ; — rnelîsdh, léger, agréable, » xliii, 27 ; cf. Gen., xlii, 23 ; II Par., xxxii, 31 ; Job, xxxiii, 23 ; — mesukdn, « indigent, » xl, 20 ; cf. Deut., viii, 9 ; Eccle., iv, 13 ; ix, 15 ; — ke-al, « comme sur, » lix, 18 ; ’lxiii, 7 ; cf. II Par., xxxii, 19. f) Formes grammaticales. — * On n’a pas été plus heureux en ce qui concerne les formes grammaticales. Ces formes, qu’on regarde comme des indices d’une date postérieure, se trouvent aussi dans d’autres auteurs antérieurs ou contemporains d’Isaïe ; —’imês quhel de’amas), « fortifier, » xli, 10 ; cf. Deut., ii, 30 ; Job, iv, 4 ; Prov., viii, 28 ; Amos, ii, 14 ; — quhel) hidês, « renouvela, » lxi, 4 ; cf. I’Reg., xi, 14 ; Ps. li, 12 ; — [pihel) kihên, « remplit la fonction de prêtre, » lxi, 10 ; cf. Exod ;, xxviii, 41 ; xxix, 1 ; Ezech., xliv, 3 ; Ose., iv, 6 ; — [pihel) pê’êr, « orna, » lv, 5 ; lx, 7, 13 ; cf. Ps. CXLLX, 4 ; — (hithpahel) des verbes Sa’dh, « être surpris, » xli, 10, 23 ; pâfâh, « ouvrir, » Ln, 2 ; ydmar, « dire, s LXt, 6 ; ces trois formes sont, il est vrai, inusitées chez les autres auteurs ; mais nous ne connaissons pas assez la langue hébraïque pour nous prononcer avec certitude sur leur caractère ; de plus, presque chaque auteur emploie certaines formes qui lui sont particulières. Pourquoi n’en pourrait-il pas être de même d’Isaïe ?

g)Arabismes. — Les pré tendus arabismes se rencontrent aussi dans d’autres auteurs : — galmûd, * solitaire, » xlix, 21 ; cf. Job, iii, 7 ; xv, 34 ; — hddar, « honorer, » xlv, 2 ; cf. Lev., xix, 15, 32 ; Lam., v, 12 ; Prov., xxv, 6 ; — hâzdh, « délirer, voir des fantômes, » lvi, 10 ; c’est là, il est vrai, un âic*l t ?(6 (uvov ; quoiqu’on puisse l’expliquer par.l’arabe li*, il ne s’ensuit pas que les Hébreux se soient approprié ce mot à l’époque de l’exil ; — même réflexion pour hâbar, « observer, » xlviii, 13, et hàlam, « prolonger, » xlviii, 9 ; — harsôb,

  • Ùen, » lviii, 6 ; cf. Ps. iii, 4 ; —’û{, « renverser, »

L, 4 ; cf. I Par., tx, 4, où l’on trouve cette racine comme nom propre, « Othéïs, » habitant de Jérusalem avant l’exil ; — sdrah, « crier, » xlii, 13 ; ce mot existait du temps du roi Josias, avant l’exil ; cf. Soph., i, 14 ; — sahar, « aurore, » xlvii, 11 ; Cf. Gen., xix, 15. — Cf. pour toutes ces objections (dont la plupart ont été formulées par Knobel-Diestel), Knabenbauer, Inlt., t. ii, p. 13-24. Trochon, Isaïe, p. 8-13 ; Le Hir, Éludes bibliques, 2 in-8o, Paris, 1869, t. i, p. 89-118, 137, 138 ; Driver, hostile à l’authenticité, Introduction, p. 236-243.

VIII. Intégrité.

I. opinion de la critique négative. — Nous ne dirons que quelques mots de cette question qui est inséparable de celle de l’authenticité. Comme nous l’avons déjà vii, toute la critique négative prétend que l’œuvre authentique d’Isaïe aurait subi de profonds remaniements dans le cours des siècles. Mais les divergences commencent’parmi les rationalistes quand il s’agit de trier les fragments et de déterminer les parties qui auraient été ajoutées à l’œuvre primitive. Nous avons déjà fait connaître, au cours de cet article, les instabilités de la critique, particulièrement à l’égard de la seconde partie. Pour compléter cet exposé, nous croyons utile de faire connaître les additions qui auraient été faites à la première partie d’après les plus récents critiques. Stade regarde les fragments ii, 2-4 ; lv, 5-6 ; v, 15-16 ; vil, 8-9°, 15, 17-25 ; ix, 1-7 ; xi, 5-xii, 6 ; xxxhxxxin, comme des additions postexiliennes ; cf. Zeitschrift fur die alttest. Wissenschaft, 1884, p. 256, t. i, p. 586 ; Duhm restreint l’œuvre authentique d’Isaïe aux fragments suivants : i, 2-26, 29-31 ; ii, 2-4, 6-19, 21 ; iii, 1-9, 12, 13-iv, 1 ; v, 1-14, 17-26 ; vi, 1-13 ( « il s’est tenu » ) ; vii, 2-8°, 9-14, 16, 18-20 ; viii, 1-18, 21-22 ; ix, 2-7, 8-14, 17-x, 4 ; x, 5-9, 13-14 ; xi, 1-8 ; xiv, 24-25o, 26-27 ; xvii, 1-6, 9-14 ; xviii, 1-6 ; xx 1, 3-6 ; xx, 16-17 ; xxii, 1-9°, 11M4, 15o, 16-18 ; xxviii, 14, 7-29 ; xxix, 1-4°, 5o-7, 9-10, 13-15 ; xxx, 1-7°, 8-17, 27-33 ; xxxi, 1-4 ( « d’eux » ), 5, à partir de « ainsi », 8o, 9 b, xxxii, 1-5, 9-18, 20. Pour Cheyne, l’œuvre d’Isaïe se réduit aux passages suivants : i, 5-26, 29-31 ; ii, 6-10, 11-17, 18-21 ; iii, 1, 4-5, 8-9, 12-15, 16-17, 24 ; iv, 1 ; v, 1-14, 17-22, 23, 24, 25b ; vi, 1-13 « il s’est tenu », vii, 2-8°, 9-14, 16, 18-20 ; vm, 1-18, 201>-22 ; ix, 8-13, 16-x, 4 ; v, 26-29 regardé comme la conclusion de ix, 8-x, 4 ; x, 5-9, 13-14, 27-32 ; xiv, 24-25o, 26-27, 29-32 ; xvi, 14 à partir de In ; xvii, 1-6, 9-14 ; xviii, 1-6 ; xx, 1, 3-6 ; xxi, 16-17 ; xxii, 1-9°, 11M4, 15o, 16-18 ; xxiii, 1-2, 3( ?), 4, 6-12, 14 ; xxviii.l^, 7-19, 21-22 ; xxix, 14o, 6, 9-10, 13-15 ; xxx, 1-7°, 8-17 ; xxxi, 1-5° « les oiseaux ». Driver, Introduction, p. 229, 230.

il. réfutation. — La réfutation de cette thèse découle rigoureusement de ce que nous avons déjà démontré. Nous ne pourrions entrer dans les détails de l’examen et de la discussion sans nous répéter. Ce que nous avons dit à propos de l’authenticité ruine par voie de conséquence l’opinion de la critique négative, et établit l’intégrité des prophéties d’Isaïe.

IX. Inspiration et canonicité du livre d’Isaïe. — L’inspiration et la canonicité des prophéties d’Isaïe n’ont jamais été contestées. La tradition juive et chrétienne sont trop unanimes sur ce point pour qu’il soit possible de conserver le moindre doute. Dans le canon hébreu, le livre d’Isaïe occupe la première place parmi les prophètes appelés postérieurs ; c’est la place que lui donnèrent les Juifs aux m" et ive siècles ; c’est aussi la place qu’il occupe dans les manuscrits hébreux espagnols et dans les plus anciens manuscrits : tels que le Codex babylonicus petropolitanus, de l’an 916. Dans le Talmud, Barajtha BabaBathra, fol. 14 b, on trouve une fois le classement : Jérémie, JËzéchiel, Isaïe, 12 petits prophètes ; cette troisième place il l’occupe aussi dans la plupart des manuscrits hébreux français et allemands. — Trois preuves principales démontrent U canonicité du livre d’Isaïe 1* Il fait partie de toutes les versions,

anciennes : les Septante et la Peschito d’abord qui sont les versions les plus appréciées ; la version copte, l’éthiopienne, l’arménienne, la géorgienne, l’arabe. Ce fait, sur lequel il est inutile d’insister, prouve que le Livre d’Isaïe fut reçu dans toutes les Églises sans aucune contestation ; — 2o Ses nombreuses citations dans le Nouveau Testament ; nous les avons déjà éniimérées ; qu’il nous suffise de dire qu’il n’y a pas probablement de livre de l’Ancien Testament qui ait été plus cité dans le Nouveau que celui d’Isaïe. — 3e L’autorité des Pères : les Pères attestent la canonicité du livre d’Isaïe de deux façons : a) en le citant : Isaïe est très souvent cité par les Pères de l’Église ; nous ne pouvons pas avoir la prétention de rapporter toutes ces citations, parce que le travail n’en finirait pas ; qu’il nous suffise d’en rapporter quelques-unes, choisies principalement dans les Pères les plus anciens. D’abord les Pères apostoliques : saint Clément de Rome cite Isaïe, lxvi, 2 1 " : « mais qui regarderai-je, sinon le pauvre, celui qui a le cœur brisé et qui craint ma parole ? » I Cor., xiii, 4, Patrum apostolicorum opéra, ’édit. Oscar de Gebhardt et Ad. Hafnack, in-8 « , Leipzig, 1900, p. 8 ; le même Père cite aussi un long passage, Is., lui, 1-12 ; I Cor., xvi, 3-14, p. 9-10. L’Épître de saint Barnabe cite dans un seul chapitre trois fois Isaïe : l, 8, 9 ; xxviii, 16 ; l, 7, Epist., VI, 1-3 ; ibid., p. 51. Saint Ignace d’Antioche fait une évidente allusion à Is v v, 26, lorsqu’il dit de Notre-Seigneur : "va açi-i) a’jaar t).rri etçtoù ; a’.wva ; xrt. Smyrn., i, 2 ; ibid., p, 107. — Saint Irénée cite Is., viii, 3, Adv. hær., iii, 16, 4, t. vii, col. 923 ; il cite aussi Is., VIII, 4, col. 924 ; il cite également Is., iii, 1, c. xviii, n. 3, col. 931. De saint Justin nous ne mentionnerons que les citations qu’il fait d’Is., vii, 14, Apol., i, n. 33, t. vi, col. 381 ; d’Is., ix, 6, et lviii, 2 ; lxv, 2, ibid., n. 35, col. 384. Tertullien ne cesse de citer Isaïe ; cf. particulièrement, Cont, Marc, iii, 21, 22, 23, t. ii, col. 351355 ; iv, 1, col. 361-362 ; v, *4, col. 475-480. Pour les nombreuses citations d’Isaïe par les Pères, voir les notes de Kilber, Analysis biblica, édit. Tailhan, Paris, 1856, t. i, p. 349-394 ; — b) en le commentant ; beaucoup de Pères ont écrit des commentaires sur Isaïe, comme pn peut le voir à la Bibliographie.

X. Texte dd livre d’Isaïe. — 1o Texte original. — Le texte original des prophéties d’Isaïe est l’hébreu. Le texte hébreu, tel que neusj’avons aujourd’hui, ne paraît pas avoir subi de graves altérations. Cependant, en comparant notre texte massorétique actuel avec la traduction des Septante, on constate qu’à certains endroits il a été altéré et qu’il y aurait un certain nombre de corrections à faire. En nous aidant des travaux de critique textuelle modernes, nous signalerons les plus importantes : ix, 10 (héb.) ; èârê, « princes, » au lieu de sârê, « ennemis ; »

x, 4 : bêlfi kora’af ha(’asîr, « Beltis est humiliée, Osiris est terrifié, » au lieu de bîlfi kàra’(ahaf’asîr, « pour n’être pas accablés sous les chaînes ; » — xi, 15 : héfrérib, « dévaster, » au lieu de héhérîm, « anathématiser ; » Septante : ipruiûcret ; Peschito : nehreb, « dévaster ; » Vulgate : desolabit ; — xiii, 22 : be-’aremenôtàv, « dans ses palais, » au lieu de be-’alemenô(av, « dans ses veuves ; » Septante : xaTO’.x^ffoudi ; Peschito : sohorfhôn, « leurs palais ; » Vulgatejira œdibussuis ; Targum : be-bîmî(âhûn ; — xviii, 7o : mê’am, « du peuple, s au lieu de’ani, « peuple ; » Septante : èx Xocoû ; Vulgate : a populo ; Targum : le’ama’;

xxii, 15 : ’êlhaëokên, « pour l’habitant, » au lieu de’él-hasokên, « au trésorier ; » Septante : il ; tô ita(rcoçéptov ; Âquila : irpbç tôv <rxY)voOvToc ; Vulgate : ad eum qui habitat in tabernæi l> ; Targum : lot farnesa’; — xxiii, 13 ; Kena’ânîm, « Chananéens, » au lieu de : KaSdîm, « Chaldéens ; » Septante et Vulgate ont mal traduit : ei « fî v XaXSafwv ; terra Chaldœorum (ꝟ. 11) ; — xxiv, 15 : bâ-’umîm, « dans les nations, » au lieu de bâ-’urîm, « dans les feux ; » — xxxi, 8 ; W, « non, » au Heu de là, « à lui ; » Septante : oùx ; Vulgate : non ; Co dex Babyloniens, édit. Strack : « S ; — uv, 9 : > » >3,

t comme les jours, » au lieu de >o*>3 ; Septante ont mal

traduit : ôrarà toO OSixto ;  ; Peschito : yômt’hy, « les jours ; » Vulgate : sicut in diebus ; Targum : keyûmêy ; — lxvi, 19 : 1313, au lieu de bis ; Septante : *oJ5 ; Vulgate : invfricam ; cf. Strack, Zur Textkritik des lsàias, dans la Zeitschrift fur kath. Théologie, 1877, p. 17 ; Studer, Beitrâge zur Textkritik des Isaias, dans les Jahrb. fur protest. Théologie, 1877 ; Lagarde, Semitica, i, Gœltingue, 1878, p. 1 ; Cheyne, The prophecies of Isaiah, t. ii, Londres, 1881, p. 131, 271 ; Dillman, Der Prophet Jesaia, 5e édit., Leipzig, 1890 ; Kaulen, Einleitung, 3e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1892, p. 362.

2o Versions.

Comme une grande partie des versions

des Livres Saints, celles d’Isaïe se divisent en deux classes : les unes immédiates, les autres médiates. Les premières ont été faites sur le texte hébreu lui-même ce sont les versions grecques des Septante, d’Aquila, de Théodotion, de Symmaque ; la Peschito syriaque avec sa recension karkaphéenne ; et notre Vulgate actuelle. Les versions médiates ont été faites.sur le texte grec des Septante ; ce sont l’ancienne Itala, les trois versions coptes, memphitique, sahidique ou thébaine, basmuhrique ; les deux araméennes, syro-hexaplaire et philoxénienne ; la version éthiopienne, l’arabe, l’arménienne, la géorgienne, la gothique et la slavonne. On trouvera beaucoup de ces versions dans les Polyglottes de Londres et de Paris. La plupart de ces versions existent en entier ; des versions coptes il ne nous reste que des fragments ; les fragments sahidiques du Musée Borgia à Rome ont été publiés par Ciasca ; Bibliorum Sacrorum fragmenta copto-sahidica Musei Borgiani, 2 in-4o, t. ii, Rome, 1889, p. 219-249.

3o Langue.

Au sentiment de tous les critiques la

langue d’Isaïe est généralement pure, correcte et élégante. C’est du bel hébreu, de l’hébreu classique si l’on pouvait employer une pareille expression. En dépit des quelques mots très rares qui se ressentent des circonstances, le reste du livre est un modèle au point de vue de la langue.

4o Style.

Le style d’Isaïe est vraiment admirable et

digne des grands sujets qu’il traite. Un critique a pu dire : « Jamais peut-être un homme n’a parlé un plus beau langage. » L. Seinecke, Der Evangelist des alten Testamentes, ErklârungderWeissagungenJesaias, c.xLlxvi, Leipzig, 1870. Son style présente, en eflet, toutes les qualités qui font les grands écrivains ; il est à la fois élevé, coulant, vif, coloré, et en même temps simple et d’un naturel parfait. C’est à cause de cette clarté de langage que saint Isidore de Péluse a pu dire qu’Isaïe était le plus sage de tous les prophètes : <S ffaçéoratoç, Epist., 1. 1, ep. CCCLXVI, t. lxxviii, col. 389-390. fous les critiques sont du reste d’accord pour reconnaître la beauté littéraire et les charmes du style d’Isaïe. Ce style est à la fois châtié et digne ; le langage est choisi, et en même temps dépouillé de toute affectation ou raideur ; la noblesse, l’éclat et la sublimité semblent le caractériser ; chaque sentence est condensée et persuasive ; les périodes finissent par s’arrondir naturellement ; par exemple, Is., ii, 12-16 ; v, 26-30 ; xi, 1-9. Isaïe tantôt se plaît dans le pittoresque qui frappe et impressionne les masses, xvii, 12-14 ; xxviii, 7-8, 10 ; xxix, 6 ; tantôt il renforce ses idées et ses sentiments par une réelle assonance de mots, v, 7 ; x, 16 ; xvii, 1, 2 ; xxii, 5 ; xxix, 2, 9 ; xxx, 16 ; xxxii, 7, 19 ; son style n’est jamais diffus ; même ses longs discours ne sont jamais prolixes ni monotones ; il sait mettre en relief les points saillants et les présente sous de vives couleurs, v, 8-30 ; vit, 18-25 ; ix, 8-21 ; xix, 16-25. Il possède à merveille l’art d’adapter son langage aux circonstances et d’inculquer à ses auditeurs ce qu’il désire qu’ils comprennent ; c’est ainsi qu’à l’aide de quelques courtes sentences il montre la vanité des $79

    1. ISAIE##

ISAIE (LE LIVRE D’)

idoles et dissipe les plus fortes illusions, i, 2, 3, 4 ; ii, €-10 ; iii, 14-15 ; v, 8-21 ; xxii, 1-5, 15-19, xxviii, 14-20 ; xxix, 12-16 ; xxxi, 3 ; où de gagner l’attention de ses auditeurs par une charmante parabole, v, 1-7 ; ou un mot symbolique, viii, 1 ; xix, 18 ; ou de les portera admirer la majesté de la gloire divine, vi, 1-3 ; ou de faire reluire aux jeux de leur imagination la rénovation mo-Tale opérée par la venue du Messie, xi, 1-10. Parfois il aime à inculquer la vérité par quelque image ou quelque scène, telle que la scène du désespoir, iii, 6-9 ; viii, 21-22 ; par une espèce de proverbe, ix, 10 ; l’enfant, x, -19 ; xi, 6 ; par des similitudes, xvii, 5, 6 ; l’exemple du lit trop étroit et du manteau, xxviii, 20 ; du rêve, xxix, S ; de la crevasse qui envahit la muraille, xxx, 13-14. — Aucun prophète ne peut être comparé à Isaïe pour la conception ou l’expression ; aucun n’a des pensées si nobles ni ne peut les exposer dans un plus beau langage. Cf. Driver, Introdtictlon, p. 228-229 ; cf. aussi Richard Simon, Histoire criliq. du V. Test., in-4o, Rotterdam, -1865, p. 363. — Isaïe est aussi doué d’un vrai génie poétique : grandeur des idées, puissance d’imagination, vivacité des descriptions, énergie et coloris de diction : tels sont ses traits caractéristiques. Ses écrits abondent en images poétiques et en descriptions pittoresques. Nous nous bornerons à donner quelques exemples : l’étendard arboré sur la montagne, v, 6 ; xi, 10 ; xviii, 3 ; xxx, 17 ; — le mugissement de la mer, v, 30 ; — le torrent irrésistible des eaux, viii, 7, 8 ; — la forêt consumée, par les flammes, x, 16-17, ou ravagée par la hache des hommes, x, 33-34 ; — la voie réservée, xi, 16 ; xix, 23 ;

— le mugissement des eaux, xvii, 12-13 ; — la tempête qui renverse tout devant elle, xxviii, 2 ; xxix, 6 ; xxx, ^7-28, 30-31, — le bûcher funéraire, xxx, 33 ; — la main de Dieu étendue sur la terre, v, 25 ; xiv, 26-27 ; xxiii, 11 ; xxxi, 3 ; et frappant des coups désastreux, xi, 15 ; xix, -16 ; xxx, 32. —Les figures, sous lesquelles le prophète se représente Dieu, sont particulièrement impressionnantes : « il s’élève, il est exalté ; » il affirme avec force sa majesté contre ceux qui voudraient lui manquer de respect, ii, 12-21 ; iii, 13 ; v, 16 ; x, 16-17, 26 ; xix, 1 ; xxviii, 21 ; xxxi, 2 ; xxxiii, 3, 10. — La prospérité future est, après les troubles présents, décrite d’une manière incomparable : on ne trouve rien de pareil dans -aucune langue ; ii, 2-4 ; iv, 2-6 ; ix, 1-7 ; xi, 1-10 ; xvi, 4o -5 ; xxix, 18-21 ; xxx, 21-26 ; xxxii, 1-8, 15-18 ; xxxiii, -5-6, 20-22. — Son génie poétique apparaît aussi dans les contrastes et les antithèses de sa narration, i, 3, 10 ; viii, 22-ix, 1 ; xvii, 14 ; xxix, 5 ; xxxi, 4-5 ; Jérusalem traitée comme Sodome et Gomorrhe, i, 9-10 ; les idoles et Jéhovah, i, 19-20 ; ii, 20-21 ; — le luxe et la pompe des villes tombant dans le Se’ôl, iii, 24 ; v, 8-9, 14. Cf. Driver, Introd, , p. 228 ; Vigouroux, Man.bïbl., » édit., Paris, 4901, t. ii, p. 596-602 ; S. Jérôme, Præf. in is., t. xxviii, col. 771 ; R. Lowth, De sacra poesi Hebreéorum, Gœttiïigue, 1770, Prsel., xxi, p. 423-425 ; Danko, Histor. revel. Vet. Test., p. 398 ; Reuss, Les prophètes, in-8o, Paris, 1876, t. i, p. 201.

XI. Forme littéraire des écrits d’Isaïe. — 1o Le contenu. — Au point de vue du contenu ou des matériaux, il faut distinguer dans Isaïe : 1. Des récits historiques, qui servent d’introduction aux prophéties elles-mêmes, par exemple, vi, 1-9 ; vii, 1-4, 10-12 ; viii, 1-4 ; xiv, 28 ; ou qui retracent des événements ayant donné lieu à des prophéties particulières ; par exemple, le siège d’Azot par le tartan ou général de Sargon, roi d’Assyrie, xx ; l’histoire de Sennachérib, xxxvi-xxxvii, 1-22, 36-38 ; la maladie d’Ézéchias, xxxviii, 1-8, 21-22 ; l’ambassade de Mérodach-Baladan, xxxix. — 2. Des oracles, qui sont .assez nombreux, et dont nous nous occuperons plus loin.

2o La forme.

Les récits historiques sont écrits

en prose ordinaire, avec beaucoup de simplicité, de vie « t de mouvement. Pour ce qui concerne les oracles, il

il y en a une partie en vers ; on regarde communément comme des morceaux en vers les fragments suivants : v, 1-2 ; ix, 7-20 ; x, 1-4 ; xi, l-8 ; xii, 1-6 ; xiv, 4-32 ; xxin 16 ; xxv, 1-5, 9-11 ; xxvi, 1-10 ; xxvii, 2-5 ; xxxiv, 1-17 ; xxxv, 1-10 ; xxxvii, 22-29 ; xxxviii, 10-20 ; xlii, 10-13 ; xliv, 1-5. Tous les oracles sans exception sont en style poétique. On sait qu’un des caractères du style poétique en hébreu est le parallélisme ; on le trouve, sous ses trois formes, dans les oracles d’Isaïe : le parallélisme synthétique est le plus souvent employé, i, 2o- b ; quelquefois le parallélisme est synonymique, .l, 3 ; quant au parallélisme antithétique, il n’est employé que rarement, 1, 2e -" 1. Cf. R. Lowth, Isaiah, a neio translation, 1e édit., in-4o, et 2e édit., in-8o, Londres, 1778 ; voir surtout Preliminary dissertation, édit. de 1822, t. i, p. 11, où l’auteur a conservé dans sa traduction anglaise le parallélisme hébreu ; il cite comme exemple de parallélisme synonymique, Is., lxv, 6-7 ; liv, 4 ; li, 7-8 ; xlvi, 3 ; lv, 3 ; lxv, 21-22 ; xxxvi, 5-6 ; ai, 28 ; ix, 20 ; i, 3 ; xlix, 4 ; xlvi, 7 ; xliv, 26 ; xxx, 16 ; l, 10 ; — comme exemples de parallélisme antithétique, Is., liv, 10 ; ix, 10 ; — et de parallélisme synthétique, Is., Lvin, 5-8 ; l, 5-6 ; li, 19 ; xv ; ld., De sacra poesi Hebrœorum ; Gésénius, Commentai’ûber den Jesata, Leipzig, 1821 ; 2e édit., 1829 ; il a imité dans sa traduction l’exemple de R. Lowth ; Bickell, Carmina Vet. Test., metrice, p. 200 ; Gietmann, De re metrica Uebrxorum, p. 59 ; pour ce qui regarde la métrique et la strophique dans Isaïe, cf. Marti, Dos Buch Jesaja, p. xxiv, § v, et pour les principes généraux, Duhm, Einleitung zu den Psalrnèn, § 24, p. xxx.

XII. Prophéties messianiques dans Isaïe. — De tous les prophètes de l’Ancien Testament, Isaïe est certainement celui dont les prophéties messianiques sont à la fois les plus claires et les plus nombreuses.

I. TABLEAU DES PROPHÉTIES MESSIANIQUES.

Les

prophéties d’Isaïe, qu’on regarde universellement comme messianiques, sont : n-iv ; « le germe de l’Éternel, » % 2 ; — v, « le bien-aimé, » ꝟ. 1 ; cette expression s’applique directement à Jéhovah, et par extension à Jésus-Christ ; — vi, « le germe saint, » ꝟ. 13 ; — vii-ix, « Emmanuel ; » — xï-xiii, « la verge de Jessé, » xi, 1 ; « le Sauveur, » xii, 2 ; « le saint d’Israël, » xii, 6 ; — xxviii, « la pierre angulaire, » ꝟ. 16 ; — xxix, « la sagesse des sages sera confondue, » ꝟ. 14 ; — xxxiii, « les sages ont disparu, » ꝟ. 18 ; — xxxv, « la vocation des gentils et la prédication de l’Évangile ; » — XL, 1-11, « la prédication de Jean-Baptiste et la venue du Messie ; » — xlii, 1-9, « vertus du Messie [serviteur, de Jéhovah] ; » — xlixl, « exhortation du Messie y- » — li, « Dieu promet des consolations et la délivrance de l’Église sous la figure de Sion ; » — lii-liii, « souffrances et gloire du Messie ; »

— liv-lv, « Israël figure de l’Église, nouvelle alliance ; » — lix, « le rédempteur et l’établissement du christianisme, » t. 19-20 ; — lx, « les nations se convertiront à Sion, figure de l’Église ; » — lxi, « offices que remplira le Messie ; » — lxiii, 1-6, « Jésus-Christ vainqueur des nations ; » — lxV-lxvi, « gloire de la nouvelle Jérusalem, l’Église, et conversion des gentils. » Dans le tableau suivant, on pourra se rendre compte, par les passages correspondants du Nouveau Testament, de l’accomplissement de la plupart de ces prophéties :

Is., vil, 14 Matth., 1, 18-25 ; Luc, 1, 27-34.

Is.j xl, 3-4. …… Matth., iii, l ; xiv, 1-10 ; Marc.,

i, 4 ; Luc, iii, 3.

Is., rx, 1.. 7 ….. Matth., iv, 13-15.

Is., xxxv, 4-10 Matth., xi, 5.

Is., lui, 7 ; xvi, 1 ; <xxxi, 1. Joa., i, 29 ; xvi, 33 ; Apec, v,

5.

Is., lui, 2-3 Matth., xi, 29 ; Luc, xvi, 14 ;

Joa., xv, 18.

Is., xxix, 14 ; lxi, 1… Matth., ii, 5 ; I Cor., i, 28. ’2

Is., xi, 12. …… Joa., xii, 37-38 ; I Pet., ii, 7 9.

Is., l, 6 Matth., xxvi, 67-68.

Is., lui, 12 Marc., xv, 7-11.

Is., lui, 9.. Matth., xxvii, 57 ; Joa., xx, 14.

Is., xi, ’10. Luc, ii, 24 ; Joa., iii, 14-15.

Is., xlix, 18 I Tim., ii, 4-7.

Is., liv, 12-13 Matth., xix, 28.

Is., Lin Joa., xvi, 33.

II. BXAMBN BT DISCUSSION DE QUELQUES PROPHÉTIES

MBSSIA.NIQUBS D’isaie — 1o La prophétie d’Emmanuel.

— L’école rationaliste nie le caractère messianique de cette prophétie. On va jusqu’à dire qu’en adoptant une interprétation messianique les chrétiens se laissèrent influencer par le judaïsme de la dernière époque qui voyait dans tous les prophètes la manifestation de la fin des temps. Marti, Jesaja, p. 76 ; cf. aussi Giesebrecht, Die Immanuelweissagung, dans les Theol. Studien und Kritiken, 1888, p. 217-264 ; Budde, Ueber das 7 Cap. des Bûches Jesaja, dans les Études archéologiques dédiées à C. Leemans, p. 121-126 ; F. C. Porter, À suggestion regarding Isaiah’s Immanuel, dans le Journal of biblical literature, 1895, p. 19-36 ; Cheyne, Récent Study of Isaaiah, dans le Journal of biblical literature, 1897, p. 131-135. — L’interprétation rationaliste n’est pas admissible ; il s’agit bien là d’une prophétie messianique.

— A)’Almâli. On dit que ce mot ne signifie pas une vierge proprement dite, qui s’appelle en hébreu befûlâh, mais une jeune fille nubile. — Le mot’Almdh dans Is., vil, 14, indique une vierge proprement dite. Voir t. i, col. 390-397. — B) Emmanuel. On a prétendu aussi qu’Emmanuel est ou un fils d’Achaz, ou Ézéchias ; cette interprétation est fausse ; Emmanuel est le Messie, Notre-Seigneur Jésus-Christ. Voir t. ii, ’<col. 1732-1734.

2o Le serviteur de Jéhovah, XLH-XLlli. — Les critiques rationalistes qui n’admettent pas que le serviteur de Jéhovah soit le Messie, ont inventé une foule d’hypothèses : certains ont prétendu que le serviteur de Jéhovah est le peuple d’Israël lui-même ; ainsi parmi les Juifs : Abenesra, Jarchi, Kimchi, Abarbanel, Salomon ben Maloch, Isaac ben Abraham ; parmi les chrétiens : Doëderlein, Schuster, Eichhorn, Telge, Rôsenmûller, Hendewerk, Hitzig, Kœster, Marti, Jesajah, p. 285. Ewald et Beck soutinrent qu’il s’agit du peuple d"Israël tel qu’il devrait être selon les desseins de Dieu. Paulus, Thenius, Maurer, Ammon, von Coelln, Seinecke n’y ont vu que la meilleure partie du peuple d’Israël. Pour de Wette, Winer, Schenkel, c’est le « noyau aristocratique ». Augusti propose uneautre explication ; dans cette prophétie, il est question d’un personnage frappé par Dieu, qui est presque lépreux ; Azarias, fils d’Amasias, est frappé de lèpre ; cf. IV Reg., xv, 5 ; II Par., xxvi, 21 ; Isaïe, dans cette élégie, ehante l’expiation de tout le peuple faite dans la personne d’Azarias. Konynenburg, Bahrdt pensent qu’il s’a.git du roi Ézéchias. Staùdlia a opiné pour Isaïe lui-même qui, d’après la tradition, mourut d’une mort violente. Saadia et Grotius tiennent pour Jérémie qui fut en butte aux persécutions ; Knabenbauer, In Is., t. ii, p. 331-333.

A) Le serviteur de Dieu est le Messie. — o) Tous les détails de cette prophétie se sont accomplis à la lettre en Notre-Seigneur Jésus-Christ ; voir IV, .iii, 5o, 6o, col. 954 ;

— b) Les Pères de l’Église ont appliqué cette prophétie à Notre-Seigneur ; pour les nombreux témoiignages des Pères, voir Kilber, Analysis biblica, édit.

Tailhan, 1. 1, p. 383-385 dans les notes. — c) Le Targum chaldéen, attribué à Jonathan ben Uziel, a aussi interprété cette prophétie du Messie. In ls., lii, 13, il s’exprime ainsi : t Voici que mon serviteur le Messie, mâSiah, prospérera, sera exalté, croîtra et sera fortifié. » Les Juifs postérieurs ont reconnu eux-mêmes l’interpré.tation messianique donnée par le Targum. Cf. Weber,

System der altsyrjtgogalen palâstin. Théologie, Leipzig, 1880, p. 344-347 ; Galatin, De arcanis catholicm veritatis, Bâle, 1550. — d) La critique interne confirme catte interprétation. Dans Is. xi, 1-11, il s’agit du Messie ; les rationalistes eux-mêmes et les Juifs. contemporains le reconnaissent. Cf. Hamburger, Realencyclopàdie fur Bibelund Talmud, Strelitz, 1884, t. i, p. 748. Or le serviteur de Jéhovah est décrit sous les mêmes couleurs et quelquefois avec les mêmes expressions que celui dont il est question dans Is., xi, 1-11, comme on peut le voir, xi, 1 et lui, 2 (rameau) ; xi, 2, et xlii, 1 ; xi, 3, et xlii, 3 ; xi, 4, et xlii, 1 ; xl, 10, et xlii, 6 ; xi, 10, et xlii, 4 ; xi, 11, et xlii, 7. Cf. Knabenbauer, In Is., t. ii, p. 325-331.

B) Objections. — a) Dans Is., xli, 8, le serviteur de Dieu, c’est Israël ; il faut donc conclure que cette application se continue. — Réponse. Il n’y a pas de parité entre les deux passages ; Is., xli, 8, Israël est nommé par son propre nom, tandis que, xlii, 1-9, il n’est jamais nommé ; de plus, xlii, 1, l’expression « serviteur » s’applique à un individu, et les caractères de cet individu sont tellement déterminés, précis, qu’il est impossible d’y voir un être collectif comme l’est un peuple. — 6) L’Ancien Testament n « connut ni ne put connaître le Messie souffrant. — Réponse. Cette objection est une simple pétition de principe ; elle suppose ce qu’il faudrait prouver ; c’est toujours la même préoccupation : l’impossibilité des prophéties claires et précises ; en vertu de ce principe il faudrait rejeter de l’Ancien Testament toute prophétie messianique. — c) Un Messie souffrant n’aurait apporté ni consolation, ni espérance, mais plutôt le contraire. — Réponse. Isaïe ne décrit pas seulement les souffrances du Messie, mais aussi son exaltation, sa gloire, et la félicité de ceux qui le suivront ; cf. Is., lii, 13 ; lui, 10-12 ; xlii, 6 ; xlix, 6 ; liv ; de plus les souffrances du Messie ne sont pas un motif de désespoir et de découragement, mais produisent plutôt les sentiments contraires. Cf. II Cor., viii, 9 ; Jac, v, 11 ; I Pet., II, 21-25. — d) Nulle part ailleurs dans l’Ancien Testament, on ne nous représente le Messie souffrant et humilié. — Réponse. Cette affirmation serait-elle vraie, on n’en pourrait tirer aucune conséquence contre les prophéties d’Isaïe, mais elle est inexacte ; les souffrances du Messie sont décrites dans d’autres livres de l’Ancien Testament ; qu’il nous suffise de citer : Ps. xxi ; Zach., ix, 9 ; xi, 12 ; xii, 10 ; xiii, 7 ; l’obscurité de son origine est aussi annoncée dans Mich., v, 1-2. — e) Le Messie" n’est jamais appelé le « serviteur de Dieu ». — Réponse. Cette appellation équivaut à itaïç du Nouveau Testament ; Matth., xii, 18 ; Act., iii, 13, 26 ; iv, 27, 30 ; de fait les Septante ont traduit sen<us par itaï « . Is., xlii, 1 ; xliii, 10 ; xlix, 6 ; l, 10 ; lii, 13. — f) Plusieurs de ces choses ne se sont jamais accomplies en Jésus. Ainsi il n’a jamais " ouvert lés prisons, ni annoncé le retour de l’exil, Is., xlii, 7 ; lxxi, 5, 9 ; lxi, 1-3 ; jamais les rois ne lui ont rendu hommage, Is., xlix, 7 ; jamais Jésus n’a rétabli et restitué les héritages dissipés et la terre dévastée, Is., xlix, 8 ; jamais il n’a partagé de dépouilles et de proie entre les siens. Is., lui, 12. — Réponse. Pour se convaincre de la futilité d’une semblable objection, il suffit de lire le Nouveau Testament, qui nous explique ce qu’est le royaume messianique. Cf. Knabenbauer, In Is., t. ii, p. 335-338.

3o Prophétie sur Cyrus, xliv, 28 ; xlv, 1-13. — Dans cet oracle, Cyrus, au témoignage de presque tous les Pères, est la figure du Messie ; il est facile de s’en convaincre par l’examen du texte : a) Lui aussi est appelé « Messie », tnàèîah, xlv, 1 ; — 6) il remplira les mêmes offices que le Messie : il est suscité pour rétablir la justice’, xlv, 13 ; — il est, comme le Messie, le pasteur de Dieu, xliv, 28 ; cf. Is., xl, 11 ; Ezech., xxxiv, 23 ; xxxvii, 24 ; Ps.. xxi, 1 ; lxvi, 20 ; — comme le Messie, il accomplira la volonté de Dieu, xi.iv, 28 ;. cf. Is., lui, 10 ; — comme le

Messie, il rétablira le temple, xliv, 28 ; cf. Zach.. vi, 13 ;

— c) enfin l’Église a appliqué à Notre-Seignenr un passage de cette prophétie, Is., xlv, 8. Voir Cyhus, t. ii, col. 1191-1194.

4o Prophétie contre VIdumée, lxiii, 1-6. — Dans ce vainqueur qui revient chargé des dépouilles de ses ennemis, les uns ont voulu voir Jéhovah lui-même ; cf. Marti, Jesaja, p. 391, qui intitule cette section : « le jour de la vengeance de Jéhovah ; » d’autres, Cyrus qui défit, près de Sardes, Crésus, roi de Lydie, et ses alliés, Hérodote, l, 80 ; Cyropsed., vii, 1 ; d’autres, les Israélites ; d’autres, Nabuchodonosor ; d’autres, Judas Machabée, IMach., v, 3, 65 ; II Mach., x, 16 ; Josèphe, Ant. jud., XII, xi, 1, 2 ; d’autres, Jean Hyrcan. — Toutes ces interprétations sont inexactes. Le vainqueur dont il est question dans ce passage, c’est le Messie lui-même ; — a) tout ce qui est dit de ce vainqueur convient à Notre-Seigneur ; — b) les Pères lui ont toujours appliqué cette prophétie ; voir Kilber, Analysis biblica, 1. 1, p. 391 ; — c) durant le temps de la passion, l’Église, dans la liturgie, applique ces versets à Notre-Seigneur.

XIII. Résumé de la christoloGie d’Isaïe. — Nous pouvons maintenant synthétiser à grands traits la christologie d’Isaïe.’Le""prophète décrit les principales fonctions du Christ : royales, prophétiques et sacerdotales. C’est là comme l’idée maîtresse de tout le livre. Presque toute la vie de Jésus-Christ, ses vertus et sa mission sont décrites en détail : sa naissance miraculeuse d’une Vierge est annoncée, vii, 14 ; le chapitre ix nous décrit ses fonctions, et les bienfaits qu’il apportera à la Galilée et conséquemment à l’humanité tout entière ; les effets de la rédemption et le retour à l’innocence primitive sont annoncés, sous une gracieuse image, xi, 6-9 ; son triomphe sur la mort est affirmé, xxv, 8 ; xxxvi, 19 ; les remèdes aux maux de l’humanité [sont décrits d’une manière charmante, xxxv ; la réalisation de ce chapitre est un des caractères les plus saillants de la vie de Jésus-Christ. — Mais ce qu’il y a de plus remarquable, ce sont’les détails de la vie de Notre-Seigneur. Il apparaît comme un serviteur doux et humble, xi, 1 ; lui, 2 ; son ministère sera plein de douceur et de mansuétude, xlii, 2 ; il vient pour consoler et soulager ceux qui souffrent, xliii, 3 ; lxi, 1 ; il sera plein de bonté pour Israël, xlix, 1-6 ; il vient pour établir une nouvelle alliance, xlii, 6 ; xlix, 8 ; ce peuple qu’il est venu visiter et sauver lui réserve les plus dures souffrances ; aussi le châtiment divin ne se fait-il pas attendre, et le salut et la grâce sont portés aux gentils, xlix, 1-9 ; les gentils, par leur dévouement et leurs hommages, le récompenseront des pertes qu’il a faites dans le peuple choisi, l, 1-11 ; ses souffrances, couronnées par une mort violente, achèvent sa mission de médiateur ; il réconcilie tous les pécheurs avec Dieu, lui, 12 b. — Après les* souffrances, la gloire et le triomphe : les grands de la terre se soumettront à lui, lui, 12 a ; il apporte aux nations la justice, xlii, 1, et la lumière, xlii, 6 ; il devient le centre du monde tout entier, xi, 10 ; toutes les nations se dirigent vers Sion, figure de l’Église qui est l’œuvre de Jésus-Christ, lx ; les Éthiopiens entrent dans le royaume de Dieu, xviii ; l’Egypte se convertira au Seigneur et sera consolée, xix, 18-25 ; Tyr aussi rendra hommage au Dieu d’Israël au temps du salut et de la rédemption, xxiii, 15-18. — Le Messie devient également le témoin, le chef et le législateur des nations, lv, 4 ; l’esprit dH Seigneur se repose sur lui, habite en lui, xi, 2 ; xlii, 1 ; lxi, 1 ; cet esprit du Seigneur se répandra, aux jours de sa venue, sur la terre, xxii, 15 ; xliv, 3 ; il détruira le péché, xi, 9, et la guerre, ii, 4. — Le Messie se sert des gentils pour opérer le salut du peuple de l’alliance, qu’il avait rejeté à cause de son infidélité, xi, 12 ; lx, 9-10 ; lxvi, 20-21 ; le retour à l’état d’innocence sera réalisé, lxv, 25 ; il y aura à la fin des temps de nouveaux cieux et une nouvelle terre, lxv, 17 ; lxvi, 22 ; quant

aux méchants, leur lot sera une éternelle réprobation, lxvi, 24. Cf. Trochon, lsaîe, p. 18-20 ; et Hengstenberg, Christology of the old Testament, trad. anglaise par E. Meyer, in-8o, Edimbourg, 1872, t. ii, p. 2-3.

XIV. Bibliographie. — I. commentateurs : Origène, Bomilim in visiones Isaïæ t. xiii, col. 219-254 ; S. Jérôme, t. xxiv, col. 901-936 ; Eusèbe, Comment, in Is., t. xxiv, col. 77-526 ; S. Basile, Comment, in Is. (les* seize premiers chapitres), t. xxx, col.117-667 ; S. Éphrem, In Es. explan., Opéra syriaca, Borne, 1740, t. ii, p. 20-97 ; S. Jean Chrysostome, Inlerpret. in Is., cap. viii, t. lvi, col. 11-94 ; Homil. vi in Oziam, seu de Seraphinis, col. 97-142 ; Homil. in locum Is., xlv, 7, col. 141-152 ; S. Cyrille d’Alexandrie, Comment, in Is., t. lxx, col. 91450 ; Théodoret de Cyr, In Is., eclogaria inlerpret., t. lxxxi, col. 215-494 ; Procope de Gaza, In Is. Epi-, tome, t. lxxxvii, part. II, col. 1817-2718 ; S. Jérôme, Comment, in Is., t. xxiv, col. 17-678 ; S. Thomas d’Aquin, In Es. expositio, Opéra, Anvers, 1612, t. xiii ; Foreiro, Comment, in Is., dans Migne, Cursus complétas Scripturæ sacrée, t. xviii ; *E. F. C. Rosenmûller, Scholia in Vet. Test., 3 in-8° 1829-1834, pars m", Isaiæ vaticinia complectens, x-xxiv, où l’on trouvera une liste des commentateurs protestants ; *Y. Ch. Dôderlein, Esaias ex recensione lextus hebraici, in-8o, Altorf et Nuremberg, 1775, 1778, 1780, 1789 ; * Lowth, Isàia, a new translation, in-4o, Londres, 1778, traduction allemande avec notes et observations par J. B. C. Koppe, 4 in-8o, Leipzig, 17791781 ; *C. G. Hensler, Jesaias, neu ûbersetzt mit Anmerkungen, in-8o, Hambourg^ 1788 ; * Paulus, Philologische Clavis ûber dos Alt. Test., Jesaias, in-8o, Iéna, 1793 ;

  • W. Gesenius, Der Prophet Jesaja (3 parties), in-8o,

Leipzig, 1820-1821 ; * F. Hitzig, Der Prophet Jesaja, in-8o, Heidelberg, 1833 ; *C. L. Hendwerk, Des Propheten Jesaia Weissagungen, 2 in-8o, Kœnigsberg, 1838-1843 ;

  • E. Ewald, Die Propheten des Allen Blindes, 2 in-8o,

1e édit., Stuttgart, 1840-1841 ; 2e édit, , 1867-1868 ; *F. W. C. Umbreit, Praktischer Kommentar ûber die Propheten des Alten Bundes, 1841-1846 ; * M. Drechsler, Der Prophet Jesaja, 3 parties, Stuttgart, 1845-1857 (n, 2, embrassant les chapitres xxviii-xxxix, édité après sa mort par Frz. Delitzsch et A. Hahn, et iii, embrassant les chapitres xl-lxvi, édité par A. Hahn, 1854-1857) ;

  • A. Knobel, Der Prophet Jesaia, dans le Kurzgef. exeg.

Handb., in-8o, 1843, 1854, 1861 ; 4e édit. revue par L. Diestel, Leipzig, 1872 ; * S. D. Luzzato, Il firofeta Isaia volgarizatoe commentato ad uso dégli Isræliti, Padoue, 1856-1867 ; P. Schegg, Der Prophet Isaias ûbersetzt und erklârt, 2 in-8o, Munich, 1850 ; L. Reinke, Die niessianischen Weissagungen bei den grossen und kleinen Propheten des Alten Testamentes, Giessen, 1858, 1860 ; A. Bohling, Der Prophet Jesaja ûbersetzt und erklârt, Munster, 1872 ; J. Bade, Christologie des Alten Testamentes, Mùnstèr, 1851, part, m ; B. Neteler, Dos Buch Isaias aus dem Vrtext ûbersetzt, Munster, 1872 ; Le Hir, Les trois grands prophètes, lsaîe, Jérémie, Ézéchiel, publiés par M. Grandvaux, in-12, Paris, 1877 ; Id., Études bibliques, 2 in-8o, Paris, 1869 ; W. Urwick, The Servant of Jéhovah, in-8o, Edimbourg, 1877 ; Trochon, lsaîe, in-8o, Paris, 1878 (dans la Bible de M. Lethielleux ) ; J. Knabenbauer, Erklàrung des Propheten Isaias, in-8o, Fribourg-en-B., 1881 ; Id., Comment, in Isaianv prophetam, 2 in-8o, Paris, 1887 (dans le Cursus Scripturæ Sacrse des Pères Jésuites) ; *Reuss, Les prophètes, ih-8°, Paris, 1876 ; édit. allemande, 1892 ; * Seinecke, Der Evangelist des Alten Testamentes, in-8o, Leipzig, 1870 ;. n’embrasse que les chapitres xl-lxvi ; *C. J. Breden-’kamp, Der Prophet Jesaja, Erlangen, 1886-1887 ; * C. von Orelli, Die ailes t. Weissagungen von der Wollendung des Gattesreiches, 1882 ; * G. A. Smith The Book of Isaia. (dans Expositor’s Bible), 1889-1890 ; Id., The Book of the twelve Prophète, 1896 ; *A. Dillmann, 5e édit. refondue du Commentaire de Knobel, 1890 ; R. Kitte),

& édit., de Knobel, 1892 ; *Nâgelsbach, Der Prophet Jesaja, dans le Bîbelwerk de Lange, Leipzig, 1877 ; * B. Duhm, Dos Buch Jesaia, dans le Hand-Kommentar de Nowack, Leipzig, 1892 ; * T. K. Cheyne, The book of Isaiah chronologically arrangea, 1870 ; Id., The Prophéties of Israël, 1880, 1884 ; Id., The Book of the prophet Isaiah, part, x de la Polychrome Bible, The sacred books of the old and new Testament, English translation, in-4o, Londres, 1898 ; Id., The Book of the prophet lsaïah, critical édition of the hébrew text, part, x de The sacred Books of t)ie old Testament, Leipzig, 1899 ; *M. L. Kellner, T/ie prophéties of Israël, Cambridge, 1895 ; *J. Skinner, dans Cambridge Bible for Schools, 1896 ; *A. B. Davidson, dans VExpositor, août et septembre 1883 ; février, avril, octobre, novembre, décembre 1884, sur les chapitres xl-lxvi. — II. critique et explication du texte : * David Kocher, Vindicte sacri textus hebr. Esaix vatis, adversus D. Rob. Lowthî criticam, Berne 1786 ; * A. Kroehmal, Haksaw Wehamichlow, 1875 ; *Paul de Lagarde, Semitica, i, 1878, p. 1-32 ; * J. Barth, -BeiJmje zur Erklàrung des Jesaias, 1885 ; *J. Bachmànn, Altlest. Untersuchungen, 1894, p. 49-100 ; *H. Oort, dans la Theol. Tijdschi-ift, 1886, p. 561-568 (sur Is., iii, 16-iv, 6) ; 1891, p. 461-477, Kritische Anteekeningen op. Jez. xl-lxvi ; *Grâtz, Émendationes in Vet. Testant., 1892. — ni. introduction :

  • C. P. Caspari, Beitrâge zur Einleitung in dos Buch

Jesaja, in-8o, Leipzig, 1848 ; * Giesebrecht, Beitrâge zur Jesajakritik, 1890 ; *T. K. Cheyne, Introduction to the Book of Isaiah, 1895 ; traduction allemande par J. Bôhmer, 1897 ; *E. Graf, De l’unité des chapitres XL-LXVI d’Ésaïe, 1895 ; * W. H. Kosters, Deutero-en Trito-Jezaja, dans la Theol. Tijdschrift, 1896, p. 577-623 ; * M. Brûck-, ner, Die Komposition des Bûches Jesaja cap. 38-33, 1897 ; *Ed. Kônig, The Exiles’Book of consolation, traduit de l’allemand par J. A. Serbie, 1899. — ir. histoire et théologie : *C. P. Caspari, Ueber den syrischephraimitischen Krieg, in-8o, Christiania, 1849 ; *B. Duhm, Die Théologie der Propheten, 1875 ; *A. Kuenen. De Profelen en de profetie onder Israël, 1875 ; traduction anglaise, Prophets and prophecy in Israël, 1877 ; * E. M. Krùger, Essai sur la théologie d’Ésaïe, . xl-lxvi, 1881 ; * W. R. Smith, The Prophets of Israël, and their place in history to the close of 8 th century £. C, 1882 ; 2e édit., par T. K. Cheyne, 1895 ; * H. Guthe, Das Zukuntfsbild des Jesaia, 1885 ; * S. R. Driver, Isaiah, his life and tintes, and the writings which bear his name, dans la série Men of the Bible, 1888, 1893 ;

  • H. Hackman, Die Zukuntfserwartung des Jesaja, 1893 ;
  • P. Volz, Die vorexilische Jahweprophetie und der

Messias, 1897 ; *J. Meinhold, Jesaja und seine Zeit, 1898 ; *E. Sellin, Serubbabel, 1898. — Voir Knabenbauer, Comment, in Isaïam prophetam, t. i, p. 19-25 ; Trochon, Isaïe, p. 21-24 ; *S. R. Driver, An introduction to the literalure of the old Testament, 7e édit., Edimbourg, 1898, p. 204-205 ; *D., K. Marti, Das Buch Jesaja, 1900, p. xxiv-xxv. V. Ermoni.

3. isaïe (Septante : ’Iuhtîixç ; Codex Alexandrinus : ’Ûoaiaç ; Vulgate : Isaias), lévite, ancêtre d’un des trésoriers du sanctuaire du temps de David. I Par., xxvi, 25. Son nom dans la Vulgate est écrit Jésias dans I Par., xxrv, 25. C’était le fils aîné de Rahabia, ùn des descendants de Gersom, fils de Moïse.

4. ISAÏE (hébreu : YeSa’eyàh ; Septante : ’Is-aïaç ; Codex Alexandrinus : ’Hirata ; Vulgate : Isaîas), fils d’Athalia, chef de la famille d’Alam qui revint avec Esdras de Babylonie. I Esd., viii, 7.

5. ISÀÏE (Ycia’eyâh ; Septante : ’Iaaia ; Vulgate : Isaias), lévite, de la famille de Mérari, qui revint de la captivité avec Esdras. I Esd., vai, 19.

6. ISJÛE (hébreu : Yééa’eyâh ; Septante : ’Ieata ; Codex Sinailicus : ’Uamâ ; Vulgate : Isaia), Benjamite, père d’Éthéel, dont les descendants furent désignés par le sort, en la personne de Sellum, pour résider à Jérusalem après le retour de la captivité de Babylone. II Esd., xi ; 7.

    1. ISARI##

ISARI (hébreu : hay-isri ; Septante : ’Ieo-pt), lévite, fils d’Idithun, chef du quatrième chœur de chantres dans le service du sanctuaire. I Par., xxv, 11. Au ꝟ. 3, il est appelé Sori.

    1. ISBAAB##

ISBAAB (hébreu : Yéséb’âb ; Septante : ’ItuBaiX), prêtre, chef de la quatorzième famille sacerdotale, lors de la division des descendants d’Aaron en vingt-quatre familles, sous le règne de David. I Par., xxiv, 13.

    1. ISBOSETH##

ISBOSETH (hébreu : ’ISbôSét ; Septante : ’Ieêooflé- ; Jcsèphe : ’leëooOdç), fils de Saûl, régna pendant quelques années, après la mort de son père, sur la plupart des tribus. Il n’est pas nommé au nombre des fils de Saûl,

I Reg., xiv, 49 (excepté dans la version syriaque, où il a été ajouté sous la forme : Echboschul). C’est le même personnage qu’Esbaal, le quatrième fils de Saûl. I Par., vm, 33 ; ix, 39. Voir t. ii, col. 1912. Voici comment on explique généralement aujourd’hui cette dualité de noms. Le véritable nom du fils de Saül était Esbaal, « l’homme de Baal. » Baal, qui signifie « maître, seigneur », désignait le vrai Dieu, en qualité de maître et de seigneur de toutes choses. Quand, plus tard, il devint le nom de dieux locaux (voir t. i ? col. 1315-1316), dont le culte idolâtrique s’introduisit chez les Juifs, on le remplaça dans plusieurs noms propres hébreux, dans lesquels il entrait comme composant, par bôSéf, « honte, ignominie, » nom donné aux idoles. Ose., ix, 10 ; Jer., iii, 24 ; xi, 3. Ainsi Yerubbd’al, surnom de Gédéon, Jud., VI, 32, fut changé en YérubbéSéf, II Sam., XI, 21 ; Meribbâ’al, I Par., viii, 34 ; ix, 40, devint MeftbôSét, II Sam., iv, 4. Cf. Clair, Les livres des Rois, Paris, 1884, t. ii, p. 9 ; F. de Hummelatier, Comment, in libros Samuelis, Paris, 1886, p. 277.

Isboseth n’apparaît sur la scène qu’après la mort de son père et de ses frères à Gelboé. Abner, général en ch, ef de l’armée de Saûl, vint prendre, peut-être à Gabaa, ce seul survivant, avec Miphiboseth, II Reg., iv, 4, dj la maison royale qui avait péri à la bataille, I Reg., xxxi, 2, 8, et le conduisit à Mahanaïm. Il l’établit roi et il fit reconnaître peu à peu et successivement son autorité à Galaad, Gessur (voir col. 223), Jezraël, dans les tribus d’Ephraïm et de Manassé, et finalement dans tout le pays qui forma plus tard le royaume d’Israël. Isboseth avait quarante ans, quand il régna sur tout Israël, c’est-à-dire, selon l’interprétation la plus vraisemblable, lorsque son autorité fut reconnue dans toutes les tribus, excepté Juda, et son règne ainsi établi dura deux années.

II Reg., ii, 8-10. En effet, le règne de David à Hébron sur Juda fut de sept ans et demi. II Reg., ii, 11. Son eompétiteur occupa le trône pendant le même temps ; mais les deux années de son règne sont comptées à partir du jour où son autorité fut établie sur tout Israël. Clair, Les livres des Rois, t. ii, p. 10 ; Fillion, La Sainte Bible, t. ii, Paris, 1890, p. 338. Cependant Ms r Meignan, David, Paris, 1889, p. 34, pense qu’Abner hésita longtemps avant de prendre Isboseth comme roi, et il explique par ce retard de plusieurs années la courte durée du règne. Le P. de Hummelauer, Comment, in libr. Samuelis, p. 277, estime qu’Isboseth, placé sur le trône immédiatement après la mort de son père, ne régna réellement que deux ans, mais que, néanmoins, David ne fut reconnu par les tribus fidèles à la maison de Saûl, qu’au bout de sept ans et demi. Voir 1. 1, col. 62-63.

Prince faible, sans valeur et sans volonté, Isboseth ne fut qu’un instrument entre les mains d’Abner, qui te 987

ISBOSETH — ISENBIEHL

brisa après s’en être quelque temps servi. À la tête de son armée, Abner prit l’offensive contre David, et à Gabaon, il proposa à Joab un combat singulier, qui fut suivi d’une bataille générale et tourna au désavantage des partisans d’Isboseth. Voir t. i, col. 63-64. Dès lors, tandis que la maison de David progressa et se fortifia de plus en plus, celle de Saül tomba dans une décadence de plus en plus grande. II Reg., iii, 1. Isboseth s’aliéna bientôt Abner, qui était le véritable chef dé son parti, pour une querelle de harem. Abner avait pris pour lui Respha, concubine de Saûl. Isboseth, blessé dans son honneur et jaloux de cette union, qui pouvait passer pour un acte de prétendant au trône, adressa des reproches à Abner. Celui-ci qui, sans doute, se détachait déjà d’une cause dont il était Tunique soutien, répondit en colère : « Suis-je donc une tête de chien dans Juda ? (Voir t. ii, col. 702.) Moi, qui ai toujours été l’ami de la maison de ton père et qui ne t’ai pas livré aux mains de David ! Et après cela, tu me querelles aujourd’hui au sujet d’une femme ! » Puis, il s’engagea par serment à faire reconnaître l’autorité royale de David sur le pays tout entier. Isboseth, qui le craignait, ne trouva rien à répondre. II Reg., iii, 6-11. Abner entra aussitôt en pourparlers avec David. Celui-ci, acceptant les propositions d’Abner, redemanda son épouse Michol. Pour ne pas dévoiler les secrets desseins du général en chef, il s’adresssa à Isboseth lui-même. Le faible roi envoya chercher Michol et la fit prendre à son second mari, Phaltiel. II Reg., iii, 12-15. Jetant enfin le voile, Abner gagna à la cause de David les anciens d’Israël, mais il fut tué par Joab. Voir t.. i, col. 65-66. À la nouvelle de ce meurtre, Isboseth perdit courage ; les bras lui tombèrent et ses partisans, qui ne comptaient guère sur lui, furent troublés. II Reg., iv, 1. Deux frères, Baana et Réchab, chef de bandes qui étaient alors au service d’Isboseth, jugeant sa cause désespérée, le tuèrent. Ils s’introduisirent dans sa maison, à l’heure de la sieste, sans être aperçus, car la servante, qui gardait la porte, s'était endormie, en nettoyant du blé. Prenant du grain, afin de s’excuser s’ils étaient surpris, ils pénétrèrent à l’intérieur de la maison, et trouvant le roi couché dans son lit et endormi, ils le frappèrent à l’aine, le tuèrent, lui tranchèrent la tête et s’enfuirent toute la nuit. Ils vinrent à Hébron apporter à David la tête d’Isboseth, et pour excuser leur meurtre, ils présentèrent leur victime comme l’ennemi du roi, l’accusant d’avoir comploté la mort de David, et eux-mêmes comme les ministres de Dieu contre Saül et sa postérité. Repoussant toute solidarité dans cet attentat et proclamant l’innocence d’Isboseth, David fit tuer les meurtriers et ensevelir la tête du fils de Saül dans le tombeau d’Abner à Hébron. II Reg., iv, 5-12. Voir t. i, col. 1343. La mort d’Isboseth rattacha toutes les tribus à la personne de David. Cf. Danko, Historia revelationis divines V. T., Vienne, 1862, p.- 249-251 ; M. « r Meignan, David, Paris, 1889, p. 34-37 ; Dieulafoy, Le roi David, Paris, 1897, p. 142-158.

E. Mangenot.

    1. ISCARIOTE##

ISCARIOTE ('Iuxapi<ÔTiriç), surnom donné à l’apôtre Judas, qui trahit Notre-Seigneur, pour le distinguer de l’apôtre saint Jude et d’autres personnes du même nom. On regarde généralement ce surnom comme composé de n*i » "ip-tf’N, 'U et Qeriyôf, « homme de Carioth. » Voir Carioth 1, t. ii, col. 283, et Judas Iscariote.

    1. ISENBIEHL Johann Lorenz##


ISENBIEHL Johann Lorenz, théologien catholique allemand, né en 1744 à Heiligenstadt im Eichsfelde, mort le 26 décembre 1818 à Œstrich im Rheingau. Après avoir été ordonné prêtre à Mayence, où il avait fait ses études, il fut envoyé en 1769 à Gœttingue comme missionnaire, c’est-à-dire pour y remplir les fonctions de curé catholique dans cette ville. Il y suivit les cours de langue orientale de Jean David Michaëlis. Lorsque renseignement

fut réorganisé à Mayence en 1773, après la suppression des Jésuites, le prince électeur Emmerich Joseph von Breidenbach le nomma professeur ordinaire de langues orientales et d'Écriture Sainte. Il commença ses leçons par l’explication de la prophétie d’Isaïe, vii, 14. Contrairement à la croyance de l'Église qui, comme le dit saint Matthieu, reconnaît le Messie dans l’Emmanuel du prophète, Isenbiehl enseigna qu’Isaïe faisait allusion à une jeune fille qu’il voulait prendre pour épouse et qui devait lui donner un fils appelé Emmanuel. La Vierge dont parle le prophète n’est ni la Vierge Marie dans le sens propre ni dans le sens typique mais seulement dans un sens accommodatice. La faculté de théologie de Mayence et le Censor ordinarius refusèrent l’autorisation d’imprimer les thèses qui soutenaient cette opinion. L’auteur en fut dénoncé au prince électeur. Celui-ci se contenta de lui faire donner cet avis : « Alors même qu’il aurait raison en fait (in tkesï), il avait tort à cause des circonstances difficiles où l’on se trouvait (in hypothesi). Comme on devait éviter, à la suite de la nouvelle organisation de l’enseignement, tout ce qui pourrait amener des troubles, il devait s’en tenir encore pour le moment à l’ancien système. » Là-dessus Isenbiehl garda le silence, mais Emmerich Joseph étant mort le 12 juin 1774, le chapitre examina l’affaire et le nouveau prince électeur, Friedrich Karl Joseph von Erthal (qui fut élu le 18 juillet 1774), révoqua le professeur et l’obligea à passer deux ans dans le séminaire archiépiscopal afin d' y compléter ses études théologiques qu’on jugeait insuffisantes. Pendant ces deux ans, Isenbiehl rédigea un Corpus deeisionum dogmaticarum Ecclesiæ catholicæ, qui parut à Constance en 1777. Dans la préface de cet ouvrage, il dit : Definilio quam in conciliis Ecclesia tradit, censendavidetvr esse régula credendi certior ftrmiorque quam ipse sacer Codex. On ne voit guère comment cette proposition pouvait justifier dans sa pensée son opinion sur la prophétie d’Isaïe, qu’il avait travaillé en même temps à défendre dans une dissertation spéciale. Dès 1775, il avait envoyé un long exposé de ses idées sur ce sujet à plusieurs théologiens catholiques qui ne le désapprouvèrent pas, mais une copie de son mémoire parvint à la censure de Vienne et celle-ci le déclara opus falsum, temerariumeterroneum. Biblioth. Friburg. Eccles., t. iv, p. 258. Il fut néanmoins nommé en 1777 professeur de grec à l'école moyenne de Mayence, à la condition de ne point s’occuper d'Écriture Sainte dans son enseignement. Il accepta, mais il était bien loin de renoncer à ses idées. Cette même année 1777, il fit imprimer et publier sa dissertation par un libraire de Coblentz, et elle parut sous le titre de Joh. Lor. Isenbiekl’s Neuer Versuch ûberdie .Weissagung vorn Emmanuel, 1778. Elle fut imprimée à Coblentz, mais elle ne porte ni le nom du lieu d’impression ni le nom de l’imprimeur. La Préface est datée du 27 octobre 1777. Le libraire avait obtenu Vimprimatur d’un censeur de Trêves. La faculté de théologie de Mayence s’occupa aussitôt de cette publication et la condamna comme renfermant propositiones faUas, scandalosas, piarum aurium offensivas ac de socianisniO' suspectas. L’auteur fut suspendu et emprisonné par l’autorité épiscopale. Les facultés de théologie de Paris, de Trêves, de Strasbourg et d’Heildelberg condamnèrent aussi son œuvre. Voir H. Goldhagen, Religionsjournal, Mayence, 1777-1779, où se trouvent tous les ^documents relatifs à l’affaire. Enfin Pie VI, dans un Bref daté da 20 septembre 1779, la condamna tanquam conlinentem doctrinam et propositiones respective falsas, temerarias, scandalosas, perniciosas, erroneas, hæresi faventes et ksereticas, et en défendit la lecture sous peine d’excommunication réservée au Pape. BullariumRomanumPu VF, t. vi, n » ccxxx, Rome, 1843, p. 146. Isenbiehl signa le 25 décembre 1779 une déclaration par laquelle il se soumettait pleinement à ce jugement. En conséquence il fut remis en liberté et nommé chanoine à Arnoneburg en ISENBIEHL — ISMAEL

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mai 1780. Il garda son canonicat jusqu’à la sécularisation de l’électorat et reçut en 1803 une pension qui lui fut payée jusqu’à sa mort en 1818. Il avait publié en 1787 le tome 1er d’un ouvrage dogmatique : De rébus divinis tractatus introducentes in universutn Veteris ac Novi Testamenti Scripturam et theologiam christianam, 1. 1, in-4o, Mayènce et Francfort-sur-le-Main, 1787. -^ Voir A. G. Hoffmann, dans Ersch et Gruber, À llgemeine Encyklopâdie, sect. ii, t. xxiv, p. 339 ; Reusch, dans YAUgetneine deutsche Biographie, t. xiv, 1881, p. 618 ; Wetzer et Welte, Kirchenlexicon, 2e édit., t. vi, 1887, col. 960 ; H. Hurter, Nomenclator literarius, 2e édit., t. iii, 1886, p. 588 à 590 ; Picot, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique pendant le xviip siècle, 3e édit., t. v, 1855, p. 95-97. F. Vigouroux.

    1. ISHOD##

ISHOD (hébreu : ’IShôd, « homme de Hod ; » Septante : ’IctoûS ; Alexandrinwi : Eoû8), de la tribu de Manassé, fils de Hammoléketh, « la reine, » sœur de Galaad. I Par., vil, 18. La Vulgate a traduit les noms propres : Regina peperit virum décorum, « Reine enfanta Belhomme. » Voir Abiezer 1, t. i, col. 47.

    1. ISIDORE (SAINT)##


ISIDORE (SAINT), Isidorus, évéque de Séville et docteur de l’Église. — Il naquit vers 555-560, soit à Carthagène, dont son père avait été gouverneur, soit à Séville, où ses parents s’étaient réfugiés pour échapper aux persécutions du roi goth Agila (549554), arien déclaré. Il appartenait à la haute noblesse hispano-romaine, mais il resta orphelin de bonne heure, et ce furent es frères aînés, saint Léandre et saint Fulgence, ainsi que sa sœur sainte Florentine, qui se chargèrent de son éducation, comme nous l’apprend saint Léandre. Régula ad virgines, t. lxxii, col. 892. À vrai dire, ce fut saint Léandre, alors archevêque de Séville (576 ?-600 ?) qui eut la principale part dans cette éducation, au témoignage de saint Isidore lui-même. Epist. ad Claudium ducem, 12, t. lxxxiii, col 905. Isidore acquit sous cet excellent maitre une érudition sacrée et profane, qui s’étendait à tout ce que l’on savait de son temps. C’est grâce à cela qu’élevé plus tard à son tour sur le siège de Séville (vers 600) à la mort de son frère, il devint comme la lumière de son siècle par ses nombreux écrits. Ils ont été souvent imprimés en tout ou en partie. Nous mentionnerons seulement, parmi les éditions embrassant toutes les œuvres du saint, celles de Margarin de la Bigne, Paris, in-f », 1580, la première en date ; celle de Grial, Madrid, in-f », 1599, entreprise par ordre de Philippe II ; enfin celle d’un ancien Jésuite, Fàustin Aravalo, in-4o, Rome, 1796-1806, la seule qui ait été faite d’après les manuscrits et dans une certaine mesure conformément aux règles de la critique, bien qu’aujourd’hui elle laisse beaucoup à désirer. — Saint Isidore ne paraît pas avoir composé de commentaire suivi sur aucun de nos Livres Saints, mais il en a expliqué beaucoup de passages. De plus il a dressé dans ses Étymologies et ailleurs, Etymolog., VI, 1, 19, t. lxxxii, col. 229 ; Proœmia in libros Veteris ac Novi Testamenti, t. lxxxiii, col. 155-160 ; De Ecclesiasticis officiis, I, Il et 12, col. 745-750 : 1o le canon des livres sacrés, tel qu’il existait de son temps, et tel que l’Église l’a maintenu depuis lors invariablement ; 2o la série des principales versions, qui faisaient autorité dans les VIe et VIIe siècles. Il a écrit aussi plusieurs opuscules plus ou moins étendus, dont le caractère est nettement exégétique. Ce sont : 1o Liber aUegoriarwm Scripturæ Sacrée, t. lxxxiii, col. 97-130. Le saint s’y occupe uniquement des personnes dont il est parlé dans la Sainte Écriture, soit que ces personnes portent un nom propre, comme Adam, Pierre ; soit qu’elles soient simplement désignées par leur office, ou quelques-unes de leurs qualités, et il s’en occupe en tant que les unes et les autres sont des figures de Notre-Seigncur, de l’Église, des élus, du diable,

des hérétiques, des réprouvés, etc. — 2o Liber de ortu, et vila Palrum, qui in Scripturis laudibus efferuntur, t. lxxxiii, col. 129-156, résumé substantiel de ce qu’on sait authentiquement de leur vie et de leurs actions. Les justes de l’Ancien Testament qui y figurent sont au nombre de 64 ; ceux du Nouveau, de 22, ce qui donne un total de 86 notices. L’authenticité de cet écrit a été révoquée en doute, mais sans doute à tort, car cette authenticité a pour garants deux contemporains tout à fait autorisés, saint Braulion, t. lxxxi, col. 15-17, et saint Ildefonse, ibid., col. 27-28, ainsi que le V. Bède, Retraclatioin Acla Apostol., t. xcii, col. 997 : ce qui nous rend absolument certains que l’écrit appartient en propre à saint Isidore de Séville. — 3o Proœmia in libros Veteri ? ac Novi Testamenti, t. lxxxiii, col. 155-180. C’est une sorte de préliminaire sur chacun des livres de l’Écriture. Le saint y fait connaître en peu de mots, mais d’unemanière très exacte, le caractère distinctif de chacun des 45 livres de l’Ancien Testament et des 27 du Nouveau. — 4o Qussstiones in Vêtus et Novum Testamentum, t. lxxxiii, col. 199-208, simplesérie de 41 question » sans importance, qui n’amènent que des réponses de quelques lignes. — 5o Myslicorum expositiones sacramentorum seu quæstiones in Vêtus lestamentum, t. lxxxiii, col. 207-424. Cet écrit est beaucoup plus étendu et plus important que le précédent. L’auteur y passe en revue tous les livres historiques de l’Ancien Testament. Il y explique le sens mystique de la plupart des faits qui y sont exposés. — 6o Liber numerorum, qui in Sanctis Scripturis occurrunt, t. lxxxiii, . col. 179-200. Il s’agit ici du sens mystérieux que saint Méliton et les autres Pères ont attribué aux nombres. Le saint Docteur s’y occupe : 1o des nombres depuis 1 jusqu’à 30 ; 2o des nombres 24, 30, 40, 46, 50, 60 et 153.

— Divers auteurs ont attribué à saint Isidore d’autres, travaux exégétiques, tels qu’une version particulière dite isidorienne de la Bible, et des commentaires suivis sur plusieurs de nos Livres Sacrés, mais ils l’ont fait sanspreuves suffisantes. En somme, le saint docteur espagnol s’est plus occupé du sens mystique des Écritures que de leur sens littéral, il a plus emprunté à saint Jérôme et à ses autres devanciers, qu’il n’a tiré de son propre fonds. Mais il a été beaucoup lii, surtout au moyen âge, et il a été le maitre d’un grand nombre en Écriture Sainte. — Voir Antonio, Eiblioteca Hispana Vêtus, Madrid, 1787, t. i, p. 282-359 ; F. Aravalo, Isidoriana ou recherches sur la vie et les écrits du saint. Les deux premiers volumes de son édition en 7 in-4° des. Opéra S. Isidori sont consacrés à cet objet. Les Isidoriana ont été reproduits dans la Patrologie latinede Migne et en forment le t. lxxxi tout entier. Voir aussi H. Dressel, De Isidori fontibus, in-8o, Turin, 187 ; W. S. Teufel, Geschichte der rômischen Lileratur, neu bearbeitet von L. Schwabe, 5e édit., 2 in-8o, Leipzig, . 1890, § 496, p. 1294-1295. F. Plaine.

    1. ISMAEL##

ISMAEL (hébreu : Ismff’êl, « Dieu exauce ; » Septante : ’Iutta^X), nom du fils d’Abraham et d’Agar et de cinq autres personnes. Ce nom est écrit quelquefois Ismahel dans la Vulgate. Voir Ismahel 1-5. Cette variante d’orthographe a sans doute pour but d’indiquer qu’il faut prononcer a ete en deux syllabes et non ee, parce que les Latins, écrivant toujours séparément a et e, comme dans Aegyptus, prononçaient néanmoins d’ordinaire ces deux lettres d’une seule émission de voix, commee ; en intercalant un h entre l’a et l’e, on marquait qu’il fallait prononcer ae en deux syllabes.

1. ISMAEL (Vulgate : Ismæl, dans la Genèse, xvi, 11, 15, 16 ; xvii, 18, etc., et Judith, ii, 13 ; Ismahel, dans I Par., i, 28, 29, 31), fils d’Abraham et d’Agar l’Égyptienne. Gen., xvt, 11, 15 ; I Par., i, 28. Son nom, révélé par un ange, fait allusion au cri d’affliction poussé

par sa mère au sein du désert et « entendu de Dieu ». Alors, en effet, qu’elle le portait encore dans son sein, et qu’elle s’enfuyait une première fois devant le mécontentement de Sara, l’envoyé du ciel la consola et l’encouragea en lui annonçant et le secours divin et les futures destinées de son fils. Gen., xvi, 10-12. Voir Ismaélites. A la naissance de l’enfant, Abraham, se’Conformant à la révélation dont il avait eu part, lui donna le nom d’Ismaël. Gen., xvi, 15. Ce nom, qui n’a pas de variantes en grec, est différemment orthographié dans les manuscrits et lés anciennes éditions de la Vulgate, où l’on trouve ; Hismæl, Ismahel, Hîsmahel, et Smahel. L’édition Clémentine elle-même écrit Ismaël dans la Genèse et dans Judith, ii, 13 ; Ismahel dans les Paralipomènes. Cf. C. Vercellone, Variée lecticmes Vulgatæ lalinæ, Rome, 1860, t. i, p. 56. Abraham, qui jusqu’alors, c’est-à-dire à quatre-vingt-six ans, Gen., xvi, 16, n’avait pas eu d’enfants, regarda celui-ci comme l’héritier que Dieu lui avait promis. Gen., xv, 4. Il le crut jusqu’au jour où le Seigneur lui annonça que le fils de la promesse naîtrait de Sara. Le patriarche, étonné ou confus d’une si grande faveur, se contenta de demander pour Ismaêl la vie et la prospérité. Dieu, tout en renouvelant sa prophétie relative à Isaac, accorda également au premier né ses bénédictions : « Quant à Ismaël, dit-il, je t’ai exaucé : voilà que je le bénirai, je l’accroîtrai et le multiplierai beaucoup ; il engendrera douze princes, et . je le ferai père d’une grande nation. » Gen., xvii, 18-20. A treize ans, le fils d’Agar fut circoncis. Gen., xvii, 23, 25, 26. Sara, l’ayant vu un jour s’amuser avec Isaac et peut-être se moquer de lui, dit à Abraham de le chasser avec sa mère. Celui-ci, dont le cœur paternel fut péniblement affecté de cette demande, n’obéit que sur l’ordre de Dieu. Se levant donc un matin, et prenant du pain et une outre d’eau, il en chargea l’épaule d’Agar, lui remit son fils et la renvoya. La pauvre mère reprit une seconde fois le chemin de l’Egypte, et alla s’égarer dans la solitude de Bersabée. Sa provision d’eau finie, elle laissa sous un arbre Ismaël épuisé de fatigue, et, pour ne pas le voir mourir, s’éloigna à une portée de trait, puis se mit à jeter de hauts cris. Dieu entendit sa voix et celle de son enfant. Il lui montra un puits plein d’eau, où elle remplit son outre et redonna un peu de force à celui dont le Seigneur allait faire le chef d’un grand peuple. Gen., xxi, 9-19. Voir Agar, t. i, col. 262. Le texte sacré présente dans le passage que nous venons de résumer certaines difficultés, pour lesquelles nous renvoyons aux commentateurs. On peut cependant, sans voir de contradictions dans les différentes parties du récit, admettre qù’Ismaël, à ce moment, n’était plus un enfant. Chassé de la maison paternelle, le fils d’Abraham demeura et grandit dans le désert, où il devint habile à tirer de l’arc. Il habita dans le désert de Pharan, appelé aujourd’hui Bddiet-et-Tih, situé à l’ouest de l’Arabah, entre les limites méridionales de la Palestine et le massif du Sinaï. Sa mère lui fit épouser une Égyptienne. Gen., xxi, 20-21. C’est la seconde fois que le sang égyptien allait se mêler au sang hébreu, et c’est de ce double mélange que sortiront les Arabes Ismaélites, qui participeront ainsi au caractère des deux races. Les fils d’Ismaël furent au nombre de douze : Nabaioth (hébreu : Nebayôf ; Septante : Naêaiti’6) ; Cédar (Qêddr, KT)8ap), Adbéel {’Adbé’ël, NaSSc^X), Mabsam (Mibèdm, Ma « raâ|x), Masma (MiSma’, Ma<iu.c<x), Duma (Dùtnâh, AoOjia), Massa (Maièd’, Ma<r<rîj), Hadar (ffàdar, XoSSSv), Théma (Têmâ’, ÔaitiS), Jéthur (Yetûr, ’Ie-coûp), Naphis (NdfîS, Naçlç), et Cedma (Qêdmàh, Ke8(ux). Ils furent eux-mêmes chefs des tribus de même nom. Gen., xxv, 12-16 ; I Par., i, 29-31. Pour la situation géographique de ces peuplades et leur histoire, voir Arabie, t. i, col. 856, et les articles spéciaux qui concernent chacune d’elles. Aux douze patriarches, enfants d’Ismaël, il faut ajouter une fille, nommée Mahéleth, Gen., xxviii, 9, Basemath, Gen., xxxvi, 3

(voir Basemath 2, t. i, col. 1492), et qui devint l’épouse d’Esaû. En dehors des événements que nous venons de raconter, la Bible ne nous apprend rien sur la vie d’Ismaël. Nous savons seulement qu’il se retrouva avec Isaac pour ensevelir Abraham dans la caverne de Makpélah. Gen., xxv, 9. Il n’était donc pas trop éloigné pour que la nouvelle de la mort de son père pût lui parvenir. Il mourut à l’âge de 137 ans. Gen., xxv, 17. Ses descendants « habitèrent depuis Hévila jusqu’à Sur, qui est en face de l’Egypte, en allant vers Assur ». Gen., xxv, 18. Voir Hévila 3, col. 688. C’est à eux principalement que s’applique le caractère prédit par Dieu lui-même à propos d’Ismaël, Gen., xvi, 12. Voir Ismaélites.

    1. ISMAEL##


2. ISMAEL, fils de Nathanias. Voir Ismahel 2.

    1. ISMAEL##


3. ISMAEL, le troisième des six fils d’Asel, descendant du roi Saül et de Jonathas par Méribaal, c’est-à-dire Miphiboseth. I Par., viii, 38 ; ix, 44. Dans ce dernier passage, la Vulgate écrit son nom « Ismahel ».

    1. ISMAEL##


4. ISMAEL, père de Zabadias. Voir Ismahel 4.

    1. ISMAEL##


5. ISMAEL, fils de Johanan. Voir Ismahel 5.

    1. ISMAEL##


6. ISMAEL, prêtre, descendant de Pheshur, qui avait épousé une femme étrangère. Esdras l’obligea à la renvoyer. I Esd., x, 22.

    1. ISMAÉLITES##

ISMAÉLITES (hébreu : hay-Ismëê’U, au singulier et avec l’article, I Par., ii, 17 ; xxvii, 30 ; JSmëê’Um, au pluriel et sans article, Gen., xxxvii, 25, 27, 28. ; xxxix, 1 ; Jud., viii, 24 ; Ps. lxxxii (hébreu, lxxxiii), 7 ; Septante : ’la|j.air)Xîrric, ’I<r(j.ar)), ÎTat : Vulgate : Ismælitse, Gen., xxxvii, 25, 27, 28 ; xxxix, 1 ; Jud., viii, 24 ; Ismahelites, Ismahelitæ, I Par., ii, 17 ; xxvii, 30 ; r Ps. lxxxii, 7), descendants d’Ismaël, fils d’Abraham et d’Agar. Gen., xxxvii, 25, 27, 28, etc.

I. Histoire.

Dans les passages indiqués de la Genèse et des Juges, le nom d’Ismaélites est une appellation générale qui s’étend aux tribus nomades des régions transjordanes, aux Madianites en particulier. Ils formaient, eneffet, parmi les Abrahamides, la population la plus nombreuse et la plus puissante. Du reste, par la communauté de leur origine, leur genre de vie, leur trafic, les Ismaélites et les Madianites pouvaient être facilement confondus. Il n’est donc pas étonnant de voir les deux noms appliqués aux marchands qui achetèrent Joseph. Gen., xxxvii, 25, 27, 28, 36 ; xxxix, 1. Dans le Ps. lxxxii (hébreu, lxxxiii), 7, les Ismaélites sont pris comme peuple particulier et cités parmi les nations habitant au sud et à l’est de la Palestine et coalisées contre le royaume théocratique. Enfin, dans I Par., n, 17 ; xxvii, 30, le nom ethnique est joint à celui de deux personnages, Jéther et Ubil. C’est tout ce que la Bible nous apprend sur ce peuple considéré dans son ensemble. Il ne reste plus que l’histoire particulière de chacune des tribus issues d’Ismaël, énumérées Gen., xxv, 13-15 : Nabaïoth, Cédar, Adbéel, Mabsam, Masma, Duma, Massa, Hadar, Théma, Jéthur, Naphis, Cedma. Si quelques-unes sont demeurées inconnues, les autres ont pu être identifiées, et nous connaissons, tantôt d’une façon précise, tantôt d’une manière générale, le territoire qu’elles ont occupé. Ce territoire est compris entre le Hedjâz actuel au sud et la Damascène, peut-être le golfe Persique au nord, la Palestine transjordane à l’ouest et les solitudes du désert syrien à l’est. Voir Arabie, t. i, col. 856, 862. Les Nabuthéens surtout ont laissé un nom et des monuments dans l’histoire. Les Ismaélites sont les Mustariba ou « devenus Arabes » dont parlent les historiens de l’Arabie. « Ce fait, qu’une partie des tribus de l’Arabie descendaient d’Ismaël, fils d’Abraham et de l’esclave égyptienne Iiagar, attesté de

jà parla Bible, est un des points les mieux établis de l’histoire de la péninsule. Il est le fondement d’une notable partie des légendes racontées dans le Coran. Fr. Lenormant et E. Babelon, Histoire ancienne dé l’Orient, Paris, 1881-1888, t. vi, p. 353. Cette nation fiait par absorber les tribus jectanides antérieures, et c’est sa langue qui, illustrée et immobilisée par le livre de Mahomet, répandue par les conquêtes de l’Islam dans toutes les parties du monde, est devenue l’arabe. Voir Arabe 2, t. i, col. 835.

II. Cabactère.

L’ange, annonçant la naissance d’Ismaël, traçait en quelques traits énergiques le portrait de cet enfant du désert : « Il sera, dit-il, un homme sauvage, — littéralement : « un onagre d’homme, » père’’âdânx ; — sa main sera contre tous, et la main de tous contre lui ; et eh face de tous ses frères 41 plantera ses tentes. » Gen., xvi, 12. Rapprochons de ces pa-Toles la description de l’onagre par Job, xxxix, 5-8, et nous aurons une peinture saisissante du caractère ismaélite :

Qui a lâché l’onagre en liberté,

Qui a exempté de tout lieu l’âne sauvage,

A qui j’ai attribué le désert pour maison,

Pour demeure la plaine salée (inculte) ?

Il se moque du bruit des villes ;

n n’entend pas les cris du conducteur.

D parcourt les montagnes où sont ses pâturages,

Et il cherche toute espèce de verdure.

Impossible de mieux caractériser l’amour de la liber£. té et l’esprit d’indépendance propres au Bédouin ou Arabe nomade, qui représente aujourd’hui les anciennes tribus ismaélites. Endurci à la fatigue, content de peu, jouissant avec délices du spectacle varié de la nature, il ne veut pour domaine que le désert avec ses maigres pâturages, mais aussi avec ses horizons sans fin. Plein , <le mépris pour son frère de la ville, qu’il appelle dédaigneusement « l’habitant des maisons », il ne souffre aucun joug et ne connaît la voix d’aucun dominateur. Un besoin et un plaisir, en quelque sorte plus forts que sa volonté, le poussent à errer de campement en campement, cherchant l’herbe verte pour ses troupeaux et le changement pour lui-même. Avec le sang chaud qu’il’porte dans les veines, sa colère s’allume facilement ; de là de perpétuelles et souvent irréconciliables rivalités entre les tribus elles-mêmes. Il attend que le fellah ait ensemencé son champ, pour aller lui ravir, dès qu’il commence à poindre, le fruit de son travail. Cette lutte entre l’Arabe sédentaire et le nomade pillard continue de nos jours comme au temps des Juges. Jud., vi, 3-5. Vaillant et fort, le Bédouin est habile à manier la lance, comme Ismaël et les fils de Cédar l’étaient à manier l’arc. Gen., xxi, 20 ; Is., xxi, 17. Sa richesse consiste en troupeaux de brebis, de chèvres, de chameaux. Il habite parfois dans des sortes de villages ou « lieux entoufés de clôtures », frâsêrîm, comme les douars des Arabes d’Afrique. Cf. Gen., xxv, 16. Les Ismaélites faisaient aussi le trafic et servaient d’intermédiaires entre les contrées lointaines de l’Arabie et les ports de la côte phénicienne ou l’Egypte. Leur descendants suivent encore de nos jours la route des marchands qui, au temps de Jacob, transportaient des parfums et des^esclaves dans la terre des pharaons. « Nous vîmes longeant la "vallée, dit un voyageur anglais, une caravane d’Ismaélites, qui venaient de Galaad, comme aux jours de Ruben et de Juda : leurs chameaux étaient chargés d’aromates, de baume et de myrrhe, et ils auraient certainement acheté volontiers un autre Joseph à ses frères pour le conduire en Egypte et le vendre comme esclave à quelque Putiphar. » E. D. Clarke, Travels in varions countrieê of Europa, Asia and Africa, If édit., in-4o, 4813, t. ii, p. 512-513. Pour compléter ce portrait, aussi bien que pour ce qui concerne la religion, on peut voir

.Arabe 1, t. i, col. 828.

riCT. DE LA BIBLE.

    1. ISMAHEL##


ISMAHEL, orthographe, dans plusieurs passages de la Vulgate, du nom d’Ismaël. Voir Ishæl 1, col. 990.

    1. ISMAHEL##


1. ISMAHEL, orthographe, dans la Vulgate, I Par., i, 28, 29, 31, du nom du fils d’Abraham et d’Agar, qui est écrit partout ailleurs Ismaël. Voir Ishæl, col. 990.

    1. ISMAHEL##


2. ISMAHEL, fils de Nathanias et petit-fils d’Élisama, de la race royale de Juda, contemporain du prophète Jérémie. Son histoire est racontée en quelques mots dans IV Reg., xxv, 23-25, et avec plus de détails dans Jer., xl, 7-xli, 18. Voir aussi Josèphe, Ant. jud., X, ix. Pendant que l’armée de Nabuchodonosor assiégeait Jérusalem*, Ismahel, comme beaucoup d’autres Juifs, s’était réfugié dans le pays des Ammonites, à la cour du roi Baalis. Après la prise et la ruine de la ville, le roi de Babylone nomma gouverneur de la Palestine Godolias, fils d’Ahicam, qui était animé des meilleures intentions. Son père avait été le protecteur de Jérémie. Jer., xxvi, 24. -Voir Godolias 3, col. 259. Un certain nombre de fugitifs, parmi lesquels Ismahel et Johanan, fils de Carée, rassurés par la nomination de ce gouverneur, lui firent leur soumission. Il les exhorta à rester paisiblement en Judée, ce que firent la plupart. Mais Ismahel retourna chez les Ammonites, et les Juifs fidèles apprirent qu’il aurait formé, probablement à l’instigation de Baalis, roi d’Ammon, le dessein d’assassiner Godolias ; ils se rendirent alors à Masphath, où résidait le gouverneur, au nord de Jérusalem, ils le prévinrent du danger qui le menaçait, et Johanan lui offrit de faire lui-même mettre son ennemi à mort. Godolias ne pouvant croire à tant de scélératesse, s’y opposa et Ismahel put ainsi exécuter son crime. Il arriva à Masphath avec dix compagnons. Le gouverneur les invita tous à un repas, et quand ils eurent fini de manger, ils le tuèrent à coups d’épée ; ils égorgèrent ensuite tous les Juifs qui se trouvaient dans la ville, ainsi que les Chaldéens. Le lendemain, Ismahel fit massacrer également soixante-dix pèlerins de Sichem, de Silo et de Samarie, qui, en habits de deuil, apportaient des offrandes à la maison de Dieu en ruines, et il n’en épargna dix autres que par cupidité ; il fit jeter ses victimes dans.une citerne ; alors, emmenant un grand nombre de captifs, parmi lesquels les filles du roi Sédécias, il se mit en route pour retourner dans le pays d’Ammon. Mais Johanan, ayant réuni à la hâte autant d’hommes qu’il avait pu, marcha à sa rencontre ; il le rejoignit « aux grandes eaux de Gabaon », probablement près de la piscine dont il est question, II Reg., iv, 13, voir Gabaon, col. 21, et il délivra tous les prisonniers. Ismahel réussit à s’enfuir, avec huit de ses hommes, en Ammonitide. Ces événements se passèrent au septième mois de l’an 587, environ trois mois après la prise de Jérusalem. Nous ne savons plus rien d’Ismahel, mais la frayeur qu’inspira son crime à Johanan et à ses compagnons, qui redoutaient la vengeance de Nabuchodonosor, les porta à s’enfuir en Egypte, malgré les conseils de Jérémie qu’ils y entraînèrent de force avec eux. Jer., xli, 17-18 ; xiiii, 5-7. Quel avait été le motif du crime d’Ismahel ? Son origine royale lui avait-elle fait espérer de reconquérir le trône de Juda ? avait-il été poussé par la jalousie ou par quelque sentiment de vengeance personnelle ? Il est impossible de le dire. Les Juifs insti-. tuèrent un jeûne national, celui du septième mois, en expiation du crime d’Ismahel. Cf. Zach., vii, 5 ; viii, 19. Ce jeûne est encore observé par les Israélites de nos jours le 3 de tischri. C. Frd. Keil, Die zwôlf kleinen Prophelen, 1866, p. 579.

    1. ISMAHEL##


3. ISMAHEL, fils d’Asel, de la famille de Saûl. I Par., ix, 44. Son nom est écrit Ismaël par la Vulgate dans I Par., viii, 38. Voir Ismaël 3.

    1. ISMAHEL##


4. ISMAHEL, homme de la tribu de Juda, père de

ni. - 32 995

ISMAHEL — ISRAËL (PEUPLE ET ROYAUME D’)

m :

Zabadias. Ce dernier était nâgîd, « chef » de la maison de Juda du temps du roi Josaphat. II Par., xix, 11.

    1. ISMAHEL##


5. ISMAHEL, fils de Johanan, de la tribu de Juda, un des commandants (iàrîm) de cent hommes, qui aidèrent le grand-prêtre Joïada à faire monter Joas sur le trône usurpé par Athalie. II Par., xxiii, 1.

    1. ISMAHÉLITE##


ISMAHÉLITE, orthographe, dans la Vulgate, I Par., ’S, 17 ; xxvii, 30, et Ps. lxxxii, 7, du nom ethnique écrit ailleurs Ismaélite. Voir Ismaélite.

    1. ISMIEL##

ISMIEL (hébreu : YeHmi’êl ; Septante : ’I<r|ia^X), de la tribu de Siméon, descendant de Séméi, chef d’une des branches de sa tribu. Sous le règne d’Ézéchias, il se joignit à plusieurs de ses frères pour aller s’emparer des riches pâturages situés du côté de Gador. I Par., IV, 36-41. Voir Gàdor, col. 34.

i. ISRAËL (hébreu : Iirâ’êl, « qui lutte avec Dieu, » de iârâh, « c combattre, lutter, » et’El, « Dieu ; » Septante : ’IffpaïjX), surnom donné à Jacob par l’ange contre lequel il lutta en vision pendant la nuit à Phanùel lors de son retour de Mésopotamie. Gen., xxxii, 28 ; cf. Ose., xii, 4. Saint Jérôme, Qusest. heb. in Gen., xxxii, 27, t ; xxiii, col. 988, au lieu d’interpréter ce nom par « celui qui lutte avec ou contre Dieu », l’explique de la manière suivante : « Sarith, d’où le nom d’Israël est dérivé, signifie, dit-il, prince. Le sens est donc : Ton nom ne sera pas supplanteur, c’est-à-dire Jacob, mais ton nom sera- : prince avec Dieu, c’est-à-dire Israël. Car comme je suis prince, ainsi tu seras appelé prince, toi qui as pu lutter avec moi. Si tu as pu combattre avec moi qui suis Dieu ou bien un ange (comme la plupart l’interprètent), à combien plus forte raison le pourras-tu avec )es hommes, c’est-à-dire avec Ésaû que tu ne dois point redouter. » — À la suite de cette vision, le fils d’Isaac fut appelé quelquefois Israël, Gen., xxxvii, 3 ; xlvii, 27 ; mais le texte sacré continue néanmoins à le nommer le plus souvent Jacob. Gen., xxxv, 22 ; xxxvii, 1, etc. Voir Jacob.

    1. ISRAËL (PEUPLE ET ROYAUME D’)##


2. ISRAËL (PEUPLE ET ROYAUME D’), peuple choisi de Dieu pour conserver au milieu des nations polythéistes la connaissance et le culte du seul et unique Dieu et de préparer l’avènement du Messie et de la religion chrétienne dans le monde.

I. Ses noms bibliques.

1o Le peuple d’Israël est appelé : 1o Benê Iirâ’êl, « c fils d’Israël, » Gen., xxxii, 32 ; xxxvi, 31 ; xlv, 21 ; xlvi, 8 ; Exod., i, 1, 7, 9, 13 ; ii, 23, 25, ete ; Luc, i, 16, pour désigner non pas seulement les douze fils de Jacob, mais leurs descendants et leurs tribus ; 2o Bef Iirâ’êl, « maison d’Israël, » Exod., xvi, 31 ; Matlh., x, 6 ; 3*>’Adafbenê Iirâ’êl, cœtus filiorum Israël, Exod., xii, 3 ; 4o Iirâ’êl, seul, Gen., xxxiv, 7 ; xlix, 7, 16, 24 ; Exod. iv, 22 ; v, 2, ete ; Ps.’xiii, 7 ; ou dans les expressions « anciens d’Israël, » Exod., iii, 16 ; « princes d’Israël, » Num., vii, 2 ; « tribus d’Israël, » Exod., xxiv, 4 ; Matth., xrx, 28 ; « homme d’Israël, » Josué, ix, 6 ; « Dieu d’Israël, s Exod., v, 1 ; « terre d’Israël, » I Reg., xiii, 19 ; Matth., D, 20 ; « peuple d’Israël, » Act., iv, 10 ; « roi d’Israël, » Joa., i, 49 ; « espérance d’Israël, » Act., xxviii, 20, etc. Par son origine et sa signification, le nom d’Israël est pour le peuple de Dieu un titre d’honneur. Pelt, Histoire de V Ancien Testament, Paris, 1897, 1. 1, p. 162-163.

2o La signification du nom d’Israël comme nom de peuple varia selon les époques. — 1. À partir de l’Exode, I, 9 ; vi, 5, etc., il fut appliqué par métonymie d’abord à tous les descendants de Jacob. Jos., vii, 15 ; Ruth, iv, 7 ; Jud., xi, 39 ; I Reg., ix, 9..— 2. Après le règne de Saûl, il désigna spécialement les tribus du nord, par opposition à la tribu de Juda, II Reg., ii, 9 ; x, 17, 18 ; six, 11, etc., quoiqu’il s’appliquât encore

quelquefois à l’ensemble des douze tribus. II Reg., i, 24 ; xxiii, 3. — 3. Quand le schisme eut été consommé, le royaume des dix tribus prit le nom de royaume d’Israël par opposition au royaume de Juda. III Reg., xiv, 19, etc. — 4. Enfin une des conséquences de la ruine de Samarie et de la captivité de Babylone fut de faire revivre le nom d’Israël dans son sens général, c’est-à-dire qu’il fut appliqué de nouveau à tous les descendants de Jacob. Jer., iii, 6 ; Ezech., iii, l, etc. L’auteur des Paralipomènes, Esdras et Néhémie l’emploient aussi dans ce sens, quel-. quefois même en parlant de l’époque antérieure à la captivité. II Par., xi, 3 ; xii, 1, etc. ; I Esd., ii, 2, etc. — Chez les mêmes écrivains, le nom d’Israël a, en outre, une acception particulière ; il désigne, comme on dirait de nos jours, les laïques, par opposition aux prêtres et aux lévites. I Par., ix, 2 ; I Esd., vi, 16 ; ix, 1 ; II Esd., xi, 3. — Dans les livres des Machabées, le peuple entier est nommé Israël. I Mach., 1, 12, 21 ; iii, 55 ; iv, 11, etc. Sur les monnaies des princes asmonéens, ’on lit la légende « sicle d’Israël ». Voir Sicle. — 5. Dans le Nouveau Testament, le nom d’Israël continue à désigner le peuple de Dieu, comme dans les derniers livres de l’Ancien, Matth., ii 6 ; Luc, i, 54 ; Act., iv, 10 ; Rom., xi, 2 ; Eph., h, 12, etc. Il a, de plus, un sens particulier, celui de vrai et fidèle adorateur de Dieu, cf. Joa, i, 47 (textegrec, 48), et dans cette acception il est dit même des Gentils qui sont devenus chrétiens. Gal., vi, 16 ; I Cor., x, . 18 ; Rom., ix, 6.

II. Son origine.

Par ses ancêtres, Jacob, Isaac, Abraham et Tharé, le peuple d’Israël se rattache aux filsde Sem, Gen., xi, 10-32, et fait partie avec les Édomites, les Ismaélites et les Térachides du groupe des Sémites. On peut se demander à quelle portion du groupe il serelie par la parenté la plus rapprochée. Généralement, on le fait dériver des Chaldéens et d’Arphaxad. Voir

1. 1., col. 1028-1029, et t. ii, col. 505-509. Cf. Vigouroux, Lai

Bible et les découvertes modernes, 6e édit., Paris, 1896,, . t. i, p. 535-563. En disant qu’Abraham est sorti de la. Chaldée, la Genèse, xi, 31, indique nettement ses attaches de famille et montre que les Israélites sont très ; éloignés des Chananéens et des Babyloniens. Le P. Lagrange, Études sur les religions sémitiques, dans lai Revue biblique, t. x, 1901, p. 27-54, les rattacherait plutôt aux Arabes du désert syrien et plus étroitement aux Araméens nomades.

III. Sa. vocation. — Dans le plan de la providence divine sur le genre humain, Israël fut choisi par Dieu, pour être son peuple, et Dieu a voulu être à un titrespécial son Dieu. Exod., vi, 6, 7 ; Lev., xxvi, 11, 12. Il se l’est attaché par des relations particulièrement étroites, dont toutes les autres nations sont exclues pour un temps, et il l’a déclaré sa propriété. Deut., vii, 6, 7 ; xxxii, 9. Il réalisait ainsi ses antiques promesses et il restait fidèle à l’alliance qu’il avait contractée avec Abraham, Gen., xv, 7-21, et qu’il renouvela avec les tribus d’Israël au pied du Sinaï. Exod., xxiv, 1-8. En vertu de ce pacte, le peuple d’Israël devait observer fidèlement les préceptes de son Dieu et lui rendre le culte que lui-même avait fixé et que lui refusaient les autres nations. Deut., xxvi, 16-19. De son côté, Dieu s’engageait, en retour, à exercer une providence spéciale à l’égard des Israélites. Il est leur père, il les a créés, nourris et élevés, Deut., xxxii, 6 ; Isa., i, 2 ; il les a tirés de l’Egypte et les a introduits dans un pays fertile, dont il les a mis en possession, Exod., iii, 7, 8 ; Lev., xxvi, 3-13 ; Deut., xxxii, 9-14. Il a établi sa demeure au milieu d’eux. Exod., xxv, 8 ; xxix, 45, 46. Sa providence s’exerça en Israël dans l’ordre spirituel encore plus qu’au point de vue temporel. Le peuple choisi ne conserva pas seulement la révélation primitive dans toute sa pureté ; il devint, en outre, le dépositaire de nouvelles révélations, qui firent de lui, au moins par destination divine, un peuple saint, prédestiné à devenir le levain qui fera fermenter un jour

la sainteté sur toute la terre. Exod., xix, 5, 6 ; Rom., iii, 1-2 ; Heb., i, 1. De lui enfin devait sortir le sauveur du genre humain. Joa., iv, 22 ; Rom., îx, 5. Cf. Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, t. i., p. 110-112. Mais, hélas ! Israël ne se montra pas toujours digne de sa vocation divine, et Dieu dut intervenir constamment dans son histoire pour lui faire remplir sa mission. Cette mission religieuse met Israël hors de pair et le rend supérieur aux Égyptiens et aux Assyriens en influence sur la véritable civilisation.

IV. Son histoire.

Nous ne donnerons ici qu’un aperçu sommaire de l’histoire du peuple d’Israël. Pour les détails, voir les articles spéciaux ; pour la chronologie, voir t. ii, col. 727-734. On peut diviser l’histoire du peuple d’Israël en trois périodes : la première, d’Abraham à Moïse, pendant laquelle il se forme et devient une nation ; la seconde, de Moïse à la captivité, pendant laquelle il a une existence indépendante ; la troisième, de la captivité à la ruine de Jérusalem, pendant laquelle il est plus ou moins asservi aux grands empires païens.

1o> période. — D’Abraham à Moïse. — L’histoire des patriarches est le prélude de l’histoire d’Israël ; elle est la préparation de ce peuple à part, soit par la migration d’Abraham loin de son pays et de sa famille, soit par l’isolement dans lequel Abraham, Isaac et Jacob vivent au milieu des populations chananéennes, soit par l’élimination des branches secondaires, Moabites, Ammonites, Ismaélites, Édomités. Ces patriarches et leur famille ont passé, au pays de Chanaan, comme des étrangers et des nomades, jusqu’au jour où la famine obligea Jacob à descendre en Egypte auprès de Joseph, son fils, devenu providentiellement le premier ministre du pharaon Apapi II. Établis dans la terre de Gessen (voir ce mot, col. 218-221), les enfants de Jacob y demeurèrent quatre cent trente ans, Exod., xii, 40, d’abord favorisés par la dynastie des rois pasteurs qui se souvenait de Joseph, puis laissés en paix par les rois indigènes de la xviiie dynastie, enfin persécutés, à l’avènement de la XIXe dynastie, par un roi qui ne connaissait pas Joseph. Exod., i, 8. Les fils d’Israël s’étaient multipliés sur la terre étrangère et étaient devenus un grand peuple. Exod., i, 7. Parce que leur nombre l’inquiétait, le pharaon, probablement Ramsès II, voulut les empêcher de croître encore, d’abord en leur imposant des corvées extraordinaires, puis en faisant périr à leur naissance tous leurs enfants mâles. Ces mesures de persécution’n’empêchèrent pas les enfants d’Israël de se multiplier. Exod., i, 8-22. Le séjour en Egypte eut pour Israël d’importantes conséquences. Il contribua à le protéger contre le danger de l’idolâtrie et à maintenir en lui la vraie foi en raison de son isolement au milieu des Égyptiens et de l’aversion que la population indigène avait pour lui. Il servit aussi à faire son éducation politique, à changer ses habitudes non « K des en celles de la vie sédentaire, à lui apprendre là cul-’ture des terres, à l’initier aux sciences et aux arts et à lui &ire connaître la constitution d’un État organise.-Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, t. i, p. 114-115 ; 179-181, 188-192.

2> période. — De Moïse à la captivité. — 1. Pour arracher son peuple à l’oppression des Égyptiens, Dieu suscita en Moïse un libérateur, un chef et un législateur. Sauvé des eaux du Nil, élevé à la/cour même du roi d’Egypte, ce sauveur se préparait à la mission qui devait lui être confiée. Dieu se révéla à lui et le chargea de tirer son peuple de l’Egypte. Par une série de châtiments divins, Moïse amena le pharaon à consentir au départ des Israélites. Voir Moïse. Ceux-ci étaient alors au nombre d’environ six cent mille, sans compter lés enfants. Une foule d’étrangers se joignit encore à eux. Exod., xii, 37, 38. La sortie d’Egypte a une importance capitale dans l’histoire d’Israël ; elle est pour ainsi dire le jour de sa naissance comme peuple de Dieu. Il était sons le joug pesant du pharaon ; Dieu l’en affranchit et acquit

par là sur lui un véritable droit de propriété. Exod., vi, 6, 7. Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, 1 i, p. 183203. La date de cet événement important est fixée, selon l’opinion la plus accréditée, au régne de Ménephtah Ier, et elle est confirmée par le témoignage d’une inscription triomphale de ce roi, dans laquelle les Israélites sont mentionnés pour la première fois sur un monument égyptien. Leur nom y figure dans cette phrase : « Ceux A’hraîlou sont arrachés, il n’y en a plus de graine. » Israîlou est l’équivalent exact, en caractères hiéroglyphiques, de l’Israël biblique, car il n’y a aucune vraisemblance que ce soit un autre Israël. Ce texte si laconique atteste au moins deux faits, l’existence d’une tribu d’Israllou et une défaite que cette tribu aurait subie. A le prendre à la lettre, il. s’agirait d’une extermination complète, puisque Israël « n’a plus de graine ». Mais l’exagération habituelle de ces sortes d’inscriptions autorise à réduire de beaucoup la métaphore royale. On peut y voir une allusion à la tentative que Ménephtah fit d’anéantir en Egypte les enfants d’Israël. Vigoureux, La Bible et les découvertes modernes, ^’édit., Paris, 1896, t. IV, p. 682-683. Maspero, dans le Journal des Débats, 14 juin 1896, et Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. ii, Paris, 1898, p. 444, propose deux hypothèses. L’ordre dans lequel les Isratlou sont cités au milieu des autres peuples vaincus indique qu’ils habitaient alors au sud de là Syrie, peut-être au voisinage d’Ascalon et de Gazer. On peut donc supposer qu’ils venaient à peine de quitter l’Egypte et de commencer leurs courses errantes. Mais il ajoute qu’on pourrait aussi reconnaître en eux un clan resté au pays de Chanaan, alors que le gros de la nation avait émigré sur les rives du Nil. Toutefois, il n’est guère probable qu’une partie des tribus israélites soit demeurée en Chanaan malgré la famine. Il y a plutôt une allusion à l’exode. Ayant quitté l’Egypte, les Israélites n’existaient plus pour Ménephtah ; ils avaient disparu avec leurs femmes, leurs enfants, leurs troupeaux, ne laissant ainsi derrière eux aucune postérité, ou mieux peut-être, ils avaient abandonné leurs récoltes ravagées, ils n’avaient plus de blés. Cf. Bulletin critique, 2 « série, t> iii, 1897, p. 203, 204 ; Bévue d’histoire’et de littérature religieuses, t. ii, 1897, p. 561, 562 ; Revue biblique, t. v, 1896, p. 467, 468 ; t. viii, 1899, p. 267-277.

Parti de Ramessés et de Phithom, Moïse dirigea d’abord sa nombreuse caravane d’Israélites vers la terre de Chanaan. Mais à Étham (voir t. ii, col. 2002, 2003), il prit, sur l’ordre de Dieu, la direction du sud et conduisit le peuple, dont.il était le guide et le chef, sur les bords de la mer Rouge. Exod., xiii, 17, 18. Dieu voulait enlever aux Israélites toute possibilité de retourner en Egypte, en même temps que les préparer dans la presqu’île du Sinaï à se constituer en peuple. C’est aux pieds du Sinaï qu’il promulgua’laloi-religieuse et morale, qui devait en faire son peuple, et qu’il conclut avec eux une alliance perpétuelle. Exod.’, xix-xxxi. La révolte survenue à Cadèsbarnc fut châtiée par un séjour de trente-huit années dans le désert. Num., xiv. Quand la génération des rebelles eut disparu, le peuple réuni marcha vers le pays de Chanaan, dont il devait faire progressivement la conquête. Après avoir conquis par la guerre le droit de passage, Num., xx-xxxii, il accomplit, sous la conduite de Josué, le successeur de Moïse, la conquête et le partage de la terre promise par Dieu à ses ancêtres. L’alliance, conclue avec Dieu au Sinaï, fut renouvelée à Sichem. Jos., xxiv, 1-28. Une fois en possession du pays de Chanaan, Israël jouit complètement de son autonomie politique et nationale. Voir Josué.

2o D’étrangers et dé nomades qu’ils avaient été auparavant, devenus enfin sédentaires, les Israélites vécurent sous le régime patriarcal, restant indépendants les uns des autres, sans autre chef ordinaire que les chefs de famille et les chefs de tribu, et sans autre lien commun

que la religion. Ils furent d’abord fidèles à l’alliance jurée et servirent le Seigneur. Jos., xxiv, 31 ; Jud., ii, 7. Mais il surgit bientôt une génération nouvelle qui n’avait pas été témoin des merveilles que Dieu avait opérées en faveur de la précédente, et le peuple déchut rapidement au point de vue social et religieux. Les Israélites abandonnèrent Jéhovah qui avait tiré leurs pères de l’Egypte et adorèrent les idoles des tribus chananéennes. Jud. ii, 10-13. D’autre part, les tribus tendirent à s’isoler et à ne pas se secourir ; elles cherchèrent même.plus d’une fois à dominer les unes sur les autres. Chacun faisait ce que bon lui semblait. Jud., xiii, 6 ; xviii, 1 ; xxi, 24. Pour rappeler son peuple à là fidélité envers lui, Dieu le livra plusieurs fois aux mains de ses ennemis ; mais bientôt touché de son affliction et de son repentir, il suscitait des juges pour l’affranchir de l’oppression. Jud., ii, 14-49. Les juges, en effet, n’étaient pas des magistrats politiques, placés à la tête du gouvernement et chargés d’administrer tout Israël. Leur mission était temporaire et le plus souvent essentiellement militaire. Ils se mettaient à la tête des tribus opprimées, chassaient l’ennemi et rétablissaient la tranquillité et la prospérité. Chacun d’eux avait des attributions très différentes et exerçait son pouvoir suivant les circonstances et sur des territoires plus ou moins étendus. Voir Othoniel, Aod, 1. 1, col. 714-717 ; Débora, t. ii, col. 1331-1333, et Barac, 1. 1, col. 1443-1446 ; Gédéon, col. 146-149 ; Abimélech, 1. 1, col. 54-58 ; Jephté, Samson, Héli et Samuel. Seuls, Héli et Samuel ont rendu régulièrement la justice. Vigouroux, Manuel biblique, 1-Wdit., Paris, 1901, t. ii, p. 63. Voir Juges.

3o Samuel, le dernier des juges, reçut de Dieu la mission d’établir la royauté en Israël. Il était devenu vieux, et ses fils, qu’il avait donnés pour juges au peuple, se laissaient corrompre par des présents. À cause de ces abus, les anciens d’Israël demandèrent un roi. Samuel résista d’abord à cette demande ; mais, sûr l’ordre de Dieu, il y acquiesça, I Reg., viii, 1-22, et sacra Saûl, I Reg. x, 1, qu’il fit reconnaître par Israël. I Reg., x, 17-27. En abdiquant ses fonctions de juge, il rappela au peuple assemblé la loi de sa divine constitution, I Reg., xii, 1-15. Par ses désobéissances successives, Saül perdit pour sa famille l’espoir d’occuper le trône, I Reg., Xm, 13* 14, et fut lui-même, sinon déposé, du moins réprouvé par Samuel. I Reg., xv, 22, 23. Voir Sàul. Dieu se choisit un homme selon son cœur, et le vieux prophète sacra David, qui fut le chef de la dynastie de Juda. I Reg., XVI, 1-13. La conduite de Saül montra ce que ne devait pas être le monarque hébreu. Vigouroux, Manuel biblique, t. ii, p. 105-106. David, préparé d’avance et de loin à sa haute destinée, cessa d’être un simple chef du peuple et commença à être un véritable roi, comme les monarques d’Egypte et d’Assyrie ; il établit une organisation politique et une administration régulière qui se maintinrent et durèrent, au moins pour le fond, jusqu’à la ruine d’Israël. Malgré ses fautes personnelles, il fut un grand prince, plus admirable encore par sa piété que par ses talents administratifs et militaires. Voir t. ii, col. 1311-1324. Dieu lui avait promis que ses descendants garderaient le trône. II Reg., vii, 12-13. Salomon, désigné pour succéder à son père, exerça pacifiquement la royauté et eut un règne prospère et glorieux, tant qu’il fut fidèle à Dieu. III Reg., iv, 20-28 ; ix, 10-28. Il eut aussi l’honneur, qui avait été refusé à David à cause du sang versé par lui dans les guerres, de construire un temple à Dieu dans sa capitale. Mais ses dernières^asnéesfurent assombries par sa volupté et son idoliMapes. Le Seigneur lui annonça qu’il punirait son inlidéliië par la scission de son royaume, dont une partie se séparerait de sa maison. III Reg., xi, 11-13. Voir Salomon. Le schisme n’eut pas lieu de son vivant ; mais Roboam, son fils et successeur, ayant refusé d’alléger les charges publiques, dix tribus cessèrent de lui obéir et prirent pour roi

Jéroboam Ier, qui avait attisé leur rébellion. Voir Roboam et Jéroboam Ier. Elles fondèrent ainsi un royaume distinct qu’elles appelèrent « Israël ». Roboam ne régna plus que sur Juda, en gardant Jérusalem comme capitale. III Reg., xii, 1-17. Il y eut dès lors deux royaumes séparés, celui de Juda (voir Juda [Royaume be]), et celui d’Israël dont nous allons résumer l’histoire.

4* Le royaume d’Israël est aussi appelé royaume d’Éphraîm à cause de la prépondérance que prit la tri’bu de ce nom. Voir t. ii, col. 1878, 1879. Beaucoup plus vaste que le royaume de Juda, il embrassait tout le nord de la Palestine depuis Béthel, et toute la contrée qui se trouvait au delà du Jourdain. Il eut successivement pour capitale Sichem, III Reg., xii, 25 ; Thersa, III Reg., xiv, 17 ; xv, 21, et Samarie, fondée par Amri. III Reg., xvi, 24. Son trône fut occupé par plusieurs dynasties qui se supplantèrent et se succédèrent. Malgré l’étendue de son territoire, le royaume d’Israël fut moins prospère que celui de Juda, et il marcha rapidement vers sa ruine. Les causes de sa décadence sont à la fois d’ordre religieux et d’ordre politique. Jéroboam, son fondateur, crut être habile politique, en empêchant ses nouveaux sujets d’aller au temple de Jérusalem pour adorer Jéhovah, parce que ce temple se trouvait dans la capitale du royaume ennemi. Il établit à Dan et à Béthel, aux deux extrémités opposées de son royaume, deux veaux d’or, qui n’étaient dans sa pensée que des symboles de Jéhovah. III Reg., xii, 26-33. Il opéra ainsi un schisme religieux en même temps qu’un schisme politique, qui dura jusqu’à la ruine de son royaume, en 721.

L’histoire du royaume d’Israël peut se résumer dans ses rapports avec le royaume de Juda. Les deux royaumes furent d’abord en guerre l’un contre l’autre. Jéroboam Ier attira Sésac, roi d’Egypte, contre Roboam qui fut battu, III Reg., xiv, 25 ; mais Abia, fils de Roboam, remporta sur Jéroboam une grande victoire. Voir 1. 1, col. 41-43. Nadab, fils et successeur de Jéroboam, fut assassiné, après un règne de deux ans, à la suite de la conjuration de Baasa contre lui. Voir Nadab. Ainsi s’accomplissait la prophétie d’Ahia qui avait annoncé l’extermination de la race de Jéroboam. III Reg., xiv, 7-11 ; xv, 25-30. L’usurpateur du trône, Baasa, s’allia contre Juda avec Bénadad Ier, roi de Syrie. Le prophète Jéhu lui prédit la ruine de sa famille. III Reg., xvi, 1-4. Voir t.’i, col. 1344, 1345. Éla, fils de Baasa, fut tué durant Un festin, la seconde année de son règne, par Zambri, un de ses officiers. III Reg., xvi, 8-14. Voir t. ii, col. 1629. Sept jours après, celui-ci fut détrôné par Amri, fondateur de Samarie et père d’Achab.

III Reg., xvi, 15-22. Voir t. i, col. 524-526. Sa maison fut en paix avec le royaume de Juda, mais elle introduisit en Israël le culte de Baal, malgré les prophètes Élie et Elisée. Voir t. ii, col. 1670-1676, 1690-1696. Achab remporta deux victoires sur Bénadad et conclut avec ce roi de Syrie une alliance contre l’Assyrie. Il fut défait à Karkar par Salmanasar II. Il s’allia avec Josaphat contre les Syriens ; mais les deux armées furent battues devant Ramoth-Galaad, et Achab périt sur le champ de bataille. Voir t. i, col. 120-124. Ochozias imita son père dans son idolâtrie. III, Reg., xxii, 53, 54. Élie lui prédit sa mort.

IV Reg., i, 16. Voir Ochozias, roi d’Israël. Joram, son frère, proscrivit le culte de Baal, IV Reg., iii, 2, et s’allia avec Josaphat contre les Moabites. IV Reg., iii, 4-27. Il fut blessé dans la guerre qu’il entreprit avec Ochozias de Juda contre Hazaël, roi de Syrie. IV Reg., viii, 28. Voir Joram, roi d’Israël. Jéhu, sacré roi d’Israël par Elisée tua Joram d’un coup de flèche dans la vigne de Naboth. IV Reg., ix, 24. Ce nouvel usurpateur extermina entièrement la maison d’Achab et extirpa le culte de Baal. TV Reg., x, - 1-27. C’est pourquoi Dieu assura le trône d’Israël à sa racé jusqu’à la quatrième génération ; mais parce que Jéhu n’avait pas renversé les veaux d’or de Dan et de Béthel, il fut défait par Hazaël IV. Reg., x, 28-33. Voir Jéhu. Son fils Joachaz fut aussi durement

opprimé par les Syriens. S’étant humilie 1 devant Dieu, il fut délivré de ce péril. IV Reg., un, 1-9. Voir Joachaz. Joas lutta contre Amasias, roi de Juda, et reçut d’Elisée mourant l’assurance d’une triple victoire sur les Assyriens. IV Reg., xiii, 10-25. Voir Joas. Jéroboam II rendit au royaume d’Israël ses anciennes frontières, en reprenant aux Syriens la. région qui est à l’est du Jourdain.

. IV Reg., xiv, 23-29. Voir Jéroboam II. Son fils

Zacharie fut assassiné après six mois de règne. IV Reg. XV, 8-12. Voir Zacharie. Sellum, son meurtrier, périt lui-même au bout d’un mois, victime d’une nouvelle conjuration. IV Reg., xv, 13-16. Voir Sellum. Manahem, le chef de cette conjuration, fut obligé de payer tribut à Phul(Théglathphalasar), roi d’Assyrie. IV Reg., xv, 17-20. Voir Manahem. Son fils Phacéïa fut tué après deux ans par Phacée. IV Reg., xv, 23-25. Voir Phacéïa. Le fils de Romélie s’associa avec Rasin, roi de Syrie, pour attaquer le royaume de Juda, IV Reg., xvi, 5, 6 ; mais ïhéglathphalasar III, roi d’Assyrie, appelé par Achaz, enleva à Israël la région transjordanique. IV Reg., xv, 29. Voir Phacée. Phacée fut assassiné par Osée, qui régna à sa place. Cet usurpateur fut le dernier roi d’Israël. Il refusa de payer le tribut aux Assyriens et chercha à s’allier avec les Égyptiens. Voir Osée, roi d’Israël. Salmanasar IV envahit Israël et commença le siège de Samarie. La ville fut prise par Sargon en 721, et les Israélites furent transportés en Assyrie. IV Reg., xvii, 1-6. Ce royaume périssait à cause de son idolâtrie, IV Reg., xvii, 7-23, que les prophètes, envoyés de Dieu, n’avaient jamais réussi à faire disparaître entièrement. Pas un seul de ses rois n’avait été fidèle à Dieu. Leur nombre fut de dix-neuf, appartenant à neuf familles différentes. La chute rapide des dynasties, qui était une punition divine, n’ouvrait pas les yeux des nouveaux usurpateurs, qui continuaient aveuglément la politique impie de leurs prédécesseurs. Le royaume d’Israël avait duré 240 ou 261 ans, selon les corn puis divers des règnes de ses rois et de ceux de Juda.

3e période. — De la captivité à la niine de Jérusalem par les Romains. — 1o Sur lts faits de la déportation des dix tribus d’Israël, sur les lieux de la déportation et sur la situation des déportés israélites, voir t. ii, col. 227229. Plus tard, Nahuchodonosor transporta en Babylonie les sujets des rois de Juda ; Voir ibid., col. 230-232. La captivité dura plus longtemps pour les Israélites que pour les habitants du royaume de Juda. La liberté fu rendue aux captifs, à l’avènement de Cyrus en 536. Voir t. ii, col. 1191-1194. Mais la plupart des Israélites ne profitèrent pas de l’édit de Cyrus ; ils demeurèrent en Assyrie et en Babylonie. Voir [t. ii, col. 239, 240. Ceux qui revinrent en Palestine furent en majorité des Judéens, et c’est’une des raisons pour lesquelles la communauté, reconstituée par Esdras et Néhémie, fut désignée sous le nom de Juifs.

2o Le retour des déportés dans leur patrie se fit graduellement. Une première caravane revint en Judée sous la conduite de Zorobabel et du grand-prêtre Josué. Voir Zorobabel et Josué grand-prètre. Dès l’année suivante, des préparatifs furent faits pour la reconstruction du Temple, qui fut interrompue à cause de l’opposition des Samaritains. I Esd., i-iv. Cinquante-sept ans pbas tard, la septième année d’Artaxerxés Ier, Esdras ramena en Judée d’autres captifs ; il était autorisé à réorganiser le culte du vrai Dieu. Voir t. ii, col. 1929-1932. Une troisième caravane fut ramenée par Néhémie, échanson d’Artaxerxés ! ’: Voir t. i, col. 1039-1042. Néhémie rebâtit les murailles et les portes de Jérusalem, malgré les vives oppositions des peuples voisins. II Esd., l-vi. De concert avec Esdras, il prit les mesures les plus propres à assurer l’observation complète de la loi mosaïque, et plus tard, revenu de la cour d’Artaxerxés, il réorima les abus, qui s’étaient produits pendant son

absence. II Esd., vii-xur. Voir Néhémie. Noos ne sommes pas bien renseignés pour les temps postérieurs à ces événements. Nous savons seulement que l’autorisation accordée aux Juifs par les rois perses de retourner dans leur patrie et d’y vivre selon leurs lois, n’impliquait pas la restitution de leur autonomie politique. Rentrés en Palestine, les Juifs restaient les sujets de ces rois. Ils étaient obligés de reconnaître leur suzeraineté, de payer des impôts et de fournir un contingent de troupes auxiliaires. Si cette époque n’est pas la plus prospère de leur histoire, elle est du moins l’une des plus glorieuses au point de vue religieux. Détournés enfin de l’idolâtrie, ils furent dès lors pour la plupart irrévocablement attachés au service du vrai Dieu. Les prophètes, qui avaient lutté pendant des siècles contre l’invasion du polythéisme en Israël, disparurent avec Malachie. Ils furent remplacés par les scribes qui, s’ils ne reçurent plus de révélations nouvelles, conservèrent le dépôt des vérités révélées, qu’ils prêchaient et faisaient pratiquer au peuple. Voir Scribes.

3o La situation politique changea pour les Israélites, lorsque après la conquête de Tyr, en 332, Alexandre le Grand se rendit le maître de la Palestine. D’après le récit de Josèphe, Ant. jud., XI, viii, 3-6, le conquérant macédonien, après avoir châtié Gaza de sa longue résistance, s’avançait sur Jérusalem, parce que le grandprêtre Jaddus, par fidélité à Darius, lui avait refusé les secours demandés. Voir Jaddus. Mais fortement impressionné par sa rencontre avec Jaddus, qu’en songe il avait vu revêtu de |sës ornements sacerdotaux, il demanda qu’on offrit pour lui un sacrifice dans le temple de Jérusalem ; il laissa aux Juifs la liberté de vivre suivant leurs lois et il leur fit remise du tribut pour les années sabbatiques. Voir 1. 1, col. 345-348. Après la mort d’Alexandre survenue en 323, les Israélites passèrent alternativement sous la domination des Séleucides et des Ptolémées, qui se disputaient l’influence sur l’Orient. De sujets de Séleucus Nicanor qu’ils étaient d’abord, ils devinrent par voie de conquête ceux de Ptolémée Lagus. Pendant quinze ans, les hasards de la guerre les transportèrent d’un empire à l’autre. Après la bataille d’Ipsus, en 301, ils tombèrent pour un siècle sous la domination des Ptolémées. Ces princes se montrèrent généralement bienveillants à l’égard de leurs sujets de Palestine et leur accordèrent même une liberté plus grande que celle dont ils avaient joui auparavant. Ils cherchaient à faire pénétrer chez eux la civilisation et la culture d’esprit grecques. Beaucoup d’Israélites, dans les villes et en particulier à Jérusalem, surtout parmi les classes élevées, se laissèrent séduire et adoptèrent les mœurs païennes. Les Juifs, dispersés en dehors de la Palestine, ressentirent davantage encore les atteintes, de l’esprit hellénique. Il se forma dès lors des partis, qui divisèrent profondément le monde israélite. Les uns, nommés Assidéens ou les pieux, restaient strictement fidèles aux antiques traditions. Voir t. i, col. 1131-1132. Les autres, les hellénisants, penchaient fortement vers les innovations étrangères. La politique attisa les divisions religieuses. Les Assidéens étaient des patriotes, amis de l’indépendance juive ; les hellénisants acceptaient le joug étranger. La persécution d’Antiochus IV Épiphane fit passer la crise à l’état aigu. Voir t. i, col. 693-700.

4o Pour ne pas accepter les réformes religieuses que ce prince voulait imposer aux Israélites, le prêtre Mathathias et ses cinq fils, connus plus tard sous le nom. de Mâcha bées, provoquèrent un soulèvement général des Juifs, et après trente-quatre années de luttes héroïques, , remportèrent une victoire complète et rendirent à leur patrie sa pleine indépendance religieuse et politique. C’était en 143. Voir Machabées, Antiochus V Eupator, t. i, col. 700-703 ; Antiochus VI Dionysos, ibid., col. 703-704 ; Antiochus VII Su>ÈTES, i&irf., col. 704

706 ; Alcime, ïbid., col. 338-340 ; Bacchides, ibid., col. 1373-1374 ; Alexandre Ier Balas, ibid., col. 348- » }50 Béhétrius Ier Soter, t. ii, col. 1358-1362 ; Démétrius II Nicator, ibid., col. 1362-1364. la seconde année de son administration comme ethnarque et comme grandprêtre, Simon, le dernier des Machabées, vit sa double dignité proclamée, par le peuple, héréditaire dans sa famille. Son fils, Jean Hyrcan, lui succéda, en effet, dans le gouvernement du pays. Malheureusement, la dynastie des princes asmonéens ne demeura pas fidèle’à l’esprit religieux qui l’avait élevée sur le trône ; elle devint peu à peu le jouet des partis politiques et des’sectes religieuses qui divisèrent de plus en plus profondément le peuple juif. Alexandre Jannée fut l’ennemi mortel des Pharisiens, qu’Alexandre, sa veuve, favorisa pendant les neuf années de sa régence. L’Iduméen Antipater, qu’Alexandre Jannée avait nommé gouverneur de l’Idumée, s’immisça habilement dans les luttes d’Aristobule et d’Hyrcan, et fit décider par Pompée que le trône devait revenir à Hyrcan, qui fut confirmé dans sa dignité de grand-prêtre et de prince, mais sans le titre de roi et sous la suzeraineté de Rome. Cette intervention des Romains dans les affaires juives amena en peu d’années la perte de l’autonomie d’Israël.’5o Antipater fit nommer par César ses deux fils, Phasaël et Hérode, gouverneurs, le premier de Jérusalem, et le second de Galilée. Celui-ci, ambitieux et fourbe comme son père, réussit, en l’an 40, à se faire désigner par les Romains roi des Juifs. Il lui fallut trois années de lutte et le concours des armées romaines pour faire reconnaître sa dignité royale. Ce roi étranger entreprit la reconstruction du temple de Jérusalem. Voir Hérode le Grand, col. 641. C’est dans les derniers mois de son règne que naquit le Messie, prédit par les prophètes d’Israël comme le sauveur du monde. Par son testament, qu’Auguste ratifia en partie, Hérode avait partagé la Palestine entre ses trois fils. Archélaûs eut la Judée proprement dite, la Samarie et l’Idumée ; mais au Bout de dix ans, il fut exilé à Vienne en Gaule. Voir t. j, col. 927, 928. Son ethnarchie devint alors province romaine et fut gouvernée par un procurateur. Voir Procurateur. Cet événement marque la fin de l’autonomie d’Israël. Philippe, frère d’Archélaûs, fut tétrarque de l’Iturie et de la Trachonitide jusqu’en l’an 34 de l’ère chrétienne. À sa mort, sa tétrarchie fut annexée à la province de Syrie. Voir Hérode Philippe II, col. 649. Hérode, surnommé Antipas, fut tétrarque de la Galilée. Il mourut exilé dans les Gaules, après avoir été dépouillé de sa tétrarchie par Caligula. Voir Hérode Antipas, col. 647. Cet empereur, à son avènement, avait nommé Agrippa Ier, frère d’Hérodiade, roi de Judée ; il lui donna encore la tétrarchie d’Antipas. À la mort d’Agrippa, en 44, la Judée redevint province romaine et fut de nouveau gouvernée par des procurateurs. Des révoltes éclatèrent, excitées par de faux messies. Agrippa II fut nommé roi, mais il n’eut que l’ombre du pouvoir et ne posséda aucune autorité. En 66, l’insurrection s’organisa à Jérusalem. Vespasien qui avait commencé la guerre, en qualité de légat impérial de Syrie, chargea son fils Titus de la poursuivre, lorsqu’il fut proclamé empereur. Après un terrible siège de plusieurs mois, la ville de Jérusalem fut prise et détruite par l’incendie, en l’an 70. Voir Jérusalem. Israël cessa d’être un peuple et ne recouvra plus jamais son autonomie politique. Sans temple, sans sacerdoce et sans sacrifice, il ne garda plus que l’ombre de son ancien culte. Il avait, d’ailleurs, rempli sa mission ; il avait conservé dans le monde la notion et l’adoration du vrai Dieu. Le Messie, qu’il devait préparer, était sorti de son sein et avait fondé une nouvelle société religieuse pour remplacer l’ancienne. Il était venu parmi les siens, et les siens ne l’avaient pas reçu. Joa., i, 11. Il avait prêché le salut aux Juifs, et quelques-ans seulement avaient prêté l’oreille à ses

enseignements. La nation l’avait fait mourir et s’était révoltée, une fois de plus, contre son Dieu. Un vin nouveau coulait pour l’humanité ; la vieille outre, usée, était mise hors de service..

Bibliographie. — 1o Ouvrages catholiques : Sulpice Sévère, Ckronic., 1-n, 27, t. xx, col. 95-144 ; S. Augustin, De eivilate Dei, xvi-xviii, t. Xli, col. 475-620 ; Pierre Comestor, Historia scholaslica, t. cxCvm, col. 1090-1538 ; Bossuet, Discours sur l’histoire universelle, 1681, souvent réédité à part ou dans les œuvres complètes ; Calmet, Histoire de l’Ancien et du Nouveau Testament et des Juifs, 2 in-4o, Paris, 1718 ; voir t. ii, col. 74 ; Berruyer, Histoire du peuple de Dieu, Paris, 1728 ; ^oir t. i, col. 1627-1629 ; Noël Alexandre, Historia ecclesiastica, Paris, 1699 (le premier volume est consacré à l’histoire de l’Ancien Testament) ; voir t. i, col. 352 ; Stolberg, Gesckickte der Religion Jesu Christi, Hambourg, 1806, les quatre premiers volumes traitent de l’histoire sainte ; Krafft, Heilige Geschichte, 3 vol., Schaffhouse, 1854-1858 ; Rohrbacher, Histoire universelle de l’Église catholique, t. i, Nancy, 1842 ; Haneberg, Geschichte der gôttliche Offenbarung, 4e édit., Ratisbonne, 1876 ; trad. franc.- par Goschler, 2 in-8o, Paris, 1856 ; Danko, Historia revelationis divines. V. T., Vienne, 1862 ; Schuster, Handbuch zur biblisclie Geschichte, 1862, 4e édit., 1886 ; Zschokke, Historia sacra Antiqui Testamenti, Vienne, 1872 ; Lenormant-Babelon, Histoire ancienne de l’Orient, 9e édit., t. vi, Paris, 1888, p. 103-333 ; Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, 2 in-12, Paris, 1897. — 2o Ouvrages protestants : Usher, Annales V. et N. T., Londres, 1650-1654 ; Buddeus, Historia ecclesiastica V.T., Halle, 1715 ; H. Prideaux, The Oldand New Testament connected in the kislory of the Jews and neighbouring nations, 2 in-f°, Londres, 1716-1718 ; S. Shukford, The sacred and propliane hist. of the world connected, 2 in-8°. Londres, 1727-1728 ; K. G. Lange, Versuch einer Harmonie der heiligen und Profanscribenten in der Geschichte derWelt, d in-4o, Bayreuth, 1778-1780 ; Spanheim, 17t8t. eccl.ab condito Adamo usque ad tevum christ., Leyde, 1701 ; Basnage, Histoire du V. et du N. T, , 4 in-12, Genève, 1708 ; Hess, Geschichte der Israe’liten von den Zeiten Jesu, Zurich, 1776-1788 ; Kurtz, Lehrbuch der heiligen Gesch., Kœnigsberg, 1843, 13e édit., 1874 ; Id., Geschichte des Allen Bundes, Berlin, 1848, 3e édit., 1864. — 3o Ouvrages rationalistes : Ewald, Geschichte des Volkes Israël, 3 vol., Gœttingue, 1843-1852, 3e édit., 7 in-8o, 1864-1868 ; Bertheau, Zur Geschichte der Isræliten, Gœttingue, 1842 ; von Lengerke, Kenaan, Volks und Religionsgeschichle Isræls, t. i, Kœnigsberg, 1844 ; Eisenlohr, Dos Volk Israël unter der Herrschaft der Kônige, Leipzjg, 1855-1856 ; Menzel, Slaats-und Religionsgeschichte der Kônigreiche Israël und Juda, Breslau, 1853 ; Hasse, Geschichte des Alten Bundes, Leipzig, 1863 ; Weber et Holtzmann, Geschichte des Volkes Israël, 2 in-8o, Leipzig, 1867 ; Hitzig, Geschichte des Volkes Israël, Leipzig, 1869 ; Kuenen, De godsdienst van Israël tôt den ondergang vandenjoods clienstaat, Harlem, 1869-1870 ; Hengstenberg, Geschichte des Reiclies Gottes unter dem Alten Bunde, 3 in-8o, Berlin, 1869-1871 ; Kôhler, Lehrbuch der biblischen Geschichte A. T., Erlangen, 1875-1893 ; Seinecke, Geschickte des Volkes Israël, ^ in-8o, Gœttingue, 1876-1884 ; Wellhausen, Geschichte Isræls, Berlin, 1878 ; Id., Isrælitiscke und jùdische Geschichte, Berlin, 1894 ; Stade, Geschichte des Volkes Israël, 2 in-8o, Berlin, 1887 ; Renan, Histoire du peuple d’Israël, 5 in-8o, Paris, 18871893 ; Kittel, Geschichte der Hebrâer, 2 in-8o, Gotha, 1888-1892 ; Winckler, Geschichte Isræls, 1895 ; Klostermann, Geschichte des Volkes Israël, Munich, 1896 ; E. Montet, Histoire du peuple d’Israël, 2e édit., Genève, 1896 ; Piepenbring, Histoire du peuple d’Israël, Strasbourg, 1898 ; Cornill, Geschichte des Volkes Israël von denàlteslen Zeiten bis zur Zerslôrung Jérusalem durch

die Ppmer, Chicago, 1898 ; Fries, Moderne Darstéllungen der Geschichte Israël*, Fribourg-en-Brisgau, 1898 ; Guthe, Geschichte des Volkes Israël, Fribourg-en-Brisgau, 1899 ; Stærk, Studien zur Religions-und Sprachgeschichte des A. T., Berlin, 1899 ; Cheyne, Das religiôse Leben der Juden nach dem Exil, trad. allemande, Geissen, 1899 ; Lôhr, Geschichte des Volkes Israël, Strasbourg, 1900. — 4o Ouvrages juifs : Josippon, édité par Sébastien Munster, Bâle, 1541 ; Seder Olam rabba, édité par Meyer, Amsterdam, 1649 ; Jost, Allgenieine Geschichte des isrælitischen Volkes, 2 vol., Berlin, 1831 ; Id., Geschichte der Isræliten, Berlin, 1820 ; Munk, Palestine, Paris, 1845 et 1881 ; Herzfeld, Geschichte des Volkes Israël, Brunswick, 1847 ; Grâtz, Geschichte der Juden seit den âlteslen Zeiten, Il in-8o, Leipzig, 18541875 ; Geiger, Dos Judenthum und seine Geschichte, Breslau, 1864-1871 ; B*âck, Geschichte des j’àdischen Volkes und seine Literatur, Lissa, 1877 ; Friedlânder, Geschichte des isrælitischen Volkes, 1848 ; Baphall, Post-biblical Hislory of the Jews fromthe close of the Old Test, till the destruction of the second teniple in Iheyear 70, 2 in-8o, Londres, 1856 ; David Cassel, Lehrbuch der jûd. Geschichte und Literatur, Leipzig, 1879 ; Braun, Geschichte der Juden, Breslau, 1896 ; S. Œttli, Geschichte lsræls, Stuttgart, 1905.

£. Mangenot.

    1. ISRAËL##


3. ISRAËL, nom géographique. Dans un sens géographique, ’érés lira’êl, « terre d’Israël, » veut dire : 1o la Palestine, I Sam., xiii, 19 ; II (IV) Reg., vi, 23 ; Eiech., xxvii, 17 (et simplement lira’êl, au féminin, Is., xix, 24) ; if[’IorparjX, Matth., iꝟ. 20, etc. ; — 2o le territoire du royaume des dix tribus. Voir Israël 2.

    1. ISRAÉLITE##

ISRAÉLITE (hébreu : Iire’êli ; féminin : Iire’êlit ; Lev., xxiv, 10 ; Septante : ’laparikii-rn ; Vulgate : Israe-’lita), descendant d’Israël (Jacob) ou bien appartenant soit au peuple soit à la terre d’Israël, dans toutes les accep-’lions énumérées Israël. 2, col. 995. Lev., xxiv, 10 ; I Reg., xvii, 11, etc. Sur l’emploi de ce nom patronymique et ethnique comparé à Hébreu et à Juif, voir ces deux mots.

    1. ISRÉÉLA##

ISRÉÉLA (hébreu : Yeiar’êlâh ; Septante : ’LrepriJÀ ; Alexandrinus : ’laptrikà), lévite, de la maison d’Asaph, chef du septième des vingt-quatre chœurs de musiciens du Temple. Il était, à la tête de douze musiciens. I Par., xxv, 14. Son nom est écrit Asaréla dans I Par., xxv, 2. Voir Asaréla, 1. 1, col. 1058.

    1. ISSACHAR##

ISSACHAR (hébreu ; Mâ(s)kâr ; Septante : ’I « roc-y. ap), nom d’un patriarche, fils de Jacob, d’une tribu d’Israël et d’un lévite.

    1. ISSACHAR##


1. ISSACHAR, le neuvième fils de Jacob et le cinquième que lui donna Lia. Gen., xxx, 17, 18 ; xxxv, 23 ; I Par., ii, 1. Son nom, comme celui de ses frères, est rattaché à une circonstance particulière. En le mettant au monde, sa mère dit : « Dieu m’a donné ma récompense (hébreu : iekârî), parce que j’ai donné ma servante à mon mari. Aussi l’appela-t-elle Issachar. » Gen., xxx, 18. Voyant sa fécondité cesser après la nais--sance de son quatrième fils, elle avait demandé à Jacob de prendre sa servante Zelpha, Gen., xxx, 9, et c’est à cette abnégation, jointe à ses prières, Gen., xxx, 17, qu’elle attribua le bonheur’d’avoir ce cinquième enfant. Le nom hébreu est écrit et ponctuée "i : w’w>, IUdskai ;

T T*

dans le texte massorétique, qui ne tient pas compte du second sin, fr. Cependant l’orthographe i : w> est invariable dans le Pentateuque samaritain, la version samaritaine, les Targums d’Onkelos et du Pseudo-Jonathan, aussi bien que dans l’hébreu. Les massorètes ont donc employé les points-voyelles d’un . qeri perpétuel, comme s’il y avait ijifi, Iéiàkar, forme

niphal du verbe iâkar, dont la signification est alors : « il est obtenu en récompense. » Cf. Gen., xxx, 16, < èdkôr Sekarfikd ; Vulgate, mercede conduxi te, « je t’ai acquis en récompense. » C’est ainsi que Josèphe, Ant. jud., i, xix, 8, explique le nom : I<r<ràj£ a P l ? l*^ v i <"ii"tfvwv tov ir. (jLt(160’j "jev6]ievov, « Issachar, signifiant celui qui est né d’une récompense ». Mais le ketib peut aussi être ponctué de deux façons : isfew », Isiâiâkàr, ce

T T T.

qui serait une contraction de isto mw>, Usa’èdkâr, « il

TT f

(Dieu) apporte une récompense, » cf. J. Fùrst, Hebrâiscltes und Chaldâisches Handwôrterbuch, Leipzig, 1876. t. i, p. 561 ; ou bien-o W, liidkâr, pour 13ttr #>, yês

iâkdr, « il y a récompense. » Cf. A. Dillmann, Die Genesis, Leipzig, 1892. p. 344. Cette dernière expression se rencontre II Par., xv, 7 ; Jer., xxxi, 16. On trouve dans la Bible d’autres exemples de mots ayant une consonne doublée au ketib, et une simple ou qeri. Cf. II Par., vii, 6 ; xxix, 28 ; Jer., xxxvii, 13, 14. Issachar eut quatre lils : Thola, Phua, Job et Semron. Gen., xlvi, 13 ; I Par., vii, 1. L’Écriture ne nous donne pas d’autres renseignements sur ce patriarche, père

de la tribu qui porte son nom.
    1. ISSACHAR##


2. ISSACHAR, lévite, le septième des fils d’Obédédom, un des portiers de la maison de Dieu du temps de David. I Par., xxvi, 5.

    1. ISSACHAR##


3. ISSACHAR, une des douze tribus d’Israël.

i. Géographie. — La tribu d’Issachar occupait la grande plaine d’Esdrelon, ayant Manassé au sud et à l’ouest, Aser au nord-ouest, Zabulon et Nephthali au nord, et le Jourdain à l’est. La Bible n’en décrit pas les limites précises ; mais les villes principales qu’elle énumère et les détails qu’elle nous donne par ailleurs sur l’étendue des territoires voisins nous permettent d’en déterminer assez facilement les contours. Voir la carte, fig. 187.

I. villes principales.

Ces villes sont indiquées dans Josué, xix, 17-23. Nous ne donnons ici, en suivant l’ordre de la liste, que leur identification ou certaine ou probable, ’renvoyant pour le reste aux articles qui concernent chacune d’elles.

1. Jezraël (hébreu : Yzrëëldh ; Septante : Codex Vatinus : ’IaZr[k ; Codex Alexandrinus : ’l^f où), est aujourd’hui sans contredit le village de Zer’in, au pied du du mont Gelboé, vers le nord-ouest.

2. Casaloth (hébreu : hak-Kesultôf, avec l’article ; Septante : Codex Vaticanus : Xaua).(16 ; Codex Alexandrinus : ’Ax « iTEÀ<18), existe encore sous le même nom de lksâl ou Ksdl, au sud-est de Nazareth, à l’appui des premiers contreforts des collines galiléennes.

3. Sunem (hébreu : tsûnein ; Septante : Codex Vaticanus : Souviv, Codex Alexandrinus : So « vâ|i), actuellement Sôlâm ou Sûlem au pied du Djebel Dâhy ou Petit-Hermon.

4. Hapbaraim (hébreu : ffàfâraîm ; Septante, Codex Vaticanus : ’Afeîv ; Codex Alexandrinus : ’Açep « i[i)> la IJa-pu-ra-ma des monuments égyptiens. Cf. W. Max Mûller, Asien und Europa nach altâgyptischen Denkmâlern, Leipzig, 1893, p. 153, 170. Son site est incertain. Les uns la placent à Khirbet el-Farrïyéh, au nord-ouest d’El-Ledjdjûn. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883, t. ii, p. 48 ; G. Armstrong, W. WilsonetConder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 79. D’autres ont cherché à l’identifier avec le village d’El-Afûléh au nordouest de Zer’in. Cf. Keil, Josua, Leipzig, 1874, p. 154.

5. Séon (hébreu : Ëî’ôn ; Septante, Codex Vaticanus : Stwvi ; Codex Alexandrinus : Stiâv). Eusèbe et S. Jérôme, Onomaslica sacra, Gœttingue, 1870, p. 152, 294, la placent près du mont Tbabor. C’est d’après ce  »

renseignement’que les explorateurs anglais croient la retrouver à’Ayûn esch-Scha’in, au nord-ouest du Thabor. Cf. G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the OUI and New Testament, p. 163. Cest sans doute le bourg de Sain signalé par R. J. Sclrwarz, Dos heilige Land, Francfort-sur-le-Main, 1852, p. 131, entre Deburiyéh (Dabéreth) et Yâfa (Japhié). Douteux.

6. Anaharath (hébreu : ’Anâhârât ; Septante : Codex Vàticanus : ’Avaxepéô ; Codex Alexandrinus : ’AfpavéD), la Anûhertû des pylônes de Earnak, n » 52. Cf. A. Mariette, Les listes géographiques des pylônes de Karnak, Leipzig, 1875, p. 23. C’est aujourd’hui très probablement En-Na’urah, localité située à la partie septentrionale du Djebel Ddhy.

7. Rabboth (hébreu : hâ-Rabbit ; Septante : Codex Vaticanus : Aaéeip<Jv ; Codex Alexandrinus : Pa66cà6), actuellement Rdbd, au sud-est de Djénin. Cf. G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in theOldandNewTest., p.iiS.

8. Césion (hébreu : Qisyùn ; Septante : Cod. Vat. : Keieriiv ; Cod. Alex. : Ke<hiôv), appelée Cédés (hébreu : Qédéi), I Par., vi, 72 (hébreu, 57). Avec ce dernier nom, elle peut être représentée par Tell Abu Qudéis, au sudest A’El-Ledjdjùn. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1882, t. ii, p. 48, 69.

9. Abès (hébreu : Â’bés ; Septante : Cod. Vat. : ’Piêtç ;. Cod. Alex. : ’Ae ; U), placée par certains auteurs à Khirbet eUBéida, à l’extrémité nord-ouest de la plaine d’Esdrelon. Cf. R. Conder, Handbook to the Bible, Londres, 1887, p. 401. D’autres la chercheraient plus volontiers à Khirbet’Abâ, à l’est de Djénin. Cf. F. Buhl, Géographie des alten Palàstina, Fribourg-en-Brisgau, 1896, p. 204.

10. Aaméth (hébreu : Remet ; Septante : Cod. Vat. : ’Pé(ji(iaç ; Cod. Alex. : ’PajiàO), appelée Jaramoth (hébreu : Yarmûf ; Septante : Cod. Vat. : ’Pep.|juz() ; Cod. Alex. : ’IepiuiO), Jos., xxi, 29, et Ramoth (hébreu : Rd’tnâf ; Septante : ’Pa|u£8), I Par., vi, 73 (hébreu, 58). On a cherché à l’identifier avec Er-Râméh, au sudouest de Tell Dothdn, cf. G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places etc., p. 150 ; ce point nous parait en dehors des limites d’Issachar.

11. Engannim (hébreu : ’Ên-Gannïm ; Septante : Cod. Vat. : ’Ie<Av xai To(jL|j.àv ; Cod. Alex. : ’H-yYavviti.) est aujourd’hui la petite ville de Djénin, à l’entrée de la plaine d’Esdrelon, lorsqu’on vient des montagnes de la Samarie.

12. Enhadda (hébreu : ’Ên-fladdâh ; Septante : Cod. Vat. : Aijiapéx ; Cod. Alex. : ’Hva86à), peut-être Kefr’Adân, au nord-ouest et tout près de Djénin. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, t. n. p. 45.

13. Bethphésés (hébreu : Bèt passés, « maison de la dispersion ; » Septante : Cod. Vat. : B^aa ?^ ; Cod. Alex. : Ba16 ?aor, ), inconnue.

A cette liste il faut ajouter les cinq villes suivantes, qui furent données à Manassé, Jos., xvii, 11 ; Jud., i, 27, mais n’en demeurent pas moins dans les limites d’Issachar, qu’elles nous permettent de fixer plus sûrement.

14. Bethsan (hébreu : Bèf Se’dn, « maison du repos ; > Septante : BcuDoiv), aujourd’hui Béîsân, non loin du Jourdain, à l’extrémité orientale de la vallée qui court entre le Petit Hermon et le Gelboé, et n’est que le prolongement de la plaine d’Esdrelon.

15. Jéblaam (hébreu : Ylle’dm ; Septante : omis Jos., xvii, 11 ; ’IeSXaâp, Jud., i, 27), la Belma du livre de Judith, vii, 3, la Jabluamu des monuments égyptiens, est reconnue par bon nombre d’auteurs dans Khirbel BeVaméh, au sud de Djénin.

16. Endor (hébreu : ’En Dur : Septante : omis Jos., xvii, 11 ; ailleurs, ’AeXSt&p, I Reg., xxviii, 7 ; ’Aevîwp, Ps. lxxxji, 11, existe encore sous le même nom de

Endôr ou Endûr, sur les dernières pentes septentrionales du Djebel Ddhy.

17. Thénac (hébreu : Ta’ânâk ; Septante : Cod. Vat. : omis ; Cod. Alex..-Tavox), ailleurs Thanach, Jos., xxi, 25, actuellement Ta’annûk, au nord-ouest de Djénin.

18. Mageddo (hébreu : Megiddô ; Septante : MafESSw), ville célèbre, connue chez les Égyptiens et les Assyriens sous le même nom, Magidi et Magidu, généralement identifiée aujourd’hui avec El-Ledjdjûn (de l’antique dénomination romaine Legio), au nord-ouest de Ta’annûk.

Il est enfin une cité lévitique attribuée à Issachar, Jos., xxi, 28, et qui n’est pas comprise dans la liste de Josué, xix, 17-23. C’est :,

19. Dabéreth (hébreu : Dâberaf ; Septante : Cod. Vat. : b166â ; Cod. Alex. : Ae6pà9), aujourd’hui Deburiyéh, à l’ouest et au pied du Thabor.

n. limites E T description. — Les villes que nous venons d’énumérer montrent dans son ensemble l’étendue du territoire d’Issachar. Le texte sacré ajoute, Jos., xix, 22 : « Et sa limite va jusqu’à Thabor, et Séhésima et Bethsamès, pour se terminer au Jourdain. » Séhésima (hébreu : Sahâsimâh ; Septante : Cod. Vat. : EaXrfjjL xarà èâÀaTvav ; Cod. Alex. ::£a<ret|xâ6) est inconnue ; mais nous avons dans Thabor, montagne ou ville, un point bien déterminé au nord, et dans Bethsamès la frontière opposée au sud-est, si l’on identifie ce nom avec’Ain esch-Schemsiyéh. Voir Bethsamès 2, t. i, col. 1730. En, tout cas, le Jourdain forme la limite orientale. Celle du nord n’est pas moins facile à fixer d’après la ligne de démarcation qui termine de ce côté la tribu de Zabulon. Pour décrire cette ligne, Josué, xix, 11, 12, prend comme point central Sarid (Tell Schadûd), d’où il se dirige d’abord vers l’occident par Merala (Ma’lûl), Debbaseth (peut-être Djébata), jusqu’au torrent qui est contre Jéconam, et ensuite vers l’orient, sur les frontières de Céséleth-Thabor (Iksâl) et du côté de Dabéreth (Deburiyéh). Si, d’autre part, il est permis de voir à-Edéma (Khirbet Admah) l’extrême limite méridionale de Nephthali, nous aurons le tracé exact de la frontière nord d’Issachar. Nous n’avons pas les mêmes ressources du côté de Mapassé, dont les limites sont indiquées d’une manière vague et obscure. Jos., xvii, 7-11. Il est cependant an point qui peut nous servir de jalon, c’est Aser (Teydsîr), donnné comme un des confins extrêmes de cette tribu, et marquant par là même une ligne d’arrêt dans la frontière méridionale d’Issachar. En remontant de là vers le nord-ouest, nous n’avons plus qu’à suivrela direction indiquée par les villes que la demi-tribu de Manassé fut obligée de prendre à sa voisine, c’est-à-dire Jéblaam, Thanach et Mageddo. Nous arrivons ainsi an Carmel, point de contact entre Aser et Issachar.

Comme on le voit, la tribu d’Issachar occupait la

grande plaine d’Esdrelon avec les vallées qui en sont le prolongement jusqu’au Jourdain. Cette plaine tiremême son nom de la première des villes qui formèrent l’héritage de la tribu, c’est-à-dire Jezraël, antique cité royale. Elle emprunta aussi sa dénomination de « plaine de Mageddo » à une autre place de ce nom, qui n’est pas moins importante. Profondément encaissée entre les montagnes de Samarie au sud, et celles de Galilée au. nord, elle est bordée à l’est par deux petites chaînes, dont l’une, le Djebel Fuqu’a ou mont de Gelboé, se rattache au massif méridional ; l’autre, le Djebel Dàhy ou Petit-Hermon, semble un fort avancé du massif septentrional. L’ensemble du territoire comprend deux versants bien distincts, celui de la Méditerranée et celui du Jourdain. Le premier, qui s’étend en pente douce, est drainé par le torrent de Cison ou Nahr elr-Muqatta’, dont les nombreuses ramifications pénètrent le sol, tantôt le creusant profondément, tantôt en transformant quelques coins en marais. Le second s’affaisse

rapidement vers le Jourdain où descendent les torrent »

qui prennent naissance dans le Gelboé et le Petit’Hermon. Cette plaine et ces vallées constituent une des parties les plus fertiles de la Palestine. Le Cison est entretenu non seulement par des torrents temporaires, mais encore par des sources assez abondantes, comme celle de Djénîn, et celles qui se rencontrent en assez grand nombre aux environs et au-dessus d’Él-Ledjdjûn. A travers cette campagne presque unie, ce sont d’interminables champs de blé ou de vastes espaces recouverts de grandes herbes et de chardons géants. Les alentours de Béisdn sont merveilleusement arrosés. De belles plantations de palmiers disaient autrefois l’un des ornements et l’une des principales richesses de Scyfhopolis. La vigne tapissait les flancs du Gelboé aux environs de Zer’în, comme nous l’apprend l’Écriture, III Reg., xxi, 1, et comme l’attestent encore aujourd’hui les antiques pressoirs creusés dans le roc. À ces avantages s’ajoute un magnifique réseau de routes qui faisaient de cette contrée Comme le carrefour des nations. Là se croisaient les voies militaires et commerciales qui mettaient en communication tous les pays environnants, jusqu’à l’Egypte et l’Assyrie. Pour plus de détails, voir Esdrelon, t. ii, col. 1945 ; Cison, t. ii, col. 781 ; Engannim 2, t. ii, col. 1802. On comprend après cela l’admirable exactitude de la prophétie de Jacob, nous représentant Issachar comme satisfait de la richesse de, son territoire, ne songeant qu’à son bien-être, et, pour jouir du repos, se rendant même tributaire des étrangers. Gen., xlix, 14-15 :

Issachar est un âne robuste ;

Couché dans son étable,

n voit que le repos est doux

Et le pays agréable :

n incline son épaule sous le fardeau,

Il s’assujettit au tribut.

II. Histoire.

Au moment où Jacob descendait en Egypte, les quatre fils d’Issachar formaient le noyau de la tribu. Gen., xlvi, 13 ; I Par., vii, 1. Lors du premier recensement fait au Sinaï, elle avait pour chef Nathanaël, fils deSuar, Num., i, 8 ; x, 15, et elle comptait 54 400 hommes en état de porter les armes. Num., i, 28-29. Dans les campements, elle avait sa place à l’est du tabernacle, aux côtés et sous les ordres de Juda, avec Zabulon, tous deux également issus de Lia. Kum., ii, 5. Elle fit au sanctuaire, par les mains de son prince, les mêmes offrandes que les autres tribus. Num., vii, 18. Parmi les explorateurs du pays de Chanaan, celui qui la représentait était Igal, fils de Joseph. Num., xiii, 8. Au second recensement, dans les plaines de Moab, elle comptait 64300 hommes, soit près de 10000 de plus qu’au premier. Num. xxvi, 23-25. — Au nombre des commissaires chargés d’effectuer le partage de la terre Promise, se trouvait un de ses enfants, Phaltiél, fils d’Ozan. Num., xxxrv, 26. — Lorsque les Hébreux prirent solennellement possession de cette terre dans la vallée de Sichem, la tribu d’Issachar se tint sur le mont Garizim pour prononcer les bénédictions. Deut., xxvii, 12. — Elledonna quatre villes aux Lévites fils de Gerson. Jos., xxi, 6, 28, 29 ; I Par., vi, 62-72 (hébreu, 47-57). - Ses chefs et ses guerriers sont comptés parmi les braves" qui combattirent avec Débora et Barac ; la lutte du reste se passait sur son territoire. Jud., v, 15. — Elle eut aussi l’honneur de donner un juge à Israël, Thola, fils de Phua. Jud., x, 1. — Au temps de David, elle était l’une des tribus les plus nombreuses et les plus puissantes avec ses 87 000 hommes, très vaillants à la guerre. I Par. vu, 5. Elle fournit son contingent, dont le chiffre n’est pas indiqué, pour l’élection royale de ce prince à Hébron. I Par., xii, 32. Malgré la distance qui la séparait de cette ville, elle y envoya des provisions, pour participer ainsi à la fête nationale qui s’y célébrait. I Par., xii, 40. — Sous Salomon, son territoire formait une des douze

préfectures établies pour l’entretien de la maison royale, et l’intendant chargé d’y lever les impôts se nommait Josaphat, fils de Pharué. III Reg., IV, 17. — Le troisième roi d’Israël, Baasa, fondateur de la seconde dynastie, était de cette tribu. III Reg., xv, 27. — Sous Ézé chias, à l’appel de ce pieux roi, une bonne partie de la population consentit à venir au temple et à célébrer la Pâque. II Par., xxx, 18. — Dans le nouveau partage de la Terre Sainte, d’après Ézéchiel, Issachar se trouve parmi les tribus méridionales, entre Siméon et Zabulon. Ezech., xlviii, 25, 26. Dans sa reconstitution idéale de la cité sainte, le même prophète, xlviii, 33, met au midi « la porte d’Issachar », entre celle de Siméon et celle de Zabulon. — Enfin, saint Jean, dans l’Apocalypse, vil, 7, cite Issachar entre Lévi et Zabulon.

III. Caractère.

D’après le résumé historique que nous venons de donner, on voit qu’lssachar a eu un rôle très effacé, sans influence sur le gouvernement et les destinées d’Israël. Nous en pouvons trouver la raison dans le caractère de cette tribu, tel qu’il ressort des paroles prophétiques de Jacob. Gen., xlix, 14-15. « Issachar est un âne robuste, » littéralement « d’os », ô’voc ô<rr<iSr] « , « un âne osseux, » selon la version d’Aquila. La comparaison, qui pourrait sembler déshonorante à nos yeux, était plutôt flatteuse, étant donnée l’estime des Orientaux pour cet animal, dont ils appréciaient les services dans la vie ordinaire et même le courage dans le combat. Issachar put donc imiter sa sobriété, son endurance, mais il n’eut aussi d’autre horizon que les riches « clôtures » au sein desquelles il aima à rester « couché ». Il eût pu combattre, mettre sa force et son activité au service de ses frères ; il trouva « le repos » plus « doux » que la gloire, la jouissance des biens qu’« un pays agréable » lui fournissait en abondance préférable même à la liberté. Car, pour conserver ou augmenter cette jouissance, il devint mercenaire (comparer èâltïr et èâkdr), corvéable, « inclinant son épaule sous le far.deau, s’assujettissant au tribut. » Il porta au rivage voisin, chez les Phéniciens, les produits de sa. terre. Il se fit le serviteur des nombreuses caravanes qui passaient par la plaine d’Esdrelon. Comme cette riche contrée fut souvent l’objet des convoitises, il aima mieux payer le tribut que de défendre sa propriété. — La prophétie de Moïse, Deut., xxxiii, 18-19, est plus obscure. Elle fait cependant allusion à la joie du repos dans les tentes, aux avantages que le trafic d’Issachar trouvera dans le voi-, sinage des ports de mer, aux trésors cachés dans le sable du Bélus, qui fournissait aux Phéniciens la matière nécessaire pour la fabrication du verre. — Enfin, d’un passage de I Par., xii, 32, les anciens commentateurs avaient conclu que la tribu d’Issachar se distinguait par une science particulière de l’astronomie et de la physique. L’hébreu porte littéralement : « Et des fils d’Issachar connaissant l’intelligence pour les temps, pour savoir ce que fera Israël. » On attribue simplement ici aux chefs de la tribu le sens politique apte à juger des circonstances, à comprendre ce qu’il convenait de faire à propos de l’exaltation de David comme roi.

    1. ISSARON##


ISSARON, dixième partie de l’éphi ou gomor. Voir Gomor, col. 273.

    1. ISTEMO##

ISTEMO (hébreu : ’Etyemôh ; Septante : Cod. Vat.r’E<rxatu.âv ; Cod. Alex. : ’E<rte[i, <i), ville de la tribu de Juda. Jos., xv, 50. Elle est appelée ailleurs Esthémo. Voir Esthémo, t. ii, col. 1972.

    1. ISTOB##

ISTOB (hébreu : ’JS-Tôb ; Septante : Cod. Vat. : EidT(16 ; Cod. Alex. : ’luxdê), nom d’un des petits royaumes situés à l’est du Jourdain, qui, avec la Syrie de Rohob et de Soba et Maacha, fournit un contingent de troupes aux Ammonites contre David. II Reg., x, 6, 8. L’hébreu écrit le nom eu deux mots 1011

ISTOB — ITALIENNES (VERSIONS) DE LA BIBLE

IMS

a"n3 tf>N, ’I ! rôftj ce qui voudrait dire a lès hommes de

Tob ». Voilà pourquoi on assimile généralement cette contrée à « la terre de Tôb », dans laquelle s’enfuit Jephté et qui se trouvait également dans la région transjordane. Jud., xi, 3, 5. Voir Tob. Il faut dire cependant que cette opinion a contre elle l’autorité des anciennes versions, qui ont lu’Istôb. De même Josèphe, Ant. jud., VII, VI, 1, tout en voyant ici un nom de roi, n’en donne pas moins’Lmfôo ;. Il semble aussi que, même dans le texte original, il serait plus naturel d’unir les deux mots ; au jh’8 surtout, pourquoi l’auteur sacré, en énumérant les troupes auxiliaires, aurait-il placé’U, « les hommes, » devant le seul mot Tôb, qui vient en troisième lieu, alors qu’il dit simplement, à propos des autres corps d’armée : « Et Aram Soba et Rohob et Maacha ? » On comprend d’ailleurs qu’au ꝟ. 6, la triple répétition de’U ait porté un copiste à séparer ce mot du suivant. Comme Istob et Tob sont des SuaÇ Xeyijisva, les données manquent pour prouver qu’ils ne désignent qu’une seule et même contrée. — On trouve encore aujourd’hui dans l’Adjlùn un endroit appelé lstib ou Khirbet lstib, el-Istib. On l’a identifié avec Thisbé, la patrie du prophète Élie. Ne rappelle-t-il point Tlstob du

livre des Rois ?,
    1. ISUHAIA##

ISUHAIA (hébreu : YeSôhâyâh ; Septante : ’IaoWa), un des chefs siméonites, descendants de Séméi, qui, dutemps du roi Ézéchias, s’emparèrent de riches pâturages dans les environs de Gador. I Par., iv, 36. Voir Gador, col. 34.

ITALA. Voir Latines (Anciennes versions) de la Bible.

    1. ITALIE##

ITALIE (grec : ’iTaXiet ; Vulgate : Ilalia), contrée dont Rome était la capitale. 1o Elle n’est pas nommée dans le texte original de l’Ancien Testament. On lit, il est vrai, son nom, trois fois dans la Vulgate, Italia, mais elle emploie ce mot pour désigner d’une manière générale les pays d’Occident, traduisant ainsi improprement l’hébreu Kiptîm (Septante : Kt’TTe£Ïov, Xirret’|i), dansNum., xxiv, 24, et dans Ezech., xxvii, 6, et Thubal (hébreu : Tûbal ; Septante : Wo6éX), dans Is., lxvi, 19. "Voir Céthim 2, h, t. ii, col. 470. — Dans le Nouveau Testament, il est question quatre fois de l’Italie. — 1o Saint Paul rencontra, à Corinthe, Aquila et sa femme Priscille qui venaient « d’Italie », parce que Claude avait ordonné à tous les Juifs de sortir de Rome. Act., xviii, 2. Voir Aquila, t. i, col. 809, et Claude !, t. ii, col. 707-708.— /2o Quand le même Apôlre en eut appelé au tribunal de César, le procurateur Festus le fit embarquer « pour l’Italie ». Act., xxvii, 1. — 3o Pendant le trajet, il changea de vaisseau à Myre et monta sur un navire d’Alexandrie qui se rendait « en Italie ». Act., xxvii, 6. Après un voyage accidenté il débarqua en effet à Pouzzoles, puis il se rendit à Rome en traversant Forum Appii et les Trois Tavernes. Act., xxviii, 13-16. — 4o Dans l’Épitre aux Hébreux, il salue les destinataires de cette lettre « de la part de ceux d’Italie ». Heb., xiii, 24. Voir Hébreux (Épître AUX), t. iii, col. 519. — La cohorte « italique » est nommée dans Act., x, 1. Voir ce mot. — 5o Le nom d’Italie désignait à l’origine le pays situé entre le Tibre et le mont Gargan. Avec lés progrès de la domination romaine il s’étendit à toute la péninsule. Jusqu’en l’an 42, la partie située au nord du Rubicon porta le nom de Gaule Cisalpine. À cette date, cette province fut supprimée par Auguste et l’Italie eut pour frontière les Alpes. " Cet empereur partagea l’Italie en onze régions, non compris la circonscription de la ville de Rome qui fut la douzième. Pline, H. N., iii, 40. Le préfet de la ville avait juridiction sur Rome et sa banlieue, le préfet du. prétoire snr le reste de l’Italie. Il y avait en Italie des colonies juives, notamment à Rome et à Pouzzoles. Cette

dernière ville était en relations permanentes avec Alexandrie. Le commerce y attirait les Juifs d’Egypte et un certain nombre d’entre eux s’y étaient fixés au temps d’Hérode et peut-être auparavant. Josèphe, Ant. jud., XVII, xii, 1 ; Bell. jud., II, vii, 1. Dans d’autres villes italiennes on trouve la trace de colonies juives, mais les inscriptions qui nous les font connaître sont toutes d’époque postérieure aux temps apostoliques. On en rencontre notamment à Brescia, Corpus inscript, latin., t. v, n » 4411 ; à Capoue, Corpus insc. latin., t. x, n° 3905. Sur les Juifs de Rome, voir Rome. Le christianisme avait déjà été prêché en Italie avant l’arrivée de saint Paul, en particulier à Rome au temps de Claude, Rom., i, 8 ; voir Claude 1, t. ii, col. 708 ; cf. Act., ii, 10, et à Pouzzoles, puisque des chrétiens accueillent l’Apôtre dans cette ville. Act., xxviii, 13. Voir Pouzzoles. Cf.E. Schùrer, Geschichte des jùdischen Vulkes im Zeitalter Jesu Christi, 3e édit., in-8o, Leipzig, 1898, t. iii, p. 37 ; Th. Mommsen et J. Marquardt, Manuel des antiquités romaines, trad. franc., t. ix, in-8o, Paris, 1892, p. 1-27.

Ë. Beurlier.

    1. ITALIENNES (VERSIONS) DE LA BIBLE##


ITALIENNES (VERSIONS) DE LA BIBLE. I. La Bible italienne au moyen âge.

L’histoire des traductions italiennes primitives de la Bible, pendant les derniers siècles du moyen âge, est obscure, et il est difficile d’en retracer les origines et le développement. On ne possède pas de renseignements précis sur les premiers traducteurs et sur l’époque où ils vivaient. Nous sommes en face d’un problème semblable à celui des origines de la Vulgate latine avant saint Jérôme ; nous ne pouvons avoir quelques renseignements qu’en étudiant les manuscrits parvenus jusqu’à nous. On peut voir l’excellent travail de Samuel Berger sur La Bible italienne au moyen âge, dans la Romania, t. xxiii (1894), p. 358-431. Ses recherches originales et sûres nous ont ouvert la voie pour cette étude. Le premier essai critique d’une histoire de la Bible italienne au moyen âge avait été esquissé au xviii » siècle par le P. 1. Le Long, dans sa Bibliotheca sacra, Paris, 1723, t. i, p. 353.

i. description des manvscrits. — 1o Le plus grand nombre d’entre eux contient différentes parties du Nouveau Testament, particulièrement des Évangiles. Ce sont quelquefois des extraits historiques sur la vie de Jésus, Magliabechiana, cl. xl, 41, ꝟ. 3-14 (xiv s.), choisis et coordonnés de manière à faire une Harmonie évangéligue, une histoire de Jésus-Christ tirée du texte des Évangiles, commençant par saint Matthieu, Magl., Conv. soppr-, C. 3, 172 ; par saint Luc, Riccardiana 1749 ; plus souvent par saint Jean, Laurenziana, pl. xxvii, 8, Rico. 1356 et 2335, tous du xive siècle. D’autres Harmonies appartiennent au xv 8 siècle : Laur., pl. xxvii, 14 (1427) ; pi. xxvii, 12 ; Magl., Conv, soppr., I iv, 9 ; Riccard. 1304 et 1354. Ces Harmonies sont le résultat d’une fusion, plus ou moins habile, des textes évangéliques lus au peuple pendant la messe des dimanches et des fêtes de l’année. En effet, plusieurs mss. n’ont que les Évangiles des dimanches et fêtes, ordinairement disposés dans l’ordre suivi par l’Église romaine, d’autres fois remaniés de façon à commencer par l’Évangile de saint Jean ou par les généalogies de saint Luc et de saint Matthieu et ne différant pas trop des Harmonies. Magl., Pal. 3 (xiv » s.) ; Ricc. 1657 (a. 1410) ont les seuls Évangiles des dimanches et fêtes ; Marciana, I ital. 80 (xiv s., xiii ?), Ricc. 1400 (a. 1463), Laur., pl. xxvii, 11 (a. 1475), Ashburn. 519 (a. 1481) et 1250 (a. 1483), Magl., Conv. soppr., F. 5, 178 (xv s.) ont aussi les textes ecclésiastiques des Épitres ; et Laur., pl. lxxxix, sup. 14 (a. 1474) même des Prophéties ; dans quelques manuscrits du xv siècle les textes évangéliques sont suivis par le commentaire, célèbre au moyen âge, du frère Simone da Cascia. Par exemple, Magl., Conv. soppr., E. i, 1336 ; Laur., Ashb. 730, Ashb. 545, Gadd. 121 (a. 1431). Enfin.

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Mare., I ital. 3 (a. 1369), Laur., Pal. xxvii, 3 (a. 1395), .Ricc. 1787 (xrv* s. ?) et Laur. Med. Pal. 3 (xv « s.), exactement parallèle au précédent, nous donnent le texte entier et exclusif des Évangiles. — Deux mss. Laur., Ashb., 435 (xivs.) et PI. xxvii, 6 (xv) ont les Actes des Apôtres : d’autres reproduisent les Épîtres de saint Paul, en partie, Siena, I, ii, 31 (fin xrv> s.), ou en entier, Ricc. 1325, 1382, 1627, tous les trois du xv » siècle ; quelquefois réunies aux Épitres catholiques, Ricc.’1321 (xv » s.). Le Magl., Pal. 5 (xrv » s.), renferme entre divers documents légendaires l’Épitre de saint Jacques : dans Laur., Strozzi, 10 (xiv « s. ?) aux Épitres pauliniennes et catholiques est jointe la première moitié des Actes. Trois mss. Laur., Ashb., 414 (xiv s.), Magl., Pal. 6 (xrv » s.), Ricc. 1349 (xv » s.) ont la seule Apocalypse ; Ricc. 1538 (xrv » s. commenc.) place les Épitres de saint Jacques et de saint Pierre après l’Évangile de saint Matthieu ; par contre, Ricc. 1658 (xrv » s. ?) donne aux Épitres la première place, tandis que Marc, I ital. 2 (xiv » s.), met entre Matthieu et l’Apocalypse des longs extraits d’autres parties du Nouveau Testament. Les deux, Siena, I v, 9 (xiv » s.) et Ricc. 1250 (xv » s.) contiennent le Nouveau Testament tout entier.

2o Sans doute, l’Ancien Testament n’eut jamais une si large diffusion ; cependant certains livres durent être assez répandus parmi les lecteurs de la Bible en langue vulgaire. C’est tout naturel, par exemple, que nous ayons encore quelques mss. du Psautier, Magl., Pal. 2 (xrv 8 s.), Marc, I ital., 57 (xiv> s, ), Vicenza, 2, 10, 5 (a. 1447), Laur., PI. xxviii, 3 (xv » s.), Magl., cl. xxxvii, 47 (a. 1481), Marucell., C. 300 (xv » s.), et d’autres de la Laurentienne, ont les seuls Psaumes de la pénitence. Remarquables sont deux mss. des Proverbes, Magl., Conv. soppr., B, 3, 173 (xive s.), Cl. xl, du xiv 8 siècle et dont le dernier ^contient aussi la version de l’Ecclésiaste. — Quant aux autres livres de l’Ancien Testament il ne semble pas que les lecteurs du moyen âge en aient fait des copies séparées ; la Genèse dans le Ricc. 1655 (a. 1399) est une curieuse exception. Aussi curieux est le ms. Siena, J v, 5 (xiv » s.), contenant la Genèse, une partie de l’Exode, les IV livres des Rois, une partie des livres des Machabées et une histoire légendaire de Samson, tirée et amplifiée du livre des Juges (ch. xiii-xvi), de manière à former, dans l’intention du compilateur, comme une histoire du peuple d’Israël, reproduite de la Bible. L’Ancien Testament tout entier est dans un autre Siena, F. III, 4, du xrv » au xv » siècle. — Quelques grands mss. durent être écrits en vue de contenir en entier la Bible en langue vulgaire : mais ils ne nous sont pas parvenus complets. Le Ricc. 1252 (xrv « s.) ne renferme que la seconde moitié de la Bible, de l’Ecclésiastique à l’Apocalypse ; le premier volume a disparu. Par contre, le Laur., Ashb., 1102, est le premier tome d’une Bible et va de la Genèse au Psautier (Ps. i-xiv) ; il date de 1466. C’est, sans doute, ce fameux ms. de F. Redi, que cet académicien avait légué dans son testament à la bibliothèque Laurentienne ; vendu après sa mort, il y est entré seulement plusieurs siècles après, avec la collection anglaise de lord Ashburnam. Cf. Enrico Rostagno, La Bibbia di Francesco Redi, dans la Rivista délie Biblioteche e degli Archivi, t. vi (1895), p. 95-109. En général ce ms. est parallèle au Siennois, F. III, 4. —Les deux premiers volumes d’une Bible italienne sont conservés à la Bibl. nat. de Paris (Ital. 3 et 4) ; ils ont été écrits en 1472, et appartenaient autrefois à la Bibliothèque royale de Naples. Un autre grand ms. de la Bibl. nat. (provenant de Naples), ital. 1 et 2, de la seconde moitié du xy » siècle, est la seule Bible italienne complète qui ait résisté au ravage des siècles. — Voir sur plusieurs de ces mss. les descriptions contenues dans les catalogues de Bandini [Laur.), Gentile (Magliab.), Mazzatinti, In--ventarii, etc. (Florence, Vicence, Paris).

II. CARACTÈRES GÉNÉRAUX DES VEBS10NS. — L’exa men le plus superficiel des mss. nous’montre que la langue vulgaire employée dans les versions bibliques est en général le dialecte toscan, tel qu’il était parlé à Florence au xiv » siècle, et depuis lors est devenu la langue nationale d’Italie. Cependant, quelques mss. sont dans un dialecte particulier, qui mérite un examen à part. Ainsi le Psautier des mss. Marc ital. 57, Vicent 2, 10, 5, trahit une influence linguistique vénitienne. Qu’on en lise les premiers versets : « Beato lo homo lo quale nonn é andado in lo conseio di malvasi et in la via di peccadori non è stado, né in la cariega de la pest-ilencia non à sedudo. Ma in la leçe del Segnore la voluntà soa et in la soa leçe pensera lo die la note eçc. »

Il est clair que ce langage, s’il n’est pas du pur vénitien, est au moins du toscan qui a subi une grave altération littéraire d’influence vénitienne. Bien mieux, les Évangiles du Marc. I ital. 3 sont proprement rédigés en vénitien (xrv » s.) ; il suffit d’en lire quelques mots :

Luc., xv, 11 : « Un homo era loqual aveva. ij. fioly, e Uo plu çovene disse a so pare : Pare, dame la mia parte de lo chastello che me tocha.E lo pare parti la sustancia e de a queluy la soa parte. Et dentro brieve termene tute cose asemblade insembre ecc. »

Qu’on compare les deux textes avec les autres mss. toscans plus communs, et il en ressortira que nous sommes en face d’une version du Psautier et des Évangiles qui diffère absolument des autres, et qui dut être tirée, au moins pour le Psautier, d’une version toscane tout à lait indépendante de celle qui se trouve dans les autres mss. Ce n’est donc pas une version unique et et homogène que celle de la Bible en langue vulgaire toscane ; en effet, les mss. nous montrent bien plus qu’une simple variation d’une même œuvre modifiée par le temps et par les copistes ; ils représentent parfois des types de versions essentiellement divers, et d’origine indépendante. En voici la classification.

1o Le Pentateuque nous parait, dans les différents mss. qui le contiennent, avoir les caractères d’une version égale et unique, en dehors des variantes inévitables dans chaque copie. Un essai isolé d’un type divers de traduction nous est donné par le Ricc. 1655. Cette Genèse diffère considérablement de l’autre version, et malgré les nombreux rapports qui existent entre les deux, il faut conclure à une origine propre et séparée. En voici quelques versets parallèles :

Siena F. III, 4 : Nel cho minciamento créo Iddio lo

cieloe la terra. Ma la terra

era vanae vota, e le ténèbre

erano sopra a la faccia dello

abisso, e lo spirito di Dio era

portato sopra all’acque ecc.

Ricc, 1655 : Nel princîpio

credo in Deo ( !) il cieloe la

terra. Ma lia terra era vana

et vota, e lie ténèbre erano

sopra la faccia dell’abiso, e

lo spirito del Singniore era

menato sopra all’aque ecc.

Peut-être le traducteur du Ricc. travailla-t-il ayant sous les yeux la version commune. Les livres des Rois et plusieurs autres de l’Ancien Testament (Judith, Job, etc.) nous offrent dans les mss. deux manières de version ; l’une incorrecte, remplie de gloses, infidèle au latin et ressemblant plutôt à une paraphrase, et l’autre correcte et discrètement glosée, représentant plus fidèlement le mot et la pensée du latin. Voici, par exemple, le commencement du livre de Judith :

Siena, F. III, 4 : Ne le

parti di Media singnore giava uno re detto per nome

Afasath, il quale era molto

possente, e per la sua pos sança inchominciôe molto

ad aquistaree sottomettare

giente alla sua singnoria ecc.

Sommes-nous en présence de deux versions différentes dès l’origine, ou d’une seule et même traduction que l’usage populaire et la variété des copies ont considéra Par., B. N. ital. 3 : Adun que lo re Arphasath de Me dii moite avea soctoposte

al suo imperio, ed egli he difichô una cictà potentis sima, la quale egli appelle

Egabanis ecc.

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blement altérée ? Certainement, même dans cette seconde hypothèse, on ne pourrait facilement décider lequel des deux textes représente la meilleure tradition. Encore, chaque ms. a-t-il ses variantes propres, et il est bien difficile d’en démêler le texte commun et original. Le Psautier toscan, par contre, bien qu’il ait été transcrit dans bon nombre de mss. ne présente pas trop de différences ; les variantes sont nombreuses dans chaque copie, mais l’unité de version, à part quelques tentatives particulières, est partout manifeste. Les livres de Salomon sont remarquables par le nombre de leurs versions : cinq mss. des Proverbes donnent au moins quatre traductions diverses et indépendantes, si ce n’est que deux d’entre elles (Paris, Bibl. nat., ital. 3, et Siena, F. III, 4) ont les mêmes références relatives aux livres des Rois. De l’Ecclésiaste on possède trois versions. Pour le reste de l’Ancien Testament, l’unité et l’égalité de la version rassortent asseï clairement de l’examen des mss. qui offrent toutefois grand nombre de variantes.

2o Peut-on dire aussi, en général, du moins, qu’il n’y a qu’une seule et même version pour le Nouveau Testament ? Les mss. donnent une si grande variété de textes, ont chacun des caractères si particuliers, qu’on serait presque amené à admettre une foule de versions différentes. Celui qui connaît l’histoire de la Vulgate latine se rappelle naturellement, lorsqu’il étudie les mss. italiens du Nouveau Testament, ce que disait saint Jérôme des textes bibliques latins de son temps : Pêne tôt eoceniplaria quoi codices. Cependant les Évangiles toscans, à part quelque exception, par exemple Magl., Conv. soppr., C. 3, 175, semblent bien se rapporter, malgré les variantes des mss., à une seule et même version. La diversité de rédaction des Actes des Apôtres est surtout dans les gloses, et c’est un fait que nous examinerons plus tard. Pour les épltres de saint Paul, le Ricc. 1252 paraît donner une version indépendante des autres, mais cela n’est pas tout à lait sûr. Qu’on en juge :

Ricc. 1252

(Rom., viii,

35) : Dunque ki nne dipar tirà dall’amore et dalla ca rità diCristo ?Tribolatione,

angoscia, scacciamento, fa mé, pericolo o coltello ?

Non, si ccome è scricto, ke

nnoi per te semo mortiûcati

d’ogni tenpo ecc.

Ricc. 1250 : Adunque

chi ssi dipartirà dall’amore

di Cristo ? Sarâe tribula tione o angoscia o persecu tione o famé o nuditade

o pericolo overo coltello,

che cci parta dal suo amo re ? Che egli è scritto nel

salterio : Messer Domene dio, per te ecc.

On doit dire plutôt que nous avons ici, comme dans d’autres livres, deux rédactions d’une même version, mais dont l’une est sans glose et l’autre glosée, car, au milieu de cette profonde différence des deux textes, on reconnaît des mots, des formes, des phrases, qui n’auraient pas pu être écrits, si l’auteur de la seconde rédaction n’eût pas connu la première. Les Épitres catholiques nous présentent, la même rédaction de deux textes, l’un incorrect et glosé, l’autre sans paraphrase. Pour l’Apocalypse, on rencontre généralement la même version dans les mss. ; une autre, toute différente dès l’origine, est contenue dans le Ricc. 1349 (commenc. du xv « s.).

111. ORIGINES HISTORIQUES DES VERSIONS : ÉPOQUE. —

1o Tous les mss. des versions italiennes, connus jusqu’à présent, sont du xv » et du xiv< siècle, et ne rémontent pas, excepté peut-être un seul sans importance, au un » siècle. Cependant, du caractère des versions et de l’arrangement des livres, on peut conclure qu’elles existaient déjà vers le milieu du xin » siècle, ou peu après. 2o Voici dans quel ordre sont placés les livres du Nouveau Testament. Le Ricc. 1250 reproduit l’ordre ordinaire des mss. latins au moyen âge : Évangiles, Paul, Actes, Épitres catholiques, Apocalypse ; mais le Ricc. 1250, les deux Parisiens, et peut-être aussi le Siennois,

ont : Évangiles, Éptlres catholiques, Paul, Actes, Apocalypse. Ce second classement est bien rare dans les mss. latins du moyen âge (xiv «-xv » s.) ; la comparaison avec les diverses familles des mss. latins montre qu’il est ancien et remonte au moins au un » siècle. La division en chapitres, dans chaque livre de la Bible italienne, est aussi remarquable. Les mss. siennois du Pentateuque divisent les chapitres d’une façon particulière, qu’on retrouve seulement dans les mss. latins antérieurs au milieu du XIIe siècle. Un ancien système de chapitres se trouve aussi dans les livres de Judith, d’Esther, d’Esdras (Siena, F. III, 4) ; le livre de Job (ibid.) est divisé en 22 chapitres au lieu de 42 ; cette dernière division est celle des textes latins à partir du milieu du xiii » siècle.

3o « Il a circulé dans le nord de l’Italie, jusqu’un peu après le milieu du un » siècle, une famille de textes très reconnaissable, et qui avaient, autant qu’on en peut juger, un système de chapitres analogue. Ces textes sont caractérisés par un certain nombre de leçons, qui ne se rencontrent jamais ailleurs. Or quelques-unes de ces leçons ont passé dans ces textes : Exod., xxxiv, 28 : Stetit ibi cum dorhino Moyses. « Istette adunque quine Moyses cho’l Singniore » (Sienne, F. III, 4 ; cf. B. N., 1) ; Num., m, 45, fin : In prteceptis meis ambulent. « Se eglino observaranno i miei chomandamenti » (Sienne, F. III, 4 = B. N., l) ; Jer., xxv, 28 : Deus Israël. « Il Dio d’Israël » (B. N., 2) (Berger, dans la Romania, 1894, p. 372). C’est donc une conformité positive et directe que les mss. italiens présentent avec les textes latins du XIIIe siècle ; conformité qui n’existe pas dans les textes liturgiques en usage au xve siècle, ni même au xiv » siècle. Comme il n’est guère . admissible que des traducteurs du xrv » siècle aient voulu d’un commun’accord, et sans aucun motif plausible, se détacher des textes latins courants pour suivre les textes anciens et surannés, il faut en conclure qu’en général la version italienne de la Bible fut terminée vers le milieu ou pendant la seconde moitié du xiii » siècle. Ce qui reste obscur et fort incertain, c’est si, au xme siècle, il se forma une édition complète de la Bible italienne, embrassant tous les livres dans leur ensemble. Nous verrons plus loin qu’on put avoir au xiv » siècle des motifs pour détruire les mss. du xitr siècle, et il ne faut pas s’étonne ? si aucun d’eux n’est parvenu jusqu’à nous.

iv. auteurs des traductions. — Les historiens de la littérature italienne ont fait sur ce sujet beaucoup d’hypothèses et ont même prétendu les donner comme affirmations certaines. On a cru, par exemple, que l’auteur de la version biblique imprimée à Venise, dans la seconde moitié du xv » siècle, était le B. Giovanni Tavelli da Tossignano, mort évêque de Ferrare. En effet, une ancienne vie de Jean Tavelli, rédigée en 1597 par un évêque de Ferrare, dit expressément que le B. Giovanni a. traduit Bernardi serrhones, Biblise ac moralium Gregorii majorent partem eleganli stilo in maternum sermonem.Ct Negroni. La Bïbbia volgare (Dedicatoria. e proemio), 1. 1, Bologne, 1882, p. xv. Malheureusement ce passage laisse indécis, si ce fut une version de la Bible tout entière, ou seulement d’une partie considérable. Quoi qu’il en soit, la traduction de Tavelli n’est pas certainement celle qui fut imprimée à Venise, ni. celle des mss. qui en sont la source ; parce que le B. Giovanni naquit en 1386, et son activité intellectuelle sa reporte entièrement au xv » siècle, tandis que la version, italienne est contenue dans des mss. qui datent positivement du xiv » siècle. Aussi cette traduction a-t-elle étéattribuée à des écrivains du xiv » siècle, et particulièrement aux célèbres Jacopo di Voragine, archevêque de-Gênes, Jacopo Passa vanti, Domenico Cavalca, tous les trois frères prêcheurs, et créateurs de la prose italienne avant Boccace. Mais, à vrai dire, de Jacopo di Voragine on. connaît seulement une traduction de légendes latinespieuses. Passavanti s’exclut lui-même du nombre des.

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traducteurs de la Bible, puisqu’il parle du caractère-des versions qui existaient déjà de son temps ; et Cavalca († 1342), le traducteur renommé de Vies des saints Pères, n’a traduit que les Actes des Apôtres, si même il les a traduits. Ces hypothèses n’ont pas d’autre fondement que le désir d’attacher à tort ou à raison l’origine du grand monument linguistique de la Bible italienne à un nom déjà célèbre et vénéré du xrve siècle. Le savant Negroni lui-même n’a pas su se défendre, après avoir rejeté les opinions précédentes, d’attribuer à la plume de Cavalca la plus grande partie de la version vulgaire. Negroni, Bibbia volgare, t. i, p. xx. Un simple examen des mss. suffit cependant pour montrer combien cette attribution est peu fondée : Une courte introduction aux Actes, de la main du célèbre écrivain, nous apprend à plusieurs reprises (cf. Ricc. 1250 ; Laur., PI. xxvii, 6, Ashb. 435) que ce livre a été travaillé par le frère Domenico Cavalca. Mais on ne peut pas conclure avec certitude de ses paroles que les Actes ont été traduits par le célèbre dominicain. Le prologue peut bien s’expliquer dans le sens que Cavalca soit non le traducteur, mais un nouveau rédacteur, voire le glosateur de la version préexistante. Que cette interprétation du prologue soit la seule vraie, on le prouvera par les mss. eux-mêmes. En effet, on rencontre au moins trois rédactions diverses des Actes, qui certainement ne sont pas tout à fait indépendantes les unes des autres, mais doivent être réduites à une même et seule version primitive : de Cavalca, dans les mss. désignés, du Ricc. 1252 ; du Laur, , Strozzi, 10. Or la comparaison des trois rédactions montre avec évidence, que Je texte du Ricc. 1252, qui est en général un texte ancien et se rapproche singulièrement du xme siècle, n’est que la version de Cavalca, plus incorrecte et presque sans gloses.

Ricc. 1252 : Il primo

sermone io feci, o Teofilo,

di tucte le cose ke Jhesù

cominciô a faree insegnare,

in fino al di che asciendècte

in cielo, cioè k’elli salio in

cielo, coramandando alli

apostoli li quali avea electi

per Ispirito santo, a’quali

dimostro se medesimo vivo

dopo la sua passione ecc.

Ashb. 435 : Lo primo

sermone, cioè lo vangelio’feci et compilai, o Teô philo, di tucte quelle cose

le quali Jesu incomincioe

a fare et a dire, in fino

adquel di et adquella hora

ch’elli comando alli appos toli, li quali ellesse per

Spirito sancto, c’andassero

ad predicare per lo morido

la fede sua, fu assumpto,

cioè salie te in cielo. Ai

quali appostoli si dimostroe

l vivo, cioè inventa d’unia a carne dopo la sua pas | sione ecc.

Certes, au xive siècle, on n’aurait jamais osé mettre la main sur une version de Cavalca, pour en ôter les gloses, et la changer à son plaisir : il est bien plus croyable que le célèbre dominicain ait cherché, pour satisfaire ses lecteurs, à reviser et à gloser, là où il le jugeait nécessaire, l’ancienne version des Actes. Le Laur., Strozzi, 10, nous sert à contrôler cette conclusion, puisqu’il contient la même traduction du texte latin que Cavalca (voire du Ricc. 1252) mais glosé d’une autre manière. "^

Laur., Strozzi, 10 : Lo primo mio parlamentoe sermone io feci, o Teofilo, di tulte quelle cose et opère le quali coinincio Jhesù di fare… in fino in quello die nel quale… fu levato in cielo et ricevuto ecc.

Il est impossible de supposer qu’on ait voulu au xvi » siècle substituer de nouvelles gloses à celles de Cavalca si appréciées par tout le monde. La version des Actes est donc plus ancienne et le travail de Cavalca n’a consisté qu’à la gloser. En outre, puisque le nom de cet écrivain ne se rencontre qu’en tête des Actes, et que jamais les mss. ne font allusion à d’autres versions de

livres bibliques qui lui appartiennent, il est établi que la traduction de la Bible en italien n’est nullement l’œuvre de Domenico Cavalca.

Aucun autre renseignement ne nous est donné par les mss. sur les auteurs de la Bible vulgaire. Il faut croire que si la version eût été l’œuvre de quelque écrivafn connu du moyen âge, jouissant d’une autorité incontestée, nous aurions rencontré quelque part son nom, comme nous avons rencontré celui d’un simple glosateur, Cavalca. Il faut donc penser que le silence des mss. sur ce sujet provient de ce que ces traducteurs n’avaient en leur temps aucune importance personnelle, ou bien que s’ils jouissaient de quelque autorité, les copistes du xive siècle eurent quelque bon motif pour taire leur nom et en effacer la mémoire. Un examen plus approfondi des mss. mêmes nous donnera-t-il la clef de cette énigme ?

Y. CARACTÈRE POPULAIRE DES VERSIONS. — Ce qui

frappe le plus l’attention du critique, qui cherche à déterminer l’origine des mss. bibliques, c’est leur caractère populaire, si divers de celui qui est propre aux ouvrages du moyen âge. Les feuilles de garde des mss., les incipit, les explicit, sont bien riches de renseignements à ce propos ; ce n’est pas certainement avec le menu peuple, qui alors ne savait ni lire ni écrire, que nous avons affaire, mais presque toujours avec des gens du monde, et non du clergé ; ce sont eux qui paraissent se préoccuper des versions vulgaires de la Bible. À ce sujet le ms. peut-être le plus intéressant est le Marc. I ital. 3 des Évangiles, copié par un prisonnier politique, Domenico de Zuliani, Triestain, en 1369 « in civitate Venetiarum, in carcere que nominatur Schiava », un de ces affreux pozzi du palais des Doges, au delà du pont des Soupirs. Cf. Morpurgo S., Un codice scritto da un prigionierétriestino, daas VArchivio storico per Trieste, l’Istriae il Tridentino, t. n. L’explicit du ms. nous dit aussi qu’il a été copié « ad petitionem domini… » de quelque grand seigneur de Venise, dont l’autorité ou la générosité pouvait bien être utile au pauvre prisonnier, quoiqu’il eût été consolé par les paroles mêmes de Jésus et de son Évangile qu’il Copiait. — Un autre ms. bien curieux est le Ricc. 1655, qui se présente comme livre de comptes (1363-1367) des Ricci, grande maison commerciale de Florence aux xiv » et XVe siècles ; il est signé d’Ardingo di Chorso de’Ricci. Plus bas, il contient divers essais de versions vulgaires, entre autres la Genèse, écrits en 1399 par Romigi d’Ardingo, selon qu’il signe à la fin. Le volume est resté pendant longtemps chez les Ricci, et il porte encore les signatures de quelques membres de cette famille au xive siècle. Le Laur., pi. xxxii, 11 (Évang. dim.), a été copié « di propia mano » par « Piero di Gieri del Testa Girdami » en 1475 ; le pl. LXXXIX sup. 14 (Évang. dim.) en 1472 par « Piero di… », et en 1552 acheté par « Barone di ser Barone Baroni cittadino fiorentino » chez « Giacomino richatere et sensale àdine 18 di novembre… grossi sei d’ariento » ; suit une invocation à Dieu et à « messer sancto Giovanni Batista pastoree barone di questa misera citta di Firenze ». Ashb. 519, à la fin : « libro di tuttye vangiely e pistolee letione’che ssi dichano alla messa del nostro Singniore yho XPo sechondo la chorte di Roma, scritto per me Finosino di Lodovicho di Cere da Verazano del mese di luglio 1481 ; chompiessi di scrivere questo di xxi di luglio 1481 ; addio sia gratia. Scrissilo nel palazzotto di Pisa essendo là chastellano per piacere. » Le volume a passé après dans la possession de Nicholo de Finosino, comme nous le dit une autre inscription. De même le Ricc. 1252 appartint à « Ubertino di Rossello delli Strozzi » ; le Ashb. 1250 fut écrit par Agnioio di Bonaiuto di Nicholo Serragli ; le Ricc. 1356 (Harm. évang.) par un notaire florentin « Laynus de Carmignano » ; le Ricc. 1657 (Évang. dim.) « di mano di me Neri di ser Viviano de’Franchi da Firenze », qui fut

prieur, c’est-à-dire membre de la Seigneurie, an xv> siècle.

Plusieurs mss. trahissent leur origine de main populaire, par leur propre formation matérielle ; ainsi le Siennois I, v, 5, a été évidemment recueilli par quelque écrivain du peuple en but de composer comme une histoire du peuple d’Israël tirée de la Bible (Genèse, Exode, Rois, Machabées ; légende de Samson). D’autres contiennent, à côté des versions bibliques, certaines légendes de caractère entièrement populaire, et des récits de voyages en Palestine qui éveillaient tant la curiosité pieuse du peuple au.moyen âge. Le Magl., XL, 41, fait suivre les Évangiles d’un petit Évangile apocryphe ; le xxxvii, 47, « Bernardi de Brogiottis » après les Psaumes de la pénitence contient des relations sur la Terre Sainte et sur les pèlerins. Le Laur., pl. xxvii, 14., « libro de Vangieli rechato di gramaticha in volghare fiorentino » et « scritto per Andréa di Neri Vettori » contient à la suite un légendaire de Vies des saints. Le Magl., Corne, soppr., i, iv, 9 (Harm. évang.), a aussi la narration du voyage en Palestine fait, en 1385, par les trois citoyens de Florence, Giorgio Gucci, Andréa Rinuccini et Lionardo Freschobaldi, une épltre de N. S. tombée du ciel, etc. Le Ricc. 1749 (Harm. évang.), à l’aspect usé, est écrit en un langage plein d’idiotismes, de toscanismes, qui indiquent qu’il est l’œuvre d’un homme du peuple. Le Magl., XL, 47, joli petit volume de poche renfermant les Proverbes et l’Ecclésiaste, fut certainement écrit pour servir de manuel de lecture à une famille du peuple. À côté de ces indices d’un usage populaire, on rencontre çà et là dans les mss. la marque des ordres religieux du moyen âge, qui se rattachent au peuple plus qu’au clergé séculier par leur manière de penser et d’enseigner. Le Paris B. N. Ital., 3 et 4., a été écrit par le frère Nicholao de Neridono ; le psautier de Vicence par frate Lazzero da Venezia rumito ; le Siennois, I, v, 9, a une messe contre la peste (il date du xie siècle), des sermons vulgaires de saint Bernard ; Je Ricc. 1538 (très belles miniatures) « di Giovanni Mellini » contient aussi des légendes, une vision de saint Bernard ; le 1382 un traité de « frate Ghaligo », des lettres en langue vulgaire de saint Jérôme, très répandues parmi les ordres mendiants au moyen âge ; des sermons de saint Bernard ; le Marc, I, ital., 2, des mains d’un citoyen de Venise a passé par emprunt à la Chartreuse ; le Laur. xxvii, 6 (Actes), a une correspondance littéraire de Giovanni dalle Celle, moine à Vallombrosa, où l’on parle longuement contre les vices du haut clergé de l’Église romaine et contre le domaine temporel des papes au xive siècle ; le Magli., Pal. 5, a des sermons de saint Bernard, des lettres de saint Jérôme, dont une traduite par « mæstro Çanobi dell’ordine de’frati predicatori », l’autre par « Nicholo de Ghlno Tornaquinci s, illustre famille florentine ; deux autres mss. de la Magliab. appartenaient jadis au couvent de Santa Maria Novella des trères prêcheurs. D’autres mss. ont un cachet singulièrement franciscain : ainsi, par exemple, un recueil de proverbes de Jacopone da Todi se trouve dans le Ricc. 1304 ; et le 1354 (Harm. évang.) est suivi de quelques légendes de saints et d’une vie de saint François d’Assise, résumé des légendes courantes au xrve siècle. Il n’y a qu’un seul ms. qui soit de la main d’un membre du clergé séculier ; le Ricc. 1627 (Ep. Paul., fin xv> s.) écrit pare Giovanni Ciatini prêtre ».

Vf. PAJUSyTÉ HE LA BIBLE ITALIBNNB AVEC LES VER-SIONS romanes. — Un caractère remarquable des versions italiennes de la Bible, c’est la parenté qu’elles présentent assez fréquemment avec les autres versions du moyen âge, françaises, provençales, vaudoises, catalanes. Prenons Je Psautier, par exemple : il suffit de rapprocher nos meilleurs mss. avec les plus anciens de la version française (normande), pour voir aussitôt qu’il y a entre les deux textes une harmonie, un parallélisme

si parfait, qu’on ne peut l’expliquer qu’en admettant une dépendance directe l’un de l’autre :

Sienà F. iii, 4 : Beato è

quell’uomo che non. andô

nel chonsiglio de’malvagi

e non istette ne la via de’pecchatorie non sedette in

chattedra di pistolencia…

E gli malvagi non saranno

di taie maniera, ma ssaran no si chôme la polvare che’l

vento lieva di la terra, ecc.

[Berger, p. 374). Arse nal, 5056 : Beneùrez est H

homs qui n’ala pas ou con seil des félons, et qui n’es tut pas en la voie des pé cheurs et qui ne sist pas

en la chaiere de pest-illance,

… Li félon ne seront mie

en tele manière, mes ausi

corne la pouldre que li venz

lieve de la terre, etc.

Il est évident que le Psautier italien a été traduit presque mot à mot sur un Psautier français qui est plus ancien (xi-xii » s.) que toutes les traductions italiennes. —Le Nouveau Testament aussi offre de nombreuses ressemblances avec les autres versions romanes de la Bible. Le texte italien (toscan) des Évangiles, quoiqu’il se trouve si différent dans le mss. qu’il est presque impossible d’en restituer la leçon primitive, présente, même dans sa forme actuelle, des parallèles indéniables avec les versions françaises. Ainsi, par exemple, dans Matth., xxiv, 27, le mot fulgur de la Vulgate est traduit en italien il sole, qui est le mot de la Bible vaudoise, lo solelh. — La version de Luc, ii, 33 : Et era Joseph et Maria, et maravigliavansi molto Joseph et Maria, se rapproche de la vaudoise plus que de la Vulgate latine. — Luc, xviii, 28 : « Che dumque merito’nde averremo ? y c’est le texte de la Bible vaudoise et des mss. latins de Languedoc — Joa., i, 1 : Nel cominciamento era il Figliuolo di Dio (Ricc. 1252) ; Lo Filh era al cotnençament (ms. vaudois de Carpentras, et mss. provençaux) ; Au commenchement fu li Fieux (Desmoulins en 1295, qui paraît postérieur à la version italienne). Dans le même Évangile le surnom Didymus (de saint Thomas) est rendu en italien par incredulo, selon les textes provençaux, no crezentz (B. vaudoise, dubitos). Il est clair qu’une des versions a subi ici l’influence directe des autres et, dans le cas, c’est l’italienne, parce que le texte italien est celui qui rend le mot provençal ou français en s’éloignant du latin qu’on devait traduire. — La version commune des Actes présente un parallèle partiel (seconde moitié), mais pariait, avec une version vaudoise. Voir les deux textes rapprochés dans Berger (Romania, 1894), p. 392. On serait porté à dire, comme pour les autres livres, que c’est le texte italien qui dépend du vaudois. Mais notre version des Actes n’est autre que celle qui a été glosée par Cavalca et qui certainement lui appartient ; et par cela même, si étrange que soit le fait, il faut conclure que le texte vaudois n’est qu’une version du catholique italien. Comme nous l’avons déjà montré, la version primitive des Actes en italien est bien antérieure à Cavalca. Berger (Romania, 1894), p. 395, reconnaît à bon droit dans la version italienne de ce livre la même dépendance des. anciens textes provençaux et languedociens, que dans lesautres. On trouve aussi des ressemblances entre la version italienne et les versions françaises des Épltres pauliniennes et catholiques. Berger, p. 400. Il est toutefois difficile d’affirmer qu’il y a eu une influence directe des unes sur les autres, parce qu’il est possible que les traducteurs italiens se soient servis des textes latins, qui furent la source des versions provençales. Un point cependant parait être décisif en faveur d’une dépendance quelconque du texte italien : c’est l’expression de II Cor., viii, 18 (dans Jîice. 1250) : il nostro frate Luca, qui se retrouve seulement dans la version provençale (ms. de Lyon) et dans quelques mss. languedociens. La version commune de l’Apocalypse offre.aussi des parallélismes de dépendance avec les autres versions provençales ou vaudoises. D’autre part, la version singulière que nous avons remarquée dans le ms. Ricc. 1349 (xv> s.) est exactement une reproduction de la catalane du ms. de Mar

moutier. Cf. les textes dans Berger (Bomania, 1891), p. 403. Des ressemblances, des parallélismes plus on moins clairs se rencontrent aussi en comparant les textes français avec l’italien de l’Ancien Testament, sans compter le Psautier. Toutefois on ne peut pas en déduire une dépendance totale directe, du côté de l’italien : c’est plutôt une harmonie des textes latins qui ont servi aux différents traducteurs, et parfois des souvenirs du traducteur italien qui connaissait plus ou moins directement les leçons des textes français et provençaux.

VU. CAUSE ORIGINELLE DBS VERSIONS DE LA BIBLE AU

moyen AGE. — Dans ces observations des caractères particuliers aux mss., nous avons déjà la clef qui nous permet de comprendre la formation de la Bible en langue vulgaire en Italie ; c’est dans l’état social et religieux du XIIIe siècle, qu’il faut la chercher.

Les hérétiques (Albigeois de Provence, Pauvres de Lyon et de Lombardie, Vaudois de la Savoie, du Piémont, des Romagnes, Patarins de Lombardie et de Toscane ) prirent, comme point de départ d’une renaissance religieuse, la lettre des Saintes Écritures. Le Nouveau Testament fut pour eux la grande et unique autorité religieuse ; sur les Évangiles on voulut édifier la nouvelle conscience chrétienne ; les Actes, les lettres des apôtres et l’Apocalypse devaient représenter à l’imitation des fidèles la vie religieuse pure et simple des premiers chrétiens, ou bien le sort historique et apocalyptique du clergé et de l’Église, , qui suivant eux avait manqué leur mission. Cf., par exemple, ms. Laur. Ashb., 415, Dansl’Ancien Testament, au xil" et au xiiie siècle le peuple ne fit attention qu’au Psautier, le manuel par excellence de la prière chrétienne, et à quelques autres livres moraux ou mystiques. Quant aux livres historiques et aux prophètes, on sait que les Cathares et les sectes dérivées les regardèrent comme l’œuvre de l’espr".lu » ial, du diable, et qu’à leurs yeux l’Ancien Testament ne méritait que l’exécration.

Parallèlement à ce mouvement religieux chez les peuples du moyen âge, se développa un grand mouvement littéraire. La langue latine avait cessé peu à peu d’être parlée et elle mourait après s’être assimilée de nombreux éléments celtiques et germaniques, et en donnant nais-. sance à tout un groupe de langues nouvelles. Plusieurs siècles furent nécessaires à ces langues pour se former et pour se créer une grammaire et un dictionnaire, mais lorsqu’elles eurent grandi, elles portèrent leurs fruits. On vit alors éclore une littérature profane, française, provençale, catalane, italienne, et en même temps une littérature religieuse qui, à cause des tendances qui portaient les esprits surtout vers les Écritures, fut surtout une littérature biblique. Le latin fut encore la langue officielle de l’Église, qui ne crut pas nécessaire d’adopter les nouveaux idiomes populaires : mais le peuple commença lui-même à traduire, dans l’ordre de leur importance, les livres de la Bible qui faisaient le fond de la liturgie : les Évangiles, les Actes, l’Apocalypse, tout le Nouveau Testament ; le Psautier (parallèle aux Évangiles), les livres sapientiaux (Proverbes, Ecclésiaste, Cantique, Job, etc.), et enfin le reste de l’Ancien Testament. C’est ainsi que se forma en Italie la version de la Bible, pendant la seconde moitié du XIIIe siècle. L’extrême simplicité de cette traduction n’en fait pas une œuvre d’art littéraire ; elle fut seulement l’expression du mouvement religieux de cette époque. La comparaison de cette version avec les versions françaises (normandes) et provençales attestent que, particulièrement dans le Nouveau Testament, elle fut composée sous l’influence religieuse et à la fois littéraire de la France. Elle fut mise au jour primitivement dans un but de propagande très favorable à l’hérésie (vaudoise). Sur le caractère littéraire des versions bibliques de son temps, voir le frère Passavant], Specchio di vera penitenza, v, ch. 5.

TOI. USAGE DBS VERSIONS VULGAIRES DE LA BIBLE AU

j/v » et au xv siècle. — La science catholique dea docteurs, qui cherchèrent l’accord de la philosophie avec la foi, frappa d’un grand coup les hérésies qui se développaient au sein des peuples latins ; la sévérité de l’Inquisition romaine et des princes séculiers arrêta les progrès des hérétiques ; mais peut-être tout aurait été vain, si la Providence n’eût fait sortir du peuplé lui-même le principe de la restauration catholique. Elle suscita saint François d’Assise et saint Dominique. Les deux ordres qu’ils fondèrent, en leur donnant un caractère populaire, donnèrent l’essor à la renaissance religieuse de l’Italie et de la France ; ils établirent l’harmonie entre la foi catholique et les nouveaux besoins du peuple, et fournirent à l’Église romaine la force dont elle avait besoin pour purifier et renouveler l’état social au moyen âge.

Nous avons établi que la version de la Bible commença à se former en Italie vers le milieu du xiiie siècle et qu’elle fut probablement l’œuvre des hérétiques patarins et vaudois. Lorsque ces hérétiques disparurent, leur version devint comme l’héritage des religieux mendiants et de la masse populaire. La version de l’Ancien Testament (hormis le Psautier et les livres sapientiaux), la dernière à paraître, fut, vers la fin du xme siècle, l’œuvre exclusive de quelques frères franciscains ou dominicains. Mais le Nouveau Testament put être adopté par les catholiques, sans aucune revision, parce que les versions vaudoises de la Bible, malgré l’esprit qui les avait fait composer, étaient au fond orthodoxes, quant à la lettre de l’Écriture.

Au xiv siècle, la version de la Bible en italien est déjà regardée dans son ensemble comme une œuvre de source franciscaine et dominicaine. Plusieurs mss., comme nous l’avons remarqué, sont en effet de simples compilations de divers ouvrages appartenant au cycle franciscain et dominicain (Lettres de saint Jérôme, Sermons de saint Bernard, Voyages en Terre-Sainte, légendes apocryphes, etc.). Tandis que les franciscains propageaient les idées religieuses en langue vulgaire au sein du peuple, les dominicains, tels que Passavanti, Cavalca, Da V’oragine, Federico da Venezia, représentaient les maîtres de la doctrine catholique dans les plus hauts rangs de l’Église romaine et de l’épiscopat, mais entretenaient aussi la vie religieuse dans les classes populaires par leurs écrits en langue italienne. — En se plaçant à ce point de vue, on peut regarder l’édition complète de la Bible vulgaire italienne au xiv siècle comme une œuvre dominicaine ; mais la diffusion des plus intéressants des livres canoniques parmi le peuple italien, aux xiv » et xve siècles, fut plutôt l’effet de l’influence franciscaine.

ix premières bibles imprimées. — Pendant la seconde moitié du XVe siècle, qui vit naître l’imprimerie, la Bible italienne eut bien vite les honneurs de la presse. On en connaît deux éditions principales, parues à Venise. — La première fut publiée en août 1471, par le célèbre typographe allemand Wendelin, de Spire ; elle passe pour l’œuvre de Nicolo Malherbi : Biblia dignantente vulgarizata per il clarissimo religioso duon Nicolao de Malermi Veneziuno, etc. ; — à la fin du second volume, on lit : Impresso… négli anni m.cccc.lxxi. in Kalende de Augusto. Cette Bible est précédée d’une Epistola de Don Nicolo di Malherbi veneto al reverendissimo prof essore de la sacra theologia mæstro Laurentio, de l’ordine de sancto Francesco, dans laquelle l’auteur déclare avoir traducto tutto testo de la Biblia, et l’avoir enrichi de petits commentaires tirés des saints Pères et d’autres célèbres théologiens du moyen âge, par exemple Mæstro Michèle da Bologna de l’ordine di cartnelitani. La dédicace est suivie d’une réponse en latin du susdit Laurentius venelus theologorum minimus, ex ordine cordiferum, etc. Après l’Apocalypse on lit les Rime di Hieronimo Squarzafico de Alexau

dria en l’honneur du volume, et de Wendelin, que le poète met au même rang que Zeuxis, Parrhasius, Folyclète. Nicolô de Malherbi (on le trouve aussi écrit Manerbi, Malermi) était un moine camaldule : de Venise, des plus distingués du xve siècle (né vers 1422, mort en 1481). Cf.Mittarellie Costadoni, Annales camaldulenses, t. vii, p. 286-288 ; Foscarini, Délia letter. veneziana, Padoue, 1752, t. i, p. 170. Il fut « dil monasterio de sancto Michèle di Lemo abbaie dignissimo », comme dit le titre de la Bible imprimée sous son nom, et ensuite d’autres monastères vénitiens, Saint-Matnias de Murano, etc. Si l’on compare avec soin le texte de Malherbi avec les différentes rédactions manuscrites de la Bible des xiii «-xive siècle, on arrive à la conclusion certaine, que la prétendue version du camaldule vénitien n’est autre chose qu’une édition de l’ancienne Bible revue et corrigée par l’abbé de St. Michèle in Lemo. La correction de D. Malherbi eut spécialement en vue : 1° d’adapter le langage toscan des mss. à l’orthographe du dialecte usité à Venise de son temps ; 2° de rapprocher la version italienne de la Vulgate jlatine, d’où elle avait été tirée.' Par suite, l'édition de Malherbi, bien qu’elle reproduise foncièrement des mss. du xive siècle, se rapproche beaucoup du dialecte vénitien, et rappelle de près le latin ; mais elle n’est point une œuvre littéraire et classique de langue italienne. Zambrini, Opère volgari a stampa, Bologne, 1884, est d’ailleurs trop sévère pour Malherbi, et trop favorable au texte des mss., quand il dit que l’abbé de Lemo ebbe l’audacia siccotne sfrontato plagiario, non solamente manomettere quesV aureo volgarizzamento, ma ben anco attribuirlo a se stesso. Les gloses ne manquent pas dans cet ouvrage, par exemple aux Psaumes, au Cantique des cantiques, aux Proverbes ; mais, en général, elles sont beaucoup moins nombreuses et mieux justifiées que dans les mss.

Deux mois seulement après l'édition de Malherbi, une grande Bible parut à Venise. Elle est sans indication typographique, mais elle sortit sans doute des presses du fameux Nicolô Jenson. Ce sont deux gros volumes in-folio, dont le premier va jusqu’aux Psaumes ; l’autre comprend le reste de l’Ancien et le Nouveau Testament. C’est à tort que Negroni, Bibbia volgare, t. i, p. XII, et, d’après lui, Carini, Versioni italiane delta Bibbia, dans Vigouroux, Manitale biblico (S. Pier d’Arena, 1894J, t. i, p. 274, divisent la Bible de Jenson en trois volumes. Il est vrai que même l’exemplaire que j’ai examiné dans la Bibliothèque nationale de Florence, est en trois tomes (1° Gen., Mi - Esd., m ; 2° II Esd., m - Ezech. xxxiv ; 3° Ezech., xxxv - Apoc.) pour la commodité de la consultation, mais évidemment le typographe avait divisé les volumes là où les explicit et les incipit sont marqués en majuscules, c’est-à-dire à la fin du Psautier et de l’Apocalypse. — Cette Bible ne porte aucune mention d'éditeur qui, à l’exemple du P. Malherbi, en ait revu et corrigé le texte, et dirigé la publication. Ce n’est pas sans molif ; en effet si l’on compare cette version imprimée aux autres versions de cette époque, on reconnaît que ce n’est pas une œuvre personnelle, ni même une revision d’anciens textes, comme la Bible malherbienne ; elle ne fait que reproduire des textes déjà existants, que le typographe a mis tels quels aux mains des ouvriers. Ainsi la Bible de Jenson reproduit en grande partie le texte de quelques manuscrits connus, par exemple Sienne, F. iii, 4. De plus il y a des parties considérables qui sont la reproduction mot à mot de la version de Malherbi, publiée peu de temps avant par Wendelin, de Spire. Cet amalgame de textes est-il effet d’un jugement critique et comparatif de leur valeur ? Evidemment non : aucun critérium n’a présidé an choix de l’une ou de l’autre version. Non seulement le ms. est à plusieurs reprises abandonné et repris, ainsi que le texte malherbien, mais le changement des textes se fait

tout à coup, quelquefois au milieu d’un livre, au milieu même d’un verset, ou entre la fin et le commencement de deux feuilles d’impression. On doit conclure de là que, dans l'édition de Jenson, l’usage de deux textes différents n’a pas d’autre motif que des raisons typographiques. L'éditeur avait commencé l’impression simultanée de plusieurs parties de la Bible d’après un ms. d’assez bonne rédaction, mais qui n'était qu’une version glosée du moyen âge, mêlée d’erreurs, et faite avec une grande liberté d’allure vis-à-vis du latin de la Vulgate. Aussitôt que la Bible de Malherbi parut, N. Jenson crut mieux faire d’abandonner le ms. pour suivre entièrement la nouvelle édition princeps de la Bible en langue vulgaire. C’est précisément auꝟ. 22 du second livre des Machabées, et au commencement du Ps. xvii, que la Bible de Malherbi entra dans l’atelier de Jenson. Celui-ci publia son édition tout de suite « in kalende de octobrio », mais sans lasigner de son nom, reconnaissant sans doute l’imperfecfection de l'œuvre. — Les livres où Jenson suit de préférence le texte de Malherbi sont ceux du Nouveau Testament, le Psautier et quelques parties des Prophètes, par exemple les Lamentations, et les Machabées. Cf. Le Long, Bibliotheca, p. 354. On devine aisément, par ce que nous venons de dire, quel dut être le sort de ces deux Bibles. Celle de Malherbi, avec sa couleur vénitienne, avec ses fautes d’impression, était tout au moins une œuvre homogène, un texte qui représentait assez fidèlement l’original sacré ; aussi se répandit-elle bientôt dans toute l’Italie ; elle eut l’honneur de plusieurs réimpressions et fut en usage pendant presque un siècle ; on l’imprimait encore en 1567. Voir dans Carini, dans le Manuale biblico, t. i, p. 275-280, la description minutieuse de plusieurs éditions de Malherbi qui lui tombèrent sous les yeux, de 1477, 1481, 1484, 1487, 1490, etc. L'édition de 1490 a une importance particulière, parce qu’on dit (Carini, p. 277 n.) que les dessins dont elle est ornée proviennent de BellinietSandroBotticelli. Ils sont, en effet, remarquables. Voir l’exemplaire de la Nationale de Florence, passim, et fig. 188 (dans Mùntz, Histoire de l’art pendant la Renaissance, 1. 1, 1889, p. 10), la reproduction d’un de ces dessins qui représente Malherbi travaillant à son œuvre.

Au contraire, la Bible de Jenson, confusion de textes tout à fait disparates, qui ne représentaient bien ni les rédactions manuscrites du moyen âge, ni la nouvelle de Malherbi, et qui était remplie de fautes grossières, eut le sort qu’elle méritait ; on la mit de côté, et la première édition fut aussi la dernière. Comparée à la Bible de Malherbi, l'édition de Nicolô Jenson a néanmoins presque toujours le caractère d’un texte plus classique relativement à la langue (toscane) : les livres de Josué et des Juges se distinguent particulièrement de tous les autres par l'élégance et la pureté du langage, mais, dans l’ensemble, la Bible de Jenson, comme édition classique, laissé bien à désirer, et en général est inférieure même à l'édition de Wendelin, de Spire. Qu’on compare par exemple un verset quelconque (Tob., viii), selon les deux rédactions

Jenson : Alhora Tobia conforto la poncella : et disse allei : Leva su Sarrae pregiamo oggie dimanee posdomane. Impercio che in queste tre nocte sagiugneremo. Et passa ta la terza nocte saremo nel nostro malrimonio.

Malherbi : Alhora Thobias confortossi con la vergene et disseli : levati suso sarra et preghiamo Dio hogi et domane et l’altro di : imperho che in queste tre nocte ce iungeremo a dio : et passata la terza nocte saremo nel nostro matrimo Au xixe siècle, à l'époque de la renaissance des études du moyen âge et à un moment où les mss. des textes publics étaient encore peu connus, on crut bien faire en réimprimant la Bible Jensonienne devenue très rare et regardée alors comme un précieux monument de. la

langue italienne du xrv » siècle » Une tentative de réimpression fut faite, dans la première moitié du xix » siècle, à Venise, par la Société vénitienne des bibliophiles. Elle chargea de l'édition deux personnes bien préparées à cette tâche, Berlan et De Andreis. Mais l’impression n’alla pas plus loin que Deutéronome, xxix, par suite de difficultés faites par la curie patriarcale : Bïbbia volgare, testa di lingua seconda l’edizione del Ï471 di Nicolo Jenson, per cura ed a spese délia Société Venela dei bibliofili, gr. in-8°, Venise, 1846, 624 p. Elle est devenue une vraie rareté bibliographique, parce que tous les exemplaires en furent détruits en librairie. Plus tard, l’idée fut reprise par le sénateur Charles Negroni, de Novare, de l’Académie de ïa Crusca, au sein de la Commission royale pour les textes de langue dans les provinces de l’Emilie, et cette fois-ci avec succès ! Dans l’espace de quelques années la Bible de Jenson, si négligée pendant des siècles, parut en dis volumes, com 187. — Nicold Malherbt traduisant la Bible. Reproduction d’une gravure de 1490.

prenant à côté du texte italien celui de la Vulgate latine : La Bïbbia volgare, secondo la rara edizione del t° di ottobre mcccclxxi, ristapipata per cura di Carlo Negroni, 10 in-8°, Bologne, 1882-1887 ; les huit premiers volumes sont consacrés à l’Ancien Testament ; ils font partie de la Collezione di opère inédite o rare dei prinii tre secoli délia lingua, pubblicata per cura délia R. Commissione pe' testï di lingua nelle Provincie dell' Emilia. Cf. S. de Benedetti, L’Antico Testarrientoe la lelteratura italiana, Pise, 1883 ; Sopra la ristampa délia Bibbia volgare procurata da C. Negroni, Florence, 1389 ; G. Tortoli, Elogio di Carlo Negroni (fl896), dans les À tti délia R.Accademia délia Crusca, Florence, 1900. La Bible réimprimée par Negroni est précédée d’une longue et savante introduction de l'éditeur, dans laquelle il met en parallèle les deux Bibles deMalherbi et de Jenson, décrit celle-ci et l’exemplaire qui lui sert de source pour son édition, parle de l’auteur probable de la version, des mss. bibliques en langue vulgaire existant dans tes bibliothèques d’Italie, et de la méthode suivie dans la reproduction orthographique du texte jensonien. Mais la Bible de Jenson ne méritait guère les honneurs d’une réimpression. Nous avons constaté qu’en réalité, loin d'être un monument de littérature classique, elle n’est en grande partie qu’une reproduction de l'œuvre de Malherbi, et que celle-ci est elle-même un mauvais remaniement de la version du xiir 3 siècle.

X. BOTTIONS PARTIELLES LE LA BIBLE ITALIENNE LU

moyen AGE. — Epistole, lezioni et Evangeli, Venezia, per Cristoforo Arnoldo, 1472. Plusieurs autres éditions des Evangiles et des Épitres (le la messe parurent à Venise et à Florence au xve siècle (cf. Carini, dans F. Vigouroux, Manuale biblico, t. i, p. 286) ; — Vangelio di S. Giovanni, Firenze, monastero di Ripoli, 1460 (cf. Follini, Annali délia tipografia di Ripoli) ; — Apocalypsis Jesu Christi… in lingua volgare composta per


Fraie Federico da Venezia (en 1334), Venise, 1515, etc. ; — Psalterio de David, Venise, 1476 ; plusieurs éditions ; quelques autres éditions partielles de la Bible sont sans importance, comme celle des Psaumes pénitentiaux, cf. Carini, p. 282 ; — Volgarizzamento di Vangeli (extraits liturgiques), testa di lingua, par E. Cicogna, Venise, 1823 ; réimprimé à Parme, 1840 ; — I quattro Evangeli, par A. Rossi, dans ses Ricerche per le Biblioteche, Pérouse, 1859 ; l'édition n’alla pas au delà du chapitre x de saint Matthieu ; — Estratti di Vangeli, par F. di Mauro, dans le Propugnatore (Bologna), 1869 (Matth., i-vn) ; 1871 (Marc, i-iv) ; 1874 (Joa., xviii-xxi) ; — Contemplazioni sulla Passione di N. S. Jesu Christo (Évangiles et Épltres de la semaine sainte), par F. de Romanis, Rome, 1834 ; autre édition par F. de Angelis, Rome, 1846 ; — Passione di N. S. (en dialecte véronais), par C. Giuliari, dans le Propugnatore, 1872 ; — Volgarizzamento degli Atti degli Apostoli, di fra D. Cavalca, Florence, 1837 ; Parme, 1842 (par B.Puoti) ; Milan, 1847 (par F. Curioni), Milan, 1887 (par B. Ponsi, qui s’est servi d’une édition florentine de 1769), dans là Biblioteca scelta di opère italiane, t. 438 ; — Atti degli Apostoli ed Apocalisse, 1834 ; — La Epistola agli Efesini, par B. Sorio, Vérone, 1848 ; par C. Del Re, Florence, 1851 ; par L. Bencini, Florence, 1851 ; par A. Toti, Sienne, 1870 ; — La Leltera di S. Paolo ai Galali, par B. Sorio, Vérone, 1861 ; — Epistola di S.Paolo a Filenlone, Sienne, 1853 ; — Epistola caltolica di S. Jacopo, par P. Pessuti, Venise, 1859 ; par G. ïurrini (avec les chap. m et iv de saint Jean), Bologne, 1863, dans la Scelta di curiosité letterarie, t. xxx (nouvelle édition, à Vérone 1869) ; — L' Apocalisse, par

F. Nesti, Florence, 1834 ; par F. Berlan, Pistoie, 1842 ; par G. Breschi, Pistoie, 1842 ; par A. Miola, dans le Propugnatore, 1880 et 1884 ; — Serto di fiori (Judic, xi et xii), par F. Zambrini, Imola, 1882 ; — Volgarizzamento del libro di Ruth, par M. Vannucci, Lucques, 1829 ; — Passione di San Job, par Bekker, dans Berichte der k. Acad. der Wissenschaflen zu Berlin, 1851 ; par F. Zambrini, dans Miscellanea di Prose, Imola, 1879 ; — 1 selle Salmi penitenziali, par F. Fanfani, Florence (Il Borghini, t. I), 1863 ; — I Proverbi, par G. Bini, Florence, 1847 ; par P. Fanfani, Florence, 1865 ; — Il libro dell’Ecclesiaste, par F. Frediani, Naples, 1854 ; — Lamentazioni di Geremiae Cantico dei cantici, par G. Turrini, Bologne, 1863 (Scelta di cur. lett., t. xxxii) ; — Il Cantico dei cantici, par P. Ferrato, Venise, 1868 ; autre édition de 40 exemplaires, Mantoue, 1876 ; — Storia di Tobia, par G. Poggiali, Livourne, 1799 ; par A. Cesaiï, dans ses Vies des saints Pères, Vérone, 1799 ; par M. Vannucci, Milan, 1825 ; par G. Manuzzi, Florence, 1832 ; par A. Miola, dans le Propugnatore, 1887 ; — I libri di Tobia, di Giudittae di Ester, par F. Berlan, Venise, 1844 ; — Miracolo di Susanna, par Razzolini, Florence, 1852 ; — Storia délia reina Ester, par F. Zambrini, Bologne, 1864 (Scelta di cur. lett., disp. xliii). Voir Zambrini, Le opère volgarï a stampa dei secoli XIIIe xiv, Bologne, 1866 (nouvelles éditions en 1878 et en 1884, avec appendice). Des extraits de la Bible de Jenson, d’après Negroni, et spécialement des passages des Évangiles, ont été réédités en 1900-1901 par le professeur

G. M. Zampini avec des commentaires.

II. La Bible italienne a l'époque de la réforme. — La Réforme, qui se faisait au nom de la Bible, inspira de nouvelles versions.

I. version de brïïcioli.

Antoine Brucioli, ou Bruccioli, naquit à Florence vers la fin du xve siècle. Très jeune encore il fréquenta les célèbres réunions philosophiques et littéraires des Orti oricellari (cf. Bandini, Spécimen literat. florent^, t. ii, p. 87) et fut en relations étroites avec Bernardo Rucellai, Luigi Alamanni, et surtout Machiavel dans tonte sa gloire. Il devint vite un des plus ardents fauteurs de la liberté florentine, opprimée, far 1$ tyrannie oligarchique des Médicis. Après la mort

III. -33.

de Léon X, il prit part au complot de Luigi Âlamanni contre le cardinal Jules de Médicis (1522), le futur Clément VII ; mais la conspiration ayant été découverte, il prit la fuite, et se retira en France. Il retourna à Florence en 1527, après la chute du pouvoir des Médicis. Il revenait imbu des idées de la réforme ; il ne cessait , de parler contre le clergé et le catholicisme, de telle sorte que les Huit de la Seigneurie durent le mettre au ban du domaine florentin. Cf. Varchi, Storia fiorenlina, 1. vin. Il alla habiter chez ses frères imprimeurs, à Venise, où l’on jouissait alors d’une liberté de presse et de pensée, presque sans bornes ; là, il se donna tout entier aux études philosophiques et littéraires, entra en relations avec les hommes de lettres de Venise, parmi lesquels se distinguait alors le fameux libelliste et comédien Pierre Arétin. Avec les presses de ses frères, il publia plusieurs ouvrages ; mais ce qui l’a rendu célèbre, c’est surtout sa nouvelle version de la Bible. Il l’avait commencée du temps qu’il demeurait à Florence, vers 1528 ; mais il en avait conçu sans doute le projet en France. Quoi qu’il en soit, C’est à Venise seulement qu’il put la continuer, l’achever et l’imprimer, afin de propager en Italie la pensée de la réforme, comme Luther l’avait fait en Allemagne.

Le Nouveau Testament sortit le premier des presses de Lucantonio Giunti, en 1530, précédé d’une lettre dédicatoire au cardinal de Mantoue, Ercole de Gonzaga : Il Nuovo Testamento di Cristo Jesu Signoree Salvador nostro, di greco nuovamente tradotto in lingua toscana per Antonio Brucioli. Épigraphe : Predicate l’evangelo (Marco xvi). À la fin : impresso in Vinegia… nel niese di maggio 1530. Il fut réimprimé en 1532 et 1536 (Anvers, au lieu de Venise), en 1544 (dédié à la duchesse de Florence, Éléonore de Tolède), en 1548 (dédié au cardinal de Ferrare, Hippolyte d’Esté), en 1550 (à Lyon), en 1552 (dédié au cardinal de Tournon, archevêque de Lyon), etc. — En 1531, le même célèbre imprimeur florentin publia la version des Psaumes, par Brucioli : Psalmi di David nuovamente dalla Hebraica yerità tradotti in lingua toscana per A. B. Réimprimés plusieurs fois après (l'édition de 1534 est dédiée à Alphonso d’Avalos d’Aquino, marchese del Vasto), L’année d’après, la Bible entière dans la nouvelle traduction on toscan, sortit des mêmes presses, avec une lettre dédicatoire d’Antoine Brucioli à François Ier, roi de France : La Bibbia, quale contiene i Sacri libri del V. T. Tradotti nuovamente da la hebraica verità in lingua toscana per A. B. Coi divini libri del N. T. Tradotti di greco in lingua toscana pel medesimo, in-f°. Cette version fut réimprimée plusieurs fois, les années suivantes ; le traducteur enrichit' son ouvrage de notes et de commentaires, qui furent publiés dans les éditions de 1540 à 1545. Voir I. Carini, dans le Manuale Biblico, t. i, p. 291-298, la description détaillée de plusieurs de ces éditions, avec ou sans commentaires. On fit aussi des éditions séparées des livres des Proverbes (1533), de Job (1534), de l’Ecclésiaste (1536), d’Isaïe (1537), du Cantique (1538, peut-être après quelques éditions), des Actes et de l’Apocalypse (1537), des Évangiles des dimanches et des fêtes (1539), des Épitres de saint Paul (1541-1558), de l'Épitre aux Romains (1545). La Bihle de Brucioli, avec ou sans commentaires, fut donc reproduite fréquemment, en partie ou en entier, dans la première et aussi dans la seconde moitié du xvie siècle, particulièrement durant la vie de l’auteur. Mais fut-elle véritablement Une version directe de l’hébreu ou du grec, comme le veulent les titres des éditions ? Il est probable que Brucioli a eu en France, à Lyon, et particulièrement à Florence et à Venise, l’occasion d'étudier les langues sacrées ; Florence était un centre de la culture grecque en Italie ; tandis que Lyon et Venise étaient peut-être les villes d’Europe les plus, fréquentées par les Juifs et leurs rabbins. En effet, l' Arétin, son ami, lui écrivait en

1537 qu’il était « un homme sans égal dans la connaissance des langues hébraïque, grecque, latine et chaldéenne », De même, le célèbre bibliothécaire de la Laurentienne, Bandini, le dit « homme d’un grand talent et savant dans plusieurs langues ». On peut ainsi justifier, jusqu'à un certain point, le témoignagne provenant de Brucioli lui-même, qu’il a traduit la Bible d’après le grec et l’hébreu. J’ai dit « jusqu'à un certain point », parce que Richard Simon, Histoire critique des versions da N. T., c. xl, a constaté que cet ouvrage ne dénotait pas une profonde connaissance de ces langues : au contraire, cette version dépend souvent d’une manière servile de la traduction interlinéaire de Santé Pagnino, . faite sur le texte hébreu et publiée en 1528, et de celle d'Érasme pour le grec du Nouveau Testament. Il semble donc que Brucioli n’avait de ces langues qu’une connaissance superficielle, et il dut ainsi s’aider de préférence des versions littérales contemporaines. On parle d’un rabbin, Élie, qui lui servit d’interprète pour traduire d’une façon exacte quelques passages de l’Ancien Testament. Cf. E. Comba, Storia délia riforma in Italia^ Florence, 1881, t. i, p. 524. En somme, Brucioli fit une œuvre plus protestante que catholique. Cela ressort clairement du caractère même de sa version, qui contrairement aux autres versions, jusque-là publiées en Italie, était directement tirée des textes originaux, sans tenir compte de là Vulgate latine, et par cela même elle reste si attachée à la lettre hébraïque, qu’elle devient obscure, et n’a presque aucune valeur littéraire. Mais ce qui révèle ericore plus l’intention protestante de cet ouvrage, c’est le large commentaire théologique que Brucioli y ajouta dans plusieurs éditions après 1540 ; ici la façon de parler et de penser du christianisme, du culte extérieur et de la Bible, né diffère presque en rien du langage des réformateurs. Même les lettres dédicatoires trahissent quelquefois l’idée de l’auteur, par exemple celle qu’il adresse en 1540 à Renée de France, duchesse de Ferrare, élève de Calvin et ouvertement favorable à la réforme. Il né faut donc pas s'étonner si Brucioli fut regardé, même par ses amis, comme un hérétique et un luthérien, et si après sa mort il fut condamné comme tel par plusieurs historiens. Cependant, jamais il n’abandonna la communion de l'Église catholique, il dédia maintes éditions de son ouvrage à des Cardinaux ou à des archevêques, et en 1551 il fit même présenter saBible au pape. Cf. Lettere di diversi scritte all’Aretino, t. ii, p. 412 ; t. v de l'édition avec commentaires, 1542. On ne connaît pas la date précise de sa mort. Sa version ne pouvait manquer d'être condamnée par l'Église. Elle figure dans l'édition de l’Index du pape Paul IV, publiée en 1559 par le célèbre imprimeur Antoine Blado. Jusqu’alors les éditions' de cette traduction avaient été nombreuses et très répandues dans la haute Italie ; après l’interdiction, on cessa de l’imprimer. Néanmoins, en 1562^ une nouvelle édition parut à Genève, pour l’usage des protestants italiens réfugiés dans cette ville. Elle avait été corrigée et retouchée par Filippo Rustici, de manière à en supprimer les hébraïsmes trop durs, qui la rendaient obscure et presque inintelligible : La Biblia… nuovamente trad. in lingua volgare… con moite et utili annotazionie figuree carte, etc. Quanto al N. T. è stato rivedutoe ricorretto… con una semplice dichiaratione sopra l’Apocalisse. Stanxpato appresso Francesco flurone, l’anno m.d.lxii, petit in-f ».

II. autres rBasiorrs du xvp. siècle. — Le contrecoup de la réforme luthérienne et la réaction catholique produisirent un certain nombre de versions totales ou partielles de la Bible en Italie. Il en parut plusieurs au xvie siècle, plus ou moins dépendantes de celle de Brucioli.'Une nouvelle version de toute la Bible parut à Venise en 1538, par le Père Santé Marmochino, des frères prêcheurs. Ce dominicain demeurait à Florence dans le célèbre couvent de Saint-Marc, et jouissait parmi ses contemporains d’une grande renommée

omme historien, mathématicien, théologue, archéologue,

helléniste et hébraïsant. Il fut professeur d’hébreu i Padoue et à Venise. Il mourut en 1545. V. Negri, Scrittori fioreniini, Ferrare, 1722, p. 490 ; Quélif-Échard, Script, ord. Prsedicatorum, t. ii, p. 124-125. 30n nom ne nous a été conservé que grâce à cette version de la Bible : La Biblia nuovaniente tradotta dalla kebraica venta in lingua thoscana per Mæstro Santi Marmochino fiorentino, Venise, mdxxxviii, in-f". Mais,

i l’on compare la version de Marmochino avec celle de

Brucioli, on est vite convaincu que, loin d’être un outrage original composé directement sur les textes hébreu 3u grec, il n’est qu’un remaniement de l’œuvre de Brucioli, corrigée et retouchée de manière à rendre plus fidèlement la pensée de la Vulgate latine. On explique jinsi comment le P. Marmochino put achever son ouvrage en moins de deux ans, comme il l’affirme. Cette rersion eut une seconde édition en 1545 où 1546. Un » utre frère prêcheur du même couvent à Florence, le ïère Zaccaria, publia en 1536 une version du Nouveau Testament grec, en langue toscane, dépendante aussi de Brucioli ou de Marmochiïio ; elle n’a aucune valeur scientifique : Il N. T. tradotto in lingua Toscanà dàl R. P. Fra Zaccheria, per L. A. Giunti, Venise, 1536, n-8°.

Vers la moitié du xvie siècle, plusieurs versions anonymes du Nouveau Testament parurent à Venise, à Lyon et à Genève, pour servir à la lecture privée ou mblique des protestants italiens réfugiés à l’étranger. Le célèbre littérateur Castelvetro passe pour avoir com)osé vers ce temps-là une version du Nouveau Testanent ; mais nous ne sachons pas qu’elle ait été jamais mprimée. Comba, Storia, t. i, p. 530 ; A. Muratori, Ipere varie de Lodovico Castelvetro, Lyon, 1727, p. 47. Jne autre version du Nouveau Testament, publiée dans

e même temps, est due à un moine bénédictin de Floence, Massimo Teofilo. Il y montra une connaissance

lu grec, telle qu’on n’en pouvait pas alors posséder une neilleure, et son ouvrage est remarquable. Dédiée à r rançois de Médicis, cette version porte cependant des races d’une tendance protestante, particulièrement dans es "notes à la fin du volume ; Cf. Rosenmûller, Hand<uch fur die Literatur der biblischen Kritik und Exewse, Gœttingue, 1800, t. iv. — En 1555, parut à Genève ine version du Nouveau Testament, par Jean-Louis Pasale, qui toutefois se donne comme éditeur et non comme uteur de la traduction : Del N. T. de Jesu Christo nosro Signore ; nuovae fedel traduttione dal testo greco n lingua volgare italiana… fuggendo sempre ogni anae indegna affettazione d’importunie malconvelienti toscanismi, per Giovan Luigi Pascale, mdlv. Cn 1551, Jean François Virginio de Brescia publia à ijon une. Parafrasi sopra le epistole ai Romani, Gaatî ed Ebrei, dédiée à Renée, duchesse de Ferrare. Pluieurs de ces éditions lyonnaises furent publiées par’imprimeur Guillaume Rouille.

Pendant le même xvi » siècle, surtout dans la seconde aoitié, un certain nombre de versions partielles furent mbliées avec ou sans commentaires ; elles n’ont pas de aleur scientifique et religieuse, et offrent rarement [uelque importance littéraire. Il suffira de îles noter ans leur donner plus d’attention. Ces versions avaient our but de satisfaire la piété des fidèles : aussi ce sont n général des traductions du Psautier ou bien des sept’saumes de la pénitence. Je n’ai rencontré, en dehors u Psautier, qu’une version de la Genèse, par Pierre xétin (1539), et deux versions de l’Ecclésiaste, par David e Pomi (Venise, 1571), et par Giovanni Francesco da’orro, jointe au Psautier (Venise, 1536 ( ?), 1548). Une ersion des Évangiles et Épitres des dimanches et fêtes ît publiée en 1578 par Francesco de’Catani da Diacceto, hanoine du Dôme de Florence, mort évêque de Fiesole,

en 1595, et une autre en 1575 par le frère Remigio Nannini, qui traduisit aussi les Psaumes. Les versions des. Psaumes sont assez nombreuses. En 1524, une traductionnouvelle fut publiée par Lodovico Pittorio à Bologne ; par Giovan Francesco da Pozzo, en 1548, à Venise, directement sur l’hébreu ; par Pellegrino Neri, en 1573 ; par B. Mariscotti, en 1573 ; une version anonyme de l’hébreu, , en 1583 ; une autre par le célèbre historien de Florence, Scipione Ammirato ; une autre anonyme en huitains, en 1583 ; en 1584, par David d’Angelico Buonriccio ; par Flaminio Nobili, en 1590 ; par G. C. Pascali, en vers, en 1592 ; et, en 1593, une autre en prose par le célèbre prédicateur Francesco Panigarola. Des sept Psaumes de la pénitence on connaît les versions de Pierre Arétin, en prose ; de Jeronimo Benivieni (1505), en terze rime ; de L. Alamanni, Adimari et Capponi, en vers ; de la célèbre poétesse d’Urbin Laura Battiferra degli Ammannati, en 1564 ; une version en vers par différents auteurs, en 1572 ; une paraphrase par Scipione di Manzano ; enfin, en 1604, une version envers, de MatteoBaccellini, publiée à Paris. 777. version de DiODATi. — D’une famille protestante de Lucques, passée alors à Genève, naquit le 6 juin 1576 Giovanni Diodati, le célèbre traducteur de la Bible. Il s’adonna de bonne heure à l’étude des sciences religieuses et des langues sacrées, et y fit de si grands progrès, que Théodore de Bèze le fit professeur de langue hébraïque, quand il avait à peine 21 ans. Il se mit aussitôt à composer une nouvelle version de la Bible en Italien, et il la publia tout entière, en 1607, avec des notes : La Bibbia, cioè 1 libri del Vecchioe del N. T. nuovaniente traslatati in lingua italiana da Giovanni Diodati di nation luccltese. In Gineva, appresso Gio. di Tornes, mdc. vu. In-f°. Le Nouveau Testament fut réimprimé à Genève en 1608, et en 1665 à Amsterdam. Agrégé comme pasteur, , en 1608, Diodati fut chargé, l’année d’après, de professer la théologie à l’Université même de Genève. U alla quelquefois à Venise et il eut, dit-on, de longs entretiens avec l’historien du Concile de Trente, Paul Sarpi, dans le but d’introduire en Italie une sorte de réforme protestante, comme l’aurait voulu peut-être le célèbre théologien de la République. En 1641, Diodati ajouta à une nouvelle édition de sa version de copieux Commentaires théologiques i La Sacra Bibbia tradotta in lingua italiana, ecommentata da Giovanni Diodati, di nation lucchese. Seconda editione, migliorata ed accresciuta, con Vag~ giunta de sacri Salmi, messi in rime per lo medesimo. Stampata in Geneva per Pietro Chovet, m. dc. xli. Eh 1644, Diodati publia une traduction française de la Bible travaillée sur sa même édition italienne : cette version est d’une médiocre valeur. La Bible de 1641 fut reproduite, en 1744, par le typographe J. D. Mùller, à Leipzig. A Genève, il était en grande considération ; déjà, en 1618, l’Eglise protestante de cette ville l’avait chargé de la représenter au congrès religieux de Dordrecht, où il dicta le texte des délibérations prises par cette fameuse assemblée. Il occupa la chaire de théologie jusqu’à l’âge de 69 ans ; et mourut en 1C49. Sa version est une œuvre remarquable au point de vue scientifique et littéraire. Incontestable est sa compétence pour l’Ancien comme pour le Nouveau Testament, car il connaissait à fond, l’hébreu et le grec, non moins que l’italien et le latin. Il est vrai qu’il ne tient pas compte de la Vulgate ; toutefois, il s’éloigne assez rarement du sens donné par saint Jérôme au texte hébreu, et, quand il le fait, c’est sciemment. Ainsi dans la version du texte grec du Nouveau Testament, il ne s’éloigne de la Vulgate que dansquelques passages d’importance théologique pour les protestants contemporains. Dans les Psaumes naturellement se manifeste une plus grande différence d’avec la Vulgate latine, parce qu’il traduitdirectement sur l’hébreu, , tandis que le latin n’est qu’une simple version dés Septante. En omettant dans sa version quelques livres bibliques, Diodati ne lit que suivre lès idées protestantes a

parmi ses contemporains d’une grande renommée comme historien, mathématicien, théologue, archéologue, helléniste et hébraïsant. Il fut professeur d’hébreu à Padoue et à Venise. Il mourut en 1545. V. Negri, Scrittori fiorenlini, Ferrare, 1722, p. 490 ; QuétifÉchard, Script, ord. Prxdicatorum, t. ii, p. 124-125. Son nom ne nous a été conservé que grâce à cette version de la Bible : La Biblia nuovamente tradotta dalla hebraica veritâ in lingua thoscana per Mæstro Santi Marmochino fiorentino, Venise, mdxxxviii, in-f ». Mais, si l’on compare la version de Marmochino avec celle de Brucioli, on est vite convaincu que, loin d'être un ouvrage original composé directement sur les textes hébreu ou grec, il n’est qu’un remaniement de l'œuvre de Brucioli, corrigée et retouchée de manière à rendre plus fidèlement la pensée de la Vulgate latine. On explique ainsi comment le P. Marmochino put achever son ouvrage en moins de deux ans, comme il l’affirme. Cette version eut une seconde édition en 1545 ou 1546. Un autre frère prêcheur du même couvent à Florence, le frère Zaccaria, publia en 1536 une version du Nouveau Testament grec, en langue toscane, dépendante aussi de Brucioli ou de Marmochi"no ; elle n’a aucune valeur scientifique : Il N. T. tradotto in lingua Toscana dal R. P. Fra Zaccheria, per L. A. Giunti, Venise, 1536, in-8°.

Vers la moitié du xvie siècle, plusieurs versions anonymes du Nouveau Testament parurent à Venise, à Lyon et à Genève, pour servir à la lecture privée ou publique des protestants italiens réfugiés à l'étranger. Le célèbre littérateur Castelvetro passe pour avoir composé vers ce temps-là une version du Nouveau Testament ; mais nous ne sachons pas qu’elle ait été jamais imprimée. Comba, Storia, t. i, p. 530 ; A. Muratori, Opère varie de Lodovico Castelvetro, Lyon, 1727, p. 47. Une autre version du Nouveau Testament, publiée dans ce même temps, est due à un moine bénédictin de Florence, Massimo Teofilo. Il y montra une connaissance du grec, telle qu’on n’en pouvait pas alors posséder une meilleure, et son ouvrage est remarquable. Dédiée à François de Médicis, cette version porte cependant des traces d’une tendance protestante, particulièrement dans les notes à la fin du volume. Cf. Rosenmùller, Handbuch fur die Literatur der biblisclien Krilik und Exégèse, Gœttingue, 1800, t. iv. — En 1555, parut à Genève une version du Nouveau Testament, par Jean-Louis Pascale, qui toutefois se donne comme éditeur et non comme auteur de la traduction : Del N. T. de Jesu Christo nostro Signore ; nuovae fedel traduttione dal teslo greco in lingua volgare italiana… fuggende sempre ogni vanae indegna affettazione d’importunie malconvenienli toscanismi, per Giovan Luigi Pascale, sidlv. En 1551, Jean François Virginio de Brescia publia à Lyon une Parafrasi sopra le epistole ai Romani, Galati ed Ebrei, dédiée à Renée, duchesse de Ferrare. Plusieurs de ces éditions lyonnaises furent publiées par l’imprimeur Guillaume Rouille.

Pendant le même xvi » siècle, surtout dans la seconde moitié, un certain nombre de versions partielles furent publiées avec ou sans commentaires ; elles n’ont pas de valeur scientifique et religieuse, et offrent rarement quelque importance littéraire. Il suffira de les noter sans leur donner plus d’attention. Ces versions avaient pour but de satisfaire la piété des fidèles : aussi ce sont en général des traductions du Psautier ou bien des sept Psaumes de la pénitence. Je n’ai rencontré, en dehors du Psautier, qu’une version de la Genèse, par Pierre Arétin (1539), et deux versions de l’Ecclésiaste, par David de Pomi (Venise, 1571), et par Giovanni Francesco da Porro, jointe au Psautier (Venise, 1536 (?), 1548). Une version des Évangiles et ÉpHres des dimanches et fêtes fut publiée en 1578 par Francesco de' Catani da Diacceto, chanoine du Dôme de Florence, mort évêque de Fiesole,

en 1595, et une autre en 1575 par le frère Remigio Nannini, qui traduisit aussi les Psaumes. Les versions des. Psaumes sont assez nombreuses. En 1524-, une traduction nouvelle fut publiée par Lodovico Pittorio à Bologne ; par Giovan Francesco da Pozzo, en 1548, à Venise, directement sur l’hébreu ; par Pellegrino Neri, en 1573 ; par B. Mariscotti, en 1573 ; une version anonyme de l’hébreu, en 1583 ; une autre par le célèbre historien de Florence, Scipione Ammirato ; une autre anonyme en huitains, en 1583 ; en 1584, par David d’Angelico Buonricciojpar Flaminio Nobili, en 1590 ; par G. C. Pascali, en vers, en 1592 ; et, en 1593, une autre en prose par le célèbre prédicateur Francesco Panigarola. Des sept Psaumes de la pénitence on connaît les versions de Pierre Arétin, en prose ; de Jeronimo Benivieni (1505), en terze rime ; de L. Alamanni, Adimari et Capponi, en vers ; de la célèbre poétesse d’Urbin Laura Battiferra degli Ammannati, en 1564 ; une version en vers par différents auteurs, en 1572 ; une paraphrase par Scipione di Manzano ; enfin, en 1604, une version envers, deMatteoBaccellini, publiée à Paris. /II. VEtisiON DE diodati. — D’une famille protestante de Lucques, passée alors à Genève, naquit le 6 juin 1576 Giovanni Diodati, le célèbre traducteur de la Bible. Il s’adonna de bonne heure à l'étude des sciences religieuses et des langues sacrées, et y fit de si grands progrès, que Théodore de Bèze le fit professeur de langue hébraïque, quand il avait à peine 21 ans. Il se mit aussitôt à composer une nouvelle version de la Bible en Italien, et il la publia tout entière, en 1607, avec des notes : La Bibbia, cioè 1 libri del Vecchioe del N. T. nuovamente traslatati in lingua italiana da Giovanni Diodati di nation lucchese. In Gineva, appresso Gio. di Tomes, une. vu. In-f ». Le Nouveau Testament fut réimprimé à Genève en 1608, et en 1665 à Amsterdam. Agrégé comme pasteur, , en 1608, Diodati fut chargé, l’année d’après, de professer la théologie à lUniversité même de Genève. Il alla quelquefois à Venise et il eut, dit-on, de longs entretiens avec l’historien du Concile de Trente, Paul Sarpi, dans le but d’introduire en Italie une sorte de réforme protestante, comme l’aurait voulu peut-être le célèbre théologien de la République. En 1641, Diodati ajouta à une nouvelle édition de sa version de copieux commentaires théologiques : La Sacra Bibbia tradotta in lingua italiana, e commentata da Giovanni Diodati, di nation luccltese. Seconda edilione, migliorata ed accresciuta, con l’aggiunta de sacri Salmi, messi in rime per lo medesimo. Stampata in Geneva per Pielro Chovet, sr. De. XLI. En 1644, Diodati publia une traduction française de la Bible travaillée sur sa même édition italienne : cette version est d’une médiocre valeur. La Bible de 1641 fut reproduite, en 1744, par le typographe J. D. Mûller, à Leipzig. A Genève, il était en grande considération ; déjà, en 1618, l’Eglise protestante de cette ville l’avait chargé de la représenter au congrès religieux de Dordrecht, où il dicta le texte des délibérations prises par cette fameuse assemblée. Il occupa la chaire de théologie jusqu'à l'âge de 69 ans ; et mourut en 1649. Sa version est une œuvre remarquable au point de vue scientifique et littéraire. Incontestable est sa compétence pour l’Ancien comme pour le Nouveau Testament, car il connaissait à fond l’hébreu et le grec, non moins que l’italien et le latin. Il est vrai qu’il ne tient pas compte de la Vulgate ; toutefois, il s'éloigne assez rarement du sens donné par saint Jérôme au texte hébreu, et, quand il le fait, c’est sciemment. Ainsi dans la version du texte grec du Nouveau Testament, il ne s'éloigne de la Vulgate que dans quelques passages d’importance théologique pour les protestants contemporains. Dans les Psaumes naturellement se manifeste une plus grande différence d’avec la Vulgate latine, parce qu’il traduitdirectement sur l’hébreu, tandis que le latin n’est qu’une simple version des Septante. En omettant dans sa version quelques livres bibliques, Diodati ne lit que suivre les idées protestantes,

de son temps. Au point de vue littéraire, la version de Diodati mérite de grands éloges. La langue est bonne et élégante ; le style soigné, et on doit seulement lui reprocher la fréquence de ces longues liaisons entre les phrases et les périodes, qui donnent l’illusion d’un langage solennel. Il faut se rappeler cependant que Diodati composait sa traduction de la Bible au xvii » siècle, en pleine décadence littéraire de l’Italie. La version de Diodati est encore la Bible officielle des protestants italiens, réimprimée plusieurs fois dans les siècles passés, et répandue dans un grand nombre d'éditions totales ou partielles à des milliers et milliers d’exemplaires, par la Société biblique d’Angleterre et par les imprimeries protestantes d’Italie, particulièrement à Florence par le collège des Vaudois. Carini, dans le Manuale biblico, t. i, p. 302. L’imprimerie Barbera, de Florence, a publié de nouveau, en 1880, l'édition de 1641, contenant, à côté du texte italien, les commentaires théologiques du traducteur.

IV. VERSIONS BIBLIQUES DES XVIP ET XVIII" SIÈCLES.

— La réforme vaudoise et allemande ayant pris la Bible en langue vulgaire comme son unique autorité religieuse, l'Église catholique dut se préoccuper des ravages que la lecture de la Bible, indifféremment permise à tout le monde, faisait parmi le peuple. Toutefois le Concile de Trente ne jugea pas nécessaire de défendre la lecture de la Bible en langue vulgaire, qui avait été jusqu’alors la.nôurriture spirituelle des chrétiens. Mais dans la suite des temps on finit par se convaincre qu’en réalité la lecture de la Bible en langue vulgaire ne faisait qu’accroître chaque jour parmi le peuple les adhérents à la réforme protestante. Pour ce motif on fut obligé, pour sauvegarder la foi catholique, de défendre absolument à tous la lecture de la Bible en langue vulgaire. Le pape Pie IV, en 1564, promulgua cette défense dans les règles de VIndex. On ne doit donc pas s'étonner si le xviie siècle ne nous donne pas un seul traducteur qui puisse être comparé à Diodati. Pendant près de deux siècles, le manque de versions bibliques en Italie fut absolu, et il suffira pour s’en convaincre de retracer ici les noms de quelques prétendus traducteurs aux xvii » et xvin » siècles. — Versions des Psaumes : A. Lomori, Davidde pénitente, Sienne, 1653 ; Davidde orante, Rome, 1663 ; — Mattei Loreto, 71 Salmista toscano, Macerata, 1671, en vers ; — Mattei Saverio, I libri poetici délia Bibbia, Naples, 1766, en vers ; son auteur dit « traduits de l’hébreu » ; une autre édition, Gênes, 1784, porte les seuls Psaumes adaptés à la musique ; c 'était bien le temps de Métastase ; — Capponi, Parafrasi poetica dei Salmi di Davide, del Sollecito, accademico délia Çrusca, Florence, 1682 ; — Cento salmi in rime italiane, avec musique, Gènes, 1683 ; — S. Conti, Salterio davidica, Bologne, 1696, en vers ; — Redi Gregorio, 1 Salmi di David, Florence, 1734, en vers ; — Abbé G. B. Vicini, I Salmi penitenziali, Carpi, 1755, en vers ; — Bracci, / Salmi davidici, Florence, 1769, en vers. — Livres de Job, Proverbes, etc. : G. M. Luchini, Le lezionidi Giobbe et il cantico di Ezechia, Lucques, 1731, en vers ; — G. Ceruti, Il libro di Giobbe, Turin, 1759, en vers ; l’auteur dit l’avoir traduit du texte hébreu ; — F. Bezzano, Jl libro di Giobbe, Roma, 1760, en huitains ; — M. de Talloni, Il libro di Giobbe vùlgarizzato in terza rima, Osimo, 1754 ; — G. M. Luchini, I Proverbi, Florence, 1733, en vers ; — B. Casa régi, I Proverbi, Florence, 1751, en vers ; — Vincenzio da S. Eraclio, J Proverbi di Salomone, Bologne, 1760, en vers ; — G. Vincioli, sous le nom de Leonte Prineo, L’Ecclesiaste di Salomone, Lucques, 1727, en vers ; — Pacchi Domenico, Jl libro délia sapienza, Lucques, 1777, en vers. — Cantique et Lamentations : G. Blanchini, La Cantica dei cantici, Venise, 1735, en vers ; — Cantica tradotta in versi anacreontici, Florence, 1786, par un auteur inconnu ; — N. Strozzi, Le Lamentazioni parafrasate, Rome, 1635 ; — Le Lamentazioni di Geremia, Piacenza, 1701,

paraphrase lyrique de l’académicien M. L ; — Menzini Benedetto, Lamentazioni di Gerem la espresse in terzarima ne' loro dolenti affetti ; tradotte in verso scioltoe : riformate dall' ebraico da Anton Maria Salvini, Florence, 1728 ; — P. Bossi, / treni di Geremia, il Cantio di Salomone, Salmi penitenziali, ecc., Padoue, 1745, en vers latins et italiens ; — F. B. Adami, I Cantici biblici ed allri Salmi con i treni di Geremia tradotti in versi da un accademico apatista, Florence, 1748 ; — F. M. Zampi, J Treni parafrasati, Venise, 1756, en vers. — Versions diverses : F. Lenci, La storia di Tobia tradotta dalla Vulgata da un accademico délia Crusca, Livourne, 1764 ; — Parafrasi délie Epistole di S. Paolo, Naples, 1766 ; etc.

III. Versions italiennes modernes.

Il y avait bien deux siècles que le peuple italien catholique ne lisait plus guère la Bible, lorsque le grand pape Benoit XIV jugea à propos, le 13 juin 1757, dé modifier les règles de VIndex et de permettre la lecture des versions de la Bible en langue vulgaire faites par des savants catholiques et approuvées par le saint-siège. Ce fut le point de départ d’une nouvelle série de versions italiennes de la Bible.

J. VERSION DE MARTINI ET VERSIONS CONTEMPORAINES. — 1° Antoine Martini naquit à Prato, petite ville près de Florence, en 1720. Il prit les ordres, et après avoir dirigé durant quatorze ans le collège ecclésiastique de Superga, à Turin, il fut obligé de le quitter pour cause de santé. Il fut nommé par Charles-Emmanuel III conseiller d'État avec une pension sur l’abbaye de SaintJacques-en-Besse. En promulguant le décret relatif aux versions de la Bible en italien, Benoit XIV avait exprimé à quelques cardinaux son très vif désir qu’un Italien, aussi savant que pieux, entreprit une nouvelle version de la Bible. Le cardinal Délie Lanze, de la maison de Savoie, qui avait plusieurs fois eu l’occasion d’apprécier le talent et le mérite de l’abbé Martini, lui fit connaître le désir du pape et le pressa de travailler lui-même à la nouvelle version biblique. Martini ne refusa pas ; il commença par l'étude du Nouveau Testament, fit de sérieuses recherches sur le texte grec comparé avec la Vulgate, et se mit à préparer la version et les notes. Mais l'état délicat de sa santé et les graves devoirs de ses fonctions l’empêchèrent d’aboutir tant qu’il fut recteur du collège de Superga. Il ne put avancer son travail qu’après avoir renoncé à la direction du collège. Mais les temps étaient alors changés ; Benoit XIV était mort, et l’on ne se montrait plus aussi favorable à son œuvre. Dans une lettre à son ami, le marquis Antoine Niccolini de Florence, datée de juillet 1761, Martini nous apprend lui-même qu’il avait terminé alors la traduction et les notes des deux Évangiles de saint Matthieu et de saint Marc. Mais il n’avait plus, dans le succès de son œuvre, la confiance d’autrefois ; il déclare ne pas savoir si un très haut personnage (sans doute le cardinal Délie Lanze) sera satisfait de son travail ; il y parle des anciennes versions italiennes de la Bible (Malermi, Brucioli) comme de raretés bibliographiques dont on n’a plus aucune connaissance précise ; c’est à peine s’il connaît par luimême la version de Diodati. Cependant il ne s’arrêta point et il acheva le Nouveau Testament dans les premiers mois de 1769 ; vers la fin de la même année, le premier volume parut à Turin ; il contenait les deux premiers Évangiles, et était dédié au roi Charles-Emmanuel de Savoie. La revision ecclésiastique avait été faite par le théologien Marchini, professeur d'Écriture Sainte à l’Université, et, sur son témoignage, le Père dominicain vicaire du saint-office à Turin et le président du collège des théologiens l’avaient approuvé. Certaines expressions de l’abbé Martini, dans ses lettres à ses amis, ' font entendre qu’il avait eu bien des difficultés dans son entreprise ; mais, quoiqu’il en soit, l’archevêque de Turin, dès que le premier exemplaire de l’ouvrage lui eut

été présenté, adressa à l’auteur une lettre de vive approbation. — Les autres parties du Nouveau Testament furent publiées les années suivantes, 1670-1671, le tout en six volumes. Pendant ce temps, l'œuvre de Martini avait rencontré, d’une part, l’accueil le plus favorable et, de l’autre, lui avait attiré des ennemis implacables qui faisaient tout pour l’empêcher de la continuer et même travaillaient à la faire condamner par le saint-office. Tout en s’efforçant d’obtenir l’approbation de Rome, Martini continua son œuvre. La fin du Nouveau Testament parut en 1771, et reçut du public le meilleur accueil, de sorte que l'édition fut promptement épuisée. Un même temps, on faisait à Naples, sans le consentement de l’auteur, une autre édition qui fut également vite épuisée. Aussi, en 1773, l’abbé Martini annonça-t-il qu’il allait faire une édition nouvelle, revue et corrigée, et qu’il allait aussi publier la version de l’Ancien Testament. Cette seconde édition du Nouveau Testament parut à Turin en six volumes, de 1775 à 1778. En 1776, il publia le premier volume de l’Ancien Testament contenant la Genèse, et en 1778, la fin du Pentateuque. Il était dédié au roi Victor-Amédée de Savoie et approuvé par le P. Hyacinthe Cattaneo, dominicain, professeur à l’Université du roi, par le vicaire général du saint-office, et par ie grand chancelier.

A la fin de 1777, le ministre du roi de Sardaigne à Home, le commandeur Graneri, avait présenté l’ouvrage de Martini, en cours de publication, au pape Pie VI. Le £aint-père lui fit adresser un bref d’approbation. Le 17 mars 1778, le souverain pontife déclarait que le "travail de l’auteur était conforme aux règles de l’Index et à la constitution de Benoit XIV, et il louait la doctrine et la piété de Martini. Celui-ci fit imprimer le bref en tète de son ix « volume, qui parut en août 1778.

Peu de temps après, les jansénistes de Toscane, voyant que la version de Martini avait été approuvée par le saint-siège, cherchèrent à se l’approprier, et ils en commencèrent une nouvelle édition avec des notes hérétiques. Le premier volume du Nouveau Testament parut au mois de mars 1779. Martini, indigné de cette altération de son œuvre, se hâta de protester, mais, malgré ses réclamations publiques, la publication du Nouveau Testament se continua. On commença aussi celle de l’Ancien, mais on ne l’acheva pas ; elle s’arrêta à Isaïe. En 1781, Martini avait été nommé archevêque de Florence, et, en 1784, il réussit enfin à en arrêter l’impression.

Dès que Martini fut sur le siège de Florence, il prit soin de faire une nouvelle édition de tout son travail ; elle fut publiée par l’imprimerie archiépiscopale, de 1782 à 1792. En 1783, il apprit qu’on allait faire à Rome une édition spéciale de sa version « .corrigée » parordre du maître du sacré palais, Thomas Mamachi. Martini s’empressa d’en référer au pape Pie VI, qui lui fit écrire par le P. Mamachi que lesdites « corrections » ne regardaient que des fautes d’impression.

Au point de vue littéraire, la version de Martini est remarquable par la pureté et l'élégance du langage toscan, et c’est à juste titre qu’on l’a mise parmi les lesti di lingua de l’académie de la Crusca (séance du 28 juillet 1885), mais elle n’a ni l'énergie ni la concision des textes originaux, et si l’auteur connaissait bien le grec, il ne possédait pas suffisamment l’hébreu, quoiqu’il se ïlt aidera Florence par un rabbin appelé Terni. Sa traduction n’en a pas moins rendu de grands services aux -catholiques italiens. C. L. Begagli, Biografia degli uomini iltustri, Venise, 1840, t. vi ; Orazione funerale de M9 r Martini par le chan. Longo de Florence ; C. Guasti, Storia aneddota del volgarizzamento dei due Teslatnenti fatto dalV ab. Antonio Martini, dans la Rassegna nationale de Florence, 16 septembre 1885, t. xxv, p. 235282. Voir aussi : Apotogia del brève del sonimo pontefice Pio VI, à MonsMartini, arcivescovo di Firenze, tmvcro dotlrina délia Chiesa sut leggere la S. Scriltura

in lingua volgare, Pavie, 1784. Cette brochure, qui est maintenant une rareté bibliographique, parut anonyme, mais Guasti confirme que son auteur s’appelait Joseph Tavelli.

2° À la même époque, les jansénistes d’Italie faisaient de grands efforts pour répandre leurs erreurs. Le fa » méux Ricci, évêque de Pistoie, fit publier, en 1786, une version du Nouveau Testament avec le commentaire de Quesnel : Il Nuovo Testamento, con riflessioni morali sopra ciascun versetto. [Tradotto dal francese, per commissions di Mons. Ricci, vescovo di Pistoid, Pistoie, 1786-1789, 6 inr8°. — On publia aussi alors à Gênes une version italienne de la grande Bible française de PortRoyal, dite de Sacy : H V, e il N. T. gitista la Volgatà in italianoe latino, per Luigi Isacco Le Maistre de Sacy, tradotto dal francese, Gênes, 1787-1892, 24 in-4°. Dans la première moitié du XIXe siècle, on publia aussi à Milan (1830-40, 18 in-8°) une version italienne de la Bible française dite de Vence, giusta la quinta, edizione del sig. Drach con nuove illustrazioni di Bartolommeo Catena. Mais la version de Martini éclipsa toutes les autres, et demeura seule la Bible des catholiques italiens.

11. VERSIONS DE DE ROSSI ET DE LVZZATTO. - 1°

Jean Bernard de Rossi, le célèbre critique de l’Ancien Testament hébreu (A. de Gubernatis, Matériaux pour servir à l’histoire des études orientales en Italie, Paris, 1876, p. 121), naquit à Castelnuovo, dans le district d’Ivrée en Piémont, en 1742. Il fut reçu docteur en théologie à l’Université de Turin en 1766, au moment même où Martini travaillait à sa version du Nouveau Testament. Tout jeune encore, il apprit à fond les langues sémitiques et les principales langues européennes. Le duc de Parme l’appela comme professeur de langues orientales dans l’Université qu’il avait fondée dans cette ville ; dans le même temps, Bodoni y établissait sa célèbre imprimerie. L’abbé de Rossi eut ainsi le loisir de s’adonner aux plus profondes études de critique et de littérature hébraïque et rabbinique ; il recueillit, à ses frais, une précieuse et vaste collection de mss. hébreux ou rabbiniques, à l’aide desquels il publia ses célèbres Varies lectiones dû texte massorétique et de nombreux travaux sûr l’histoire de la littérature rabbinique, particulièrement en Italie. En 1809, de Rossi se retira de l’Université et revint à Turin, en Piémont, où, cinq ans plus tard, on lui offrit la place de conservateur de la bibliothèque du roi. Au milieu de ses travaux critiques, il traduisit plusieurs livres de l’Ancien Testament sur le teste hébreu original. On a ainsi de lui les Psaumes (1808), l’Ecclésiaste (1809), le livre de Job (1812), les Lamentations (1815), les Proverbes (1815). Ses versions sont assez élégantes et rendent bien la vigueur et la concision du texte sacré ; elles font amèrement regretter que l’abbé de Rossi ne voulût pas étendre son travail à toute la Bible.

2° La version de l’Ancien Testament fut reprise vers le milieu du xixe siècle, par le rabbin Samuel David Luzzatto. Cf. A. de Gubernatis, Matériaux, p. 83. Il naquit à Trieste, le 22 août 1800. Instruit dès son enfance, par sa famille, dans la langue sacrée, à l'âge de huit ansil pouvait lire le livre de Job. En 1829, [on le choisit comme professeur d’hébreu au collège rabbinique de Padoue, récemment fondé, et qui, grâce à lui, jouit bientôt d’une célébrité européenne. Des savants étrangers tels que Gesenius, Rosenmûller, Frz. Delitzsch, s’adressaient à lui pour résoudre des difficultés philologiques. Il publia d’excellentes grammaires des langues hébraïque et rabbinique et un grand nombre de travaux sur des textes hébreux particuliers. Il se proposa de faira une version de la Bible en italien, selon la méthode scientifique de la philologie comparée, et il travailla à cet ouvrage plusieurs années, quand, au milieu de ses travaux, il mourut en 1865. Il avait publié, en 1853, une version du livre de Job, en 1855 et l’année suivante, une

autre d’Isaïe et, en 1859-1860, du Pentateuque. Cependant, il était loin, lorsqu’il mourut, d’avoir achevé sa version. Mais comme plusieurs livres étaient plus ou moins prêts, quelques-uns de ses disciples et de ses collaborateurs résolurent de terminer son œuvre et de donner an public l’Ancien Testament en entier. Il fut publié en effet, en quatre volumes, de 1868 à 1875 : La Sacra Bibbia volgarizzata da Samuele Vavide Luzzalo e continuatori, Royigo. Le quatrième Volume contient des préfaces sur ces différents traducteurs. La version du Fentateuque et des Juges est de Luzzatto ; les livres de Samuel ont été achevés par A. Mains ter, du collège rabbinique de Padoue, et les livrés des Rois, par Eude Lolli, de Goritz, né en 1826, maintenant grand rabbin à Padoue. Le même Lolli corrigea les livres de Jérémie, d'Ézéchiel, de Joël, d’Amos (avec Philoxène Luzzatto), de Zacharie, de Malachie et le premier livre des Chroniques, et fît lui-même la version du second livre des Chroniques et d’Aggée : Mainster revisa aussi la version d’Abacuc, et fit celle de Nahum ; Ehrenreich termina les versions d’Osée et Michée (avec Pardo) et fit celles de Daniel, d’Esdras et de NéhémiejViterbi traduisit Sophonie et les Proverbes ; Mortara (né en 1815, mort rabbin majeur à Mantoue) revisa les Psaumes ; Foa traduisit le 'Cantique. — La version est divisée en chapitres et en versets, sans aucune explication historique, ou autre, qui aide le lecteur à pénétrer le sens des auteurs sacrés. Seulement, là où il est nécessaire, au milieu du texte, des mots entre parenthèses carrées ou rondes expliquent les hébraïsmes ou les incertitudes du sens littéral. La langue et le style en sont durs et sans élégance ; la version paraît plus occupée de rendre l’expression de l’hébreu, que de l’adapter au génie du langage italien. Pour ces motifs, cette traduction n’a pas franchi les frontières du judaïsme, et elle est inconnue des catholiques. Cependant c’est un ouvrage d’assez grand mérite. 3° Il suffira de mentionner ici quelques autres versions publiées pendant le xix° siècle par des juifs en Italie : une version des Psaumes (Vienne, 1845), du rabbin Lelio délia Torre, né à Cuneo en 1805, mort à Padoue en 1871 ; une autre, en 1874, par le rabbin Jacob Rakkach avec commentaire ; une version de Job et des Lamentations (1874-1875), par Benjamin Consolo ; du Cantique, avec commentaire, de Noftama Cheleni, en 1873 ; du Cantique et des Lamentations par G. Barzilai ; la Prière d’Habacuc par Vito Anau (Ancône, 1883).

111. YBRSIONS D’VGDULENA, DE CVRCl ET DE CASTELLl. — 1° Grégoire Ugdulena naquit à Termini de Sicile, en 1815. Dès sa première enfance, il s’adonna à l'étude des ilangues classiques, et particulièrement du grec où il fit 'd'étonnants progrès. Il prit ensuite les ordres sacrés et entra dans l’enseignement. En 1843, il obtint, par son mérite en littérature biblique, la chaire d’hébreu et d’herméneutique à l’Université de Palerme, mais il la perdit à la suite des événements politiques de 1848-1849, auxquels il prit une part assez considérable. Rentré alors dans la vie privée, en 1850, il commença une nouvelle version de la Bible, faite directement sur les textes .originaux, et accompagnée d’introductions et de commentaires. Le premier volume parut en 1859, et contenait le Pentateuque. En 1850, il obtint de nouveau sa chaire à l’Université, prit une part active à la vie politique ; il fut ministre de l’Instruction publique en Sicile 'et député au parlement italien. En 1862, il publia le .second volume de sa version, contenant les livres des Rois. En 1865, il fut élu professeur de grec à l’Institut d'études supérieures de Florence, et, en 1870, de grec et d’hébreu à l’Université de Rome, où il mourut en juillet 1871. La version de la Bible en resta là, comme un remarquable fragment scientifique et littéraire ; l’auteur était très compétent, soit comme traducteur italien, soit pour la connaissance des langues sacrées et du mouve# ment scientifique-biblique en Allemagne. Le célèbre

Manzoni et le pape Pie IX étaient des admirateurs du travail du professeur sicilien, à présent presque oublié, parce qu’il est resté incomplet. A. de Gubernatis, Matériaux, p. 169 ; I. Cari iii, Di Gregorio Ugdulenae délie sue opère, Palerme, 1872.

2° Une série de versions fut entreprise plus tard par Charles-Marie Curci, Napolitain. Il naquit en 1809, et en. 1826 entra dans la compagnie de Jésus ; il en sortit plusieurs années après, jouissant déjà d’une grande célébrité en Italie, et s’adonna aux études politiques. Dans les dernières années de sa vie, il s’occupa activement d'études bibliques. En 1873, il publia à Florence un petit volume, contenant la version des Évangiles avec quelques notes, dont il se vendit en Italie, et surtout en Toscane, près de trente mille exemplaires. Ensuite, il fit dans des églises de Florence un cours exégétique sur le Nouveau Testament (de 1894 à 1896), et traduisit quelques autres livres de l’Ancien, qu’il publia successivement. Le Nouveau Testament parut à Naples en 1879-1880. En 1883, il donna aussi une version des Psaumes, d’après le texte hébreu : Jl N. T. volgarizzato ed esposto in note esegetichee morali, Naples, 18791880, avec des longues introductions et des notes plus longues encore : 3 in-4°. — Les Lezioni esegetichee morali sopra i quatlro Evangeli sont un ouvrage distinct (en 5 in-8°), mais le même pour le fond. — Le virtù domestiche ossia il libro di Tobia esposto in 18 lezioni, Florence, 1877 ; cet ouvrage fut réimprimé avec l’exposition du récit de la Genèse touchant Giuseppe in Egitto. — Ces travaux ont été encore publiés à Turin par YVnione tipografica éditrice : — Il Sallerio volgarizzato dall' ebreo ed esposto in note esegetichee morali, Rome, 1883. Les travaux et les leçons de Curci eurent beaucoup de succès pendant la vie de l’auteur, mais en réalité leur valeur est bien médiocre. L’auteur a certainement connu les travaux critiques sur la Bible et particulièrement sur le Nouveau Testament ; mais, comme il avait abordé ce genre d'études dans un âge déjà avancé, il n’avait pas acquis une véritable compétence. Il a fait de la science biblique en prédicateur, plutôt qu’en savant. La critique textuelle et historique est faible. Le texte italien de ses versions est dur, sans élégance, quelquefois trop concis, d’autres fois trop diffus. Dans les Psaumes, il a montré qu’il connaissait imparfaitement l’hébreu, et la traduction même, qui prétend rendre le rythme hébreu, est assez barbare.

3° Il reste à parler d’un hébraïsant, juif de naissance, , le professeur David Castelli, mort le 13 janvier 1901. Il était né à Livourne, le 30 décembre 1836. Son père, très instruit, lui donna dès sa plus tendre enfance le goût de la langue sacrée, qu’ensuite il étudia à fond sous la direction du rabbin Piperno qui possédait une solide connaissance de l’hébreu biblique, targumique et talmudique, et fut l’auteur d’une partie (lettre M) de YEncyclopêdie talmudique publiée par Isaac Lampronti (xvii «-xviiie siècles). Cependant le R. Pipêrno n'était pas un philologue dans le sens moderne du mot ; et D. Castelli dut lui-même se former à la méthode scientifique par des études personnelles. En 1863, il alla s'établir à Pise, ou il fut nommé chancelier de l’Université juive et se donna à l’enseignement particulier de la philosophie et des langues classiques. En 1876, il fut désigné pour la chaire d’hébreu à l’Institut d'études supérieures à Florence, où il resta jusqu'à sa mort. On lui doit une version de l’Ecclésiaste (1866), du livre de Job (1897), dn Cantique des cantiques (1892), avec introductions critiques et notes. Dans ses volumes sur la poésie biblique (1878), la prophétie dans la Bible (1882), la loi du peuple juif et son développement historique (1887), il y a aussi de nombreux passages traduits de différents livres de la Bible. Castelli était un rationaliste de l'école d’Ewald, Wellhausen, Nowack, etc. Très bon écrivain de langue italienne, ce qui est rare parmi ceux qui sont nés juifs,

ses traductions se distinguent par une clarté, une élégance sévère, une concision qui est en harmonie avec le style de la Bible. Dans la prérace à son petit recueil de passages choisis de l’Ancien et du Nouveau Testament pour l’enseignement moral des jeunes gens (1898), il dit avoir eu la pensée d’une nouvelle version de la Bible, d’après les principes de la critique moderne. Hais il n’a pu mettre ce projeta exécution. A. de Gubernatis, Matériaux, p. 101-103.

iv. versions diverses. — Beaucoup de traductions partielles de la Bible parues dans le xixe siècle n’ont pas de réelle valeur scientifique. La plupart sont des versions en vers, dont le mérite littéraire est médiocre. Il suffira de les indiquer pour être complets : B. Silorala, I libri poctici délia Bibbia, en vers, Turin, 1847 ;

— A. Fava, Poésie bibliche, en vers, Milan, 1874 ; — G. Massi, Cantici di Sion, Turin, 1880, en vers ; — J. D. Gazzola, Il Salterio, Vérone, 1816, en vers, d’après une traduction en prose de G. Ventnri faite sur l’hébreu ;

— J.-B. Spina, Esperimento di traduzione di alcuni Salmi in terza rima, Rimini, 1823 ; — I Salmi tradotti 'la vari, Venise, 1835, dans la collection du Parnaso straniero ; — A. Fava, 1 Salmi, Florence, 1870, en vers ; — V. Barelli, Il Salterio recato in versi italiani, Florence, 1881 ; — N. Bilotta, I Salmi, Naples, 1882, en vers ; — F. Rezzano, H libro di Giobbe, Venise, 1834, en vers, dans le Pamaso slraniero ; — V. Talamini, Il libro di Giobbe, Venise, 1871, en vers ; — E. Leone, Canlico dei cantici, Florence, 1825, en vers ; — F. De Beaumont, Cantico dei cantici, Palerme, 1874, en vers ; — I. Sorio, Il Cantico dei cantici tradotto in vevsi quinari, Bassano, 1888 ; — G. Eroli, Il libro délia Sapienza, Nàrni, 1859 ; — E. Leone, I Treni, Florence, 1823, en vers ; — A. Maffei, I Treni, Florence, 1878, en vers ; — M. Villareali, Le profezie d’Isaiae le lamentazioni di Geremia tradotte in tcrza rima, Palerme, 1883 ; — G. Valentino, Parafrasi dei capitofo XSSlll di Ezechiele profeta, Cosenza, 1874 ; — A. Calciato, Il libro di Rut ; versione libéra in oltava rima, Piacenza, 1876 ; — A. C., Il libro di Tobia volijarizzato, Bassano, 1875 ; — I. Spano, Il vangelo di S. ifatteo volgarizzato in dialetlo sardo ; con osservazioni filologiche dei principe Luigi Luciano Bonaparte, Londres, 1866 ; — Pons, Epistola di S. Paolo a Filemone, Florence, .1875 ; — Apocalisse di Giovanni Teologo, spiegata da 689 santi angeli, Parme, 1876.

A cette liste, qui n’a qu’une valeur bibliographique, il faut ajouter trois ou quatre volumes qui contiennent des versions faites avec une méthode critique, et par des savants d’une véritable compétence. C’est d’abord la version de Cento Salmi par le célèbre exégète jésuite, F. X. Palrizi, professeur d’hébreu et d'Écriture Sainteau collège romain ; cet ouvrage a une grande valeur scientifique, mais non pas littéraire. Nicolas Tommaseo, littérateur de renom du xixe siècle, a publié à Florence, en 1875, une bonne traduction des bvangiles faite sur le textus receptus grec avec un petit commentaire tiré des Pères et de saint Thomas, mais le style a une élégance affectée et de mauvais goût. Deux autres versions sont d’un jeune professeur protestant, A. Revel ; il a traduit le Nouveau Testament et le premier livre des Psaumes ; ces deux traductions sont également remarquables~au point de vue scientifique et au point de vue littéraire.

L’Italie ne possède pas encore une version complète de la Bible répondant aux exigences de la science moderne. L’auteur de cet article s’est proposé, depuis plusieurs années, de traduire toute la Bible d’après les textes originaux, comparés avec la Vulgate, et mise au courant des progrés de la saine critique. Il a publié jusqu’ici la version des Psaumes (1895), des Lamentations (1897), du Cantique des cantiques (1898), d’après le texte hébreu avec introductions et commentaires ; et les Évangiles (1900), d’après la Vulgate comparée au texte grec, avec une courte introduction et des notes. Ces

essais ont été très favorablement accueillis en Italie, an double point de vue scientifique et littéraire, et l’auteur, ainsi encouragé à continuer son travail, ne déposera pas la plume, avant d’avoir achevé son œuvre.

S. MmoccHi.

1. ITALIQUE (COHORTE) (grec : 'ItoIixîj <nrc : 'pa ; Vulgate : cohors italica). Le centurion Corneille qui fut baptisé par saint Pierre, à la suite de la vision qu’eut cet apôtre, appartenait à une cohorte italique résidant à Césarée. Act., x, 1. Voir Corneille, t. ii, col. 1012. Les cohortes italiques étaient composées à l’origine, c’est-àdire au début de l’empire, de citoyens romains volontaires recrutés en Italie, c’est pourquoi on les appelait cohortes italicse civium romanomm volqntariorum. Voir Ephemeris epigraphica, t. v, 1884, p. 249. — Th. Mommsen, Res gestes divi Augusli, 2e édit., in-8o, Berlin, 1883, p. 72, n. 1, croit que tout à fait au début de leur organisation ces cohortes furent recrutées parmi les affranchis. Il appuie son opinion sur Suétone, August., 25, et Dion Cassius, lv, 31. Le nom de Corneille, qui était celui d’un affranchi ou descendant d’affranchi de la gens Cornelia, confirme son hypothèse. Il y eut jusqu'à trentedeux cohortes italiques. Par la suite, ces cohortes furent complètement assimilées aux autres cohortes auxiliaires et ouvertes aux pérégrins. La durée du service y était de vingt-cinq ans. Voir Cohorte, ii, t. ii, col. 827. Nous avons la preuve par les inscriptions qu’une de ces cohortes, celle qui portait le numéro deux, tenait garnison dans la province de Syrie et nous connaissons un optio (officier immédiatement inférieur en grade au centurion) de cette cohorte nommé Proculus ; l’inscription est antérieure à l’an 69. Archseolog. Epigr, Mittheilungen aus Œsterreich, 1862, p. 218. Grûter, Corpus inscript, latin., p. 434, n. 1, mentionne un tribun nommé L. Msesius Rufus ; il est, dit l’inscription, tribunus cohortis militarise ilalicæ quee est in Syria. La cohorte italique en garnison en Syrie comprenait donc mille hommes. — E. Schûrer, Geschichle des jïidischen Volkes im Zeilalter Jesu-Christi, in-8o, Leipzig, t. i, 1890, p. 386, prétend que c’est probablement par erreur que le texte des Actes place une cohorte italique à Césarée au temps du roi juif Agrippa, et que, pour ce motif, l’histoire du centurion Corneille est suspecte ; mais, comme le remarque F. Blass, Acta Apostolorum, in-8o, Gœttingue, 1895, p. 124, on ne voit pas pourquoi une des cinq cohortes résidant à Césarée n’aurait pas été composée de citoyens romains qui avaient établi leur domicile dans cette ville. Cf. W. Ramsay, Cornelius and the italic cohort, dans The Expositor, septembre 1896, p. 194-201. E. Beurlier.


2. ITALIQUE (VERSION). Voir Latines (Akciennxs



VERSIONSj DE LA BlBLE.


ITHAÏ (hébreu : '/fat ; Septante : 'E<rtoï), fils de Ribaï de Gabaath, de la tribu de Benjamin, un des braves de David. II Reg., xxiii, 29. Il est appelé Éthaï, I Par., xi, 31. Voir Éthaï 2, t. ii, col. 2002.


ITHAMAR (hébreu : 'l(àmâr ; Septante : T81|iap), le quatrième et le plus jeune des fils d’Aaron. Exod., vi, 23 ; Num., iii, 2 ; xxvi, 60 ; I Par., vi, 3 ; xxiv, 1. Il fut consacré prêtre avec son père et ses trois frères Nadab, Abiu et Éléazar. Exod., xxviii, 1. Ses deux frères aînés, Nadab et Abiu, ayant été frappés de Dieu parce qu’ils avaient mis dans leurs encensoirs un feu étranger, Lev., x ; cf. Num., iii, 4 ; xxvi, 61 ; I Par., xxiv, 2, et étant morts sans postérité, Ilhamar et Éléazar devinrent la souche des deux familles sacerdotales. Num., iii, 3, 4 ; I Par., xxiv, 2. — Lorsqu’on changeait de campement dans le désert du Sinaï, Ilhamar avait sous ses ordres les Gersonites, chargés du transport des rideaux et des tentures du Tabernacle, ainsi que des Mérarites qui de- . *£

fi’1039

ITHAMAR — ITURÉE

1040

valent en transporter les cordes, les pieux et les planches. Exod., xxxviii, 21 ; Num., iv, 21-33 ; vil, 8. -- Le souverain pontificat passa dans la descendance d’Ithamar en la personne d’Héli, le juge d’Israël, et il y resta jusque sous le règne de Salomon. À cette époque, il rentra par’Sadoc dans la famille d’Éléazar comme l’avait annoncé Samuel, parce que le grand-prêtre Abiathar, descendant d’Ithamar, avait pris parti pour Adonias contre Salomon. I Reg., ii, 31-35 ; III Reg., ii, 26, 27, 35 ; cf. I Reg., xiv, 3 ; xxii, 9 ; I Par., xxiv, 3 ; Josèphe, Ant. jud., VIII, i, 3. Voir Grand-Prêtre, col. 304. — Du temps de David, lorsque ce prince divisa les prêtres en vingt-quatre groupes pour le service du sanctuaire, la postérité d’Ithamar était moins nombreuse que celle d’Éléazar ; elle ne forma donc que huit séries contre seize et toutes-furent tirées au sort. I Par., xxiv, 4-6. — Parmi les prêtres qui revinrent de la captivité de Babylone du temps d’Artaxerxès est mentionné un descendant d’Ithamar appelé Daniel. I Esd., viii, 2. — Une tradition rabbinique place son tombeau près de celui de son frère Éléazar, à Aouçtah, dans les environs de Naplousè, mais cette tradition n’est pas fondée. V. Guérin, Samarie, t. i, 1874, p. 462. F. Vigouroux.

    1. ITHIEL##

ITHIEL (hébreu : ’Ifi’él, « Dieu est avec moi » ), nom, d’après un certain nombre d’interprètes, de l’une des deux personnes auxquelles Agur, fils de Jakéh (Yaqéh), adresse son discours dans les Proverbes, xxx, 1. Les Septante n’ont pas rendu ce mot dans leur version. La Vulgate l’a traduit par cum quo est Deus. Voir Agur, t. i, col. 288.

    1. ITURÉE##

ITURÉE (grec : Troupaïa ; Vulgate : Ituriea), district situé au nord-est de la Palestine et qui forma avec la Trachonitide le territoire de la iétrarchie de Philippe. Luc, iii, 1. Le* nom d’Iturée tire son origine de celui d’Jéthur, l’un des fils d’ismaël. I Par., i, 31. Lors de la conquête de la Terre Promise, la tribu de Ruben, ’qui " s’établit au delà du Jourdain, dut conquérir une partie de son territoire sur les Ituréens. I Par., v, 19. Dans ce passage le mot hébreu Yetûr est traduit dans les Septantepar’Iïoupaïoietdansla Vulgate par Iturœi. L’hébreu etles Septante disent simplement queles Rubénitès firent la guerre à ce peuple et s’emparèrent de son territoire ainsi que du pays de leurs alliés. La Vulgate donne pour motif de la guerre qu’ils avaient porté secours aux Agaréens. La quantité de butin que les Rubénitès firent sur les Ituréens et sur les peuples voisins prouve que ces nations étaient très prospères. Voir Agaréens, t. i, col. 263. L’Iturée resta en la possession de la tribu de Ruben jusqu’à la captivité. Il semble cependant qu’une partie de riturée demeura indépendante, - car Eupolème cite les Ituréens avec les Moabites, lés Ammonites et d’autres nations voisines, parmi les peuples à qui David fit la guerre. Eusèbe, Prsspar. evang., ix, 30, t. xxi, col. 748. Pendant la domination assyrienne, riturée fut occupée par des colonies étrangères amenées par les vainqueurs. En -185 avant J.-C, une partie du pays fut reconquise par Aristobule Ier. Ce prince obligea les habitants à embrasser le judaïsme ou à s’exiler. Josèphe, Ant. jud., XIII, xi, 3. Depuis cette époque, on trouve fréquemment le nom des Ituréens dans les écrivains anciens, tantôt ils sont nommés avec les Syriens, Pline, H. N., V, xxiii, 31 ; tantôt avec les Arabes. Appien, Bell. civil., v, 7 ; Dion Cassius, lix, 12 ; Strabon, XVI, ii, 18. Les noms des soldats ituréens qu’on rencontre dans les inscriptions latines sont syriens, Corp. inscript, latin., t. iii, n « 4371, etc. Les habitants de ce pays étaient restés à moitié sauvages et se livraient au brigandage. Ils étaient renommés par leur habileté à tirer de’l’arc. Strabon, XVI, ii, 18 ; Cicéron, Philipp., ii, 112 ; Virgile, Georg., il, 448 ; Lucain, Plumai., vii, 230, 514. César employa des auxiliaires ituréens comme archers dans la guerre

d’Afrique. Bell. afr., 20. Marc Antoine en avait parmi ses gardes du corps et s’en servit pour terroriser le Sénat. Cicéron, Philipp., ii, 19. -112 ; xiii, 18. Sous l’empire, des cohortes d’archers ituréens figurèrent dans l’armée romaine. Corp. inscript, latin., t. iii, n »  » 1382, 3446, 3677, 4367, 4368, 4371. et p : 862, 866, 868, 888 ; t. vi, n° 421 ; t. viii, n » 2394, 2395, etc. ; Vopiscus, Vita Aureliani, 11.

Les Ituréens, comme beaucoup de peuples voisins, n’habitèrent pas toujours la même contrée. En effet, au temps de la conquête du pays de Chanaan, ils étaient à l’est de la mer Morte, I Par., v, 19 ; au temps de David, dans le voisinage des Moabites et des Ammonites. Eusèbe, Prsep. evang., ix, 30, t. xxi, col. 748. Les textes qui se rap 188. — Carte de l’Iturée.

portent à la période la plus connue de leur histoire nous lesmontrentdansleLibanou dans son voisinage. Strabon, XVI, ii, 10, place le pays des Ituréens dans les montagnes qui s’élèvent au-dessus de la plaine de Massyas ou Mars j as, plaine située entre le Liban et l’Anti-Liban, et leur donne pour capitale Chalcis ad Libanum. Dans une inscription romaine, Q. /Emilius Secundus dit qu’il fut envoyé par Quirinus(CïRiNus, t. ii, col. 1186) pour combattre les Ituréens dans le Liban. Ephemeris epigraphica, t. IV, 1881, p. 538. Lorsque Pompée s’empara du pays, les Ituréens faisaient partie d’une confédération qui avait pour chef Ptolémée, fils de Mennée, dont le royaume comprenait les montagnes de l’Iturée et la plaine de Massyas. Strabon, XVI, ii, 10 ; Josèphe, Ànt. jud.., XIV, vil, 4 ; Beil. jud., i, ix, 2. Le général romain détruisit les forteresses du Liban, mais il laissa la souveraineté du pays à Ptolémée qui devint vassal de Rome. Appien, Milhrid., 106 ; Josèphe, Ant. jud-, XIV, iii, 2.

Josèphe, Ant. jud., XIV, mi, 4, la désigne ainsi que ses successeurs sous le nom de dynastes. On lui a attribué les monnaies qui portent l’inscription grecque : « Ptolémée, tétrarque, grand-prêtre. » Eckhel, Doctrina numoruni, t. iii, p. 263 ; Mionnet, Description des médailles, t. v, p. 145, supplém., t..vin, .p. 19, etc. Mais cette attribution, est douteuse. Head, Historia numoruni, in-8o, Londres, 1887, p. 655. Ptolémée mourut en 40 avant J.-C. et eut pour successeur son fils Lysanias. Josèphe, Ant. jud.., XIV, xiii, 3 ; Bell. jud., i, XIII, 1 ; Dion Cassius, xlix, 32. À l’instigation de Cléopatre, Antoine fît exécuter ce prince, sous prétexte qu’il conspirait avec les Parthes, et donna une partie de son territoire à la reine d’Egypte. Josèphe, Ant. jud., XV, iv, 1 ; Bell. jud., I, xxii, 3 ; Dion Cassius, xlix, 32. On ignore si c’està lui ou à un autre prince de ce nom qu’il faut attribuer les monnaies qui portent l’inscription : « Lysanias tétrarque et grand-prêtre. » Mionnet, Suppl., t. viii, p. 119 ; Head, Historia numor., p. 655. À partir de cette époque, l’ancien royaume de Ptolémée fut divisé. En 23 ayant J.-C, un certain Zénodore reçut à ferme de Cléopatre m : „ partie du domaine de Lysanias, Josèphe, Ant. jud., W, ï, 1 ; Bell. jud., i, xx, 4, et probablement après la mort de cette reine la gouverna en qualité de tétrarque. Dion Cassius, Lix, 9. La part qu’il prit aux brigandages qui désolèrent la Trachonitide fit que les Romains lui enlevèrent ce pays^ pour le donner à Hérode le Grand. Josèphe, A nt. jud., XV, x, 1-2 ; Bell. jud., i, xx, 4. À sa mort, en l’an 20, Auguste donna au même Hérode le reste du pays. Josèphe, ibid. À Zénodore appartiennent certainement les monnaies qui portent l’inscription : « Zénodore tétrarque, grand-prêtre, » et les dates des années 280, 282, 287 de l’ère des Séleucides, c’est-à-dire 32, 30 et 25 avant J.-C. Eckhel, Doctr. num., t. iii, p. 496 ; Madden, Coins of the Jews, in-4o, Londres, 1881, p. 124 ; Head, Historia numoruni, p. 663.

Dans une inscription grecque, il est question d’un Zénodore, fils du tétrarque Lysanias ; il est très probable qu’il s’agit de celui-ci. E. Renan, Mission de Phénirde, in-4o, Paris, 1864, p. 317-319. Cf. Mémoires de l’Acad. des inscriptions et belles-lettres, t. xxvi, 1870, part. H, p. 70-79. Après la mort d’Hérôde, une portion de la tétrarchie de Zénodore fut donnée à Philippe, fils de ce prince. Josèphe, Ant. jud., XVII, xi, 4 ; Bell. jud., II, VI, 3. C’est d’elle qu’il est question dans saint Luc qui en énumère les deux parties, la Trachonitide etl’Iturée.La tétrarchie de Philippe passa ensuite entre les mains d’Agrippa Ier, puis d’Agrippa II. Une partie de l’îturée était probablement restée en dehors du territoire soumis à Zénodore. C’est contre ces Ituréens indépendants que Q. /Emilius Secundus fit la guerre dont nous avons parlé plus haut. Au temps 4e Claude, il est question d’un royaume ituréen gouverné par Soemus et qui, après sa mort, fut annexé à la province de Syrie. Dion Cassius, lix, 12 ; Tacite, Annal., xli, 23. Elle fournit des soldats à l’armée romaine. Voir fig. 362, t. i, col. 1236. La contrée appelée aujourd’hui Djédour est très probablement l’ancienne Iturée, ou tout au moins une grande partie de ce pays. C’est un plateau ondulé et couvert de collines coniques. La partie située au nord est couverte de rochers de basalte. On y voit de nombreuses coulées de lave. Le Djédour renferme trente-huit villes ou villages pauvres et peu peuplés. Journal of biblical researches, juillet 1854, p. 311. — VoirFr. Mùnter, De rébus Iturseorum, in-8o, Copenhague, 1824 ; E. Kuhn, Die stâdtische vnd bûrgerliche Verfassung des rômischen Reichs, in-8o, Leipzig, 1864-1865, t. ii, p. 169-174 ; I. G. Wetzstein, Reise in den beiden Trachonen und uni das Haur &ngebirge, dans la Zeitschrift fur allgemeine Erdkunde, Berlin, 1859, p. 169-208, 265-319 ; E. Schûrer, Getchichte des Jûdischen Volkes im Zeilalter Jesu Christi, in*. Leipzig, t. 1, 1890. p. 593-608 ; C. Ritter, Die Erdkunde im Verltâltniss zur Katur und zur

Gssckichte des Menschen, 2e édit., in-8o, Berlin, 1848^ 1855, part, xvii, 1, 1854, p. 14-16 ; Th. Monomsen et J. Marquardt, Manuel des institutions romaines, trad. franc., t. ix, Organisation de l’empire romain, Paris, 1892, p. 343-345. E. Becrlier.

    1. ITURÉENS##

ITURÉENS (hébreu : Yetûr ; Septante : ’iToupaîos ; Vulgate : Iturœi), habitants de l’îturée. I Par., v, 19. Voir Ituhée.

    1. IVOIRE##

IVOIRE (hébreu : Sên, Sénhabbim ; Septante : êXlipaç, lJ.sçàvTivov, ôSdvTsc eJ.eip « vT(v « ( ; Vulgate : ebur), substance constitutive des dents chez l’homme et les mammifères, et, plus communément, la matière compacte, blanche et dure qui forme les défenses de l’éléphant. Cette matière est composée, pour un quart environ, de substance organique, pour le reste, de phosphate de chaux, de carbonate de chaux, de fluorure de calcium et autres sels calcaires.

I. L’IVOIRECHEZ LES ANCTENS PEUPLES.— l » Chez plusieurs

peuples anciens, où l’on ne connaissait les défenses d’éléphant que par le commerce d’importation, on a quelquefois pris ces défenses pour des cornes. Élien, Nat. animal., iv, 31 ; vii, 2 ; Pausanias, v, 12 ; Philostrate, Vit. Apollen., ii, 13 ; Pline, H. N., xviii, 1 (cf. cependant viii, 4) ; Martial, i, 73, 4. Ézéchiel, xxvii, 15, les appelle déjà qerànôp sên, « cornes d’ivoire. » — 2o Les Égyptiens ont connu l’ivoire de très bonne heure. Dès la cinquième dynastie, ils écrivent avec l’image d’un éléphant le nom de l’île d’Éléphantine, voisine de la première cataracte. Voir la carte, t. ii, col. 1605. Peut-être avaient-ils vu cet animal dans les premiers temps de leur installation dans la Thébaïde. Toujours est-il qu’ils estimaient beaucoup ses défenses et s’en faisaient apporter en tribut de tous côtés. — Sur un monument de la XVIIIe dynastie, on voit des Syriens qui apportent en tribut un éléphant et une défense (fig. 189). Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, 1897, t. ii, p. 285, 493. Ces tributs se perpétuèrent jusquesous lés dernières dynasties. Hérodote, iii, 97, 114 ; Diodore de Sicile, i, 55. Cf. Pline, H. N, , vi, 34. C’était surtout d’Ethiopie qu’ils leur arrivaient par dents et par demi-dents. « Ils le teignaient à volonté en vert ou en rouge, mais lui laissaient le plus souvent sa teinte naturelle et l’employaient beaucoup en menuiserie, pour incruster des chaises, des lits et des coffrets ; ils en fabriquaient aussi des dés à jouer, des peignes, des épingles à cheveux, des ustensiles de toilette, des cuillers d’un travail délicat, des étuis à collyre creusés dans une colonne surmontée d’un chapiteau, des encensoirs formés d’une main qui supporte un godet en bronze où brûlaient des parfums, des boumérangs couverts au trait de divinités et d’animaux fantastiques. » Maspero, L’archéologie égyptienne, Paris, 1887, p. 259. Le musée de Ghizéh et les musées d’Europe conservent u n grand nombre de figurines et de statuettes d’ivoire, dont plusieurs datent de l’ancien empire. Une figurine de la Ve dynastie garde encore des traces de couleur rose. On a découvert en Assyrie des ivoires égyptiens, un entre autres qui représente deux personnages assis l’un vis-à-vis de l’autre (fig. 190). Layard, Monuments of Nineveh, t. i, pl. £9, 11. Cf. Maspero, Histoire ancienne, t. ii, p. 792 ; t. iii, p. 219, 323. — 3o Les Assyriens tiraient l’ivoire de l’Inde. Sur l’obélisque de Salmanasar III, sont représentés dès tributaires qui lui amènent un éléphant (voir Éléphant, t. ii, fig. 547, col. 1661) et d’autres qui paraissent porter sur leurs épaules des défenses de cet animal. C’est dé là d’ailleurs que les Syriens en importaient aussi chez les Égyptiens. Les rois assyriens aimèrent toujours à prodiguer l’ivoire dans leurs ameublements et dans la décoration de leurs palais. Cf. Layard, Nineveh and Babylon, p.195, 358, 372 ; Kinereh and ils reniains, X. i, p. 29, 391 ; t. ii, p. 205, 211, 420 ; Perrot, Histoire de l’art, t. ii,

p. 532, 758 ; Vigonroui, La Bible et les découvertes modernes, Paris, 1896, t. iii, p. 386-387. On travaillait l’ivoire à Ninive et à Babylône. Mais on y employait beaucoup d’objets d’ivoire de fabrication étrangère, comme le démontrent les trouvailles faites à Nimroud. On y remarque « le style égyptien avec une exagération de naturalisme dont les Phéniciens sont seuls coutumiers. Nous pouvons conclure que ces pièces d’ivoire ont été

premier, quand il voulut imiter le faste des autres souverains orientaux. Il ût d’abord « un grand trône d’ivoire et le couvrit d’or pur ». III Reg^, x, 18 ; II Par., ix, 17. Ceci doit s’entendre d’un trône de bois avec des incrustations d’ivoire et des placages d’or pur sur le bois ; car on ne recouvrait pas d’or l’ivoire considéré lui-même comme matière précieuse et travaillé par le sculpteur. Pour se procurer cette matière plus abondamment, il la

189. Captifs de différentes nations apportant en tribut des éléphants avec leurs défenses. D’après Wilkinson, Manners, 2e édit., t. i, pl. 11.

- Thèbes, tombeau de Rekhmara.

fabriquées, comme les coupes de bronze, dans les ateliers de Phénicie. De là, les caravanes transportaient ces menus objets jusqu'à Ninive : nous savons que les marchands de Tyr et de Sidon avaient de nombreux comptoirs jusqu’au cœur même de la Mésopotamie ». Babelon, Manuel d’archéologie orientale, Paris, 1888, p. 448. — Pour le travail de l’ivoire chez les Phéniciens, voir Perrot, Histoire de l’art, t. iii, p. 846-853 ; G. Raw faisait venir directement de l’Inde, par sa flotte unie à celle d’Hiram. III Reg., x, 22 ; II Par., ix, 21. On sait que l’ivoire indien a été célèbre plus tard chez les Romains. Virgile, Georg., i, 57 ; Horace, Od., i, xxxi, 6. Dans le Cantique, v, 14 ; vii, 5, le corps de l'époux est comparé à l’ivoire poli, et le cou de l'épouse à une tour d’ivoire. — 2o Le Coraïte qui a composé le Psaume xliv (xlv), 9, y parle de « maisons d’ivoire », c’est-à-dire de

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190. — Ivoire égyptien, trouvé à Nimroud en Assyrie. British Muséum.

linson, Hislory of Phœnicia, in-8o, Londres, 1889, p. 293, 374. Sur le commerce de l’ivoire en Afrique, voir Periplus maris Erythrœi, 3, 16, 49, dans les Geographi minores, édit. Didot, 1. 1, p. 259, 261, 293.

II. L’ivoire chez les Hébredx. — 1o Bien que les premiers Hébreux aient vu l’usage qu’on faisait de l’ivoire en Egypte, ils ne l’ont pas employé, faute de pouvoir se le procurer aisément et surtout d'être à même de le travailler. Ce fut seulement Salomon qui s’en servit le

maisons dont les lambris sont ornés d’incrustations d’ivoire. Il n’est point dit que Salomon ait employé ce genre de décoration dans son palais ; mais plus tard, le roi Achab se construisit une « maison d’ivoire », c’est-àdire une maison dont la décoration intérieure comportait des placages et des sculptures en ivoire. III Reg., xxit, 39. Les anciens estimaient beaucoup ce genre de luxe. ; Homère, Odyss., iv, 73 ; Horace, Od., II, xv, 1, 2 ; Virgile, JEneid., x, 136 ; Lucain, x, 119 ; Élien, Var. hist., xii, 29 ;.

etc. Il est certain que les Hébreux ne travaillaient pas euxmêmes l’ivoire employé dans les maisons royales, mais qu’on s’adressait aux artistes phéniciens, experts en toutes sortes d’arts et d’industries. — 3° Amos, III, 15, annonce que les « maisons d’ivoire s périront avec tout le luxe des grands, qui ont maison d'été et maison d’hiver. Le même prophète maudit encore les grands d’Israël, qui s'étendent sur des « lits d’ivoire », c’est-à-dire sur des divans incrustés d’ivoire, pour se livrer à de scandaleux festins. Am., vi, 4. Le divan était chez les grands un

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191. — Ivoire gravé assyrien. Divinité ailée. Grandeur nature. British Muséum.

meuble d’apparat qu’ils aimaient à décorer luxueusement de matières précieuses et d’ivoire. Piaule, Stich., II, ii, 54 ; Horace, Sat., II, vi, 103. — 4° Dans sa prophétie contre Tyr, Ézéchiel compare cette ville à un vaisseau dont les bancs sont faits de buis incrusté d’ivoire. Ézech., xxvii, 6. Le buis est un bois dur qui se prête fort bien à des incrustations de cette nature. Virgile, Mneid., x, 137, parle aussi de « l’ivoire qui. brille incrusté dans le buis par l’artiste ». Cf. Buis, 1. 1, col. 1968. Le même prophète ajoute que Tyr faisait le commerce avec les marchands de Dedan ou Dadan, voir Dad&n 1, t. ii, col. 1202, et que, par l’intermédiaire de ces Arabes, la cité échangeait ses produits contre « des cornes d’ivoire et de l'ébène » provenant de beaucoup d’iles, c’est-à-dire de beaucoup de

pays asiatiques baignés par la mer. Ezech., xxvii, 15. Les Phéniciens ouvraient ensuite l’ivoire brut et le revendaient aux Assyriens, aux Hébreux, et aux peuples divers qui composaient leur clientèle. — 5° D’après la Vulgate, Esth., i, 6, il y avait dans le palais de Suse des tentures soutenues par des anneaux d’ivoire. Cette matière était sûrement à l’usage des rois perses, comme elle l’avait été sous leurs prédécesseurs assyriens et chaldéens. Cf. Babelon, Manuel d’archéologie orientale, p. 193. Mais, au lieu d’anneaux d’ivoire, le texte hébreu et les Septante parlent ici d’anneaux d’argent. — 6° La Vulgate mentionne encore des princes de Juda « plus rouges que l’ivoire antique », Lam., iv, 7, là où dans l’hébreu il est question de perles, penînim. Voir Corail, t. ii, col. 957, et Perles. Saint Jérôme, a sans doute songé aux ivoires que les anciens teignaient quelquefois en rouge. — 7° Parmi les marchandises qu’on apportait dans la grande Babylone, saint Jean mentionne toutes sortes d’objets en ivoire, xîv oxéïoç iÀeçàvrivov, oninia vasa eboris. Apoc, xviii, 12. H. Lesêtih ;.

    1. IVRAIE##

IVRAIE (grec : ïtïâvia ; Vulgate : zizania), plante nuisible qui croît dans les blés.

I. Description.

Herbe annuelle de la famille des graminées, comme le blé, le seigle et l’orge, mais en différant complètement par ses propriétés, puisqu’elle est vénéneuse. Les effets qu’elle produit sur l’organisme, comparés à ceux de l’ivresse, lui ont valu son nom vulgaire herbe-à-l’ivrogne ; pour la même raison Linné l’avait nommée Lolium temulentum (fig. 192). Le danger de l’ivraie résulte surtout de ce qu’elle croit habituellement parmi les moissons et sous tous les climats. Car, si sa tige plus grêle et ses épillets latéraux pourvus d’une seule glume à la base permettent de distinguer assez aisément la plante complète, il n’en est pas de même malheureusement pour les graines isolées. Elles se confondent avec celles des céréales au moment de la récolte, et leur mélange avec le bon grain communique des qualités malfaisantes à la farine, au pain et même aux boissons fermentées qui en proviennent. Leur absorption est suivie de nausées, de vertige, de délire ; enfin la mort même peut survenir, quand la dose a été trop forte. Toutefois les conséquences de l’empoisonnement sont rarement aussi graves, parce que la dessiccation et surtout la cuisson détruisent en partie le principe toxique de l’ivraie. Celui-ci réside essentiellement dans un alcaloïde, la témuline de Hoffmeister, agissant sur le système nerveux, et associé à divers corps gras auxquels seraient dus les accidents des organes digestifs.

L’existence d’une espèce dangereuse parmi les graminées a été longtemps une énigme inexplicable, car on sait que cette famille est une des plus naturelles pour l’ensemble de ses caractères et qu’elle renferme, par ailleurs, les plantes les plus estimées pour la haute valeur nutritive de leurs graines, formant ainsi, de temps immémorial, la base de l’alimentation chez tous les peuples civilisés. On se demandait dès lors si les mauvaises qualités de l’ivraie tenaient à sa nature propre ou si elles ne. devaient pas être plutôt attribuées à la contamination de ses tissus par un organisme étranger. Or cette dernière hypothèse vient d'être pleinement confirmée par des observations récentes. On a reconnu, d’abord, que plusieurs céréales avariées, telles que le seigle, avaient déterminé les mêmes effets toxiques que l’ivraie, or l’analyse de ces grains de seigle devenu enivrant décelait un champignon microscopique, nommé Endoconidium temulentum par MM. Prillieux et Delacroix. L’identité des symptômes produits conduisait à admettre l’analogie des causes. C’est ce que vient d'établir positivement M. Guérin en constatant la présence de filaments d’origine mycélienne dans la graine de l’ivraie, sur le pourtour de l’albu

men. La pénétration se fait dans la plante an moment de sa floraison, par la base de l’ovaire ; le nucelle est d’abord contaminé, puis la réserve interne de matières nutritives au voisinage immédiat des cellules formant l’assise-à-gluten. Quant à l’embryon lui-même, il reste indemne, ce qui explique pourquoi la jeune plante qui en naît, bien que sortie d’une graine infectée, reste saine pendant toute la première phase de sa vie végétative, jusqu’au moment où sa propre floraison l’expose à une nouvelle invasion du parasite. La présence de cet organisme étranger chez le Lolium temulentum parait si constante que l’auteur de cette découverte n’hésite pas à y voir un fait d’association normale ou de symbiose. Il en serait de même aussi pour deux espèces voisines, lés Lolium arvenseet linicola, qui, du reste, ne sont considérées par plusieurs que comme de pures variétés du précédent. Ces trois types, rendus vénéneux par suite de la cohabitation d’un champignon, forment en tous cas un groupe des plus naturels dans le genre Lolium, caractérisé par la longueur de la glume basilaire, qui atteint le sommet de l'épillet. Chez toutes les autres espèces, où la glume reste plus courte, l’infection semble très rare et accidentelle, d’où il résulte qu’elles peuvent être employées sans danger dans l’alimentation des animaux. Une d’entre elles constitue même l’un des fourrages les plus précieux, et se cultivé communément désignée sous le nom de ray-grass par l’agriculture, le Lolium perenne. — Voir P. Guérin, Sur la présence d’un champignon dans l’ivraie, dans le Journal de botanique, 1898, p. 230 ; Prillieux, Maladie des plantes agricoles, 1897.

IL Exégèse. —, L’identification du ÇiÇàviov (pluriel, ÇiÇâvia) n’offre aucune difficulté : c’est bien le nom de l’ivraie, non pas de provenance grecque (le iiom grec de cette plante était alpa, d’où le latin sera, Plin., H. N., i 19C. — L’ivraie. xviii, 44), mais sémitique. On

peut comparer le p’n, zônîn

du Talmud, le ^y^zeouân arabe que l’on fait dériver de ^U, zan, « nausée. » Le nom viendrait à cette plante de l’effet qu’elle produit : la graine en effet donne des vomissements, une sorte d’ivresse, des convulsions qui vont parfois jusqu'à la mort. Pline, fl. N., xviii, 44. C’est de là que vient le nom latin populaire ebriaca qui a fait notre mot ivraie. Elle n’est mentionnée que dans un seul endroit de la Sainte Écriture, dans S. Matth., xui, 24-30, 36-43. Les caractères de la plante indiquée dans la parabole conviennent d’ailleurs parfaitement à l’ivraie. Tant qu’elle est en herbe, cette graminée se confond avec le blé : il faut une très grande attention pour pouvoir les distinguer. C’est ce que remarque saint Jérôme, Comment, in Matth., xiii, 26, t. xxvi, col. 94. Mais quand l'épi a poussé, rien de plus facile. Matth., xiii, 26. Mais si la méprise est alors aisée à éviter, il n’est pas sans difficulté d’arracher l’ivraie sans déraciner le blé en même temps, tant les

tiges des deux plantes sont souvent mêlées, et leurs racines enchevêtrées. Matth., xiii, 29. Au contraire, lorsque, à l'époque de la moisson, la faucille a coupé les tiges, rien de plus facile que de séparer l’ivraie. Matth., xiii, 30. Quant au fait de l’ennemi qui vient, durant la nuit, semer l’ivraie dans le champ nouvellement ensemencé, il n'était pas inouï en Orient comme en Occident. Cette façon de se venger devait même être assez fréquente, puisqu’elle a été prévue dans le code pénal des Romains. Mais il n'était pas nécessaire d’une main ennemie, que la croyance populaire était disposée à voir dans ces accidents, car certaines conditions de la température produisaient ordinairement tout le mal. L’ivraie est très répandue en Orient, et en particulier en Palestine. Thomson, The Land and the Booh, in-8o, Londres, 1885, p. 421. L’enseignement de la parabole se dégage facilement : du reste le divin Maître a pris la peine d’en donner lui-même l’explication à ses apôtres. Matth., xiii, 36-43. Nous y voyons le pouvoir laissé ici-bas au démon pour éprouver les hommes, la juxtaposition des bons et des méchants dans la destinée terrestre de l'Église, et leur séparation, à l'époque du jugement final.

E. Levesque.

    1. IVRESSE##

IVRESSE (hébreu : Sikkdrôn, de Mkar, « enivrer, » d’où Hkhôr et Mkkor, « ivre ; » (ar'âlâh, l’ivresse qui fait tituber, de râ'al, « tituber, » d’où ra’al, « titubation » par ivresse ; yain, « viii, » cause prise quelquefois pour l’effet ; Septante : (j18r(, d’où (jsfl-itov, « ivre ; » xpaiitâXi) ; Vulgate : ebrietas, d’où ebrius, « ivre ; » crapula), état de celui qui a bu à l’excès des boissons fermentées.

I. L’ivresse proprement dite. — 1o Les exemples. — Noé fut le premier à s’enivrer, mais son ivresse fut involontaire, parce qu’il ne connaissait pas les effets du vin. Gen., ix, 21-24. Les deux filles de Lot enivrèrent leur père pour commettre ensuite l’inceste avec lui. Gen., xix, 32-35. Le riche Nabal était ivre quand sa femme Abigaïl vint le retrouver après son heureuse intervention auprès de David, et elle dut attendre jusqu’au lendemain matin pour pouvoir lui parler. I Reg., xxv, 36, 37. Voir Nabal. — Pour cacher son adultère avec Bethsabée, David enivra le mari de cette dernière, Urie, mais ne réussit pas à obtenir ce qu’il désirait. II Reg., xi, 19. — Ela, roi d’Israël, s’enivrait à Thersa quand Zambri vint le tuer. III Reg., xvi, 9. — Rénadad, roi de Syrie, faisait de même sous sa tente. III Reg., xx, 16. — Holopherne dormait sur son lit du sommeil dé l’ivresse quand Judith le décapita. Judith, xiii, 4, 19. — Quand Ptolémêe, gendre de Simon Machabée, voulut s’emparer du pouvoir à sa place, il l’attira avec ses fils dans la forteresse de Doch, les enivra et les massacra. I Mach., xvi, 16. — Isaïe, v, 11, 22, parle de ces buveurs qui, dès le matin, courent aux liqueurs enivrantes et s'échauffent encore par le vin bien avant dans la nuit, pleins de bravoure pour boire et de vaillance pour mêler les liqueurs fortes. Il cite les propos que tient un de ces ivrognes : « Venez, je vais chercher du viii, nous boirons les liqueurs fortes, nous recommencerons demain et bien mieux encore ! » Is., lvi, 12. — Saint Paul mentionne les ivresses nocturnes des païens. I Thess., v, 7.

2o Les effets.

Sous l’influence de l’ivresse, le trouble

saisit l’esprit et se manifeste par l’incohérence des paroles. Aussi Héli, à première vue, croit-il à l’ivresse d’Anne, qui ne fait que remuer les lèvres sans se faire entendre. I Reg., i, 13, 14, — Au jour de la Pentecôte, lorsque les Apôtres se mettent à parler sous l’action de l’Esprit-Saint, les Juifs étonnés disent qu’ils sont ivres. Act., ii, 15. — Après ce trouble viennent l'étourdissement et la titubation. Zach., xii, 2 ; Is., ii, 17, 22. Les phénomènes 'les plus répugnants se produisent ensuite : « Ils" chancellent dans le viii, les boissons fortes leur donnent des vertiges… Toutes les tables sont pleines de vomissements, d’ordures (fig. 193) : il n’y a plus de place. > Is., xxviii, 7 ; Jer., xlvui, 26. Un lourd sommeil succède

à cet état. L’homme fort de tempérament s’en réveille, Ps. lxxvii (lxxviii), 65 ; d’autres ne s’en relèvent pas, Jer., li, 39, 57, et beaucoup meurent des suites de leur orgie. Eccli., xxxvii, 34. — Mais les pires effets de l’ivresse se font sentir à l'âme. Quand le corps est en cet état, l'âme perd conscience d’elle-même ; l’intelligence et la volonté sont comme hors de service. L’homme ivre ne peut pas seulement se débarrasser d’une épine qu’il a dans la main. Prov., xxvi, 9. L’ivresse, surtout quand elle devient habitude et dégénère en ivrognerie, porte au mal, Eccli., xxx, 40, engendre la colère, Eccli., xxxi, 38, 40, et la luxure. Eccli., xxvi, 11 ; Hab., ii, 15 ; Eph., v, 18. Elle dégoûte du travail et conduit à la pauvreté. Eccli., xix, 1. Elle alourdit l’esprit, Luc, xxi, 34, fait perdre le sens, Ose., iv, ll, et égare les sages. Prov., xx, 1 ; Eccli., xix, 2. Elle fait oublier aux princes la loi et les droits des malheureux. Prov., xxxi, 4, 5. Elle attire le châtiment, Matth., xxix, 49, et enfin exclut du royaume de Dieu. I Cor., vi, 10 ; Gal., v, 21. Saint Paul avait ses raisons pour rappeler cette exclusion dans le monde grec qui, d’après Platon

193. — Femme égyptienne ivre. D’après Wilkinson, Manners, 2e édit., t. i, p. 392.

lui-même, Leges, VI, trad. Grou, Paris, 1845, t. i, p. 288, regardait l’ivresse comme décente « dans les fêtes du dieu qui nous a fait présent du vin ». — Aussi saint Paul recommande-t il de fuir la compagnie des ivrognes, I Cor., v, 11, et de se garder de l’ivresse. Rom., xiii, 13 ; Gal., v, 21. Il était même expressément recommandé de ne boire aucune liqueur enivrante au grand-prêtre, Lev., x, 9, à celui qui faisait le vœu du nazaréat, Num., vi, 3, et à certains personnages auxquels Dieu assignait Une mission spéciale, comme Manué, mère de Samson, Jud., xiii, 4, 7, 14, et saint Jean-Baptiste. Luc, i, 15.

II. L’ivresse improprement dite. — Les Livres Saints parlent quelquefois d’ivresse dans des circonstances où l’on ne fait que boire à sa soif et assez copieusement, comme il arrivait dans les festins. C’est en ce sens restreint que les frères de Joseph s’enivrèrent avec lui, Gen., XLin, 34, que les convives de Cana étaient enivrés, Joa., ii, 10, et que, dans les agapes des premiers chrétiens, l’un était ivre tandis que l’autre manquait de tout. I Cor., XI, 21. Dans ces passages, a s’enivrer » est un hébraïsme qui signifie « bien boire », de même que, par exemple, « haïr » signifie i aimer moins ». Cf. Gen., xxix, 31 ; Deut., xxi, 15, 16 ; Rom., ix, 13, etc. Aggée, i, 6, marque cette nuance quand il dit aux Juifs : t Vous buvez et vous n'êtes pas enivrés. » — Les Juifs entendaient sans doute parler de ce genre d’ivresse lorsque, dans une de leurs calomnies, ils accusaient Notre-Seigneur d'être oIvottotïiç, potator vini, <l buveur de vin. » Matth., xi, 19.

III. L’iVRESSEDANS LÉ SENS METAPHORIQUE. — L’ivresse

est prise par les écrivains sacrés comme terme de comparaison, quand ils parlent soit des passions qui mettent l’homme hors de lui, soit des choses qui se

présentent avec une abondance excessive. On peut être ainsi :  ! Ivre d’amour. L'époux du Cantique, v, 1, invite ses amis à s’enivrer d’amour. Voir aussi Prov., v, 18, 19. Mais d’autres fois, cette ivresse vient d’un amour criminel. Prov., vii, 18. Les hommes sont enivrés par le vin de l’impudicité que leur verse Babylone. Jer., li, 7 ; Apoc., xvii, 2. Que l’Israélite, infidèle à l’alliance du Seigneur, ne dise pas : « J’aurai la paix, même si je suis les penchants de mon cœur et si j’ajoute l’ivresse à la soif. » Deut., xxix, 19. — 2o Ivre de douleur. Jérusalem, après sa ruine, est ivre d’absinthe, symbole de la douleur. Lam., iii, 15 ; Ezech., xxiii, 33. — 3 « Ivre de frayeur, comme le navigateur pendant la tempête. Ps. cvi (cvii), 27. Jérémie, xxv, 27, dit aux ennemis d’Israël de la part de Dieu : « Buvez, enivrez-vous, vomissez, sans vous relever, à la vue du glaive que je vais envoyer au milieu de vous ! » Le prophète lui-même tremble comme un homme ivre, à la pensée des crimes de son peuple et des châtiments qui vont le frapper. Jer., xxiii, 9-12. — 4o Ivre de sang, quand on a répandu à profusion son propre sang, Is., xlix, 26, ou le sang des autres. Israël, soutenu par la force du Seigneur, s’enivrera du sang de ses ennemis vaincus. Zach., ix, 15 ; Ezech., xxxix, 19. Saint Jean représente Babylone comme une « femme ivre du sang dés saints et du sang des témoins de Jésus ». Apoc, xvii, 6. La métaphore est même employée quand il s’agit des choses inanimées. Le Seigneur enivrera ses flèches du sang de ses ennemis. Deut., xxxii, 42. L'épée du Seigneur s’enivre à l’avance du sang qu’elle va verser, ls., xxxiv, 5, 6. Au jour de la vengeance, son épée dévore, elle se rassasie, s’enivre du sang de ses ennemis. Jer., xlvi, 10. — 5o Ivre par suite de la malédiction divine. Les prophètes se servent fréquemment de la comparaison tirée de l’ivresse pour indiquer l’effet produit par la colère divine sur les pécheurs et sur les nations infidèles. Dieu fait errer les méchants comme des hommes ivres, qui tâtonnent dans les ténèbres. Job, XII, 25. — Les nations étrangères seront frappées de cette ivresse, qui comportera pour elles l'étourdissement, la titubation, l'égarement, la chute, le vomissement, le sommeil mortel. Ce sera le sort des ennemis d’Israël, Is., lxiii, 6 ; de l’Egypte, Is., xix, 14 ; de Ninive, Nah., iii, 11 ; de Babylone, Jer., li 39, 57 ; d'Édom, Lam., iv, 21 ; de Moab. Jer., XLvm, 26. Jérusalem est comme une coupe d'étourdissement pour ceux qui s’attaquent à elle. Zach., xii, 12. — Cette ivresse atteindra aussi le peuple de Dieu, devenu infidèle. Dieu abreuve son peuple d’un vin d'étourdissement, en déchaînant contre lui ses ennemis. Ps. lix (lx), 5. Les habitants de Samarie, les gens d'Éphraïm, et ceux de toute la Palestine sont traités d’ivrognes, à cause de leurs débauches et de leur insouciance. Is., xxviii, 1, 3 ; Joël, i, 5. La terre de Juda chancelle comme un homme ivre, à cause des crimes de ses habitants. Is., xxiv, 20. La malédiction divine porte l’ivresse à ses derniers excès. Is., xxviii, 7 ; Jer., xiii, 13. Jérusalem coupable est ivre, mais non de vin ; elle chancelle, parce que Dieu ne lui révèle plus rien. Is., xxix, 9, 10. Elle boit, de la main du Seigneur, la coupe de la colère et absorbe jusqu'à la lie la coupe de l'étourdissement. Is., li, 17, 21, 22. — Parmi les agrapha du papyrus de Behnesa, découvert en 1897, Sayings of Our Lord discovered and edited by B. P. Greafell and A. S. Hunt, Londres, 1897, la troisième sentence est ainsi conçue : « Jésus dit : J’ai été au milieu du monde et je leur suis apparu dans la chair, et je les ai trouvés tous ivres, (ie6ûovta « , et je ne n’en ai trouvé aucun d’altéré. » Les hommes n’avaient pas soif de la justice, Matth., v, 6, et l’ivresse des biens temporels les empêchait d'être altérés des biens spirituels. Cf. Revue d’histoire et de littérature religieuses, Paris, 1897, p. 434 ; Revue biblique, Paris, 1897, p. 506.

H. Lesêtke. IVROGNE, IVROGNERIE. L’ivrogne est celui qui a l’habitude de boire avec excès, et l’ivrognerie est cette habitude vicieuse. Voir Ivresse.

IXION, mot par lequel la Vulgate rend l’hébreu râʾâh. Deut., xiv, 13. Le râʾâh, qu’on retrouve sous la forme dâʾâh dans le Lévitique, xi, 14, est un oiseau que la loi défend de manger. Cet oiseau est vraisemblablement le busard. Voir Busard, t. i, col. 1974. Le Samaritain omet le mot râʾâh ; l’Alexandrin et le Vaticanus ne le traduisent pas, alors que d’autres versions grecques le rendent par ἰξός. Mais ce mot grec n’a jamais désigné un oiseau ; il veut dire seulement « gui » ou « glu ». Cf. Bailly-Egger, Dictionn. grec-français, Paris, 1895, p. 971. Quant à ixion, ce n’est pas un mot latin. Cf. Freund-Theil, Grand dictionnaire de la langue latine, Paris, 1872, t. ii, p. 294. Il ne se lit qu’en cet endroit de la Vulgate. Il désigne en grec un personnage mythologique, ἰξίων, Ixion, roi des Lapithes. Pindare, Pythie., ii, 59 ; Eschyle, Eumen., 441, 718. Peut-être ἰξός et ixion proviennent-ils d’une mauvaise lecture, dans les manuscrits grecs, de ἰκτίνος, « milan, « qui se trouve dans les deux mêmes versets du Lévitique et du Deutéronome.

IYAR, nom du second mois de l’année juive dans le Talmud. Il commençait à la nouvelle lune d’avril. Comme les autres noms de mois du calendrier juif, il fut emprunté par les Hébreux de la captivité au calendrier assyro-babylonien, où il occupait aussi la seconde place, sous le nom d’airu. Ce mot vient probablement de la racine אור, ʾIôr, « lumière. » Le mois d’Iyar serait donc le mois « brillant », par opposition au mois « sombre », le mois d’Adar, racine : אור, qui commençait à la nouvelle lune de février. — Iyar était consacré au dieu Éa. C’est dans ce mois qu’Asarhaddon proclama solennellement son fils Assurbanipal héritier légitime du trône d’Assyrie et qu' Assurbanipal lui-même rapporta à Babylone la statue de Marduk enlevée par un de ses prédécesseurs. — Le mois d’ijar,-i » iii, a passé du calendrier babylonien dans les calendriers palmyrénien, nabatéen et syrien, dans le ? Targums et le Talmud. Mais il ne se trouve pas dans la Bible. Le mois correspondant y est désigné tantôt par son rang de « second mois », II Par., xxx, 2, tantôt sous le nom de ziv. I Reg., vi, 1, 37.

Ziv, iii, est un des anciens noms de mois chananéens. Le Targum de Jonathan, I Reg., VI, 1, 37, le qualifie de « mois des fleurs »ירחבצביא, ירח . Le Talmud de Jérusalem (Rosch haschschanah, ch. I) rapproche ce mot de l’araméen Vf (cf. Dan., ii, 31 ; iv, 33 ; v, 6, 9, 10, etc.), « éclat, splendeur, couleur du visage. » « En principe on nommait le mois de Ziv, en raison de l'éclat (ziv) de ce mois (d’Iyar) où toutes les plantes ont surgi et où les arbres se distinguent par leurs produits. » M. Schwab, Le Talmud de Jérusalem, Paris, 1883, t. vi, p. 61-62. — On le trouve dans une des inscriptions néo-puniques découvertes par Lazare Costa à Constantine (n° 70) sous la forme orthographique de basse époque ויב. Cf. Corpus inscriptionum semiticarum, 1. 1, p. 365. — Le mois de ziv n’est mentionné que dans deux passages de la Bible. I Reg., vi, 1, 37. C’est pendant ce mois, y est-il dit, que Salomon jeta les fondements du Temple. — Voir Die Keilschrifttexte Assurbanipals, édit. Winckler, Leipzig, 1875, i, 11-23 ; H. Rawlinson, The cuneiform inscriptions of western Asia, t. v, 43, 1. 3-8, a-b ; Frd. Delitzsch, Assyrische Lesestücke, 3e édit., Leipzig, . 1885, p. 92 ; Clermont-Ganneau, Études d’archéologie orientale, cxiir 5 fascicule de la Bibliothèque de l'École des Hautes Études, t. ii, p. 62-76 ; M. Jastrow, The religion of Bajbylonia and Assyria, Boston, 1898, p. 462, 464, 684 ; Lidzbarski, Handbuch der nordsemitischen Epigraphik, Berlin, 1898.

F. Martin.


IZRAHIA (hébreu : Izraḥyâh, « que Jéhovah fasse jaillir ou briller ; » Septante : Ἰεζραΐα), fils d’Ozi, chef d’une des familles de la tribu d’Issachar et père de Michaël, d’Obadia, de Johel et de Jésia. I Par., vii, 3.







DICTIONNAIRE


DE LA BIBLE




TOME TROISIÈME


DEUXIÈME PARTIE


J — K










ENCYCLOPÉDIE


DES


SCIENCES ECCLÉSIASTIQUES


RÉDIGÉE PAR
LES SAVANTS CATHOLIQUES LES PLUS ÉMINENTS
DE FRANCE ET DE L’ÉTRANGER


______________________________________________________
1° DICTIONNAIRE DE LA BIBLE
Publié par F. VIGOUROUX, prêtre de Saint-Sulpice
Ancien professeur à l’Institut catholique de Paris, Secrétaire de la Commission biblique.
____________________________________________________
2° DICTIONNAIRE DE THÉOLOGIE CATHOLIQUE
Commencé sous la direction de A. VACANT, prof. au Sém. de Nancy,
Continué sous celle de Eug. MANGENOT, professeur à l’Institut catholique de Paris.
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3° DICTIONNAIRE D’ARCHÉOLOGIE CHRÉTIENNE ET DE LITURGIE
Publié par le Rme dom Fern. CABROL, abbé de Farnborough et dom H. LECLERCQ.
____________________________________________________
4° DICTIONNAIRE D’HISTOIRE ET DE GÉOGRAPHIE ECCLÉSIASTIQUES
Publié par Mgr Alfred BAUDRILLART, recteur de l’Institut catholique de Paris,
Albert VOGT, docteur ès lettres, et Urbain ROUZIÈS.
____________________________________________________
5° DICTIONNAIRE DE DROIT CANONIQUE
(En préparation)

DICTIONNAIRE
DE LA BIBLE

CONTENANT
TOUS LES NOMS DE PERSONNES, DE LIEUX, DE PLANTES, D’ANIMAUX
MENTIONNÉS DANS LES SAINTES ÉCRITURES
LES QUESTIONS THÉOLOGIQUES, ARCHÉOLOGIQUES, SCIENTIFIQUES, CRITIQUES
RELATIVES À L’ANCIEN ET AU NOUVEAU TESTAMENT
ET DES NOTICES SUR LES COMMENTATEURS ANCIENS ET MODERNES


PUBLIÉ PAR
F. VIGOUROUX
PRÊTRE DE SAINT-SULPICE
AVEC LE CONCOURS D’UN GRAND NOMBRE DE COLLABORATEURS



DEUXIÈME TIRAGE



TOME TROISIÈME
DEUXIÈME PARTIE
J — K





PARIS
LETOUZEY ET ANÉ, ÉDITEURS

76bis, RUE DES SAINTS-PÈRES, 76bis


1912
TOUS DROITS RÉSERVÉS





Imprimatur

Parisiis, die 27 Januarii 1903.

Franciscus, Card. RICHARD,
Arch. Par.

J


J. Dans la transcription des noms propres de lieux et de personnes, notre j rend l’iod initial hébreu, lorsqu’il est suivi des voyelles a, e, o ou u : Jabès = Yâbêš ; Jacob = Ya’ǎqôb ; Jéhu = Yêhû’ ; Jérusalem = Yerû-šâlaîm ; Joseph = Yôsêf ; Jubal = Yûbal. Voir Iod, col. 920.


JAASIA (hébreu : Yaḥzeyâh ; Septante : Ίαζίας), fils de Thécué. I Esd., x, 15. Esdras chargea Jonathan et Jaasia de dresser, avec le concours de Mésollam et Sébéthaï, le catalogue des Israélites qui avaient épousé des femmes étrangères. I Esd., x, 1-17. Le texte hébreu, ꝟ. 15 dit au contraire que Jaasia, Jonathan, Mésollam et Sébéthaï s’opposèrent au dénombrement. Voir Sébéthaï.


JABEL (hébreu : Yâbâl ; Septante : Ίωβήλ, fils de Lamech et d’Ada, frère de Jubal. Gen., iv, 20. Il fut le père des nomades ou de ceux qui habitent sous la tente, en élevant des troupeaux, c’est-à-dire qu’il fut le premier à mener ce genre de vie.


JABÈS. La Vulgate a rendu ainsi deux noms d’hommes et deux noms de ville qui ont deux orthographes différentes en hébreu : Ya‘ebêṣ (voir Jabès 2 et 5), et Yâbêš, « sec. » Voir Jabès 1 et 3.

1. jabès (hébreu : Yâbêš ; Septante : Ίαβίς ; Codex Alexandrinus : Άβείς ; Ιαβείς, père de Sellum, roi d’Israël. IV Reg., xv, 10, 13, 14.

2. jabès (hébreu : Ya‘ebêṣ ; Septante : Ίαγβής ; Codex Alexandrinus : Ίαγβής, Γαβής), descendant de Juda. I Par., iv, 9-10. Sa mère lui donna ce nom, dit le texte, parce qu’elle l’enfanta dans la douleur (עצב, ‘ôṣéb). Lui-même fait un jeu de mots sur son nom dans une prière qui est reproduite par l’écrivain sacré : « Jabès invoqua le Dieu d’Israël, disant : Puisses-tu me bénir et étendre mes limites ; que ta main soit avec moi, et qu’elle me préserve du mal, en sorte que je ne sois pas dans la douleur (עצבי, ‘ŏṣbî) ! Et Dieu lui accorda ce qu’il demandait. » Ces détails sont donnés au milieu d’une sèche énumération généalogique, et sans indiquer à quelle famille de Juda appartenait Jabès. Il est dit seulement qu’il était plus considéré que ses frères, lesquels ne sont pas nommés, non plus que son père et sa mère. Ce passage a ainsi un caractère fragmentaire et incomplet. On ne sait s’il existe quelque connexion entre la personne de Jabès et la ville appelée du même nom. I Par., ii, 55. Voir Jabès 5. Le Targum identifie Jabès avec Othoniel.

3. jabès-galaad (hébreu : Yâbêš Gil‘âd, Jud., xxi, 8, 10, 12, 14 ; I Reg., xi, 1, 9 ; xxxi, 11 ; II Reg., ii, 4, 5 ; xxi, 12 ; I Par., x, 11 ; ou simplement Yâbêš, I Reg., xi, 3, 5, 18 ; Yâbêšâh, avec local, I Reg., xxxi, 12 ; I Par., x, 12 ; Septante : Codex Vaticanus : Ἰαβείς Γαλαάδ, Jud., xxi, 8, 18, 12, 14 ; I Reg., xi, 1 ; II Reg., xxi, 12 ; Ἰαβείς τής Γαλααδίτιδος, I Reg., xxxi, 11 ; II Reg., ii, 4, 5 ; Ἰαβείς seul, I Reg., xi, 3, 5, 9, 10 ; I Reg., xxxi, 12 ; I Par., x, 12 ; Γαλαάδ seul, I Par., x, 11 ; Codex Alexandrinus : Εἰαβείς, I Reg., xi, 9, 10 ; xxxi, 11, 12, 13 ; II Reg., ii, 4, 5 ; Vulgate : Jabès Galaad, Jud., xxi, 8, 10, 12, 14 ; I Reg., xi, 1, 9 ; xxxi, 11, 12 ; II Reg., ii, 4, 5 ; xxi, 12 ; I Par., x, 11 ; Jabès, I Reg., xi, 3, 5 ; I Par., x, 12), ville du pays de Galaad, à l’est du Jourdain. Jud., xxi, 8, 10, 12, 14, etc. Le nom, écrit יָבֵש et יָבִישׁ, veut dire « aride ». Josèphe le transcrit par Ἰάβισος, Ant. jud., V, ii, 11 ; Ἰαβίς, Ant. jud., VI, v, 1, et Ἰαβισσός, Ant. jud., VI, xiv, 8. L’antique cité est mentionnée pour la première fois dans le livre des Juges, xxi, 8-14, à propos de l’anathème porté par les Israélites contre la tribu de Benjamin à la suite du crime commis par les habitants de Gabaa sur la femme d’un lévite. Réunis à Maspha, les enfants d’Israël avaient juré de ne pas donner leurs filles pour femmes aux Benjamites, et en même temps de punir de mort ceux qui ne marcheraient pas contre les coupables obstinés. Or il se trouva que les habitants de Jabès-Galaad n’avaient pas pris part à la guerre. On envoya donc dix mille hommes qui en exterminèrent la population, sauf les jeunes filles nubiles, au nombre de quatre cents, qu’on donna aux Benjamites échappés au massacre. Cependant la ville ne tarda pas à se relever, car nous la voyons un peu plus tard assiégée par Naas, roi des Ammonites. I Reg., xi, 1. Ne pouvant obtenir un traité d’alliance, elle eut seulement la permission de réclamer le secours d’Israël. Ses envoyés vinrent à Gabaa, et Saül convoqua tout le peuple, qui se leva en masse et forma une immense armée. Celle-ci, surprenant les Ammonites et les attaquant des trois côtés à la fois, les frappa et les mit en déroute, et Jabès fut délivrée. I Reg., xi, 1-11. Les habitants montrèrent plus tard leur reconnaissance. En apprenant que les Philistins, vainqueurs de Saül sur le Gelboé, avaient coupé la tête du roi et suspendu son corps à la muraille de Bethsan, ils résolurent d’aller l’enlever et l’arracher à la honte. Les hommes les plus vaillants se levèrent donc, et, marchant toute la nuit, prirent les cadavres de Saül et de ses fils, et après les avoir brûlés, déposèrent les ossements « sous le tamaris de Jabès » (Vulgate : « dans le bois de Jabès »). I Reg., xxxi, 11-13 ; I Par., x, 11, 12. David les félicita de leur belle conduite, II Reg., ii, 4, 5, et fit ramener les cendres royales dans le pays de Benjamin. II Reg., xxi, 12-14. — Cette expédition nocturne des habitants de Jabès montre que la ville ne devait pas être éloignée de Bethsan (aujourd’hui Béïsân), de l’autre côté du Jourdain. Le site en est jusqu’à présent resté inconnu, mais le nom s’est conservé dans celui d’un torrent, l’ouadi Yâbis, qui se jette dans le fleuve au sud-est de Béïsân. Eusèbe et saint Jérôme, Onomastica sacra, Gœttingue, 1870, p. 134, 268, nous disent que, de leur temps, c’était encore « un village, κωμή, à six milles (près de neuf kilomètres) de Pella, sur la montagne, en allant vers Gérasa (Djérasch) ». Voir la carte de Gad, col. 28. Robinson, Biblical researches in Palestine, Londres, 1856, t. iii, p. 319, suppose que l’emplacement pourrait être fixé à Ed-Deir,

à la distance indiquée au sud-est de Khirbet Fahîl (Pella). L. Oliphant, The land of Gilead, Edimbourg, 1880, p. 174, préfère Miryamîn ; mais ce point est trop rapproché de Fahîl. D’autres enfin cherchent plutôt Jabès dans la proximité de Kefr 'Abîl, entre Miryamîn et Ed-Deir. Cf. J. P. van Kasteren, Bemerkungen liber einige alte Ortschaften im Ostjordanlande, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, t. xiii, 1890, p. 211 ; F. Buhl ; Géographie des allen Palâstina, Fribourg-en-Brisgau, 1896, p. 259.

4. JABÈS (LE BOIS DE) (hébreu : hâ-'êSél be-YâbêSâh, « le tamaris à Jabès ; » Septante :-f) apoupa-f) Iv 'IaëEt'?, « le champ » ou « le verger qui était en Jabès » ), endroit où les habitants de Jabès -Galaad ensevelirent les ossements de Saul et de ses fils, dont ils avaient enlevé les cadavres des murs de Bethsan. I Reg., xxxi, 13. La Vulgate en fait un bois, xii nemore Jabes. L’hébreu porte dans un endroit, I Reg., xxxi, 13, tahat hâ-'êéél, « sous le tamaris, » et dans l’autre, I Par., x, 12, tahat hâ-'êlâh, « sous le térébinthe. » Septante : i%6 rï)v SpOv ; Vulgate : subter quercum, « sous le chêne. » C'était donc un arbre très connu à Jabès, comme l’indique l’article.

Voir Jabès-Galaad.

5. JABÈS (hébreu : Ya’bês ; Septante : Codex Vaticanus : Tapée, Codex Alexandrinus : Faë-r^), ville de Juda où habitaient des scribes (hébreu : sôferîm). I Par., ii,

55. Elle est inconnue,
    1. JABIN##

JABIN (hébreu : Yâbïn), nom ou titre de deux rois d’Asor.

4. JABIN (Septante : 'Ia6î « ), roi d’Asor, qui vivait du temps de Josué. Voir AsoR 1, t. i, col. 1105 ; Jos., xi, 1. Effrayé par les victoires que Josué avait remportées contre les rois du sud de la Palestine, Jabin se mit à la tête d’une confédération des rois chananéens du nord, et ayant rassemblé une armée considérable, il marcha contre les Israélites. Les armées ennemies se rencontrèrent dans le voisinage du lac Mérom. Voir Mérom. Jabin fut battu et Josué, profitant de sa victoire, s’empara d’Asor et la brûla ; son roi fut tué, et finalement tout le pays soumis. Jos., xi, 1-17. Voir Josué.

2. JABIN (Septante : 'Iaêfv), roi d’Asor, qui vivait du temps de Débora et de Barac, juges d’Israël. C'était probablement un descendant, en tout cas le successeur du Jabin, roi de la même ville d’Asor, qui avait été tué par Josué. Les Chananéens, depuis la mort de Josué, avaient réussi à relever Asor de ses ruines et même à soumettre les Israélites du Nori auxquels ils avaient imposé un tribut. Jabin avait neuf cents chars de guerre qui faisaient la terreur des descendants de Jacob. Il ne commandait pas lui-même son armée, comme son prédécesseur ; il avait placé à la tête de ses troupes Sisara, dont la capacité militaire lui inspirait sans doute confiance. Lorsque les tribus du Nord, à l’instigation de Débora, refusèrent de continuer à payer le tribut à Jabin et se révoltèrent contre lui, sous la conduite de Barac, Sisara marcha contre elles ; mais il fut battu et périt dans sa fuite de la main de Jahel la Cinéenne. Jud., iv, 2, 7, 17. Jabin habitait à Haroseth des nations. Voir Ha.roseth, col. 433. Il ne paraît pas avoir pris part personnellement à la campagne, mais la défaite de son armée est justement considérée comme sa propre défaite. Jud., iv, 23 ; Ps. lxxxii, 10. Il ne se releva point du coup qui venait d'être porté à sa puissance, et les Israélites surent si bien mettre leur victoire à profit, qu’ils n’eurent plus rien à redouter des Chananéens. Voir Débora 2, L ii, col. 1231 ; Barac, t. i, col. 1443 ; Jahel, col. 1106.

    1. JABLONSKI Daniel Ernest##


1. JABLONSKI Daniel Ernest, théologien protestant

né dans un petit village près de Dantzig le 26 novembre 1660, mort à Berlin le 25 mai 1741. Il suivit les cours à l’université de Francfort-sur-1'Oder et visita la Hollande et l’Angleterre. De retour en son pays, il fut pasteur à Magdebourg, puis directeur du gymnase de Lyssa en Pologne. En 1693, il fut nommé prédicateur du roi à Berlin et, en 1733, l’académie royale de cette ville le choisit pour président. Il travailla longtemps et sans succès à la réunion des sectes protestantes. Trèy versé dans la connaissance de la langue hébraïque, il publia : Biblia hebraica cum punctis : item cum notis hebraicis et lemmatibus latinis, 2 in-4o, Berlin, 1699 ; la 2e édition a pour titre : Biblia hebraica… Subjungitur Leusdeni catalogus 2294 selectorum versicutorum quibus omnes voces Veteris Testamenti continentur, in-12, Berlin, 1712.

B. Heurtehize. 2. JABLONSKI Paul Ernest, orientaliste protestant allemand, né à Berlin en 1693, mort à Francfort-surPOder le 14 septembre 1767. Il suivit les cours de l’université de Francfort et s’attacha surtout à l'étude de la langue copte. Il visita divers pays et explora tout particulièrement les bibliothèques d’Oxford, de Leyde et de Paris. En 1721, il devint professeur de philosophie à Francfort, et l’année suivante obtint la chaire de philosophie. Parmi ses nombreux écrits nous mentionnerons seulement : Disquisitio de lingua Lycaonica ad locum Actorum, xir, 11, in-4o, Berlin, 1713 ; Bemphan, JEgyptiorum deus, ab Isrælitis in deserlo cultus, in-8 l>, Francfort-sur-1'Oder, 1731 ; Dissertationes academicse rm de terra Gosen, in-4o, Francfort, 1735 ; Dissertatw de sinapi parabolico ad Matth., xiii, 31 et 32, in-4o, Francfort, 1736 ; De ultimis Pauli apostoli laboribus a B. Luca prætermissis, in-4o, Berlin, 1746. Par les soins de J. Vater fut publié l’ouvrage suivant de P. E. Jablonski : Opuscula quibus lingua et antiquitas Mgyptiorum difficilia Sacrorum Librorum loca et historiée ecclesiasticse capita illustrantur, 4 in-8o, Lej’de,

1804-1813.
B. Heurtebize.
    1. JABNIA##

JABNIA (hébreu : Yabnéh ; Septante : 'Ioêvrip ; Alexandrinus.Iaëef ;), orthographe, dans II Par., xxvi, 6, de la ville de Juda qui est appelée Jebnéel, Jos., xv, 11, et Jamnia dans les Machabées. I Mach., iv, 15, etc. Voir Jamnia, col. 1115.

    1. JABOC##

JABOC (hébreu : Yabbôq ; Septante : 'Ia6t6y_ et 'I « <5<Sx ; Vulgate : Jaboc et Jeboc), rivière (nahal) de l’ancien pays de Galaad, à l’est du Jourdain (fig. 194).

I. Histoire et identification.

Jacob revenant de Mésopotamie, après s'être séparé de Laban, à l’entrée des monts de Galaad, vint à Manahaïm et de là descendit vers le Jaboc qu’il traversa à gué avec sa famille, pour se rendre ensuite à l’endroit qu’il appela Socoth et de là à Sichem. Gen., xxxii, 23 ; xxxiii, 17-20. Le patriarche ne s'était pas encore^éloigné des bords du fleuve quand se présenta à lui le personnage mystérieux avec qui il lutta jusqu’au matin ; c’est là qu’il reçut le nom d’Israël. Gen., xxxii, 24-30. — Le Jaboc, au temps du roi Og, formait la limite méridionale du royaume de Basan et la limite septentrionale du territoire de Séhon, roi d’Hésébon ; il divisait en deux parties presque égales le pays de Galaad. Jos., xii, 2 ; Jud., xi, 13-22. Il formait aussi la frontière nord du pays des Ammonites. Num., xxi, 24 ; Deut., ii, 37 ; iii, 16. Cf. Josèphe, Ant. jud., IV, v, 2, 3. — La Peschito nomme, Judith, ii, 24, la région du Jaboc parmi celles qui furent ravagées par les armées du roi d’Assyrie. Dans le grec, ibid., on lit à la place 'A6pwvdt ; et dans la Vulgate, ii, 14, Mambré. La lecture vraie paraît devoir être Chaboras. Voir Abronas, 1. 1, col. 92, et Mambré 3. — Le nom de Jaboc a depuis longtemps cessé d'être en usage. Induits en erreur par le nom de Djéser Ya’qùb, « pont de Jacob, » ou Djéter bendt Ya’qùb, « pont des filles de Jacob, » donné à un pont construit sur le Jourdain supérieur, à près de trois kilomètres de l’extrémité sud du lac Houléh, près d’un château nommé Qasr Ya’qûb, « le château de Jacob, » un grand nombre de voyageurs ont pris cet endroit, malgré l’écriture et l’histoire, pour le gué du Jaboc traversé par le patriarche Jacob à son retour de Mésopotamie ; ils l’ont souvent désigné sous le nom de vadum Jacob, « le gué de Jacob, » faisant ainsi de cette partie du Jourdain le Jaboc lui-même. Cf. Boniface Stéphani de Raguse (1555), De perenni cultu Terras Sanctæ, édit. de Venise, 1875, p. 272 ; de Radzivil (1582-1584), Peregrinatio hierosolymitana, in-f°, Anvers, 1614, p. 41 ; Aquilante Rochetta (1598), Peregrinatione di Terra Santa, tr. ii, c. xxi, Palerme, 1630, p. 99-100. Les descriptions de la Terre Sainte du xiie siècle et celles des siècles suivants indiquent le Jaboc traversé par Jacob, à deux milles (ou deux lieues) au sud du lac de Tibériade. Cf. Fretellus (vers 1120), De lotis sanctis, t. clv, col. 1042 ; Jean de Wurzbourg (1137), Descriptio Terræ Sanctæ, t. clv, col. 1069 ; Theodoricus (vers 1172), Libellus de locis sanctis, xlix, édit. Tobler, in-12, Saint-Gall et Paris, 1865, p. 107 ; Thietmar (1217), Peregrinatio, p. 8, à la suite de Peregrinationes medii ævi quatuor, 2e édit., Laurent, in-4°, Leipzig, 1873 ; Odoric de Portnau, en Frioul (vers 1330), De Terra Sancta, ibid., p. 155, etc. Les cartes d’Adrichomius dans son Theatrum Terræ Sanctæ, in-f°, Cologne, 1590, celle de Jacques Goujon, accompagnant son Histoire et voyage de la Terre Sainte, in-4°, Lyon, 1670, celle de J. Bonfrère, dans Onomasticon, édit. J. Clericus, in-f°, Amsterdam, 1707, et plusieurs autres montrent le Jaboc vers l’extrémité sud du lac de Tibériade ou de Génézareth, là où coule la rivière appelée aujourd’hui le Šerî’at el-Menâdréh. C’est le Hiéromax des Grecs et des Latins, et Yarmouk des écrivains juifs et arabes. Ce nom, pris à tort pour une forme ou une corruption de Jaboc, aura été la cause de cette identification. Si ces deux noms offrent une certaine ressemblance, ils ont cependant été employés simultanément pour designer deux cours d’eau différents. Le récit biblique, en traçant la ; marche de Jacob du nord-est au sud-ouest et en plaçant le passage du Jaboc après la station de Mahanaïm, semble désigner clairement la situation de ce fleuve au sud de cette localité qui elle-même doit être placée au sud du Yarmouk. Voir Mahanaïm.

Eusèbe de Césarée, à une époque où le nom de Jaboc ne devait pas encore avoir été remplacé par un nom arabe, indiquait ainsi la situation de cette rivière : « Le fleuve Jaboc… coule entre Ammon, qui est Philadelphie, et Gérasa, pour aller ensuite se mêler au Jourdain. ». Onomasticon, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, p. 222, 224.

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194. — Le Nahr ez-Zerqa’à la sortie des montagnes. D’après une photographie de M. L. Heidet.

Saint Jérôme, dans sa traduction, ajoute, après Gérasa : « à quatre milles de celle-ci. » De locis et nom. hebr., t. xxiii, col. 963. La rivière qui coule entre’Amman, la Philadelphie des Grecs, et Djéras, la Gérasa des anciens, à quatre milles (environ six kilomètres) au sud de cette dernière localité, c’est le Nahr ez-Zérqa’. La tradition juive l’a toujours désignée comme l’ancien Jaboc : « À une journée à peu près au nord d’Hésébon, on trouve le fleuve Yabôq, appelé Ouadi’z-Zerqa’, » disait, au xiiie siècle, le rabbin Estôri ha-Parchi, dans son JCaftor va-Phérah, édit. Luncz, Jérusalem, 1897, p. 63. Au siècle dernier, le géographe Chr. Cellarius, suivant les indications de l’Écriture, d’Eusèbe et de saint Jérôme, remettait le Jaboc à sa véritable place. Notitiæ orbis antiqui, t. III, c. xiii, in-4°, Leipzig, 1706, t. ii, p. 650, et sur la Carte de Palestine. Les palestinologues modernes sont généralement d’accord pour reconnaître le Jaboc dans l’actuel Nahr ez-Zerqa’ et l’Ouadi’z-Zerga — Voir Gratz, Schauplatz der heil. Schrift, nouvelle

édit., in-8 « , Ratisbonne, 1873, p. 208, 428 ; de Saulcy. Dictionnaire topographique abrégé de la Terre Sainte, in-12, Paris, 1877, p. 184 ; R. Riess, Biblische Géographie, in-f°, Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 30 ; Àrmstrong, Wilson et Conder, iVar)ïes and places in the OUI Testament, in-8o, Londres, 1887, p. 91 ; Buhle, Géographie des alten Palàstina, in-8o, Fribourg et Leipzig, 1896, p. 122, etc. II. Description.

Le Nahr ez-Zerqa’, « la rivière bleue, » est, après le Sériât el-Menddréh, l’ancien Yarmouk, le plus considérable des affluents du Jourdain. « Le commencement de la Zerqa’, » râs ez-Zerqa’, selon la manière de parler des Arabes, se trouve près du château du même nom, Qal’at ez-Zerqa’, à 22 kilomètres au nord-est de’Amman, où il. reçoit les eaux abondantes du’Aïn ez-Zerqa’, « la source de la Zerqa’. » En réalité la vallée où elle a son lit et la rivière elle-même commencent un peu à l’ouest de’Amman avec Vovadi’Amman. Le cours d’eau traverse les ruines inférieures de’Amman et se dirige au nord-est jusqu’au Râs ez-Zerqa’. De ce point il fléchit au nord-ouest jusqu’à la rencontre de i’ouadi Djéras, au delà duquel il décrit ses nombreux méandres sur une ligne presque droite allant d’est en ouest jusqu’à l’issue des montagnes. En entrant dans le Ghôr, il incline au sud-ouest pour aller se jeter dans le Jourdain, près du pont d’Ed-Damiéh et en face de la montague appelée Qarn Sartabéh, après avoir parcouru avec ses sinuosités près de 100 kilomètres. Outre les eaux de Vouadi Djéras, le Nahr ez-Zerqa’reçoit encore sur son parcours le tribut des cours de plusieurs courants permanents, et l’hiver de nombreux torrents. Près de’Amman où la pente est moins forte et où elles sont quelquefois resserrées et ralenties dans leur cours par des digues, les eaux de la rivière dépassent un mètre de profondeur ; au delà de Youadt Djéras, la vallée assez large jusque-là se rétrécit et les eaux de la Zerqa’se précipitent sur la pente qui va s’abaissant rapidement vers le Ghôr, entre les flancs élevés et abrupts des anciens monts de Galaad. La largeur moyenne de la rivière en cette partie est d’environ 7 mètres, et sa profondeur de 60 centimètres. Pendant l’hiver, quand elle a été gonflée par des pluies torrentielles, elle devient souvent infranchissable. À la sortie des montagnes, la rivière s’élargit et s’approfondit, et presque en toute saison il est nécessaire de chercher un gué pour la passer. Jacob, se dirigeant vers Sichem, la franchit probablement en cette dernière partie, non loin du pied des montagnes. D’innombrables petits poissons aux écailles argentées, de la grandeur de la truite à laquelle ils ressemblent par la forme, se jouent dans des eaux limpides de la Zerqa’qui court entre deux haies d’oléandres touffus et serrés auxquels se mêlent çà et là quelques agnus-castus, de gigantesques roseaux, et des arbustes d’autres espèces. La vallée ressemble à un immense abîme creusé pour séparer en deux le pays au de la du Jourdain. Les deux côtés, , celui de la Belqa’, au sud, et celui de l’Adjloùn au nord, sont couverts de rétem, ou genêts, et en quelques endroits de buissons d’oliviers sauvages parmi lesquels des bergers, descendant des quelques villages qui couronnent les hauteurs, viennent faire paître leurs troupeaux de vaches, de moutons et de chèvres. Deux ou trois moulins ruinés sont les seules constructions qui paraissent s’être jamais élevées sur les bords de la Zerqa’, dans la partie profonde de la vallée.’L. Heidet.

    1. JACAN##

JACAN (hébreu : Ya’âqân ; Septante : ’Iaxîjj.), Horréen dont le nom est écrit Acan dans la Genèse, xxxvi, 27. Voir Acan, t. i, col. 105. C’est peut-être l’ancêtre des Benê-Ya’âqdn ou « fils de Jacan », qui avaient donné leur nom à Be’êrôt Benê-Ya’âqdn (Vulgate : Beroih filiorum Jacan), la vingt-huitième station des Israélites dans le désert du Sinai. Deut., x, 6. Voir BenéJACAH et Beroih 1, t. i, col. 1584, 1621.

    1. JACHAN##

JACHAN (hébreu : Ya’ekân ; Septante : ’laotyâv), cinquième fils d’Abihaïl, et petit-fils d’Huri, de la tribu de Gad. Il habitait, ainsi que ses six frères, dans le de Basan. I Par., ꝟ. 13-14.

    1. JACHANAN##

JACHANAN (hébreu : Yoqne’âm ; Septante : Codex Vaticanus : ’Isxôpi ; Alexandrinus : ’Isxovàji.), ville chananéenne, dont le roi fut vaincu par Josué. Jos., xii, 22. Elle est appelée ailleurs Jéconam. Jos., xix, 11. Voir Jéconam.

    1. JACHIN##

JACHIN (hébreu : Yâkin), nom de trois Israélites et d’une des deux colonnes du temple de Jérusalem.

1. JACHIN (Septante : ’Ayziv, Gen., xlvi, 10 ; ’Ia^siv), fils de Siméon et petit-fils de Jacob. Gen., xlvi, 10 ; Exod., vi, 15 ; Num., xxvi, 12. Il fut le chef de la famille des Jachinites. Num., xxvi, 12. Son nom ne figure pas sous cette forme dans la liste des fils de Siméon qui se trouve I Par., iv, 24, mais il y est altéré en Jarib. Voir Jarib 1. Dans ce passage, Jarib-Jachin occupe la troisième place, tandis qu’il est nommé comme le quatrième fils dans Gen., xlvi, 10, et Exod., vi, 15. Cela vient de ce que Ahod, le troisième fils de Siméon, n’y figure pas. Ahod devait être mort sans enfants ou bien sa descendance s’était confondue avec celle de ses frères, car il n’est pas nommé non plus dans Num., xxvi, 12. Voir Ahod 1, 1. 1, col. 295.

2. JACHIN (Septante : ’A-/îl, ’Iayt’v), prêtre de la famille d’Ithamar, chef de la vingt-et-unième classe sacerdotale du temps de David. I Par., xxiv, 17. Sa descendance forma la cinquième des huit classes sacerdotales issues d’Ithamar. Certains commentateurs croient que ce sont les prêtres de cette famille qui sont désignés sous le nom de Jachin parmi ceux qui revinrent à Jérusalem à la fin de la captivité de Babylone. I Par., ix, 10 ; II Esd., xi, 10. D’après d’autres, il s’agit d’un prêtre particulier de ce nom. Voir Jachin 3.

    1. JACHIN##


3. JACHIN, nom, selon l’opinion commune, d’un des prêtres qui s’établirent à Jérusalem au retour de la captivité de Babylone. I Par., ix, 10 ; II Esd., xi, 10. Voir Jachin 2.

4. JACHIN (Septante : ’ïayoifi, dans III Reg., vii, 21, et’Iu-/Cit « force, » traduction du nom hébreu, dansll Par., m, 17), nom d’une des deux colonnes du temple de Jérusalem, faites par l’architecte Hiram. III Reg., vii, 21 ; II Par., iii, 17. Voir Colonnes du Temple, t. ii, col. 856.

    1. JACHINITES##

JACHINITES (hébreu : Hay-Ydkînî ; Septante : ’Iax’vî), descendants de Jachin, de la tribu de Siméon. Voir Jachin 1.

    1. JACINTHE##


JACINTHE. Quelques rares auteurs ont voulu voir dans le hâbasséléf de Cant., ii, 1, la jacinthe, Hyacmthu ? orientalis, assez abondante en Palestine, mais sans pouvoir en donner aucune preuve. Généralement on y voit le narcisse, ou plutôt le colchique. Voir ces mots.

    1. JACKSON Arthur##


JACKSON Arthur, théologien anglais non conformiste, né à Suffolk en 1593, mort en 1666. Ses études terminées à Cambridge au collège de la Trinité, il exerça le ministère évangélique en diverses paroisses. Voici quelques-uns de ses écrits : À Help for the understanding of the Holy Scripture, 3 in-4o, Cambridge, 1643-1658 : il y est presque exclusivement question des livres historiques. L’ouvrage suivant fut publié par les soins de son fils : Annotations upon the whole book of Isaïa, in-4o, Londres, 1682. — Voir W. Orme, Biblioth. biblica, p. 257 ; Walch, Biblioth. theologica,

t. it, p. 467, 479, 480.
B. Heurtebize.
JACOB, nom d’un patriarche et du peuple issu de lui, ainsi que de deux autres Israélites. Le nom de Jacob se retrouve sous la forme I-qu-bu dans un contrat assyrien de la 18e année du roi Darius. Voir aussi Jacques.

1. JACOB (hébreu : יעקב, quelquefois יעקדב, Ya’àqôb ; Septante : Ἰακῶβ), lils d’Isaac et de Rébecca. Il vint au monde en tenant d’une de ses mains le talon (עקב, ’âqêb) de son frère jumeau Ésau, ce qui lui fit donner par sa mère le nom de Jacob, c’est-à-dire « [celui qui] tient par le talon, qui supplante ». Gen., xxv, 25 ; cf. xxvii, 36 ; Ose., xii, 3. Sa vie se passa tour à tour dans le pays de Chanaan, dans la Mésopotamie, de nouveau en Chanaan et enfin en Égypte.

I. De la naissance de Jacob a son départ pour la Mésopotamie. — Dieu avait prédit à Rébecca, dès avant la naissance de ses deux fils, qu’ils seraient les pères de deux peuples et que la postérité de l’alné serait soumise à celle du plus jeune. Gen., xxv, 22-23. Cf. Ose., XII, 3. Lorsque les deux enfants eurent atteint l’âge d’homme, une circonstance fortuite prépara les voies à l’accomplissement de cette prédiction divine. Un jour qu’Ésau revenait de la chasse [exténué de fatigue, il demanda à son frère de lui donner un plat de lentilles que celui-ci avait préparé pour lui. Jacob le lui abandonna à condition qu’Ésaû lui céderait son droit d’aînesse en échrnge de ce service ; il exigea même que cette cession, à laquelle Ésau avait consenti, fût confirmée par serment. Gen., xxv, 29-34. Ce transfert du droit de primogéniture ne pouvait toutefois être valable sans l’autorité d’Isaac ; les privilèges du droit d’aînesse étaient attachés à la bénédiction paternelle, et c’est cette bénédiction qui devait nécessairement confirmer, au profit "de Jacob, l’abandon de ce droit par Ésau. Aussi Rébecca, dont Jacob était le fils préféré, Gen., xxv, 28, épiait-elle le moment favorable pour la lui assurer. Or, un jour, elle entendit le vieux patriarche ordonner à Esau d’aller à la chasse et de lui préparer un repas après lequel il le bénirait. Elle en prévint aussitôt Jacob et se hâta de tout disposer pour qu’Isaac fût amené à ratifier le marché conclu autrefois entre ses deux fils. Elle revêtit Jacob des habits de son frère et lui couvrit le cou et les mains de peaux de chevreaux, afin qu’Isaac, devenu presque aveugle, pût croire en le touchant qu’il touchait Ésau dont la peau était velue. Puis elle lui remit les aliments soigneusement choisis et préparés par elle et qu’il devait apporter à son père. Jacob s’était refusé d’abord à ce stratagème dans la crainte que sa supercherie, si elle était découverte, n’attirât sur lui la malédiction paternelle au lieu de la bénédiction qu’on voulait lui faire surprendre ; mais rassuré par Rébecca, il se présenta à Isaac en se donnant pour Esau, il l’invita à manger du gibier qu’il venait, disait-il, de chasser et le pria de le bénir ensuite. Isaac manifesta son étonnement d’un si prompt retour ; Jacob répondit en attribuant à Dieu l’heureux succès de sa chasse. Cependant le vieillard restait défiant, parce que la voix de son interlocuteur lui paraissait être. celle de Jacob ; il voulut donc le toucher pour s’assurer qu’il était bien Ésau, il l’interrogea même encore, et Jacob répéta son mensonge, car c’est bien ainsi et à bon droit que ce langage est communément qualifié, malgré ce qu’ont pu en dire pour le disculper plusieurs anciens avec saint Augustin. Serm. iv, De Jacob et Esau, xxii, t. xxxviii, col. 45 ; De mendac, v, t. xi, col. 491. Là-dessus^ le patriarche mangea et but ce que son fils lui offrait ; ensuite, l’ayant embrassé, il lui donna cette bénédiction solennelle qui le constituait l’aîné de la famille et « le seigneur de ses frères ». Ésau, qui avait autrefois montré tant d’indifférence pour son droit d’aînesse et l’avait vendu avec une si coupable légèreté, fut rempli de douleur et outré de colère lorsqu’il apprit, à son retour, ce qui venait de se passer. Voir Ésau, t. ii, col. 1910-1911. II ne parla de rien moins que de tuer son frère dès qu’Isaac serait mort. Ces menaces déterminèrent Rébecca à éloigner pour un temps son enfant de prédilection. Elle ne voulait pas d’ailleurs que Jacob, à l’exemple d’Ésa, épousât une femme de Chanaan. Ce fut ce dernier motif qu’elle fit valoir auprès d’Isaac pour le décider à envojer Jacob en Mésopotamie, afin qu’il y prit une épouse dans la famille de Laban. Gen. xxvii, 1-xxviii, 2.

Isaac envoya donc Jacob en Mésopotamie chez Laban, son oncle, frère de Rébecca ; mais il voulut, avant de se séparer de lui, confirmer en la renouvelant la bénédiction qu’il lui avait déjà donnée. Gen., xxviii, 3, 4. Le Seigneur allait ratifier à son tour l’acte d’Isaac et montrer ouvertement que le patriarche n’avait fait qu’exécuter le dessein divin, déjà révélé à Rébecca, c’est-à-dire l’élection de Jacob, à l’exclusion d’Ésau, comme héritier des promesses messianiques. Mal., i, 2 ; Rom., ix, 11-13. Cette manifestation céleste eut lieu à Luza, dans la région même où Abraham avait autrefois élevé un autel au Seigneur. Gen., XII, 8. C’est la seule halte mentionnée par la Bible dans le récit du voyage de Jacob de Bersabée à Haran. Voulant passer la nuit en cet endroit, il prit une des pierres qui s’y trouvaient, la mit sous sa tête et s’endormit. Il vit alors en songe une échelle posée sur la terre et dont l’extrémité touchait au ciel, et, le long de l’échelle, des anges qui montaient et descendaient, tandis que le Seigneur se tenait au-dessus et lui parlait. Il se révéla à lui comme Jéhovah, le Dieu d’Abraham et d’Isaac ; il lui donna, ainsi qu’à ses descendants, la propriété de la terre sur laquelle il dormait et il lui assura une postérité innombrable, en laquelle seraient bénies toutes les nations de la terre, cf. Gen., xxii, 18 ; il lui promit enfin de le protéger toujours et de le ramener dans le pays de Chanaan. Jacob se trouva saisi à son réveil d’une religieuse terreur. Il dressa la pierre sur laquelle il avait dormi et, répandant de l’huile sur le sommet en manière de consécration, l’érigea en monument. Il fit de plus, afin de témoigner sa reconnaissance pour cette vision et pour les bienfaits que Dieu devait lui accorder à l’avenir, le triple vœu d’honorer plus que par le passé Jéhovah comme son Dieu, de donner à cette pierre et à ce lieu le nom de Béthel ou maison de Dieu, et d’offrir au Seigneur la dîme de tous les biens qu’il aurait reçus de lui. Gen., xxviii, 10-22. Voir Bétyle, t. i, col. 1765.

II. Jacob en Mésopotamie.

Immédiatement après la vision de Béthel, la Genèse nous montre Jacob parvenu au terme de son voyage. Tandis que, arrivé dans le voisinage de Haran, il interrogeait au sujet de Laban des pasteurs qui stationnaient auprès d’un puits (fig. 195), Rachel, fille de Laban, arrivait précisément avec son troupeau. Jacob s’empressa d’ouvrir le puits, quoique l’heure ne fût point encore venue, et de faire boire les brebis de Rachel ; il se fit ensuite connaître à elle. Laban, à qui sa fille avait couru apporter la nouvelle de l’arrivée de Jacob, vint aussitôt recevoir le fils de sa sœur avec les démonstrations de la plus vive amitié et l’emmena dans sa maison. Gen., xxix, 1-14a.

Lorsqu’un mois se fut écoulé depuis l’arrivée de son neveu, il lui dit : « Devez-vous, parce que vous êtes mon parent, me servir gratuitement ? Dites-moi quel salaire vous désirez ? » Or Laban avait deux filles : Lia l’ainée, dont les yeux étaient chassieux (hébreu : « faibles » ), et Rachel, beaucoup plus belle. Jacob avait déjà conçu pour la plus jeune de ses cousines une grande affection. Il offrit donc à Laban sept ans de service pour avoir la main de Rachel. Sa demande fut agréée et, en conséquence, à la fin de la septième année, on célébra le mariage, avec de grandes réjouissances. Mais le soir, quand le moment vint de conduire à Jacob son épouse voilée, Laban substitua Lia à Rachel. Aux reproches que lui fit le lendemain son gendre, il répondit en alléguant

fallacieusement l’usage du pays qui ne permettait pas à un père de marier sa fille plus jeune avant l’ainée. Il dit cependant à Jacob que Kachel serait à lui et qu’il pourrait l’épouser après les sept jours de fête consacrés à la noce de Lia, cf. Jud., xiv, 12, s’il voulait le servir sept autres années. Jacob y consentit, et ce nouveau mariage eut lieu au jour indiqué. Laban donna à Rachel, à cette occasion, une servante du nom de Bala, de même qu’il en avait donné une, Zelpha, à Lia. Gen., xxix, 14°-29.

Jacob ne dissimulait pas sa préférence pour Rachel ; mais Dieu l’en punit en refusant à celle-ci la maternité tandis que Lia donnait successivement le jour à quatre flls : Ruben, Siméon, Lévi et Juda. Ce contraste excita l’envie de Rachel ; aveuglée par le dépit, elle s en prit d’abord à Jacob de sa stérilité, puis voulant en atténuer de quelque manière les effets, elle lui fit prendre comme épouse secondaire Bala, dont les enfants seraient censés les enfants de Rachel même. Cf. Gen., xvi, 1-3. Bala eut deux fils, Dan et Nephthali. Lia de son côté, voyant sa fécondité interrompue pendant quelque temps, suivit l’exemple de sa sœur et fit épouser à Jacob sa servante Zelpha, dont il eut également deux fils, Gad et Aser ; mais entre temps elle devint encore elle-même mère de deux autres fils, Issachar et Zabulon, et, en dernier lieu, d’une fille, Dina. Le Seigneur se souvint aussi de Rachel et exauça enfin ses prières en lui accordant un fils qu’elle appela Joseph. Gen., xxix, 30 ; xxx, 1-13°, 17-24. Ces onze fils, auxquels viendra s’adjoindre plus tard Benjamin, composent avec Dina, leur sœur, toute la famille de Jacob, telle que la Bible, nous la fait connaître. Il paraîtrait toutefois qu’il aurait eu d’autres filles, d’après le texte hébreu de Gen., xxxvii, 35 ; xlvi, 7, à moins qu’il ne faille entendre cette expression dans un sens large, c’est-à-dire celui de belles-filles.

La naissance de Joseph marquait la fin des quatorze années de service que Jacob s’était engagé à fournir à Laban. Le fils d’Isaac résolut de reprendre sa liberté et de revenir dans la terre de Chanaan pour y travailler au bien de sa propre famille. Mais Laban s’y opposa : « J’ai’connu par mon expérience, lui dit-il, que le Seigneur m’a béni à cause de vous ; fixez le prix que je dois vous donner » à l’avenir. Jacob consentit à rester et proposa en conséquence à son beau-père un traité dont les conditions sont différemment comprises par les interprètes. En cet endroit, en effet, il y a des divergences sensibles dans les diverses leçons du texte sacré qui d’ailleurs paraît offrir certaines lacunes. Cependant, si l’on néglige les détails secondaires, il est aisé de se former une idée très claire des conditions essentielles de ce pacte. Il revenait à ceci : les troupeaux étaient préalablement partagés d’après les conventions établies, et ensuite [séparés. [Jacob devrait donner à Laban tous les produits des siens qui seraient d’une seule couleur, blanche pour les brebis, noire pour les chèvres ; tout le reste, c’est-à-dire tous les petits tachetés ainsi que les agneaux noirs, d’après l’hébreu de Gen., xxx, 33, et, probablement encore par analogie, „ les chevreaux blancs seraient la part qui resterait à Jacob.’Celui-ci ne pouvait assurément se faire cette part plus modeste, car, les brebis ont communément, 1a laine blanche, et les chèvres le poil noir ; les sujets à robe mouchetée forment l’exception et même leurs petits sont d’ordinaire d’une couleur uniforme. Aussi Laban n’hésita-t-il pas à souscrire à ce marché qui paraissait tout à son profit. Cet homme cupide ne se contenta pas même de cet avantage ; autant qu’on peut en juger par diverses données du texte, il rendit pire encore la condition de Jacob par la manière dont il procéda à la répartition des troupeaux dans le but de lui laisser d’abord le plus petit nombre possible de têtes de bétail et de s’assurer à lui-même ensuite une plus forte proportion dans leur progéniture. Gen., xxx, 25--6. Mais les

choses allèrent tout autrement qu’il n’avait pensé, grâce au moyen industrieux qu’employa Jacob pour obtenir en grande quantité des brebis et des chèvres de la couleur qu’il souhaitait. Il prit des branches vertes de peuplier, d’amandier et de platane, les écorça incomplètement de manière qu’elles offrissent aux regards des parties blanches et des parties vertes, et les déposa dans les canaux où les troupeaux venaient boire. L’aspect de ces couleurs mêlées impressionnant l’imagination des brebis et des chèvres au temps de la conception, elles produisaient des petits tachetés de diverses couleurs, que Jacob séparait à mesure et qui devenaient sa propriété. Cependant, afin de rendre moins sensibles aux yeux de Laban les heureux effets de son habileté, il n’usait de ce procédé que pour la première portée de l’année, celle qui donne les animaux les plus forts, et il laissait les choses aller leur cours naturel pour la seconde portée. De la sorte il eut pour lui tout le bétail vigoureux, tandis qu’il ne restait pour son beau-père que les produits de qualité inférieure. Gen., xxx, 37-42. — Jusqu’à quel point faut-il attribuer à l’industrie de Jacob les merveilleux résultats qu’il obtint, c’est ce qu’on ne saurait dire. Il est certain, d’une part, que son procédé était conforme aux idées et à la pratique de plusieurs peuples de l’antiquité, et des savants modernes y voient une méthode fort admissible de sélection artificielle. Voir sur cette question F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 5e édil., t. iv, p. 331-335. Mais, d’autre part, il est difficile d’attribuer uniquement à cet artifice le prodigieux succès de cette méthode, d’autant plus que Jacob en varia plusieurs fois l’application et toujours avec le même bonheur, produisant selon les besoins du moment tantôt une couleur uniforme, tantôt une couleur mélangée. En réalité le véritable auteur de ce qui arrive ici est Dieu même qui bénit les moyens employés par son serviteur ainsi que Jacob le déclara ensuite à Lia et à Rachel : « C’est Dieu, leur dit-il, qui a pris le bien de votre père pour me le donner. » Et il confirme cette déclaration par le récit d’un songe dans lequel Dieu lui avait dit qu’il connaissait tout ce qu’il avait eu à souffrir de Laban. Durant ce même songe une vision mystérieuse lui avait fait comprendre que Dieu approuvait l’emploi du moyen qui l’enrichissait ou peut-être même le lui avait-elle divinement appris, ce moyen. Gen., xxxi, 9-12. Le texte comporte l’un et l’autre sens. Si l’on adopte le dernier, Dieu se serait servi de ces branches, privées elles-mêmes de toute vertu naturelle, pour produire l’effet désiré par Jacob, comme il se servit plus tard d’un bois quelconque pour adoucir les eaux de Mara. Exod., xv, 25. Il faut remarquer toutefois que, dans ce cas, la vision aurait dû avoir lieu six ans auparavant, ce qui ne s’accorde guère avec Gen., xxxi, 31 b.

Laban, déçu dans ses espérances, exigea qu’on changeât les conditions du contrat et que la part de Jacob devint la sienne, et réciproquement. Mais le résultat fut toujours le même, et il revint aux premières conditions pour changer encore « jusqu’à dix fois », dit Jacob, Gen., xxxi, 7, 41, c’est-à-dire plusieurs fois, mais sans que jamais le succès répondit à son attente. Ces échecs répétés l’aigrissaient et l’indisposaient de plus en plus contre son neveu. Jacob le sentait, et il connaissait en même temps les critiques acerbes de ses beaux-frères. Il songea donc à s’éloigner ; mais le motif qui l’y détermina réellement fut l’ordre formel que Dieu lui en donna en lui réitérant la promesse de le protéger. Gen., xxxi, 1-3. Une difficulté sérieuse se présentait toutefois : il connaissait l’avarice de son beau-père, son tempérament dur et violent. Laban s’opposerait à son départ, fallût-il en venir pour cela à la violence. Gen., xxxi, 32. Il résolut donc de faire à son insu tous les préparatifs de ce départ et de s’éloigner secrètement. Il manda auprès de lui, au milieu des champs, Rachel et Lia, leur exposa ses griefs contre Laban, leur raconta la vision dont il a a - a

été parlé plus haut, en faisant suivre son récit de l’ordre que Dieu lui avait donné de quitter ce pays pour revenir à celui de son père. Il n’eut pas de peine à décider les deux filles de Laban, l’égoisme de leur père les avait déjà assez détachées de lui. Le départ eut lieu aussitôt, car. il fallait profiter de l’absence de Laban qui était allé tondre ses brebis. Gen., xxxi, 1-12. — Jacob put admirer alors comment Dieu avait tenu ses promesses de Béthel et combien il avait « béni ses travaux et rendu fructueux son labeur, en l’assistant contre les pièges qu’on lui avait tendus ». Sap., x, 10, 11. Lui qui était arrivé, vingt ans auparavant, n’ayant pour tout bien que son bâton, Gen., xxxii, 10, et qui n’avait demandé au Seigneur que le pain et le vêtement, xxviii, 20, il se voyait maintenant le père de douze enfants et le maître de nombreux serviteurs et servantes et d’un nombre incalculable de brebis, de chèvres, d’ânes et de chameaux. Gen., xxx, 43 ; cf. xxxii, 5 ; 13-15. C’est avec cette belle et riche caravane qu’il repassa l’Euphrate en se dirigeant vers la région que l’Écriture appelle par anticipation la montagne de Galaad. Gen., xxxi, 21.

III. Retour de Mésopotamie en Chanaan.

Laban n’apprit l’exode de Jacob que le troisième jour qui suivit. Cf. Gen., xxx, 36. Il réunit immédiatement ses frères, c’est-à-dire sans doute plusieurs de ses parents, et se mit à sa poursuite pendant sept jours jusqu’à ce qu’il l’eût rejoint au mont Galaad. Gen., xxxi, 22-23. Ce nombre sept a été substitué par quelque copiste, ou bien il faut supposer que, entre.la nouvelle de la fuite de Jacob et le départ de Laban, il s’est écoulé un certain temps nécessaire pour avertir les parents habitant divers lieux plus ou moins éloignés et attendre leur arrivée. Autrement on devrait admettre que Jacob a pu faire franchir en dix jours à des troupeaux de brebis une distance de près de 650 kilomètres, c’est-à-dire, en moyenne, plus de quinze lieues par jour. Cf. Gen., xxxiii, 13-14. Voir Hummelauer, Comment, in Gen., 1895, p. 493, et F. Vigouroux, La sainte Bible polyglotte, Paris, 1898, t. i, p. 163. Dieu, qui connaissait les mauvaises dispositions de cet homme, « vint à lui pendant la nuit » et lui défendit de parler durement à Jacob. Gen., xxxi, 24, 29. Aussi se contenta-t-il de se plaindre à son neveu qu’il lui eût caché son dessein et l’eût privé du plaisir d’embrasser ses filles et ses petits-enfants. Il lui reprocha ensuite de lui avoir dérobé ses dieux. On ne sait ce qui est désigné ici par ce mot remplacé, aux versets 19 et 34, par celui d’idoles, et qui traduit l’hébreu (erâfîm. On croit assez communément que c’étaient des objets superstitieux, des amulettes auxquelles on attribuait quelque vertu magique. Voir Theraphim. Rachel avait en effet emporté les (erâfîm de son père, Gen., xxx, 19 ; mais Jacob qui l’ignorait, et se croyait sûr de tous les siens comme de lui-même, invita son oncle à entrer dans toutes les tentes pour chercher à y découvrir ses idoles, dévouant d’avance à la mort le coupable s’il y en avait un. Mais ce coupab. trouva le moyen de déjouer ces recherches ; une ruse de Rachel les rendit infructueuses. Jacob alors, ne voyant sans doute dans l’accusation de Laban qu’une dernière injustice à son endroit, donna un libre cours à son indignation ; il retraça en termes véhéments le tableau des services qu’il avait rendus pendant vingt ans au frère de sa mère et des duretés et des injustices qu’il avait dû subir en retour. Laban n’avait rien à répondre, et d’autre part Dieu lui avait défendu de maltraiter Jacob, même en paroles ; il ne lui restait plus qu’à se retirer. Il voulut toutefois s’assurer contre tout retour offensif de son gendre. Il lui proposa donc un traité d’alliance. Jacob prit une pierre et l’érigea en monument ; puis, sur son ordre, les siens rassemblèrent des pierres et l’on mangea sur ce monceau, que Laban appela d’un nom chaldéen Yegar-Sâhadu (à’, tandis que Jacob le nomme en hébreu Gal’êd, « Monceau du témoignage. » Voir Galaad 4, col. 45.

Ils s’engagèrent l’un et l’autre par serment à considérer ce tumulus comme une barrière qu’aucun des’deux ne franchirait jamais pour aller attaquer l’autre. On immola ensuite des victimes, on prit un repas en commun et, la nuit suivante, Laban repartit pour Haran après avoir embrassé ses filles et ses petits-enfants. Gen., xxxi, 2225. « Jacob aussi s’en alla par le chemin qu’il avait pris, et les anges de Dieu furent à sa rencontre, et les ayant vus, il dit : C’est le camp de Dieu, et il appela ce lieu Mahanaim, camp. » Gen., xxxii, 1-2. Voir Mahakaim.

Sur le point de remettre le pied sur la terre natale, le souvenir d’Ésaù et de ses menaces effraya Jacob. Quelques-uns de ses serviteurs allèrent par son ordre au pajs de Séir, le saluer de sa part, avec recommandation de faire mention des présents qu’il lui destinait. Ésau partit aussitôt à la suite des envoyés pour aller au-devant de son frère, à la tête de quatre cents hommes. Jacob fut épouvanté. Il divisa le bétail et ses gens en deux troupes, séparées par un assez grand intervalle, espérant que si l’une d’elles tombait sous les coups d’Ésaù, il pourrait du moins sauver l’autre. Il adressa ensuite à Dieu une prière où éclataient son humilité et sa reconnaissance. Le matin suivant, il choisit dans les diverses espèces d’animaux qu’il possédait cinq cents tètes (cinq cent cinquante d’après l’hébreu) dont il fit plusieurs troupeaux qui devaient s’avancer à une certaine distance les uns des autres, à la rencontre d’Ésaù. Cette disposition est conforme aux mœurs des Orientaux ; ils veulent faire mieux ressortir par là le prix de ce qu’ils offrent. Voir Aon, t. i, col. 715. Mais elle avait aux yeux de Jacob un avantage plus précieux encore en ce moment, celui d’adoucir peu à peu et comme par degrés l’esprit de son frère. Les serviteurs avaient en effet pour instruction de répondre successivement à Ésau, à mesure qu’ils le rencontreraient 1 un après l’autre : Les bêtes que je conduis sont un présent que votre serviteur Jacob envoie à Ésau son seigneur ; et votre serviteur Jacob vient lui-même vers vous. Gen., xxxiii, 3-21.

Lorsque les présents furent partis, Jacob passa de grand matin le gué de Jaboc avec ses épouses, leurs enfants et tout ce qui lui appartenait, et étant resté seul en arrière, « voilà qu’un homme luttait avec lui jusqu’au matin ; voyant qu’il ne pouvait vaincre [Jacob], il toucha le nerf de sa cuisse (c’est-à-dire un tendon reliant la hanche à l’os du bassin) lequel se dessécha aussitôt. Et il lui dit : Laisse-moi, car déjà monte l’aurore. — Je ne vous laisserai point, si vous ne me bénissez, déclara Jacob. — Quel est donc ton nom ? lui dit-il. — Jacob. — Non, lui répliqua-t-il, ce n’est plus Jacob qu’on te nommera, mais Israël ; et si tu as été fort contre Dieu, combien plus prévaudras-tu contre les hommes ! » Voir Israël 1, col. 995. Jacob demanda à son adversaire de se nommer à son tour ; mais celui-ci refusa et le bénit. Et Jacob appela ce lieu Phanuel. Cependant le soleil se leva et Jacob se remit à marcher, mais il boitait de sa hanche (hébreu et Septante). De là vient que ses descendants ne mangent point de ce nerf que l’ange avait paralysé dans la hanche de leur père Jacob. Gen., xxxii, 24-32. Cette lutte ne fut pas imaginaire, car elle n’eut pas lieu en songe ; Jacob était éveillé et sur pied, il venait de faire traverser le gué de Jaboc à sa caravane ; d’ailleurs la claudication qui lui resta suffirait à montrer qu’il y avait eu une lutte réelle avec cet être mystérieux qu’Osée, xii, 3-4, appelle un ange, et sans doute c’en était un. Dieu, en limitant les forces de cet esprit céleste pour laisser la victoire à Jacob, réconforta une dernière fois son serviteur.

Les dispositions prises par Jacob en vue de l’arrivée d’Ésaù trahissent cependant encore quelque appréhension : il plaça en arrière ceux des siens qui lui étaient les plus chers. Quant à lui, , il alla au-devant de son frère en s’inclinant sept fois. Mais Ésaû avait oublié ses anciens griefs, il courût vers Jacob et le tint longtemps

embrassé en pleurant. Il ne voulait recevoir aucun de ses présents, se disant assez riche, et il ne les accepta que sur les instances de Jacob. Il lui proposa ensuite de l’accompagner dans son voyage. Mais Jacob lui objecta qu’il était obligé de faire marcher lentement ses troupeaux, aQn de n’en point perdre une partie par la fatigue. Il le pria donc de prendre les devants avec ses hommes, tandis que lui-même le suivrait à petites journées jusqu’à ce qu’il allât le rejoindre à Séir. Gen., xxxiii, 7-15. Nous ne lisons nulle part que Jacob ait effectué ce voyage à cette époque ou plus tard. Mais ce n’est pas une raison suffisante pour nier qu’il l’ait jamais accompli, encore moins pour affirmer qu’il a menti à son frère en lui faisant cette promesse. Le mot rendu par « jusqu’à ce que » pourrait fort bien d’ailleurs signifier ici « en attendant que » je vienne, sans indication de temps. Saint Augustin pense que Jacob promit sincèrement*, mais qu’il changea ensuite d’avis. Qusest. CVl, inlleplat., t. xxxiv, col. 575.

Après qu’Ésaù se fut éloigné, Jacob se dirigea vers l’occident, du côté du Jourdain, et il vint en un lieu situé près du fleuve. Il y dressa ses tentes, ce qui lui fit donner à ce site le nom de Soccoth. Il y construisit même une maison. Cela permet de supposer qu’il avait l’intention de faire en cet endroit un séjourassez long ; La Bible ne nous donne toutefois aucune indication sur la durée de ce séjour à Soccoth et ne relate aucun fait so rapportant à Jacob qui s’y soit passé. Gen., xxxiii, 1617.

IV. Jacob établi de nouveau en Palestine.

La Genèse semble donner à entendre que Jacob ne demeura pas longtemps sur la rive gauche du Jourdain. « Il passa (d’après la Vugate) à Salem, ville des Sichémites, après qu’il fut revenu de Mésopotamie. » Gen., xxxiii, 18. Mais dans l’hébreu on lit : « Il arriva sain et sauf près de la ville des Sichémites. ï> C’était l’accomplissement du souhait que Jacob avait formé à Béthel, lorsqu’il partait pour la Mésopotamie. Gen., xxviii, 21. Le patriarche prit en quelque sorte possession de la Terre Promise en achetant une partie du champ où il avait planté ses tentes et qu’il paja cent agneaux (hébreu : qesitdh). Voir <Jesitah. Cf. Act., vii, 16. C’est ce champ que Jacob mourant donna à Joseph en sus de sa part. Gen., xlviii, 22 ; cf. Joa., iv, 5, 12. Il érigea aussi en cet endroit un autel et il invoqua le Dieu très fort d’Israël. Gen., xxxiii, 20. Peut-être entendait-il accomplir ainsi le vœu qu’il avait fait au Seigneur après la vision de Béthel ? Gen., xxviii, 22, et c’est ce qui expliquerait pourquoi il resta si longtemps à Sichem sans aller jusqu’à cette localité qui était cependant à si peu de distance.

Mais les desseins de Dieu étaient tout autres. Jacob ne devait pas se fixer en Chanaan, et il avait à remplir ses engagements envers le Seigneur à l’endroit qu’il avait désigné lui-même après avoir entendu les bénédictions fct reçu les promesses divines. Un événement imprévu l’obligea de s’éloigner de Sichem. Le fils du roi enleva Dina et lui fit violence, puis il vint la demander en mariage à Jacob. Soit qu’il ne sût à quoi se résoudre sur le moment et qu’il eût besoin de prendre conseil de « es fils, soit que, selon les usages de l’Orient, cf. Amnon, t. i, col. 501, et Gen., xxxiv, 31, il voulût laisser le soin de régler cette affaire aux frères utérins de Dina, enfants de Lia comme elle, le patriarche différa sa réponse jusqu’à l’arrivée de ces derniers. Révoltés/ et irrités de l’outrage fait à leur sœur, ils feignirent néanmoins d’agréer cette proposition ; puis, ayant mis, grâce -à une fraude habile, les Sichémites dans l’impuissance de se défendre, Siméon et Lévi, accompagnés sans doute’de leurs serviteurs, les attaquèrent et les massacrèrent ; ensuite les autres enfants de Jacob saccagèrent la ville et enlevèrent tous les biens des habitants avec leurs femmes et leurs enfants. Gen., xxxiv, 1-29. Voir Dina, t. ii, col. 1436, 1437, et Goêl, col. 262.

Cet acte d’épouvantable vengeance, auquel Jacob ne pouvait s’attendre, l’affligea profondément ; il se plaignit en termes amers à Siméon et à Lévi, qui en étaient les principaux auteurs, de ce qu’ils l’avaient rendu odieux par là aux habitants du pays et l’avaient voué à la mort avec toute sa maison. Gen., xxxiv, 30. Cette crainte, si naturelle en de telles circonstances, est le sentiment qui dut dominer les autres à cette heure et le seul que Jacob exprime ; mais cela ne’prouve point qu’il n’ait pas été touché de ce qu’il y avait d’injustice et de barbarie dans ces représailles, ni même qu’il n’ait pas manifesté sa réprobation, car l’Écriture ne dit pas tout. Les paroles sévères du patriarche sur son lit de mort, de longues années plus tard, et la translation du droit d’aînesse de Ruben à Juda, à l’exclusion de Siméon et de Lévi, témoignent combien cette indignation dut être vive et profonde. Gen., xlix, 5-7,

Dieu vint encore une fois au secours de son serviteur dans cette circonstance critique ; il lui ordonna de partir pour Béthel et d’y ériger un autel. C’était le moyen de le soustraire aux conséquences qu’aurait eues plus tard pour lui la vengeance de ses fils, et, pour le moment, il le protégea dans sa marche en répandant une sorte de terreur mystérieuse dans l’esprit des habitants du pays ; ils n’osèrent pas le poursuivre. Jacob voulut que, avant de partir pour aller remercier le Seigneur à Béthel, chacun des siens se purifiât et prît des habits décents ; il ordonna en même temps de rejeter tous les dieux étrangers, c’est-à-dire les idoles proprement dites ou les objets superstitieux, tels que les amulettes, etc., et particulièrement les ferdjîm de Rachel. Toutes ces choses, emportées de Mésopotamie ou pillées dans le sac de Sichem, furent enterrées sous « le térébinthe derrière la ville de Sichem ». Jacob s’éloigna alors de cette ville et vint à Luza. Il y construisit un autel et imposa une seconde fois à ce lieu le nom de Béthel, ou maison de Dieu, en mémoire de la vision dont Dieu l’avait favorisé lorsqu’il fuyait Ésaû. Gen., xxxv, 1-7 ; cf. xxviii, 12-19. Il eut là une nouvelle vision qui fait comme le pendant de la précédente. Dieu lui apparut, le bénit et lui déclara de nouveau qu’il ne s’appellerait plus Jacob mais Israël. Cf. Gen., xxxii, 23. Il lui réitéra aussi les promesses faites à Abraham et à Isaac relativement à sa glorieuse et innombrable postérité et à la propriété de la terre de Chanaan. Jacob érigea une stèle en mémoire de ce que Dieu venait de lui dire, y répandit des libations et de l’huile et confirma encore à ce lieu le nom de Béthel. Gen., xxxv, 9-15 ; cf. xxviii, 18-22.

De Béthel Jacob se dirigea vers Hébron. Une épreuve douloureuse l’attendait au cours de ce voyage. Lorsqu’il fut arrivé aux environs de Bethléhem, Rachel mit au monde Benjamin, le second de ses fils, et elle mourut dans les douleurs de l’enfantement. Voir Benjamin, 1. 1, col. 1588. Jacob dressa une pierre sur la tombe de cette épouse, objet de tant d’affection, et s’éloigna pour aller fixer sa tente par de la la Tour du troupeau. C’est pendant cette dernière station que Ruben, son fils aîné, se rendit coupable d’inceste avec Bala. Le patriarche ne fit pas éclater son ressentiment en apprenant cet outrage, se réservant de châtier plus tard Ruben, Gen., xlix, 4, en le privant de son droit de primogéniture. Gen., xxxv, 16-22. Jacob arriva enfin à Hébron où Isaac habitait. Trente ans s’étaient écoulés depuis qu’il s’était éloigné de son père, mais il est très probable qu’il était venu le visiter depuis son retour de Mésopotamie, pendant son séjour à Soccoth et à Sichem ; il n’y a en effet que deux journées de marche de Sichem à Hébron. La mort d’Isaac, à l’âge de cent quatre-vingts ans, est rapportée aussitôt après l’arrivée de Jacob, quoiqu’elle n’ait eu lieu, que douze ou treize ans plus tard. L’auteur sacré ajoute qu’Isaac fut enseveli par ses deux fils Ésaû et Jacob. Gen., xxxv, 29.

Hébron devait être naturellement, dans la pensée de

Jacob, le terme de ses pérégrinations, le lien où il achèverait paisiblement ses jours comme son père Isaac et son aïeul Abraham. Gen., xxxv, 27. Une fois encore il se trompait et lui-même, par son affection trop marquée pour Joseph, fournit à ses autres enfants l’occasion de commettre une faute qui devait empoisonner son existence et avoir pour conséquence de l’éloigner à jamais du pays de Chanaan. La jalousie causée par cette préférence avait en effet dégénéré en haine. Cette haine, dont Jacob ne voyait que trop les indices, sans toutefois s’en, plaindre ouvertement, Gen., xxxvii, 4, 11, s’accrut encore lorsque Joseph raconta naïvement à ses frères deux songes qui semblaient présager sa future élévation au-dessus d’eux. Il les avait d’ailleurs indisposés par les rapports défavorables qu’il avait déjà faits à son père contre les désordres des enfants de Bala et de Zelpha. Gen., xxxvii, 2-11. Leur animosité les porta enfin à se débarrasser de lui par un crime. Un jour Jacob, qui avait envoyé Joseph vers Sichem pour prendre des nouvelles de ses frères et de leurs troupeaux, vit arriver, au lieu de Joseph dont il attendait le retour, des hommes porteurs d’une robe ensanglantée qui lui dirent : « Nous avons trouvé cette robe : voyez si c’est ou non celle de votre fils. » Voir Joseph. Jacob reconnut aussitôt dans ce vêtement la tunique de Joseph et crut qu’une bête féroce l’avait dévoré. Il déchira ses habits et se livra à une douleur que ne purent adoucir les consolations des siens : « Je veux, disait-il, descendre en pleurant vers mon fils dans le scheôl. » Gen., xxxvii, 12-14, 32-35. Jacob avait alors environ cent sept ans, et Joseph en avait seize d’après la Vulgate. Les autres versions et l’hébreu lui en donnent dix-sept. Gen., xxxvii, 2.

V. Jacob en Egypte ; ses dernières années ; sa prophétie ; sa mort ; sa sépulture. — Vingt-deux ans après la disparition de Joseph, une grande famine sévit en beaucoup de pays et se fit sentir pareillement en Chanaan. Jacob apprit qu’on pouvait se procurer du blé en r.gypte ; il y envoya ses fils pour en acheter, ne gardant près de lui que le plus jeune, Benjamin. Or, lorsqu’ils revinrent auprès de lui avec le blé qu’ils avaient acheté, ils lui apprirent que l’intendant du royaume, à qui ils avaient dû faire connaître, pour répondre à ses questions, l’existence de Benjamin, exigeait qu’ils le lui amenassent ; en attendant, il retenait Siméon comme otage. Le vieux patriarche déclara qu’il ne laisserait point partir Benjamin, et longtemps il résista aux in* stances de ses enfants, ne pouvant se résoudre à ce sacrifice. Il finit cependant par se rendre aux prières de Juda, ou plutôt il céda à la nécessité, car la provision de froment était épuisée, et il permit que Benjamin descendit avec ses frères en Egypte. Il leur remit à leur départ des présents de toute sorte pour le gouverneur. Gen., xli, 56 ; xlii, 1-5 ; 29 ; xlhi, 15.

C’était la dernière épreuve par laquelle Dieu voulait faire passer son serviteur. Tandis que Jacob avait toujours l’âme troublée par la douleur de la perte de Joseph, que cette séparation renouvelait, et par ses craintes sur le sort de Benjamin, Gen., xlii, 36 ; xlhi, 6, 9, 14, ses fils revenaient tous sains et saufs. Ils lui apportaient une nouvelle aussi inattendue qu’elle était heureuse : Joseph n’était point mort ; ce gouverneur de l’Egypte si redouté, c’était lui-même. Il priait son père de venir sans retard dans la terre des pharaons avec toute sa famille, et le roi de son côté joignait son invitation à celle de son ministre. Jacob n’en pouvait croire ses oreilles ; il était comme un homme qui se réveille à peine et ne comprend pas ce qu’on lui dit. Mais il dut bien se rendre à l’évidence, quand il vit les riches présents que lui envoyaient le pharaon et Joseph, de l’argent, des vêtements, du froment, des ânes et des ânesses, avec les chariots qui devaient servir à le porter lui, ainsi que les femmes et les enfants et tout le bagage. Et alorc son âme commença à « revivre » et il dit : « Mon

fils Joseph vit encore, cela me suffit ; j’irai et je le verrai avant de mourir. » Gen., xlv, 9-28.

Le départ paraît s’être effectué sans retard selon le désir de Joseph, Gen., xlv, 9, mais ce ne fut pas assurément sans que Jacob éprouvât des hésitations et des inquiétudes sur cette émigration. Cf. Gen., xlvi, 3. Elle paraissait opposée aux desseins de Dieu qui avait si souvent répété à Abraham, à Isaac et à lui-même la promesse de donner à leur postérité cette terre de Chanaan qu’il allait maintenant abandonner. Il savait d’ailleurs que Dieu avait autrefois défendu à Isaac de descendre en Egypte. Gen.. xxvi, 1. Ces considérations avaient peut-être fait naître dans son cœur le désir et l’espérance d’obtenir un éclaircissement divin. Arrivé à Bersabée, à la frontière même de la Palestine, il s’arrêta pour immoler des victimes au Dieu de son père Isaac. Le Seigneur répondit aux secrets désirs de son cœur et, l’appelant la nuit dans une vision, il lui dit : « Je ouis Dieu, le Dieu de ton père ; ne crains point, descends en Egypte, je te ferai père d’un grand peuple en ce pays. Moi-même, j’y descendrai avec toi et moi-même je t’en ramènerai lorsque tu en reviendras. » Et afin que Jacob comprît bien que ce n’était pas de son vivant qu’il reviendrait en Chanaan, le Seigneur ajouta : « Joseph te. fermera les yeux de ses mains. » Rassuré par cette vision, le patriarche reprit son chemin et arriva en Egypte avec toute sa famille. F. Hummelauer, Comment, in Genesim, Paris, 1895, p. 572-574 ; F. Keil, Comment, on the Pcntateuch, Edimbourg, 1872, t. i, p. 369-374.

Joseph averti par Juda, que Jacob lui avait envoyé pour le prévenir de son arrivée, vint en toute hâte dans la terre de Gessen, à la rencontre de son père, et se jeta dans ses bras en pleurant, tandis que celui-ci lui disait : « Je mourrai content, maintenant que je t’ai vu. » Joseph donna ensuite à ses frères des instructions sur ce qu’ils devaient dire au pharaon, afin de le déterminer à les établir dans la terre de Gessen, et les choses réussirent en effet comme il l’avait souhaité. Gen., xlvi, 28 ; xlvii, 6. Ce point réglé, ce fut le tour de Jacob d’être présenté au roi par Joseph. Il le bénit en entrant et en sortant, et lorsque le prince lui demanda son âge : « Les jours de mon pèlerinage sont de cent trente ans, petits et mauvais. » Le patriarche se retira ensuite avec ses fils dans la terre de Gessen, où l’affection de Joseph lui assura, en ce temps de famine générale, l’abondance de toutes choses et une existence tranquille et heureuse pendant les dix-sept années qu’il vécut encore. Gen., xlvii, 7-13.

Parvenu à l’âge de cent quarante-sept ans et se sentant près de mourir, il appela Joseph auprès de lui et lui fit promettre avec serment de ne point l’ensevelir en Egypte, mais de faire transporter son corps dans la terre promise à ses pères pour y reposer à côté d’eux dans le même tombeau. Joseph le lui jura, Gen., xlviii, 27-31. Le texte sacré donne à entendre que Jacob tomba malade peu de temps après. Joseph se rendit auprès de lui avec ses deux fils, Manassé et Éphraïm. Jacob s’assit sur son lit et, après avoir rappelé les promesses que Dieu lui avait faites à Béthel sur l’avenir de sa race, il déclara à Joseph qu’il voulait faire siens Manassé et Éphraïm et les rendre participants, à l’égal de ses propres fils, des effets de ces promesses. C’était là un suprême témoignage d’affection à sa chère Rachel dont il raconta une dernière fois la mort et la sépulture à Éphrata. Il bénit ensuite solennellement les deux fils de Joseph en plaçant sa main droite sur Éphraim le plus jeune et la gauche sur l’aîné Manassé, non point par mégarde et à cause que ses yeux s’étaient affaiblis, mais parce que Dieu lui révélait que si les destinées de Manassé devaient être grandes, Éphraïm occuperait une place plus glorieuse dans le futur peuple d’Israël. Le patriarche prédit ensuite à Joseph que Dieu ramènerait sa race dans la terre de ses pères. Gen., xlviii, 1-22. Jacob bénit eDfia

tous ses enfants. Son discours est un testament en même temps qu’une prophétie. En vertu de sa puissance patriarcale, Israël dépouille Ruben de son droit de primogéniture parce qu’il a, lui, « son aine et sa force, » violé les lois les plus saintes de la famille et outragé son père dans ce que l’honneur paternel a de plus délicat. Gen., xlix, 3-4. Il punit aussi Siméon et Lévi pour avoir, au mépris de l’autorité paternelle, ravagé Sichem .par le meurtre et le pillage, ꝟ. 5-7. Ce n’est pas à eux que sera transféré le droit d’aînesse enlevé à Ruben quoiqu’ils viennent immédiatement après lui dans l’ordre de la naissance. Si Jacob avait suhi seulement le mouvement de son cœur, on peut penser que c’est Joseph qu’il aurait mis à la tête de ses frères, mais le saint vieillard parle et agit en ce moment sous l’inspiration de Dieu, et c’est Juda, placé par sa naissance après les trois premiers, qui recevra la primauté dont ils ne se sont pas montrés dignes ; c’est lui qui doit avoir la gloire de compter le Messie dans sa postérité et de préparer la venue de ce Roi par l’autorité royale dévolue à ses descendants, ꝟ. 8-12. Son discours fini, Jacob ordonna à ses enfants de l’ensevelir à Hébron, dans le tombeau où reposaient ses pères, ainsi que Lia son épouse ; puis il s’étendit sur sa couche et mourut. Joseph donna les plus vives marques de douleur en voyant son père mort ; toute l’Egypte s’associa à son deuil et pleura Jacob soixante-dix jours. Il le fit embaumer par ses médecins et, à l’expiration du deuil, il alla, accompagné de ses frères et des gens de sa maison et suivi d’un nombreux cortège, conduire le corps du patriarche dans la terre de Chanaan. Le convoi s’arrêta en chemin à l’aire d’Atad, au delà du Jourdain, où l’on célébra pendant sept jours des funérailles avec de grandes lamentations, après quoi on vint à Hébron où le cercueil de Jacob fut placé, comme il l’avait prescrit, dans la caverne double achetée autrefois par Abraham à Ephron l’Héthéen. Gen., xlix, 29 ; l, 13.

VI. Vertus de Jacob.

Jacob a été l’objet d’accusations injustes : on a dénaturé ses actes en lm prêtant dans tout ce qu’il a fait des intentions mauvaises et des vues égoïstes, ou bien on a exagéré la gravité des fautes dont il s’est réellement rendu coupable, telles que ses mensonges réitérés, Gen., xxvii, 19, 24 ; son affection trop marquée pour Rachel, xxix, 31, et pour Joseph, xxxvii, 3-4, les procédés dont il usa à l’égard de son frère Ésau et de son oncle Laban. Plus faible qu’eux, il triompha de l’un et de l’autre par la ruse. Si les moyens qu’il employa pour réussir ne furent pas tous irréprochables, il ne faut pas néanmoins, pour le juger, oublier que ceux au milieu de qui ils vivaient n’appréciaient pas moins l’astuce que la force, et que, si^ tout n’est pas à louer dans sa vie, le bien l’emporte de beaucoup sur le mal. L’Esprit-Saint lui-même, qui nous fait connaître ces fautes, rend témoignage à la sainteté du patriarche : l’Écriture l’appelle juste, Sap., x, 10 ; elle l’associe à Abraham et à Isaac dans toutes les louanges qu’elle donne aux ancêtres du peuple juif, et Notre-Seigneur nous le montre à côté d’eux dans le royaume des cieux. Matth., viii, 11. Son histoire nous apprend combien il méritait ces éloges et cette récompense par ses vertus si éprouvées, qui firent de lui le digne fils d’Abraham et d’Isaac. Comme eux, il donna, selon les circonstances, l’exemple d’une foi vive, d’un profond esprit de religion, d’une obéissance prompte et parfaite aux ordres de Dieu^ d’une persévérante confiance en lui, accompagnée de l’humble sentiment de sa propre misère. Gen., xxxii, 9-12. Il mérita que son double nom de Jacob et d’Israël devint le nom même du peuple de Dieu dans l’Ancien et dans le Nouveau Testament, et que le vrai Dieu s’appelât le Dieu de Jacob, comme le Dieu d’Isaac et le Dieu d’Abraham. E. Palis.

2. JACOB, nom donné au peuple issu de Jacob. Ce

peuple est le plus souvent appelé Israël ou Benê Ièra’êl, « enfants d’Israël, » voir Israël 2, col. 995 ; mais il est aussi désigné par le nom de Jacob, spécialement dans les parties poétiques de l’Écriture, dans les Psaumes et dans les prophètes, où il est Qtoployé dans le parallélisme comme synonjme d’Israël. Gen., xlix, 7 ; Num., xxiii, 7, 10, 21, 23 ; xxiv, 5, 17, 18-19 ; Ps. xiii, 7 ; cxiii, 1 ; Is., xxvii, 6 ; Jer., ii, 4, etc. Tantôt il est nommé Jacob sans aucune addition, Deut., xxxii, 9 ; xxxiii, 10 ; Ps. XLHI, 5 ; Is., lix, 20 ; Jer., x, 25 ; xxxi, 11 ; Lam., Il, 3 ; Ainos, VI, 8 ; vii, 2 ; viii, 7 ; Rom., XI, 26 ; tantôt « maison de Jacob », Exod., xix, 3 ; Is., ii, 5, 6 ; viii, 17 ; xxvii, 9 ; Amos, iii, 13 ; ix, 8 ; Mich., ii, 7 ; Abd., 17, 18 ; « fils de Jacob, » III Reg., xviii, 31 ; Mal., iii, 6 ; « race de Jacob, » semen Jacob, Is., xlv, 19 ; Jer., xxxiii, 26 ; « assemblée de Jacob » (hébreu : qehillât Ya’aqôb ; Vulgate : multitudo Jacob). Deut., xxxiii, 4. — De même que le nom d’Israël, le nom de Jacob sert quelquefois à désigner le royaume schismatique des dix tribus. Is., ix, 8 ; xvii, 4 ; Ose., x, 11 ; xii, 2 ; Mich., i, 5. — Plus tard, lorsque le royaume d’Israël eut été détruit, le royaume de Juda fut désigné aussi quelquefois sous le nom de Jacob. Nahum, ii, 2. — Dans plusieurs passages des Livres Saints, le nom de Jacob, employé dans son acception ethnique, est considéré comme celui d’un individu : « Jacob, mon serviteur. » Is., xliv, 1 ; xlv, 4 ; XLvm, 20 ; Jer., xxx, 10 ; xlvi, 27, 28. Voir A. Ishâni, /aco6 and liræl, Ephraim and Juda ; or the discrinnnative use of thèse titles, in-12, Londres, 1854.

Le nom de Jacob semble avoir désigné sa postérité même avant l’époque de Moïse. On trouve du moins sur les trois listes de villes soumises par Thotmès III (voir A. Mariette, Karnak, in-f », Leipzig, 1875, pl. 17, 18, 19, n° 102) et représentées sur les pylônes du temple de Karnak, un nom de ville (le cent deuxième), qui es-t

écrit : À 1 A. i Iâ-q-ba-â-r (ou l), nom qui correspond probablement à l’hébreu bx-apy », Jacob-el, et semble la transcription égyptienne du nom hébreu Ya’âqôb, avec l’addition du nom de Dieu’El, ce qui fait du nom du patriarche un nom théophore comme tant d’autres que nous lisons dans l’Écriture, Ismæl, Samuel, etc. Cette forme complète du nom de Jacob se retrouve en assyrien, Yâqub-ilu, sur des contracts de l’époque d’Hammurabi, roi de Babylone, qui vivait probablement du temps d’Abraham (voir Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1. 1, p. 493). Cf. Fritz Hommel, Die Allisræhtische Ueberheferung, in-8o, Munich, 1897, p. 95, 203 ; A. H. Sayce, The Higher Critxcism and the Verdict of the Monuments, in-8o, Londres, 1894, p. 337-339 ; Ed. Meyer, Der Stamm Jakob, dans la Zeitschrift fur die alttestamentliche Wissensschaft, t. vi, 1886, p. 2-16 ; W. Max Muller, Asien und Europanach altagyptischen Denkmàler, in-8o, Leipzig, 1893, p. 162-165.

Iaqobel, dans les listes de Karnak, désigne une ville de la terre de Chanaan, située vraisemblablement dans la Palestine centrale, et l’on peut supposer, d’après son nom, qu’elle était habitée par des descendants de Jacob, de même que Josepal ou Joséphel, autre ville mentionnée sur les mêmes listes, aurait été habitée par des descendants de Joseph, pendant que le gros de la nation israélite était encore en Egypte. Le premier livre des Parahpomènes, vil, 21-24, rapporte que des descendants de Joseph avaient fait des incursions en Palestine avant la sortie d’Egypte. — Voir W. N. Groff, Lettre à M. Revillout sur le nom de Jacob et de Joseph en égyptien, in-4o, Paris, 1885, p. 5 ; F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 5e édit., t. iv, p. 373.

3. JACOB, nom, dans la Vulgate, I Mach., viii, 17, du grand-père d’Eupoleme que Judas MachaLée envoya

comme ambassadeur à Borne. Au lieu de Jacob, le texte 4jrec porte’Axxciç.Voirvccos 2, t. i, col. 115.

4. JACOB, fils de Mathan et père de saint Joseph, l’époux de la Sainte Vierge. Matth., i, 15, 16. Voir Généalogie 2, col. 170, et Joseph 2.

    1. JACOB (PUITS DE)##


5. JACOB (PUITS DE), puits d’eau vive, près de l’ancienne Sichem, ainsi appelé du nom du patriarche auquel on en fait remonter l’origine, et près duquel le Sauveur retournant de Jérusalem en Galilée, par la Samarie, s’assit fatigué et s’entretint avec la femme samaritaine qui était venue y puiser de l’eau. Joa., IV, 3-42. L’Évangile tout en le reconnaissant, par la bouche de la Samaritaine, pour un puits, çpéap, puteus, ꝟ. 11, 12, lui donne cependant le nom de miyr) toO’Iocxwë, fans Jacob, « fontaine de Jacob, » ꝟ. 6. Les anciens l’ont ordinairement désigné sous le nom de « puits de Jacob y,

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196. — L’église du puits de Jacob. D’après Arculf et Adamnan (vers 670).

comme les indigènes de langue arabe qui l’appellent ^constamment bîr Ya’qiib ; les chrétiens occidentaux font plus fréquemment usage aujourd’hui du nom de « puits de la Samaritaine ».

I. Situation et histoire.

On montre le puits de Jacob à deux kilomètres, à l’est, de l’entrée orientale deNâblûs, l’ancienne Sichem, à 200 mètres environ, également à l’est, du petit village de Balâfâh, à 500 mètres au sud-est du tombeau traditionnel de Joseph et à un kilomètre au sud-ouest du village d’El-’Askar ; il se trouve ainsi sur la limite occidentale de la plaine appelée en cette partie sahel el-’Askar, et plus au sud sahel Râgib et sahel Mahnèh, à la base de Djebel e{-fûr, le Garizim de l’Écriture, à l’endroit où ce mont fléchit brus--quement du sud à l’ouest, près du puits, à 500 pas à peine, où bifurquent les chemins de Naplouse à Jérusalem et à la vallée du Jourdain. Voir la carte du mont Garizim, col. 109. Chrétiens et musulmans, juifs et samaritains sont unanimes à reconnaître dans ce même puits celui creusé par le patriarche Jacob dont parle l’Évangile. Les descriptions de l’histoire prouvent l’ancienneté et la perpétuité de cette tradition.

L’Ancien Testament ne fait pas mention du puits de Jacob, mais ses récits font connaître l’usage des patriarches de creuser des puits aux endroits où ils s’établissaient pour leur commodité, et surtout pour éviter les -rixes avec les populations indigènes. Cf. Gen., Xxi, 30 ;

xxxvi, 15, 18-22. Par la narration de saint Jean, IV, 5, 12, nous constatons chez les Juifs et chez les Samaritains l’existence d’une tradition locale attribuant à Jacob l’établissement près de Sichar, en Samarie, tenue par quelques-uns pour une localité différente et par d’autres pour Sichem elle-même (voir Sichar), près de la montagne où adoraient les Samaritains, c’est-a-dire près du mont Garizim, et près du terrain donné par Jacob à son fils Joseph, d’un puits profond creusé pour l’usage de sa famille et celui de ses troupeaux. Ce terrain se trouvait près de Sichem à l’endroit qui fut habité par Jacob ; c’est là qu’après la conquête du pays par Josué furent ensevelis les ossements de Joseph rapportés d’Egypte. Cf. Gen., xxxiii, 18-20 ; xxxv, 4 ; xlviii, 22 ; Jos., xxiv, 32. Au ive siècle, « on montrait encore ce puits, » assure Eusèbe de Césarêe, Onomasticon, au mot X’jyip, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, p. 346. Le pèlerin de Bordeaux, en 333, venant du Nord et allant à Jérusalem indique le puits de Jacob, après le tombeau de Joseph, prés du Garizim, de Sichar et de Sichem. ltinerarium, t. viii, col. 790. Vers la fin du même siècle, saint Jérôme traduisant VOnomaslwon d’Eusèbe, remplace l’indication citée par ces mots : « On vient maintenant d’y faire construire une église. » De locis et nom hebr., t. xxiii, col. 963. Sainte Paule Romaine, faisant son pèlerinage des Lieux saints, arrivée « au côté du mont Garizim, entra dans l’église bâtie autour du puits de Jacob ». Id., ’Efist. cvtn, t. xxii, col. 888. Le puits étant devant la grille du sanctuaire, ante cancellos altaris. Antonin de Plaisance (vers 570), De locis sanctis, 6, t. lxxii, col. 901. D’après la description et le dessin de l’évêque Arculf (vers 796), l’église avait la forme d’une croix dont les branches étaienttournées vers les quatrepoints cardinaux (voirfig. 196) ; le puits était au milieu, il avait quarante aunes (orise pour ôpYutaî) ou coudées de profondeur. Adamnan, De locis sanctis, t. II, t. lxxxviii, col. 802-803. Saint Willibald pendant son pèlerinage (723-726) visita « l’église [bâtie] sur le puits », près du Garizim. Acla sanct. Boll., Vitaseu HodœporiconS. Willibaldi, cap. iii, n. 20, juliit.ll, édit. Palmé, p. 508, 509. Le Commemoratoriumde Casis Dei (vers 804), édit. Orient, latin, Genève, 1880, p. 269-270, l’appelle « une grande église ». Pierre diacre, en parlant au commencement du XIIe siècle, d’après les anciens documents, l’indique « à deux milles (environ trois kilomètres) de la ville de Néapolis, l’antique Sichem, et à 500 pas du monument de Joseph » ; De locis sanctis, t. clxxiii, col. 1127. Le pèlerin Sévulf, en 1102, nomme « la fontaine de Jacob », sans faire mention de l’église, peut-être parce qu’elle n’existait plus. Cf. Peregrinatio, dans le Recueil de voyages de la Société de géographie, in-4°, Paris, 1839, t. iv, p. 849 850, soit qu’elle ait été détruite ou qu’elle tombât en ruines. On était occupé à la reconstruire quand Frétellus, probablement avant 1120, écrivit son livre De locis sanctis lerrm Jérusalem, t. CLV, col. 1045, 1046. Jean de Wurzbourg, quelques annéesplustard, latrouvaitrétablie. Ibid., co. 1058-1059. Les dispositions générales n’avaient point été modifiées : « Le puits sur lequel s’assit le Seigneur, distant d’un demi-mille de la ville [de Néapolis], est situé devant l’autel, dans l’église qui a été construite au-dessus et où de saintes religieuse.) se consacrent au service de Dieu, » dit Théodoric, vers 1172, dans son Lxbellus de loch sanctis, édit. Tobler, Saint-Gall et Paris, 1868, p. 94. Ernoul (vers 1187) appelle le « demi-mille » une « demilieue ». Fragments sur la Galilée, dans Itinéraires français, publiés par la Société de l’Orient latin, Genève, 1882, p. 73-74. D’après le moine grec Phocas (1185), la distance du puits à la ville serait « d’environ quinze stades ». De locis sanctis, Bolland., Acta sanctorum, maii t. ii, prelim. , xiii et xiv, p. iv. Trente ans après que les musulmans eurent rétabli leur domination sur le pays, Thietmar, visitant, en 1217, « le puits de Jacob, dans le voisinage de Néapolis, » ne mentionne plus l’église peut1077

JACOB

d076

être abattue déjà par les infidèles. Peregrinatio,-p. 25, à la suite de Peregrinationes medii sévi quatuor, 2e édit. Laurent, Leipzig, 1873. En 1336, Guillaume de Baldensel atteste positivement que l’église était en grande partie ruinée, les pèlerins, passant près de l’angle du Garizim, venaient cependant chercher encore le puits de Jacob, obstrué par les décombres. Cité par Quaresmius, dans Elucidalio Terrse Sanctse, in-f°, Anvers, 1627, t. ii, p. 800. Cf. Ishaq Hélo (vers 1338), dans Carmoly, Itinéraires de la Terre Sainte, Bruxelles, 1847, p. 25-1. Le P. Noé, franciscain, passant en 1508, près de Napolosa. à l’église du Saint-Sauveur, la trouve « toute fracassée » et dans

cette crypte ou au moins pour y jeter un regard furtif. Le puits bouché, et ordinairement à sec pendant l’été, était au milieu. Dans les ruines de l’église on remarquait deux tronçons de colonnes « de marbre gris » debout. Quaresmius, loc. cit., Peregr. V, t. VII, c. v, t. ii, p. 799803. Cf. de Radzivil, 1582-1584, Peregrinationes hierosolymitanæ, in-4°, Anvers, 1614, p. 236-238 ; Aquilante Rochetta (1598), Peregrinationedi Terra Santa, Palerme, 1630, p. 121, 122 ; Jean Cotovic (1598), ltinerarium hierosolymitanum, t. III, c. iii, Anvers, 1619, p. 333 ; Bernardin Surius (1644), Le pieux pèlerin, t. III, c. ii, Bruxelles, 1666, p. 548 ; Jacques Goujon (1668), Histoire

197.

Abside de l’égliss de la Samaritaine. Entrée de la crypte renfermant le puits de Jacob. D’apiès une photographie du P. Henrik.

l’église la fontaine de Jacob avec très peu d’eau ; en avant du puits était un autel, et derrière l’autel la pierre sur laquelle Notre-Seigneur s’était assis. Viaggio da Venetia al santo Sepolcro, Venise, 1676, G, 3. Au temps où Boniface Stefani, de Raguse, était custode de Terre Sainte 41551-1565), les catholiques venaient dans cette église, alors ruinée jusqu’au sol, pour offrir, une fois dans l’année, au jour de la lecture de l’évangile de la Samaritaine, le saint sacrifice au Très-Haut, sur l’autel de^ -meure à l’orifice du puits. Id., De perenni cultu Terrai Sanctse, édit. de Venise, 1878, p. 253-255. Au commencement du xviie siècle, les chrétiens grecs de Naplouse venaient encore quelquefois dans l’année célébrer la liturgie à cet autel. Il était renfermé dans une petite chapelle semblable à une grotte ; on y pénétrait avec peine par une ouverture étroite pratiquée dans la voûte. Cette ouverture était ordinairement fermée par de grosses .pierres ; les pèlerins les écartaient pour descendre dans

et voyage de la Terre Sainte, Lyon, 1670, p. 95-96 ; Morisson (1697), Relation historique, t. II, c. x, Toul, 1704, p. 236-238. Henri Maundrell qui visita le puits de Jacob, le 24 mars 1697, en donne cette description : « A une petite demi-heure de Naplosa, nous trouvâmes le puits de Jacob. Il y avait une grande église sur ce puits, mais il n’en reste aujourd’hui que quelques fondements, le temps qui dévore tout, et les Turcs ayant détruit le reste, le puits est couvert aujourd’hui d’une vieille voûte de pierre. L’on y descend par un trou étroit, et l’on découvre l’embouchure du puits en levant une grande pierre plate qui est dessus. Il est creusé dans un rocher et contient environ 9 pieds de diamètre et 105 de profondeur. Nous y trouvâmes cinq pieds d’eau. Ce puits est justement au bout de la vallée de Sichem, qui s’ouvre en cet endroit en un grand champ, et qui fait apparemment partie de la terre que Jacob donna à son fils Joseph. » Voyage d’Alep à Jérusalem, Paris,

1706, p. 103-104. ta description que donne du puits V. Guérin, après une exploration en 1870, nous le montre à peu près dans le même état. Parti du tombeau de Joseph, sept minutes après, l’illustre explorateur était arrivé au puits de Jacob : « Il est renfermé, dit-il, dans une petite crypte voûtée, ancienne chapelle tournée vers l’est et située elle-même à l’extrémité orientale d’une vieille église chrétienne, bâtie en forme de croix, dont les arasements seuls sont encore visibles maintenant. Quelques tronçons de colonnes en granit gris gisent sur l’emplacement occupé jadis par cette église… Pour parvenir au puits, il faut se laisser glisser r.ar une ouvcr habitants de Balàtah comme leur propriété ; les moines grecs les ont acquis avec le terrain environnant, en 1885. Le tout a été entouré d’un mur solide et élevé. Une petite habitation construite dans cette enceinte est occupée par le moine chargé de la garde du sanctuaire. Des fouilles faites autour du puits ont découvert les restes des trois absides de l’église du xiie siècle desquelles il y demeure une ou deux assises. La crypte dans laquelle se trouve l’ouverture du puits est sous l’abside du milieu (fig. 197). On y descend par deux escaliers parallèles s’ouvrant dans le sol de l’église immédiatement devant l’abside elle-même ; chacun a neuf degi es,

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198. — Crypte renferment le puits de Jacob. D’après une photographie du Père Henrik.

ture ménagée dans la voûte de la petite chapelle obscure qui le contient… Je me suis convaincu qu’il fut non pas creusé dans le roc, comme beaucoup de voyageurs l’ont affirmé, mais bâti avec des pierres d’assez faibles dimensions et régulièrement agencées entre elles. Très étroit à son orifice supérieur, il s’élargit ensuite un peu, et sa profondeur actuelle est d’environ 24 mètres. Elle était autrefois beaucoup plus grande ; car presque tous les pèlerins qui la visitent ont l’habitude d’y jeter des pierres pour savoir s’il contient encore de l’eau… Il est ordinairement à sec, la source qui lui fournissait de l’eau se trouvant probablement plusieurs mètres plus bas et obstruée par cet amas toujours plus grand de petites pierres. Néanmoins, à l’époque des grandes pluies, cette source se fait encore quelquefois jour à travers, et des voyageurs y ont signalé alors 3 ou 4 mètres d’eau. » Samarie, in-4°, Paris, 1874, t. i, p. 376-377.

II. État actuel.

Le puits de Jacob et les ruines de l’église ainsi abandonnés étaient considérés par les

dont trois au delà de la porte étroite donnant entrée dans la crypte. Elle est voûtée et était éclairée par une petitefenêtre ouverte entre les deux portes ; la brèche de la voûte par où on y pénétrait naguère a été fermée. Elle a été de nouveau disposée en chapelle (fig. 198). La partie la plus à l’est, moins large et dont le sol, pavé de grosses mosaïques blanches, est de 20 centimètres environ plusélevé, en forme le sanctuaire. Au fond, vers l’Orient, les Grecs ont élevé, à la place qu’oeccupait, ce semble, l’ancien, un petit autel, sous la table duquel se voit un fragment de colonne qui est peut-être la pierre dont parle le P. Noé. Le puits est devant l’autel. Une margelle antique rectangulaire, de l m 15 de long et de m 75 de large, percée d’une ouverture circulaire, marquée de stries profondes, creusées par la corde employée pour tirer l’eau, est posée à l’orifice pratiqué dans la voûle qui recouvre le puits. La profondeur, après le déblaiement, est de 25 mètres environ et sa largeur moyenne de 2 mètres et demi. L’eau, assure le gardien s’y main

lient maintenant tonte l’année, plus abondante cependant l’hiver. Deux tronçons de colonnes en marbre sont dressés sur les deux côtés de la chapelle. Le reste des ruines autour des absides du puits n’a pas encore été fouillé ; on y voit émerger d’autres tronçons de colonnes dont deux ou trois en granit gris, d’un diamètre assez considérable, les mêmes sans doute auxquels font allusion les voyageurs.

L’état actuel correspond trop exactement aux descriptions anciennes pour que l’on ne reconnaisse pas les mêmes ruines, la même église, le même puits recherché et vénéré depuis les âges les plus reculés. La situation étant d’ailleurs celle indiquée par l’Évangile et la Bible, avec les autres garanties générales que nous donne l’histoire locale, l’identité du puits de Jacob paraît une des mieux établies parmi tous les monuments que l’on fait remonter aux temps bibliques. Les objections fondées sur la distance de Sichem à ce puits, sur l’existence d’autres fontaines entre la ville et le puits dont nous venons de parler ont été résolues de diverses manières : 1o il n’est pas certain que Sichem et Sichar soient une seule et même ville ; 2o la position de l’ancienne Sichem devait être, probablement, beaucoup plus rapprochée du puits que ne l’est Naplouse ; 3ola Samaritaine pouvait préférer l’eau du puits de Jacob à celle des autres fontaines, par un sentiment de dévotion que n’empêche pas une vie déréglée ; 4o elle pouvait se trouver à la campagne et avoir le puits plus à sa portée qu’aucune autre fontaine — Outre les auteurs que nous venons de citer, on peut consulter encore entre autres : Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, t. m p. 326-335 ; Mo r Mislin, Les Saints Lieux, in-8o, Paris, 1868, t. iii, p. 323-330 ; R. Conder, Tent Work in Palestine, in-8o, Londres, 1878, t. i, p. 72-76 ; P. Séjourné, dans la Revue biblique, 1893, p. 242-244 ; 1895, p. 619-622 ; Fr. Liévin de Hamm, Guide indicateur de la Terre Sainte, Jérusalem, 1887, t. iii, p. SO-37 ; Survey of western Palestine, Memoirs, Londres, 18811883, t. ii, p. 172-185 ; Palestine exploration fund, Quarterly statement, Londres, 1873, p. 71 ; 1877, p. 72-75 ; 1879, p. 87-85 ; 1881, p. 195. L. Heidet.

    1. JACOB BEN-ASCHER##


6. JACOB BEN-ASCHER, exégète juif du XIV » siècle, qui mourut à Tolède vers 1340. Il a laissé un commentaire sur le Pentateuque qui se rattache étroitement à celui de Nachmanide au point de vue cabalistique. Il a été édité pour la première fois à Zolkiew, in-4o, 1806, puis à Hanovre, in-4o, 1838. On a aussi de lui les Parperaof’al hal-fôrâ/i, in-4o, Constantinople 1500, 1514 ; Venise, 1544, 1548 ; etc. Ses Quatre ordres, ’Arbd’âh turim, n’en sont guère qu’un extrait pratique, très souvent édité, sorte de code raisonné de la loi mosaïque et talmudique, si populaire qu’il a vahi à son auteur le nom de Ba’al hat-turîm, « le maître des ordres. »

E. Levesque.

j 7. JACOB BEN CHAYIM. Voir Rabbiniques (Bibles).

    1. JACOBA##

JACOBA (hébreu : Ya’âqôbâh ; Septante : T » xa6â ; Codex Alexandrinus : Maxaëâ), chef de famille de la tribu de Siméon qui alla s’établir avec d’autres Siméonistes dans la vallée de Gador. Son nom ne diffère que par la terminaison de celui de Jacob. I Par., iv, 36. Voir Gador, col. 34.

    1. JACQUES (’lixo)ooc)##


JACQUES (’lixo)ooc), nom de deux apôtres. D’après un certain nombre d’exégètes, il faudrait admettre un troisième et même un quatrième Jacques, sinon davantage, c’est-à-dire un Jacques fils d’Alphée, différent de Jacques le Mineur, voir Jacques 2, et un autre Jacques, d’ailleurs inconnu, qui aurait été le père de l’apôtre Jude. Luc., vi, 16 ; Act., 1, 13. On lit dans ces deux passages’lo-jôav’Iaxuiëou ; la plupart des interprètes sousentendent àSsî.çôv, « frère de Jacques ; » certains com mentateurs, au contraire, sous-entendent à tort uîiv, « fils de Jacques. » Ce Jacques père de Jude est tout à fait inconnu de la tradition. — Le nom de’Iixwëo ; est le même que celui de’Iocxrâê de l’Ancien Testament, voir Jacob l, col. 1061 ; mais les Septante ont traité ce nom comme indéclinable, tandis que les écrivains du Nouveau Testament lui ont donné une terminaison grecque qui leur a permis de le décliner. Ils ont conservé d’ailleurs la forme’IaxoSë, que l’usage avait adoptée pour le nom du fils d’Isaac et du père de saint Joseph. La Vulgate latine a fait de même : elle se sert de la forme Jacob pour les personnages de l’Ancien Testament, et de la forme Jacobus pour ceux du Nouveau. Nos noms français sont dérivés du latin, d’après cette règle générale que la syllabe tonique est toujours respectée, parce que c’est sur elle que la voix s’arrête, tandis que les syllabes qui la suivent sont abrégées. Jacob ayant l’accent tonique sur Vô n’a subi aucun changement, mais Jacobus ayant l’accent sur a s’est contracté en Jacques.

    1. JACQUES (SAINT) LE MAJEUR##


1. JACQUES (SAINT) LE MAJEUR, fils de Zébédée, et frère de saint Jean l’Évangéliste, un des douze Apôtres ; il est surnommé « le Majeur » pour le distinguer de son homonyme, le frère du Seigneur (fig. 199). — 1o L’Évangile, Matth.

iv, 21, 22 ; Marc, i,

19, 20 ; Luc, v, 10, 11,

nous fait connaître la

première rencontre de

Jacques avec Jésus. C’é tait sur les bords du lac

de Génésareth où Jac ques et Jean, son frère,

étaient occupés à rac commoder leurs filets.

Jésus les invita à le sui vre, et aussitôt ils lais sèrent leur père Zébédée

dans la barque avec les

mercenaires, pour obéir

à son appel. On ne sait

pas exactement à quelle

époque eut lieu cet évé nement ; on est porté à

croire que ce fut au

printemps ou dans l’été

de l’an 27. — L’année

suivante, probablement

au printemps de l’an 28,

Jacques fut appelé à l’a postolat avec les onze

autres disciples. Matth.,

x, 2-4 ; Marc, iii, 14 ; vi,

7 ; Luc, vi, 13-16 ; Act.,

i, 13. Dans la liste des

apôtres de Marc, iii, 16 19, Jacques occupe la

seconde place, immédia tement après saint

Pierre ; au contraire dans les listes de Matthieu, de Luc et des Actesj il occupe le troisième rang. — Dans le collège des Douze, Jacques, ainsi que Pierre, André et Jean, paraît avoir été un apôtre privilégié. Voir Apôtres, t. i, col. 782-787. Il paraît en effet dans quatre circonstances solennelles : Pierre, Jacques et Jean assistent seuls à la résurrection de la fille de Jaïre, Marc, v, 37 ; Luc, viii, 51 ; seuls ils sont admis à contempler la transfiguration de Jésus-Christ, Matth., xvii, 1-2 ; Marc, ix, 1 ; Luc, ix, 28, 29 ; seuls aussi ils sont témoins de son agonie, Matth., xxvi, 37 ; Marc, xiv, 33 ; ces trois mêmes apôtres avec André demandent au

Sauveur l’explication de ses paroles sur la fin du monde

199. — Saint Jacques le Majeur. D’après Giov. Santi. Il tient comme emblème le bourdon du pèlerin.

Voir Mrs. Jamoson, Sacred and Legendary Art, 2e édit., in-8° Londres, 1850, p. 140. 4083 JACQUES (SAINT) LE MAJEUR — JACQUES (SAINT) LE MINEUR 4034

et sur son second avènement, Marc, xiii, 3-4. — Le Sauveur changea le nom de Jacques et de Jean et les appeL Boanerges, ce qui signifie « fils du tonnerre », Marc., iii, 17, par allusion sans doute î la vivacité et à l’impétuosité de leur caractère. Voir Boanerges, t. î, col. 1821. Cf. Die Evangelien des Markus und Lukas, dans Kritisch exegetischer Kommentar, de H. A. W. Meyer, in-8o, Gœttingue, 1892, p. 55. Cette ardeur de caractère se manifesta surtout dans deux circonstances : la première fois ce fut durant le voyage de Jésus à Jérusalem. Luc, îx, 52-56. Les Samaritains ne voulurent pas le recevoir parce qu’il allait à Jérusalem ; indignés de ce traitement Jacques et Jean demandèrent à Jésus la permission de faire descendre Je feu du ciel sur les Samaritains pour les consumer ; Jésus les reprit d’une telle proposition. La seconde fois, ce fut encore durant un voyage à Jérusalem, Marc, x, 35-40 ; Jacques et Jean demandent à Jésus de les faire asseoir l’un à sa droite et l’autre à sa gauche dans son royaume. Cf. aussi Matth., xx, 20-23. Selon l’usage juif, la droite et la gauche indiquaient les places d’honneur. Josèphe, Ant. jud., VI, xi, 9. Le Sauveur refusa d’accéder à leur demande. — On ne sait plus rien de saint Jacques depuis le moment où il assista à l’agonie du Jardin des Olives, jusqu’après l’ascension. Lorsque le Sauveur fut monté au ciel, il se prépara par la prière avec les autres apôtres dans le cénacle à la descente du Saint-Esprit. Act., i, 13-14. Il fut le premier des Apôtres, qui versa, Act., xii, 2, son sang pour Jésus-Christ. S'étant rendu avec Pierre, à Jérusalem pour y célébrer la fête de Pâques, vers l’an 42, Hérode Agrippa Ier s’empara de sa personne et le fit périr par le glaive. Act., xii, 2.. Cf. Eusèbe H. E., ii, 1, 9, t. xx, 136, 157 ; iii, 5, col. 221. V. Ermoni, Les Églises de Palestine aux deux premiers siècles, dans la Revue d’histoire ecclésiastique de Louvain, 2 « année, 15 janvier 1901, p. 16.

2o La tradition a ajouté les détails suivants au martyre de saint Jacques. Clément d’Alexandrie, au vii « livre des flypotyposes, dans Eusèbe, H. E., ii, 9, t. xx, col. 157, raconte que celui qui conduisait saint Jacques devant le tribunal, le voyant confesser si ferme, ment la foi de Jésus-Christ, fut rempli d'émotion et confessa lui-même qu’il était chrétien. Pendant qu’on les conduisait tous deux au supplice, son compagnon pria saint Jacques de lui accorder le pardon ; l’apôtre, après un moment de réflexion, lui dit : « La paix soit avec toi ; » et il l’embrassa. Tous deux eurent alors la tête tranchée. Cette tradition, ainsi que le fait de la conversion du magicien Hermogène, a été acceptée par le Bréviaire romain, 25 juillet, 2 S leçon du n « nocturne.

3* D’après des légendes plus récentes, saint Jacques le Majeur alla prêcher l'évangile en Espagne et retourna de là à Jérusalem où il subit le martyre. La première mention qu’on connaisse de cette prédication se trouve dans De vita et obitu sanctorum utriusque Testamenti, 71, attribué à saint Isidore de Séville, t.LXXXHi, col. 151. Une autre source légendaire fait transporter son corps à Iria, aujourd’hui El Padron, dans le nord-ouest de l’Espagne. Théodomir, évêque d’Iria (772), en fut le premier auteur. D’après lui. le corps de saint Jacques fut porté après son martyre à Joppé, et de là par mer à Iria où on le débarqua. On le conduisit alors à Liberum Donum, connu depuis sous le nom de Santiago ou saint Jacques de Compostelle. Compostelle est, selon les uns, une contraction de Jacomo Apostolo ; selon les autres, de Campus stellse, parce que ce fut une étoile miraculeuse qui révéla en 772 à l'évêque Théodomir le lieu où étaient ensevelies les reliques de l’apôtre. On commença vers 1082 à bâtir sur son tombeau une magnifique église qui devint cathédrale en 1112. C’est à cause de ces légendes que saint Jacques est devenu le patron de l’Espagne. Le pèlerinage de saint Jacques de Compostelle, en Galice, a été | pendant des siècles le plus célèbre de la chrétienté après i

celui des Lieux Saints. Les critiques s’accordent néanmoins à rejeter les deux légendes espagnoles relatives à saint Jacques. Voir Baronius, Martyrologium romanum, 25 jul., Anvers, 1589, p. 325 ; Acta sanctorum, julii t. VI, 1729, p. 73-114 ; Tillemont, Mémoires, Bruxelles, 1706, t. î, p. 899 ; Gams, Die Kirchengeschichte von Spanien, Ratisbonne, 1862. V. Ermoni.

    1. JACQUES (SAINT) LE MINEUR##


2. JACQUES (SAINT) LE MINEUR, fils de Marie, sœur de la sainte Vierge, et de Cléophas ou Alphée, Matth.', xxvii, 56 ; Luc, xxiv, 10 ; Joa., xix, 25 ; frère de Jude, Luc, vi, 16 ; Act., i, 13 ; Jud., i, et aussi frère (cousin) du Seigneur, Matth., xiii, 55 ; Marc, vi, 3, Gal., i, 19, etl’undes douze Apôtres. Matth., x, 3, Marc, iii, 18 ; vi, 3 ; Luc, vi, 15 ; Act., 1, 13 ; xii, 17 ; xv, 13 ; xxi, 18 ; ICor., XV, 7 ; Gal., Il, 9, 12 (fig. 200).

I. Identité de Jacques frère du Seigneur et de Jacques fils d’Alphée. — 1o Tout le monde reconnaît que Jacques fils de Zébédée (voir Jacques 1, col. 1082) et Jacques fils d’Alphée sont deux personnes distinctes ; mais un certain nombre de critiques veulent distinguer aussi Jacques fils d’Alphée de Jacques frère du Seigneur, contrairement à la tradition de l'Église latine. Cette identité a été reconnue par le concile de Trente, qui, Sessio xiv, De Extrema Unctione, c î, can. 1, 3, déclare que Jacques, l’auteur de la première ÉpUre catholique, et par conséquent le frère du Seigneur, est Jacques l’Apôtre, c’est-à-dire le fils d’Alphée. Elle s’appuie sur les raisons suivantes : — 1. Saint Paul, Gal., i, 19, affirme que Jacques, frère du Seigneur, était apôtre ; il est donc le même que le fils d’Alphée. Ce passage est péremptoire et il est confirmé par les autres écrits du Nouveau Testament. — 2. Saint Luc, vi, 13-16, dans sa liste des Apôtres, ne mentionne que deux personnages du nom de Jacques : l’un qu’il appelle simplement Jacques, ꝟ. 14, et l’autre qu’il appelle fils d’Alphée, j}. 15 ; le même saint Luc, après avoir mentionné dans les Actes, xii, 2, le martyre de Jacques, fils de Zébédée, identique à celui de Luc, vi, 14, de la liste des Apôtres, continue le parler dans les chapitres suivants de Jacques, évêque de Jérusalem, frère du Seigneur, qu’il identifie ainsi à celui de Luc, vl, 15, c’est-à-dire au fils d’Alphée. — 3. Jacques, frère du Seigneur, est représenté comme exerçant une grande autorité parmi les Apôtres, Act., xii, 17 ; xv, 13 ; xxi, 18 ; dans Gal., ii, 9-12, il est même mentionné avant Céphas et Jean, avec lesquels il est une des colonnes de l'Église ; or il ne pouvait occuper une telle place parmi les Apôtres que parce qu’il était apôtre lui-même. — 4. C’est ainsi que les anciens Pères ont compris ces passages du Nouveau Testament. Voir Papias d’Hiérapolis, dans Routh, Rehquix sacrse, Oxford, 1846, t. î, p. 16, 23, 43 ; Clément d’Alexandrie, Hypot., ru, dans Eusèbe, H. E., ii, 1, t. xx, col. 136 ; S. Jean Chrysostome, In Gal., i, 19, t. lxi, col. 632 ; S. Jérôme, Adv. Helv., xiii, t. xxiii, col. 195-196. Cf. Tillemont, Mémoires, 2 « édiU in-4o, Paris, 1701, p. 365.

2o L'Église grecque fait aujourd’hui dj Jacques le Mineur une personne différente de celle de Jacques fils d’Alphée, et célèbre leur fête à des jours distincts, le 25 et le 9 octobre. Nicétas Paphlagon, dans les Actes de Jacques d’Alphée, dit qu’il n’est pas le même que 1cfrére du Seigneur, t. cv, col. 148 ; Métaphraste, dans la Vie ; de Jacques frère du Seigneur, ne fait aucune mention du fils d’Alphée. L’autorité de ces écrivains n’est pas considérable ; celle de saint Épiphane qui soutient la même opinion, Hser., lxxix, 3, t. xiii, col. 744, n’a pas beaucoup plus de poids dans les matières de ce genre. Saint Grégoire de Nysse a embrassé la même opinion, Orat., n. De resur., xlvi, col. 648, mais c’est parce qu’il a confondu Marie de Cléophas avec la Sainte Vierge, et fait de Jacques un fils de saint Joseph. Cf. Acta sanctorum, 1680, maii t. î, p. 24-27. Les savants modernes qui se prononcent pour la dis

tinction des deux Jacques s’appuient surtout sur l’Écriture. — 1. Dans le Nouveau Testament, disent-ils, Jacques l’Apôtre est toujours appelé fils d’Alphée, tandis que Jacques, frère du Seigneur, est dit fils de Clopas ou CUopbas ; or, d’après eux, Alphée et Clopas sont deux personnages distincts. Il n’est nullement certain qu’Alphée et Cléophas soient deux personnes différentes. Voir Alphée 2, 1. 1, col. 418, et Cléophas, t. ii, col. 807. La question serait tranchée si le même écrivain distinguait Alphée et Cléophas, mais il n’en est pas ainsi. Les trois synoptiques qui nomment Alphée, Matth., x, 3 ; Marc, m, 18 ; Luc, vi, 15 ; Act., i, 13, ne nomment jamais de personnage appelé Cléophas, et saint Jean, qui nomme Cléophas, xix, 25, ne parle jamais d’Alphée, et ne nous donne d’ailleurs nulle part aucun catalogue des Apôtres.

Il est impossible de

prouver rigoureuse ment qu’Alphée et Cléo phas sont distincts ; si,

à cause de la différence

des noms, on ne peut

pas affirmer leur iden tité, on ne peut pas non

plus établir leur dua lité, qui est en contra diction avec la tradition

la plus commune. — 2.

D’après Joa., vii, 5, les

frères de Jésus, ajoute t-on, ne croyaient pas

à sa mission ; au con traire, Joa., vi, 69, 70,

les disciples de Jésus,

par la bouche de saint

Pierre, affirment leur

foi dans sa divinité et

sa mission ; il est donc

impossible d’identifier

Jacques frère du Sei ^ gneur, incroyant, avec

Jacques l’Apôtre,

croyant. — Lorsque

D : » près"L’.'"v7n M Leydèn."’n « "ent saint Jean dit 1 ue les dans la main le bâton du foulon, frères du Sauveur ne instrument de son martyre. Voir croyaient pas en lui, il Mrs. Jameson, Sacred and Legens’exprime d’une madary Art, p. 150. nière générale et non

mathématique. On ne

peut pas conclure de là qu’aucun de ses frères ne croyait en lui. — 3. D’autres textes qu’on allègue, tels que Joa., ii, 22, et Act., i, 14, etc., ne prouvent rien en faveur de la distinction.

II. Vie de saint Jacques.

1° Jacques est appelé dans saint Marc, xv, 40, jitxpôç, le « Mineur » ; on le distingue ainsi de l’autre Jacques surnommé le « Majeur ». Il reçut ce surnom, soit à cause de sa petite taille, soit â cause de sa jeunesse relative ; certains pensent même, ce qui est moins probable, qu’il se le donna lui-même par modestie. Il fut appelé à l’apostolat, vraisemblablement au printemps de l’an 26, avec son frère Jude ; ce dernier n’est même désigné qu’en rapport avec son frère : ’Ioiêav’Iax(660u. Luc, vi, 16. Après ces indicaions sommaires, le Nouveau Testament ne nous parle )lus de saint Jacques qu’après la résurrection de Notre-Seigneur. Jésus-Cnrist lui apparut après sa résurrection, I Cor, xv, 7 ; la tradition est d’accord pour voir dans

e Jacques le frère du Seigneur et non le fils de Zébédée.

Votre-Seigneur lui apparut probablement pour l’instruire, comme les autres Apôtres, des choses du royaume de Dieu. Act., i, 3. Nous trouvons dans la suite Jacques et les autres Apôtres, avec Marie à Jérusalem, attendant, dans la foi et la prière, les dons du Saint-Esprit. Act., i, 13-14. Oa le perd de vue à peu près pendant dix ans.

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200. — Saint Jacques to Mineur.

Trois ans après sa conversion, saint Paul se rendit à Jérusalem ; Barnabe l’introduisit chez Pierre et Jacques. Act., îx, 27 ; Gal., i, 18, 19. C’est probablement à cette époque qu’il fut élu évéque de Jérusalem. Lorsque saint Pierre fut délivré de sa prison, il en avertit Jacques et les frères. Act. xii, 17. Il se prononça dans la question des observances légales que lui avaient soumise, ainsi qu’à Pierre, Paul et Barnabe. Act., xv, 13-21. Nous avons déjà vu que saint Paul le nomme une des colonnes de l’Église. Gal., ii, 9. Certains fidèles, venant de la part de Jacques, rendirent hésitante la conduite de Pierre touchant les rites judaïques. Gal., ii, 12. Enfin, sans que l’on puisse préciser la date, Paul rendit visite à Jacques » chez lequel se réunirent tous les anciens [les presbylres]. Act., xxi, 18.

2° Jacques fut le premier évêque de Jérusalem. Eusèbe fl. E., ii, 1, t. xx, col. 136 (d’après les anciens : ioropoOdt) ; 23, col. 196 ; iii, 5, col. 221 ; 7, col. 236 ; 22, col. 256 ; iv, 5, col. 309 ; vii, 19, col. 681 ; S. Épiphane, User., xxix, 3, t. xli, col. 393. — Certains auteurs ont soutenu qu’il avait été établi évêque de Jérusalem par Notre-Seigneur lui-même ; ainsi S. Épiphane, Hser., lxxviii, 7, t. xlii, col. 709 ; S. Jean Chrysostome, d’après une tradition (léyezat). Hoin. xxxviii, in 1 Cor., 4, t. lxi, col. 326, qui paraît provenir des Récognitions clémentines, i, 43, t. i, col. 1232. — Saint Jérôme* nous affirme au contraire qu’il fut établi évêque de Jérusalem par les Apôtres, Devir. illustr., ii, t. xxiii, col. 609. Eusèbe a deux versions : dans un endroit, il nous dit qu’il fut établi évêque par les Apôtres, H. E., ii, 23, t. xx, col. 196 ; dans un autre passage, il dit qu’il fut établi, évêque et par le Sauveur et par les Apôtres, H.E., vii, 19, col. 681 ; c’est aussi le sentiment de l’auteur des-Constitutions apo$tohque$, viii, 35, t. i, col. 1137. Cf. aussi Clément d’Alexandrie, dans Eusèbe, H.E., t. xx, col. 136. — Les historiens lui conservent son titrede « frère du Seigneur », Eusèbe, fl. E., i, 12, t. xx, col. 120 (d’après la tradition) ; ii, 1, col. 133 ; 23. col. 197 (d’après Hégésippe) ; iii, 7, col. 236 ; 22. col. 256 ; iv, 5, col. 309 ; il est aussi surnommé le « juste » à cause de ses grandes vertus, Eusèbe, H.E, ii, 1, t. xx, . col. 136 ; IV, 22, col. 380 (d’après Hégésippe), qui lui gagnèrent même l’estime des Juifs. Josèphe, Ant. jud., XX, ix, 1. Après avoir gouverné saintement son Église pendant trente ans au dire de saint Jérôme, De vit : illustr., ii, t. xxiii, col. 613, il couronna sa vie par le martyre en 62, la huitième année du règne de Néron.

III. Traditions sur saint Jacques.

Hégésippe, dans son Histoire ecclésiastique, rapporte les traditions suivantes : Jacques fut sanctifié dès le sein de sa mère ; il ne but jamais ni vin ni cervoise ; il s’abstint de mangerla chair des animaux ; le rasoir ne passa jamais sur sa tête ; il ne s’oignait jamais d’huile, et ne prenait jamais, de bains ; ses vêtements étaient de lin ; il se rendait souvent au temple pour y prier pour les péchés du peuple ; a force de se tenir à genoux, ses genoux étaient devenus aussi durs que fa peau d’un chameau ; à cause de ses éminentes vertus il fut surnommé le « Juste » et « Oblias », qui signifie « secours du peuple » et « justice. » Après-avoir décrit son genre de vie, Hégésippe donne les détails de son martyre. D’après son récit à la fois simple et dramatique, où sousdes détails apocryphes on peut cependant découvrir un fonds de vérité historique, Jacques, en face de toutes les menaces des Juifs, resta ferme et inébranlable dans sa foi ; et à toutes les. interrogations il répondit courageusement en déclarant que Jésus est le Fils du Dieu vivant. Les scribes et les pharisiens, furieux d’une attitude si ferme et si digne, le précipitèrent du haut du pinacle du temple où ils l’avaient engagé à monter afin que sa voix fût entendue de tout le peuple ; ils attendaient de sa part un acte defaiblesse ; ils furent profondément déçus ; bien plus ils : craignirent que le peuple ne se rendit à ses exhortations1087 JACQUES (SAINT) LE MINEUR - JACQUES (ÉPITRE DE SAINT) 1088

et n’embrassât la foi à la divinité de Jésus. Comme il ne mourut pas de sa chute, ils voulurent l’achever à coups de pierres. Pendant qu’on le lapidait, le juste à genoux répétait les paroles du divin Maître sur la croix : « Je vous prie, Seigneur, Dieu Père, pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu’ils font. » Sur ces entrefaites, un des fils de Réchab, fils des Réchabites dont parle le prophète Jérémie, s’écria : « Cessez ; que faites-vous ? Le Juste prie pour vous. » Enfin comme la lapidation n’était pas un moyen assez expéditif aux yeux des persécuteurs, un foulon l’acheva à coups de bâton. Cf. Eusèbe, H. E., ii, 23, t. XX, col. 197-204 ; V. Ermoni, Les

201. — Tombeau dit de saint Jacques dans la vallée de Josaphat. D’après une photographie.

Églises de Palestine aux deux premiers siècles, dans la Revue d’histoire ecclésiastique, janvier 1901, p. 17-18. Le même Hégésippe rapporte, col. 201, que Jacques fut enterré dans le lieu même de son martyre, et qu’on voyait encore son tombeau près du temple. Au témoignage d’Eusèbe, on conservait religieusement sa chaire. H. E., vii, 19, t. xx, col. 681 ; 32, col. 733. — D’autres données, qui paraissent avoir un caractère légendaire, se greffèrent sur la tradition relative à Jacques ; on dit qu’il était marié, peut-être à cause de I Cor., ix, 5 ; c’était un rigide ascète, un nazaréen vivant continuellement dans le temple, comme Anne la prophétesse. Cf. Routh, Reliquise. sacrée, Oxford, 1846. t. i, p. 228 ; Stanley, Apostolical âge, Oxford, 1847, p. 319. — L’historien Josèphe varie un peu les détails de son martyre ; ce qu’il y a de plus intéressant, c’est que le grand-prêtre Ananias fit comparaître Jacques et quelques autres devant le sanhédrin, et, les ayant accusés de violer la loi, les livra pour être lapidés. Ânt. jud., XX, ix, 1. — Saint

Épiphane mentionne d’au Ires circonstances. Sur la foi d’Eusèbe et de Clément, il nous apprend, Hser., xxix, 4, t. xii, col. 396, que Jacques portait sur la tête de irÉTa>ov ou lame d’or du grand-prêtre, Lev., viii, 9 ; H doit probablement confondre avec ce que Polycrate, évêque de Smyrne, dit de l’apôtre saint Jean. Eusèbe, H. E., v, 24, t. xx, col. 493. Il serait mort à l’âge de 96 ans, et aurait gardé la virginité perpétuelle. Hser., lxxviii, 13, t. xlii, col. 720. — Enfin si l’on en croit Grégoire de Tours, il aurait été enterré sur le mont des Oliviers dans un tombeau où il axait déjà fait enterrer Zacharie, père de Jean-Baptiste, et le saint vieillard Siméon. De glor. mart., i, 27, t. lxxi, col. 727, 728. Un des tombeaux de la vallée de Josaphat porte le nom de saint Jacques le Mineur (fig. 201). Il est situé vis-à-vis de l’angle sudest de l’esplanade du Temple de Jérusalem. C’est une excavation taillée dans le roc et comprenant plusieurs salles et des galeries. D’après la tradition locale, Jacques, frère du Seigneur, s’y serait réfugié pendant la Passion et y aurait été enterré après son martyre.

V. Ermoni.

    1. JACQUES (ÉPITRE DE SAINT)##


3. JACQUES (ÉPITRE DE SAINT), la première des Épltres catholiques. Voir Catholiques (Épures), t. ii, col. 350.

I. Destinataires.

L’Épître porte la suscription ; « aux douze tribus qui sont dans la dispersion, » ïaïç StiSsxa çuXaîç t<xïç èv xîj SiacjTropà. Jac., l, l.Les destinataires sont aussi les frères de i’auteur. Jac, i, 2. Quels sont-ils ? On a proposé trois opinions, dont deux, les extrêmes, sont fausses : — 1° opinion. — Quelques exégètes, entre autres Lardner, Macknight, Theile, Credner, Hug, pensent que l’Épître s’adresse à tous les Juifs sans distinction. Cette opinion n’est pas probable. — 1. Elle est écartée par la condition même des destinataires : ils sont les frères de l’auteur, Jac, I, 2, 19, etc. ; ils ont été engendrés avec lui par la parole de vérité ; ꝟ. 18, ils reçoivent le verbe qui peut sauver leurs âmes ; y. 21 ; ils portent « un bon nom », xoc), àv 6’vou.a, qui est invoqué sur eux, c’est-à-dire le nom de Jésus-Christ, il, 7 ; tout cela ne peut convenir qu’à des chrétiens. — 2. Jac, ii, 1, montre qu’ils ont la foi en Jésus-Christ, qu’ils pratiquent cette foi sans acception de personnes, c’est-à-dire sans respect humain ; cela ne convient non plus qu’à des chrétiens. — 3. Jac, v, 7, les exhorte à pratiquer la patience jusqu’à l’avènement du Seigneur ; ce langage ne peut s’adresser qu’à des chrétiens. — Les partisans de cette opinion opposent trois arguments : 1. Au commencement de l’Épître, disent-ils, il y a une salutation générale ; à la fin, il n’y a pas de bénédiction chrétienne, ce qui prouve qu’elle ne s’adresse pas exclusivement à des chrétiens. — En parlant ainsi, ils ne prennent pas garde que la salutation générale du commencement : « aux douze tribus, » est restreinte par les divers correctifs dont nous venons de parler ; et quant au manque de bénédiction à la fin, ce n’est pas un indice suffisant. — 2. Le chapitre m convient, assure-t-on, à tout le monde : aux Juifs aussi bien qu’aux judéo-chré-, tiens. — Sans doute, mais c’est parce que : a) il est des exhortations générales qui s’adressent à tout le monde et qui conviennent à toutes les situations ; b) certains indices de ce chapitre montrent que l’auteur parle à des judéo-chrétiens ; ainsi : iii, 1. fait évidemment allusion aux paroles de Jésus ; Matth., xxiii, 8 ; iii, 9, emploie un terme foncièrement chrétien : « Patrem. » — 3. Jac, iv, 1-10, prétend-on, vise les intrigues des Juifs, et particulièrement des zélotes. — Ce passage convient à tout le monde, car les discordes, dont il y est question, sont celles qui proviennent de nos passions et de nos mauvaises inclinations, Jac, iv, 1.

S 1 opinion. — Koster, Kern et de Wette ont prétendu que le titre 1, 1, « aux douze tribus, est purement symbolique ; au sens littéral il indiquerait les ethno-chrétiens, vivant en dehors de la Palestine et formant le , « c véritable Israël de Dieu j>, selon Gal., vi, -16. L’Épltre serait donc adressée aux ethno-chrétiens ; cf. V. Soden, dans les Jahrbâcher fur protestantisclie Théologie, 188Ï, p. 177. — Cette opinion n’est pas non plus soutenable :

— 1. La suscription, i, 1, « aux douze tribus » ne supporte pas une telle interprétation ; elle doit être prise dans son sens naturel et obvie, comme dans Act., xxvi, 7. — 2. Le ton et la terminologie de l’Épltre portent des marques juives ; on emploie le mot « synagogue » pour désigner le lieu de réunion des chrétiens, Jac, ii, 2 ; la loi est une autorité suprême, Jac, ii, 8, 10, 12 ; iv, 11 ; l’infidélité est désignée par le terme d’« adultère », Jac, iv, 4 ; l’obligation de s’occuper des orphelins et des veuves, Jac, i, 27, se rapporte naturellement aux prescriptions de la loi mosaïque. — 3. La doctrine est opposée à cette interprétation ; les erreurs réiutées dans l’Épltre paraissent se rapporter en grande partie au formalisme pharisaïque.

3’opinion. — C’est la vraie : l’Épltre s’adresse directement aux Juifs convertis. Cette opinion, vraie dans sa teneur générale, est cependant susceptible de modifications accidentelles : « Néanmoins il (saint Jacques( n’exclut pas les Gentils ; mais à l’exemple de Notre-Seigneur, Malth., xix, 28, et de saint Jean, Apoc, vii, 4, il considère les douze tribus comme la tige d’où le peuple chrétien doit sortir, et la postérité spirituelle d’Abraham se compose à ses yeux de tous les vrais croyants. Rom., iv, 11-12. Ces amis de Dieu, ces citoyens de la sainte Jérusalem sont dispersés en tous lieux et exilés icibas parmi les pécheurs, comme les Juifs l’ont été, au temps de la captivité, dans l’empire de Babylone. » Bacuez, Manuel biblique, 10e édit., t. iv, Paris, 1900, p. 583584. — On peut aussi admettre avec certains auteurs, en s’appuyant sur Act., viii, 1, que la Stadjrooâ embrasse aussi les Juifs de la Palestine dont Jérusalem était le centre. — Cependant on serait mal fondé à restreindre l’Épltre aux Juifs de la Syrie, quoiqu’elle ait été insérée immédiatement dans la Peschito destinée aux chrétiens de langue araméenne, et que Josèphe affirme que la plupart des Juifs de la dispersion se trouvaient en Syrie. Bell. jud., VII, iii, 3.

II. Occasion et but.

1o L’occasion de l’Épltre paraît avoir été les enseignements antichrétiens de certains docteurs simonites ou nicolaites. Ces docteurs que Jacques regarde comme des hommes présomptueux, Jac, m, 1, et qui abondaient en paroles, Jac, iii, 5-18, enseignaient que la foi sans les bonnes œuvres suffit au salut. Il semble même que, pour légitimer leur doctrine, ils s’appuyaient sur certains passages des Épîtres de saint Paul, ce que nous verrons plus loin. Cf. S. Augustin, De grat. et lib. arbit., vii, 18, t. xliv, col. 892. Averti du danger que faisaient courir ces fausses doctrines, saint Jacques écrivit cette Épitre pour çnrayer le mal. Il y était d’autant plus obligé que, en qualité d’évêque de Jérusalem, et juif de naissance et d’éducation, il inspirait la plus grande confiance aux judéochrétiens. — 2o L’objet de l’Épltre répond très bien au but que l’auteur se proposa. On voit en effet qu’il insiste tout particulièrement sur les points qui faisaient l’objet des enseignements des faux docteurs. Sans doute saint Jacques touche plusieurs points de morale : vanité des richesses, i, 9-11 ; ii, 1-7 ; iv, 4, 13-16 ; v, 1-6 ; nécessité de la patience, i, 2-4, 12 ; v, 7-11 ; mais on sent que dans sa pensée ce ne sont là que des objets secondaires. L’objet principal, celui auquel il revient le plus souvent, c’est qu’il est impossible de se sauver sans les bonnes œuvres, ii, 14-26 ; iv, 17 ; qu’il faut veiller sur ses paroles, m, 2-12 ; ne pas faire ostentation de vaine science, ni s’arroger la charge de docteur, iii, 1, 13, 14 ; mais remplir exactement les devoirs de la justice et de la charité, iv, 1, 2, 4, 11 ; v, 1-9, etc. L’objet de l’Épltre est donc une thèse dogmatique.

III. Date. —’Il n’est pas facile de déterminer avec


précision la date de la composition de l’Épltre. Les opinions des exégètes sur ce point sont très diverses ; pour* les uns, elle a été écrite vers 45, peu de temps avant le concile de Jérusalem. Cf. Kitto, Cyclopædia of bibhcal literature, in-8o, Edimbourg, 1870, t. ii, p. 462. Hilgenfeld la place entre 81 et 96, à cause de Jac, ii, 6-7 ; v, 6 ; Davidson, vers l’an 90. D’après Baur, elle fut écrite au 11e siècle, à cause de sa ressemblance avec l’Épltre de Clément de, Rome et le Pasteur d’Hermas. Holtzmann établit l’ordre suivant : Épitre de Clément de Rome, Épitre de Jacques, Pasteur d’Hermas. Pfleiderer la place même après le Pasteur d’Hermas. Cf. Davidson, An introduction to the study of the New Testament, in-8o, 3e édit., Londres, 1894, 1. 1, p. 288 ; Ad. Jùlicher, Einleitung in dos Neue Testament, in-8o, Fribourg et Leipzig, 1894, p. 142, 143. — D’autres exégètes admettent une date plus plausible, et la placent vers l’an 60, quelque temps avant le martyre de saint Jacques et la destruction de Jérusalem ; telle est l’opinion de Michælis, Pearson, Mill, Guericke, Burton, Macknight, Bleek. Cf. Kitto, Cyclopxdia, t. ii, p. 461. C’est le sentiment le plus probable. On ne peut en fixer la date précise avec certitude, mais l’Épltre a dû être écrite entre l’an 60 et l’an 66. 1o Il ne paraît pas possible qu’elle soit antérieure à l’an 60 : car — 1. avant cette date le christianisme ne devait pas avoir atteint le degré de diffusion qu’elle suppose.

— 2. Jac, ii, 2-4, accuse un grand amour pour la distinction des places dans les réunions des fidèles, une certaine ambition pour la prééminence, une sensible déférence pour les riches et de la négligence pour les pauvres. Cela prouve naturellement qu’il s’était glissé dans la communauté chrétienne des abus et même du relâchement. De tels abus eussent été impossibles aux environs de la Pentecôte, alors que les chrétiens étaient dans toute leur ferveur primitive et ne faisaient aucune distinction entre les riches et les pauvres, ni même à l’époque où saint Paul prêchait l’égalité absolue de toutes les conditions devant Dieu. — 3. L’Épltre suppose que saint Paul avait déjà écrit des lettres ; elle dépend, dans une certaine mesure, des Épîtres pauliniennes. Cette dépendance est double : a) quant à V interprétation ; ce que l’auteur dit sur la nécessité des bonnes œuvres, Jac, n, 14, 18, 24-26, paraît motivé par les fausses interprétations données à Rom., iv, 3 ; Gal., iii, 22. Cette fausse interprétation de certains passages de saint Paul laisse supposer que le grand apôtre n’était pas en ce moment en Asie Mineure, autrement on ne se serait pas permis de dénaturer son enseignement ; 6) quant aux idées et aux mots ; cette dépendance est très sensible comme le montre le tableau ci-dessous :

Épitre de saint Jacques. Épîtres de saint Paul.

r, 3 : Oro>fjt.ovï)v xaTspyâÇcxat, Rom., v, 3-4 ; 80xt(j, rç pour

So7.tiJ.iov 80xtu.£ov.

I, 4 : ôXoxXvipoi I Thess., v, 23.

r, 16 : [M| 7cXav3u9s. … I Cor.. vi, 9 ; xv, 33 ; Gal.,

vi, 7.

I, 22 : 7rapa>0YfÇ£<JTat… Col., Il, 4. I, 22, 23 : nouitric Xôyou, Rom., II, 13 ; vi|iou pour

àxpoaTïjt X&yov).ôyou.

1, 26 : vou-ov… tri ; IXeuBspi’a ;. Idée familièreà saintPaul.

il, 8 : vdpiov tsXeïv Rom., ii, 27.

il, 9 : icapaëÔTai Gal., Il, 18.

il, 11 : TCap<x6dcTY] ; vt5p.ou.. Rom., ii, 25, 27. H, 18 : àXX’èpeT Tt ;. … I Cor., xv, 35.

m, 6 ; iv, 1 : tiiÀT] FréquentdansRom.etCor

Rom., VI, 23, 19 ; X ii, 4 ;

I Cor., vi, 15 ; xii, 12 ; e t c. ni, 18 : xapTtôç 81xatoo13v/|ç. Phil., i, 11. IV, 1 : èv toïç fisXe<7t, àvu (TTpaT£UO().évOV, (TTpaTEUO uivuv Rom., vii, 23.

III. - 35 4091’JACQUES (ÉPITRE DE SAINT)

1092

Or ces Épltres de saint Paul, dont dépend celle de Jacques, ont étéécritesentre52et62. — 4.L’Épître aaussi d’évidentes attaches avec I Pet. (E. Vowincki, Die Grundgedanken des fakobusbriefes, in-8o, Gutersloh, 1899), et dès lors il y a entre les deux un lien de dépendance. Le tableau suivant montre ces diverses ressemblances :

a) Verbales.

Épître de saint Jacques. 1 Pet.

1, 1 : 81a<raop<x (appliqué aux chrétiens) i, 1.

I, 2 : 7tetpa<7[A0(… TtoixO.oi. i, 6.

I, 3 : xà ôox : (xiov û|j.<âv zf^s

rcioxsMç I, 7.

I, 18 ; v, 19 : àl-ffiua (in diquant le christianisme), i, 22.

I, 21 : 0virap ! a (souillure). iii, 21 : pûjroç.

I, 21 ; iii, 13 : npaOrr) ?… iii, 16.

I, 27 : « [JuavToc i, 4.

r, 27 : SottiXoç i, 19.

III, 13 : xair) ma.<npi<fé[.. iii, 2 : àYVïi ; 16 : àyaOï)

àvaurpoçT].

iv, 7 : Siâ60), o ; v, 8 (mot inconnu à saint

Paul).

iv, 8 : àyvi£siv xapSiaç… 1, 22 ; tyvyjii à la place de

xapSîaç.

iv, 11 : xaTO&aXsïv ii, 12 ; iii, 16.

V, 8 : yiyyixsv. IV, 7.

  • " b) Dans les idées.

I, 3 : Les tentations et les afflictions sont une

épreuve pour la foi i, 7.

1, 18 : La parole de vérité, moyen de régénération, i, 23.

m, 13 : Importance d’une bonne conversation, ii, 12.

îv, 1 : Les passions nous font la guerre ii, 11.

c) Dans les citations.

Jac, i, 10, 11 ; I Pet., i, 24, citent Is., xl, 6-8. v Jac, lv, 6 ; I Pet., v, 5, citent Prov., iii, 34. Jac, v, 20* ; I Pet., iv, 8, citent Prov., x, 12.

Il existe donc une dépendance entre les deux Épitres. Il est vrai que Davidson, Introduction, t. i, p. 286, fait dépendre Pierre de Jacques ; mais la plupart sont d’un avis contraire. La première Épître de saint Pierre étant au plus tôt de 60 ou 61, il est impossible de faire remonter l’Épltre de Jacques au delà de l’an 60. — On objecte contre cette solution que la situation des judéo-chrétiens auxquels l’Épître est adressée n’est pas celle des environs de l’an 60. On n’y fait aucune allusion aux discussions sur la valeur et la durée de la circoncision, l’autorité et la signification des lois rituelles, ni aux conditions dans lesquelles les Gentils convertis doivent être admis dans l’Église ; ces questions furent agitées au concile de Jérusalem. L’Épltre, qui n’en fait aucune mention, a dû donc être écrite, semble-t-il, antérieurement à ces discussions, avant que la prédication de saint Paul au milieu des Gentils eût appelé l’attention sur ces questions ; elle date donc probablement de l’an 45. Cf. Kitto, Cyclopxdia, t. ii, p. 461, 462. — Cette difficulté est sérieuse, mais elle n’est pas concluante : o) le caractère de l’Épltre s’opposait à ce que l’auteur s’occupât de telles questions ; au point de vue doctrinal, l’Épltre, comme nous l’avons vii, porte uniquement sur la nécessité des bonnes œuvres ; pour le reste, c’est une exhortation morale ; b) les destinataires sont des judéo-chrétiens ; or les questions en litige concernaient uniquement les ethno-chrétiens ; la différence des lecteurs rendait donc oiseux ce genre de discussions.

2o L’Épître n’a pu être écrite après l’an 70, époque de la destruction de Jérusalem. En effet : — 1. Rien n’y ressent l’agitation de cette époque ; pas un mot de la ré volte ni des horreurs du siège. — 2. Saint Jacques mourut en l’an 62 ; s’il est vraiment l’auteur de l’Épltre, comme nous le prouverons plus loin, on ne peut pas placer la date de la composition après l’an 62. — 3. Jac, v, 1, parait présager de grandes catastrophes ; peut-être avait-il en vue le siège et la destruction de Jérusalem, qu’il entrevoyait par l’esprit prophétique. — 4. La formule du serment, Jac, v, 12, est empruntée évidemment à Matth., v, 34-37 ; or, dans cette dernière formule, l’incise « ni par Jérusalem » suppose la ville encore existante. — 5. Enfin l’Épître fut écrite de Jérusalem, comme nous le montrerons bientôt ; saint Jacques en était évêque et la ville était encore debout. — Ceux qui assignent une date postérieure à notre Épître s’appuient : 1. sur les ressemblances qu’elle offre avec l’Épître aux Hébreux : l’une et l’autre citent l’exemple de Rahab, Jac, n, 25, etHeb., xi, 31 ; l’obéissance d’Abraham, Jac, ii, 21, et Heb., xi, 17 ; elles parlent de la foi morte, Jac, ii, 26, et des œuvres mortes, Heb., vi, 1 ; du fruit de la justice semé dans la paix, Jac, iii, 18, et du paisible fruit de la justice, Heb., xil, 11. Cf. Davidson, Introduct., t. i, p. 296. On en conclut que l’Épltre de Jacques a fait des emprunts à l’Épltre aux Hébreux, et, comme on suppose que cette dernière est de date tardive, on conclut que la première l’est aussi. — Mais ces hypothèses et ces conclusions ne sont pas fondées. Saint Jacques a pu emprunter directement les deux premiers exemples à l’Ancien Testament, Jac. ii, 25, et Jos., ii, 4 ; Jac, ii, 21, et Gen., xxii, 9-10 ; quant aux œuvres mortes et au fruit de justice, c’étaient des idées communes et courantes dans la primitive Église. — D’ailleurs dans le cas même^où l’on admettrait une dépendance entre les deux écrits, rien ne prouve que ce soit saint Jacques qui a emprunté à l’Épître aux Hébreux et non le contraire. — Enfin, alors même qu’il serait vrai que l’Épître de Jacques dépendît de l’Épltre aux Hébreux, notre opinion n’en subsisterait pas moins puisque l’Épître aux Hébreux a été écrite entre 6366 (col. 523). — 2. On a également prétendu, pour assigner une date tardive à l’Épître de Jacques, qu’elle contient des allusions à l’Apocalypse. Jac, i, 12, et Apoc, n, 10 ; Jac, ii, 5, et Apoc, ii, 9. — Le premier exemple, Jac, i, 12, semble plutôt être une allusion à Job, v, 17 ; les deux autres exemples sont trop vagues pour qu’on puisse y voir des allusions. — D’ailleurs, s’il y avait de vraies allusions, ce serait l’Apocalypse, composée sous Donatien, qui les aurait empruntées à l’Épître de Jacques. — 3. On a recours à des arguments plus futiles encore pour assigner à cette lettre une date plus récente. Elle ne respire nullement, dit-on, les temps apostoliques ; — le Christ y est à peine mentionné, et y est uniquement représenté comme le Juge du monde ; son rôle de Messie disparaît complètement ; — la foi est tantôt une science, Jac, ii, 14, tantôt une persévérance, Jac, 1, 6 ;

— l’auteur parle de la loi dans le style du IIe siècle, avec de l’enthousiasme pour la loi nouvelle ; — la religiosité a perdu tous les traits des temps primitifs ; elle n’est plus qu’une confiance en la bonté de Dieu, qui se traduit par la prière, et ne perd jamais l’espérance ; d’un autre côté l’accomplissement des commandements de Dieu, et l’exercice de la pure piété. Jac, i, 27 ; et., Julicher, Einleitung, p. 143. — Tous ces détails de critique interne ou portent à faux ou n’ont pas d’importance. Le Christ y est à peine mentionné ? Mais l’auteur se proclame son serviteur, i, 1 ; il indique à ses lecteurs quelle est la foi qu’ils doivent avoir en Jésus-Christ, ii, 1. — Où voit-on que la manière dont l’auteur parle de la loi soit celle du iie siècle ? Il n’y a aucune opposition dans la manière de concevoir la foi et d’en parler ; i, 6, l’auteur recommande la fermeté de la foi ; ii, 14, l’auteur prouve que la foi sans les œuvres est une foi morte, inefficace ; s’il parle spécialement de la confiance en Dieu, c’est que son but le réclamait ; nous avons déjà dit que l’Épître contient, outre sa thèse doctrinale,

une exhortation morale. Il faut donc placer la composition de l’Épitre dans l’intervalle de l’an 60 à l’an 62.

IV. Lieu de composition.

Des indices internes montrent que l’aut eur vivait dans les environs de Jérusalem en Palestine. Le pays de l’auteur n’était pas loin de la mer, Jac, i, 6 ; iii, 4 ; ce pays était riche en certains produits : figues, viii, huile, Jac, iii, 12 ; v, 14 ; il était exposé à la sécheresse, et les récoltes étaient souvent compromises par le manque de pluie, Jac, v, 17, 18 ; il était ravagé par des vents brûlants, Jac, i, 11 ; les pluies étaient tantôt hâtives, tantôt tardives. Jac, v, 7. Tous ces traits conviennent parfaitement à la Palestine. — Le lieu dut être Jérusalem même : l’auteur de l’Épitre, Jacques le Mineur, était attaché à Jérusalem par bien des liens, et probablement il ne s’en éloigna jamais. Cf. Act., xv, 13 ; xxi, 18-23 ; Gal., i, 19. De plus, seul l’évêque de Jésusalem, de la ville sainte, pouvait adresser une lettre circulaire aux judéo-chrétiens de la dispersion, car Jérusalem était le centre de ces fidèles, le lieu vers lequel se tournaient toujours leurs pensées et leur souvenir.

V. Authenticité.

i. preuve de l’authenticité. — L’Épitre est de saint Jacques le Mineur : 1° L’en-tête porte, i, 1 : « Jacques serviteur de Dieu. » C’est donc un personnage du nom de Jacques qui a écrit l’Épitre. On ne peut taire sur lui que trois hypothèses : ou bien c’est Jacques fils de Zébédée, ou un autre Jacques inconnu, selon l’opinion de Luther, ou enfin Jacques le Mineur. Or ce n’est pas Jacques fils de Zébédée, lequel fut mis à mort 7 ans après le martyre de saint Etienne, c’est-à-dire vers 43 (cf. Act., xii, 2 ; Eusèbe, H. E., iii, 5, t. xx, col. 221), époque où l’Épitre n’était pas encore écrite ; — l’hypothèse d’un autre Jacques inconnu est inadmissible. jamais un personnage du nom de Jacques, sans notoriété’n’eût réussi à faire accepter son Épître par les fidèles, et n’eût parlé avec tant d’autorité. Reste donc Jacques le Mineur. — 2° Le concile de Trente, dans deux endroits, attribue l’Épitre à Jacques l’Apôtre, sess. xiv, De Eoctrema Vnctione, can. 1, 3 ; dans ce cas, toute la difficulté est de savoir si Jacques l’Apôtre est réellement le même que Jacques le Mineur ; l’opinion affirmative est plus probable ; dans un troisième passage, ibid., cap. i, le concile attribue l’Épitre à Jacques apôtre et frère du Seigneur. — 3° La tradition confirme cette attribution : Eusèbe affirme que de son temps on regardait cette Épître comme étant de Jacques le Mineur. H. E., ii, 23, t. xx, col. 205. Origène parle de l’Épitre de Jacques ; In Lib. Jos., Hom. vii, 1, t. xii, col. 857 ; il nous dit également qu’il circulait une Épître sous le nom de Jacques, Comrn. in Joa., tom. xix, 6, t. xiv, col. 569 : dans d’autres endroits il cite l’Épitre sous le nom de Jacques l’Apôtre ; In Lev., Hom. ii, 4, t. xii, col. 419 ; In Exod., Hom. iii, 3, t. xii, col. 316 ; In Exod., Hom. vin, 4, t. xii, col. 355 ; cf. aussi Hom. IV in Ps. xxxvi, 2, t. xii, col. 1351 ; In Epist ad Rom., ir, 8, t. xiv, <tol. 990. Enfin saint Jérôme attribue, sans aucune hésitation, l’Épitre au frère du Seigneur, évêque de Jérusalem. De vit : illustr., ii, t. xxiii, col. 609. Il faut d’ailleurs remarquer que les Pères ont eu moins souvent l’occasion de parler de l’Épitre de saint Jacques que des Épitres de saint Paul. — 4° La critique interne s’accorde avec la tradition : a) « Tout le détail de l’Épître, l’état de choses qu’elle suppose, ce grand nombre de dogmatiseurs, ii, 1, 5, 13, ces disputes sur la foi et les œuvres, i, 22 ; iii, 14-20, ces persécutions, i, 12 ; v, 10^ 11, ces acceptions de personnes, ii, 1, 9, conviennent parfaitement à son pays et à son époque. » Man. bib., Î0e édit., t. iv, p. 582. — b) Le caractère pratique de l’Épitre est en parfaite harmonie avec ce que nous savons de saint Jacques le Mineur, qui était ennemi des longs discours et grand amateur de la pauvreté. — c) Le ton de l’Épitre, qui respire le langage de Jésus dans saint Matthieu et les deux autres synoptiques, les citations de l’Ecclésiasque, i, 10 ; ii, 1 ; des Proverbes, i, 19 ; iv, 6 ;

son style sententieux, conviennent également à saint Jacques ; Julicher lui-même le reconnaît, Einleïtung, p. 140. Cf. Kaulen, Einleïtung, 3e édit., in-8°, part, m », Fribourg, 1893, p. 646.

il. objections, ET réponses. — Les principales objections contre l’authenticité ont été résumées par Julicher, Einleïtung, p. 140-142. Apres avoir reconnu que l’Épitre répond au caractère de Jacques, évêque de Jérusalem, il se prononce pourtant contre l’authenticité pour trois raisons : — 1° Le grec de l’Épitre est très pur ; l’auteur est maître de la langue grecque ; il va même jusqu’à faire des jeux de mots : ii, 4, St£xp16r]Te et xpiToeî ; iv, 14, sauvons v » ) et içavijojiiv/i ; d’autre part, il n’est pas possible qu’un juif palestinien ait pu si bien manier la langue grecque. — a) Certains exégètes répondent à cette difficulté que le texte grec actuel n’est qu’une traduction de l’original araméen ; dans ce cas l’élégance de la langue grecque serait le fait du traducteur, mais cette hypothèse n’est guère vraisemblable. — b) La pureté de la langue, quoiqu’elle soit réelle, n’exclut pas des tournures sémitiques qui révèlent à quelle race appartient l’auteur. — c) Quoi qu’il en soit du reste, il est certain qu’au premier siècle de notre ère il y avait en Palestine des Juifs qui parlaient et écrivaient le grec, et saint Jacques a pu connaître suffisamment cette langue pour écrire sa lettre, en se taisant aider au besoin par un Juif helléniste.

2° Saint Jacques, continue Julicher, était zél_’pour la loi, au point que saint Pierre par crainte de cet apôtre n’avait pas osé s’asseoir à la table des ethno-chrétiens à Antioche. Gal., ii, 12. Il n’a donc pu écrire une Épître dans laquelle il n’est pas même tait mention de l’obligation des observances légales, où il est dit que la religion consiste dans la pratique des bonnes œuvres, Jac, l, 27 ; où l’on nous parle de la loi parfaite de liberté, Jac, i, 25 ; ii, 12, et de la loi royale de l’amour du prochain. Jac, ii, 8. — Il est vrai que saint Jacques ne dit rien des observances mosaïques, mais c’est parce qu’il n’avait aucune raison de le faire. — a) Son langage répond au but qu’il se proposait ; il n’aait pas besoin de recommander aux judéo-chrétiens la fidélité à des prescriptions qu’ils ne violaient pas, mais il était à propos d’insister sur les bonnes œuvres et d’exciter leur zèle sur ce point. Les circonstances à Antioche étaient différentes. Gal., ii, 12. Les partisans de Jacques empêchèrent saint Pierre de s’asseoir à la table des Gentils pour ne pas scandaliser les judéo-chrétiens ; c’était en soi chose indifférente, mais, en l’occurrence, inopportune ; dans notre Épître au contraire, rien de pareil ; dès lors saint Jacques peut parler le langage même de Jésus-Christ. — 6) Dans les passages où l’on prétend voir un idéal trop au-dessus d’un Juif, saint Jacques ne fait que relléter l’enseignement de Jésus, ou de saint Paul.

3° Ce qui paraît surtout inadmissible à Julicher, c’est que saint Jacques ait écrit le passage, ii, 14-26, qui expose avec tant de force la nécessité de la justification par les œuvres ; Jac, ii, 24, dit-il, est la négation même du texte de Rom., iii, 28, qui affirme que l’homme est, au contraire, justifié par la foi. Aux temps apostoliques, il était impossible qu’on eût une idée si fausse de la doctrine de saint Paul. — L’insistance même de saint Jacques sur la nécessité des œuvres montre que dès lors il y avait des judéo-chrétiens qui comprenaient mal l’Apôtre des Gentils, comme le fit Luther au xvr siècle. Saint Jacques écrit pour redresser leurs fausses interprétations, et, comme on le fait lorsqu’on veut corriger une erreur, il insiste avec beaucoup d’énergie sur la nécessité des œuvres pour le salut : de là ces expressions si fortes. Jac, ii, 14, 17, 20-22, 24-26. Il ne nie point d’ailleurs la nécessité de la foi pour la justification, et son enseignement n’est pas la contradiction, mais le complément et l’explication de ce que nous lisons dans l’Épitre aux Romains.

VI. Canonicitè.

L'Épître de saint Jacques fut rejetée par Luther et les centuriateurs de Magdebourg. Le cardinal Cajetan et Érasme eurent des doutes à son sujet. Généralement on la place parmi les deutérocanoniques. Le canon de Muratori ne la mentionne pas. Eusèbe la met au rang des <xvrtXeYÔ|i£va (écrits contestés), H. E. m, 25, t. xx, col. 269 ; voir son texte, Canon, t. ii, col. 173 ; ailleurs, pourtant, il déclare, comme nous l’avons vii, que la première des Épîtres catholiques est regardée comme étant de Jacques ; quoiqu’il ajoute, exprimant probablement son propre sentiment, qu’elle est apocryphe : ioréov M &ç voŒiiewct jiiv x. t. "I. H. E., n, 23, t. xx, col. 205. Il atteste néammoins dans ce même passage qu’elle est reçue, ainsi que l'Épitre de Jude, dans plusieurs Églises. Malgré ces hésitations et ces doutes, qu’on peut s’expliquer aux premiers siècles de l'Église, la canonicitè de l'Épitre de Jacques est certaine. — 1° Le concile de Carthage, 397, et le concile de Trente l’ont reçue comme canonique. — 2° Les plus anciens manuscrits et les plus anciennes versions, telles que la Peschito, la contiennent. — 3° La tradition patristique est aussi en sa faveur : — a) Pères apostoliques. Certains des Pères apostoliques paraissent citer l'Épître de Jacques ; saint Clément de Rome, I Cor., x, 1, dit : « Abraham, appelé l’ami [de Dieu], fut trouvé fidèle en ce qu’il fut obéissant aux paroles de Dieu ; » et n° 7 : « À cause de sa foi et de son hospitalité, il eut un fils dans sa vieillesse, et, à cause de son obéissance, il l’offrit en sacrifice à Dieu sur une des montagnes qui lui furent montrées. » Pat. Apost. opéra, édit. Oscar de Gebhardt et Ad. Harnack, in-8°, Leipzig, 1900, p. 5-6. Cf. Jac, ii, 53. Ce qui donne à penser que saint Clément cite dans ces passages l'Épître de saint Jacques, et non Gen., xv, 6, ou Rom., iv, 3, ou Gal., iii, 6, ce sont les mots : 6 çfXo ? izpoaayopzv^iii ;, et, xai çcXo ? ©eoO èxXt|911, qui ne se trouvent que dans Jac, ii, 23 b. Cf. aussi, de la même Épître de saint Clément, xvii, 2, p. 10 ; XII, 1, p 6, où se trouve cité l’exemple de Rahab, Heb., xi, 31 ; Jac, II, 25. Ci. A. Charteris, Canonicity, a collection of early testimonies to the canonical books of theNew Testament, in-8°, Edimbourg, 1880, p. 292 ; Von Soden, dans les Jahrbùcher fur protestantische Théologie, 1884, p. 171-172. — Hermas, Matid., xii, 5, s’exprime ainsi : « Si vous résistez [au démon], vaincu" il s'éloignera de vous avec contusion. » Pat. Apost. opéra, p. 166. CL Jac, IV, 7 : ressemblances verbales : âv-tiff-nivat çeûÇeToi, àç' ù|ifflv. Cf. aussi Sim., VIII, 6, édit. cit., p. 186, où on lit : è7tat<rxuv91vTeç tî> ô'vo(ia Kupt’ou tô siuxXviOèv iic' ayToûç, et Jac. ii, 7 : 6Xaffçr)n.o0<rtv…Tb È7uxXîr)ftèv tç' viiôé ;. — 6) Autres Pères. Saint Irénée cite mot à mot Jac, ii, 23, Cont. hær., IV, xvi, 2, t. vii, col. 1016, et. aussi xhi, 4, col.1009. Tertullien dit : « Abraham amicus Dei deputatus. » Adv. Jud., 11, t. 11, col. 600 ; cf. Jac, 11, 23 ; cf. Clément d’Alexandrie, Psedag., III, 11, t. viii, col. 573 ; viii, col. 613 ; Strom., vi, 18, t. ix, col. 397. Origène, In Joa., tom. xix, t. xiv, col. 569 ; In Epist ad Rom., iv, t. xiv, col. 989, 990 ; Rom. iv in Ps. zxxvi, t. xii, col. 1351 ; Hom. a in Lev., 4, t. xii, col. 418, cite Jac, v, 20, sous la dénomination d' « Écriture divine » ; Eusèbe, Comment. inPs. c, t. xxiii, col. 1244. Saint Athanase, Epist. fest., xxxix, t. xxvi, col. 1177, place l'Épître de Jacques dans son canon. S. Épiphane, Hser., xxxi, 34, t) xli, col. 540. Cf. S. Kirchhofer, Quellensammlung zur Geschichte des Aleutestamentlischen Canons bis auf Hieronymus, in-8°, Zurich, 1844 ; voir Canon, t. ii, col 179-182.

VIL Forme de l'Épître. — Comme on l’a déjà remarqué, elle ressemble bien plutôt à une instruction morale, à une exhortation, qu'à une lettre proprement dite. Le début, qui est une salutation aux tribus d’Israël, convient très bien à l'évêque de Jérusalem ; mais la fin n’est pas la conclusion d’une lettre, c’est une simple maxime qui clôture une instruction. Le genre est tout à fait sé mitique ; il porte l’empreinte de son auteur. Saint Jacques ne ressemble nullement à saint Paul ; pas de longs raisonnements, de considérations sur les mystères de la foi ; on dirait plutôt les Logia du Sauveur ; ce sont des sentences courtes et énergiques, des espèces d’aphorismes destinés à inculquer profondément les vérités que l’auteur annonce. Sous ce rapport, on pourrait l’appeler une Épître synoptique. Cf. Jac, 1, 14, et Matth., xv, 19 ; — Jac, iv, 12, et Matth., x, 28 ; — Jac, v, 1-6, et Luc, VI, 24. Les analogies avec le Discours sur la montagne sont très nombreuses et très frappantes. Cf. Jac,

1, 2, 12, et Matth., v, 10-12 ; — Jac, I, 4, et Matth., v, 48 ; ^- Jac, 1, 5, 6 ; v, 15, 18, et Matth., vii, 7-11 ; — Jac, 1, 20, et Matth., v, 22 ; — Jac, 11, 13, et Matth., v, 7 ; vi, 14, 15 ; — Jac, ii, 14-17, et Matth., vii, 21-23. ; — Jac, iii, 17, 18, et Matth., v, 9 ; — Jac, iv, 4, et Matth., vi, 24 ; — Jac, iv, 10, et Matth., v, 3, 4 ; — Jac, iv, 11, et Matth., vii, 1 ; — Jac, v, 2, et Matth., vi, 19 ; — Jac, v, 10, et Matth., v, 12 ; — Jac, v, 12, et Matth., v, 33. — L’enchaînement entre les idées est faible ; quelquefois même elles se suivent sans qu’on en voie bien la connexion. Lorsqu’un sujet est traité avec un certain développement, il se termine par une espèce de sentence épigrammatique. Jac, I, 5-8, 13-16, 22-27 ; II, 1-13, 14-26 ; m, 1-5, 6-8, 13-18 ; iv, 1-10, 13-17 ; v, 7-10. - C’est probablement à cause de ce caractère moral et gnomique de l'Épître que l’auteur en appelle à la loi et cite de préférence les livres didactiques de l’Ancien Testament. Jac, 1, 10, 12, 19 ; 11, 1 ; iv, 6.

VIII. Langue et style.

1° La langue est généralement pure ; nous l’avons déjà dit. On voit que l’auteur possède bien le grec ; dans la plupart des cas les mots sont bien choisis et appropriés aux idées et aux choses qu’ils expriment. On remarque pourtant quelques particularités propres à l’auteur ; les principales sont : 1, 11, iropsîoei, « voies ; » 1, 18, le participe (30uXïî8efç, « volontairement ; » I, 2, la phrase, ôtoev ireipa<r|Aot{ 7cepntl17r]Te iroixtXoï ;, « lorsque vous tomberez dans différentes tentations ; » I, 17, Tpoitîi ; àuoxiatriia. « l’ombre de changement ; » 1, 18, àTOxÛY]<Tev, « il engendra. » — Çà et là on rencontre même des expressions poétiques. L'Épitre contient même deux hexamètres : 1, 17 ; iv, 4. — 2° Le style est énergique et varié ; il est caractérisé surtout par des pensées fortes, 1, 11 ; ii, 5, 6 ; iv, 13-16 ; v, 1-3 ; - des images, 1, 6, 10, 11, 14, 15, 17, 23, 24 ; iii, 3-7, 11, 12 ; iv, 15 ; v, 2, 3 ; — des tours vifs et frappants, ii, 2-4, 15, 16 ; iv, 1 4, 13, 15 ; v, 1-6, 13-14 ; — des interrogations, ii, 4-7, 14-16 ; iii, 11-13 ; iv, 1, 4, 5 ; v, 13, 14 ; — des antithèses, 1, 9, 10, 19, 22-26 ; ii, 5, 10-12, 15 ; iv,

2, 4. Le ton est particulièrement autoritaire ; sur 108 versets, l'Épître contient une cinquantaine d’impératifs, 1, 1, 4, 5, 6, 7, 9, 13, 16, 19, 21, 22 ; 11, 1, 3, 5, 12, 16, 18 ; iii, 1, 13, 14 ; iv, 7, 8, 9, 10, 11 ; v, 1, 7, 8, 9, 10, 12, 13, 14, 16, 20.

IX. Texte.

Certains auteurs ont pensé que le texte grec actuel est la traduction d’un original araméen. Cette opinion est généralement rejetée. On croit que le texte original est le grec Trois manuscrits onciaux, le Sinaiticus, le Vaticanus et VAlexandrinus, contiennent intégralement les Actes et les Épîtres catholiques ; deux manuscrits onciaux, K, L, contiennent intégralement les Épîtres catholiques ; les manuscrits C, P, contiennent des fragments des Épîtres catholiques. Cf. Gregory, Novum Testamentum grseçe, édit. Tischendorf, t. iii, Prolegomena, Pars prior, in-8°, Leipzig, 1884, p. 409417. — Signalons quelques variantes importantes : principales inscriptions : Iay-woou emixToXir) ; — ç, [otxtoSou xaOoXixY] tmazoi.t) ; -ç% taxtoëoy tou omofffoXou zmtrcoXri xaOoXtxï) ; le Sinaiticus n’a pas d’inscription, mais il porte en souscription : etcistoXy] i « xw60u ; — dans le texte : 1, 12 ; omission de é xûpioç ; i, 19, "ors [latin scilis] pour <5<tts ; II, 5, tù xôdjKi) pour xoû xou[jloû ; iii, 1, m5XXv pour itoXXot ; iii, 12 ; oùSenfoc fQY^i « Xuxov xat y^u*" pour

o5ts &)a)xôv xa y*’j *ù ; iv, *31 itoiri<su>iz9a pour « op£U(rô|Aee « ; IV, 15, noi-r, au>ysy pour Çr|oo)[iev ; V, 16, xi ; â[iapTta ; pour t& xapaimâpaTa.

X. Division et analyse.

Outre un petit préambule, 1, 1, l’iipltre se divise en trois parties : 1° Exhortation à la constance et à la patience, i ; — 2° Reproches aux taux docteurs, ii-iv, 6 ; — 3° Devoirs des divers états, IV, 7-v. F’PARTIE, I. — L’épreuve est quelque chose de bon parce qu’elle conduit à la perfection, i, 2-4 ; — il faut demander la sagesse avec une foi vive, sans hésitation, y. 5-7 ; — il faut se glorifier dans l’humilité et la bassesse ; la tentation est une épreuve qui nous mérite la couronne de vie, ꝟ. 8-12 ; — tout le mal doit être attribué à l’homme, ꝟ. 13-16, et tout le bien à Dieu, ꝟ. 17, 18 ; — il faut éviter la colère qui ne produit pas la justice de Dieuꝟ. 19, , 20 ; — il faut observer la parole de vie, la loi, et s’appliquer aux bonnes œuvres, ꝟ. 21-27.

il’partie, ii-iv, 6. — L’auteur blâme : — 1° l’acception des personnes, défaut très pernicieux à une époque où il y avait tant d’inégalité dans les conditions sociales, II, 1-12 ; — 2° la présomption en matière de salut et le mépris des bonnes œuvres, sous prétexte que la loi seule sauve, ii, 13-26 ; — 3° l’ambition, le désir des charges et des dignités, les paroles imprudentes et tous les écarts de la langue, m ; — 4° un certain nombre de défauts : plaisirs et discordes, iv, 1-2 ; amour des choses de ce monde, ꝟ. 3-4 ; envie et orgueil, ꝟ. 5-6.

up partie, iv, 7-v. — Il faut se soumettre à Dieu, se détacher des choses de ce monde, pratiquer la miséricorde et l’humilité, iv, 7-10 ; il ne faut ni critiquer ni juger les autres, ꝟ. 11-13° ; — il faut se mettre en garde contre une excessive confiance en soi-même, et ne pas se perdre dans des projets chimériques touchant l’avenir, y. 13 b -17 ; — les riches doivent gémir, car leurs richesses ne leur auront servi à rien ; ils ont retenu le salaire des ouvriers, et ce salaire crie vengeance ; ils se sont plongés dans les plaisirs et ont tué le juste, v, 1-6 ; — par conséquent les chrétiens doivent pratiquer la patience, parce que le jour du Seigneur viendra, ꝟ. 711 ; — surtout ils doivent s’abstenir de tout serment, ꝟ. 12 ;

— se conformer toujours à la volonté de Dieu, ꝟ. 13 ; — si quelqu’un est malade, qu’il profite des moyens que l’Église met à sa disposition, ꝟ. 14-15 ; — que les fidèles confessent leurs fautes et qu’ils prient, car la prière est toute-puissante ; l’exemple d’ÉIie le prouve, ꝟ. 1618. — Il faut ramener les égarés, car quiconque sauvera un pécheur aura sauvé sa propre âme, v, 19-20.

XL Examen du passage dogmatique, v, 14-15. — Ces deux versets soulèvent une question théologique. S’agit-il du sacrement d’Extrême-Onction ? Les auteurs catholiques, l’affirment pour les raisons suivantes : 1° Le concile de Trente a ainsi interprété ce passage, sess. xiv, De Extrema Unctione, c. i, et can. 1, 4. — 2° On y trouve tous les éléments constitutifs du sacrement : la matière, qui est l’huile, la forme, qui est la prière, le ministre, qui est le prêtre, le sujet, qui est le malade, les effets, qui sont le salut, le soulagement et la rémission des péchés. — 3° Il ne peut s’agir d’un remède corporel : a) les derniers mots duꝟ. 15 sur la « rémission des péchés » s’opposent à cette interprétation ; b) si l’Apôtre eût voulu indiquer un remède corporel, il n’aurait pas indiqué le même pour toutes les maladies ; de plus il n’aurait pas conseillé d’appeler le prêtre mais le médecin. — 4° Il ne peut pas être question de guérisons miraculeuses : « Si l’on prétend qu’il s’agit d’obtenir des guérisons miraculeuses, comme celles que faisaient les Apôtres dans leurs premières missions, Marc, vi, 13, saint Jacques n’en aurait pas promis pour tous les cas ; il n’aurait pas dit d’en demander à tous les prêtres indistinctement, et l’Église n’aurait pas fait de cette pratique un rite permanent et obligatoire. » Man. bibl., 10e édit., t. iv, p. 590. — Les protestants, qui rejettent le sacrement de l’Extrême-Onction, ont prétendu que

l’apôtre parle dans ce passage d’un remède naturel destiné à guérir un malade, qui n’est pas moribond, comme celui à qui l’Église catholique confère le sacrement. W. Smith, À dictionary of llie Bible, t. i, Londres, 18C3, p. 927-928. — Il n’est pas nécessaire d’être sur le point de mourir pour recevoir l’Extrême-Onction. Voir Conc. de Trente, sess. xiv, De Extrema Unctione, c. m. Le texte de saint Jacques ne dit rien sur la gravité de la maladie ; il parle d’une maladie en général. Et si l’onction d’huile commandée par l’apôtre peut amener la guérison du malade, l’Église enseigne que l’Extrême-Onction procure assez souvent la guérison corporelle, lorsque cela est nécessaire au salut de l’âme. Cf. Conc. de Trente, ibid., c. n. Voir Extrême-Onction, t. ii, col. 2140.

XII. Enseignements pratiques. — L’Épître de saint Jacques contient d’importantes instructions morales. 1° Défauts à éviter : Il ne faut pas attribuer à Dieu les maux de ce monde, i, 13. On doit éviter le formalisme extérieur ou pharisaïsme, i, 27 ; le luxe immodéré et l’excès d’égards pour les riches, ii, 2, 3 ; les intempérances de la langue, iii, 2-12 ; l’esprit de parti, iii, 14 ; la médisance et la calomnie, iv, 11 ; l’orgueil et la jactance, IV, 16. — 2° Vertus à pratiquer : La patience dans les épreuves, I, 2, dans l’oppression, v, 7, dans les persécutions, v, 10 ; la confiance en Dieu, I, 6, etc. ; la, simplicité, i, 8 ; l’humilité, i, 9, 10 ; iv, 10 ; le bon usage des tentations, i, 12 ; la mansuétude, i, 19>>, 20 ; la pureté, i, 27>> ; iv, 8 b ; la modestie, iii, 17 ; la miséricorde, il, 13 ; le zèle pour la conversion des pécheurs, v, 19-20.

XIII. Bibliographie. — *Mor, Prxlectiones in Jacobi et Pétri Epistolas, Leipzig, 1794 ; *Gabler, De Jacobo, Epistolse eidem adscriptæ auctore, Altdorꝟ. 1787 ;

  • Credner, Einleitung in dos Neue Testament, in-8o,

Halle, p. 595-597 ; *Koster, dans Studien und Kritiken, 1831, n. 3, p. 581 ; *Kern, dans la Tubing. Zeitschrift, 1835, p. 15 ; Id., BriefJacobus, in-8o, Tubingue, 1838 ; * Schneckenburger, Annotatio ad Epistolam Jacobi perpétua, Stuttgart, 1832 ; A. Maier, Einleitung, in-8o, Fribourgen-B. , 1852, p. 394-405 ; *Alford, The greek Testament, in-8o, Londres, 1849-1861, t. IV, 274 ; Schegg, Jacobus der Brader des Hernn und sein Brief, in-8o, Munich, 1883 ; *P. Feine, Der Jacobusbrief, in-8o, Vienne, 1893.

V. Ermoni.

    1. JACQUES (PROTÉVANGILE DE)##


4. JACQUES (PROTÉVANGILE DE), Lvangile apocryphe. Voir Évangiles apocryphes, i re classe, 1°, t. ii, col. 2115.

    1. JACQUES BAR SALIBI##


5. JACQUES BAR SALIBI, auteur et commentateur syrien, monophysite, mort à Amid (Diarbékir) en 1171. Il fut consacré évêque de Marasch (Germanicie) en 1154, par le patriarche jacobite Athanase VIII et prit alors le nom de Denys ; l’année suivante, Athanase lui adjoignit en sus le diocèse de Mabboug et, en 1166, Michel le Grand, successeur d’Athanase, le transféra à Amid, où il mourut. « Il y eut un grand deuil dans toute l’Église, dit Bar Hébræus, car il avait compilé et écrit des commentaires soignés sur tous les livres des deux Jestaments, sur les docteurs, sur les centuries d’Évagre et sur les livres de dialectique, il avait encore composé beaucoup d’autres ouvrages. » — Son commentaire sur l’ancien Testament est conservé à Paris (Fonds syr. n° 66) et n’a pas encore été publié. Les divers livres sont commentés dans l’ordre suivant : le Pentateuque, le livre de Job, Josué, les Juges, les deux livres de Samuel, les livres des Rois, les Psaumes, les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique des cantiques, Isaïe, Jérémie et les Lamentations, Ézéchiel, Daniel, les douze petits Prophètes, l’Ecclésiastique. Un certain nombre de livres ne sont donc pas commentés. En revanche les livres mentionnés ci-dessus ont en général deux et quelquefois trois commentaires chacun, l’un appelé matériel ou corporel, c’est-à-dire lifterai, et l’autre spirituel ou mystique, c’est-à-dire sjmbolique.

Le livre de Jérémie comporte trois commentaires, l’un fait sur les Septante, le second sur la Peschito, et le troisième matériel et spirituel. Pour faire comprendre ces deux derniers mots, nous dirons que les paroles du Ps. m sont toutes interprétées, au sens matériel, de la révolte d’Absalom contre David et, au sens spirituel, des sévices des Juifs et des démons contre l’humanité du Messie. — Le commentaire sur le Nouveau Testament se trouve dans la plupart des bibliothèques syriaques. Citons le manuscrit de Paris n° 67, écrit à Édesse en 1174, c’est-à-dire trois ans seulement après la mort de l’auteur, et un manuscrit de Dublin daté de 1197. Asséman a donné des extraits de cet ouvrage. Bibl. orient., t. ii, p. 157-170. Dudley Loftus a traduit en anglais une partie du commentaire sur saint Matthieu et le commencement du commentaire sur saint Marc : À clear and learned explication of the history of our Blessed Saviour J. C. taken out of above 30 greek, syriack and other oriental authors by way of catena by Dionysius Syrus and faithfully translated by Dudley Loftus, Dublin, 1695, et The exposition of Dionysius Syrus, written above 900 years sinee on the Evangelist St. Mark, translated by D. L., Dublin, 1672. — Voir Bar Hébrseus, Chronicon eccles., t. i, p. 513-515 et 559 ; Assémani, Bibl. orient., t. ii, p. 156-211 ; Rubens Duval, ha littérature syriaque, Paris, 1899, p. 79-80, 399-400.

F. Nau.

G. JACQUES D’ÉDESSE, écrivain syrien né au village d’Endêba, dans le district de Goumiah (Al-Djumah), province d’Antioche, vers 640 (peut-être en 633), et mort au monastère de Téléda, le 5 juin 708.

I. Sa vie et sa doctrine.

Une courte biographie de Jacques d’Édesse nous a été conservée par Bar Hébræus, Chron. eccles., t. i, p. 290-294. Il étudia avec soin la langue grecque et les Saintes Écritures au couvent d’Aphtonia ou de Kennesré (sur la rive gauche de l’Euphrate, en face d’Europus) et alla compléter ses études a Alexandrie. Il fut nommé évêque d’Edesse vers 684, par le patriarche Athanase II, son ancien condisciple, ^mais ne put supporter une cabale formée contre lui par certains clercs et abandonna spontanément son siège. Il se retira au monastère de Saint-Jacques de.Kaisoum (entre Alep et Édesse), puis fut invité par les moines d’Eusébona (diocèse d’Antioche) à venir demeurer parmi eux. Il y resta onze ans à expliquer les Psaumes et les Écritures d’après le texte grec, et à restaurer les études grecques tombées en désuétude. Il fut combattu par les frères qui n’aimaient pas les Grecs, et dut se retirer au grand monastère de Téléda (probablement le moderne TeU’âdi ou Tell’âde ; voir Sachau, Reisein Syrien und Mesop., Leipzig, 1883, p. 459), il y habita neuf ans et y fit une revision du texte de l’Ancien Testament. Il reprit possession de son siège épiscopal d’Édesse en 708, mais pour quatre mois seulement, et mourut au monastère de Téléda où il s’était rendu pour y chercher ses livres et ses disciples.

D’après M. Wright, Syr. Lit., Londres, 1894, p. 143, et Journal of Sacrtd Literature, 4 8 série, t. x, p. 430, Jacques tient dans la littérature de son pays la même place que saint Jérôme parmi les Pères latins. C’était, pour son temps, un homme de grande culture d’esprit, qui était familier avec le grec, l’hébreu et les anciens écrivains syriaques, c’était un àvTjp TptyXwrro ;. « À son « poque, dit P. Martin, dans le Journ. as., 1888, t. xi, p. 155, il n’y avait pas, dans le monde chrétien, un auteur qu’on pût lui comparer : un auteur plus laborieux et plus instruit, un auteur doué de connaissances plus variées et plus étendues, maniant la plume avec plus d’ardeur et , en faisant sortir de meilleures productions. » Il fit de nombreuses traductions du grec en syriaque, et une revision de l’Ancien Testament, commenta l’Écriture, écrivit un hexaméron, une chronique, une liturgie, des canons, de nombreuses lettres, etc. Jacques d’Édesse fut

un adversaire du concile de Chalcédoine. Cf. Lamy, Dis- _ sertatio de Syrorum fîde et disciplina in re euchanstica, Louvain, 1859, p. 206-214.

II. Sa revision de l’Ancien Testament. — Une partie de cette revision nous est conservée dans quatre manuscrits. Deux (add. 14429 et 14441) se trouvent à Londres, au British Muséum. Ils sont datés de 719 et ont donc été écrits onze ans seulement après la mort de Jacques d’Édesse. Le premier renferme les deux livres de Samuel, avec le commencement des Rois, le second contient Isaie et a été publié en majeure partie par Ceriani : Esaix fragmenta syriaca versionis anonymm et recensionis Jacobi Edessse, dans les Monum. sacra et prof., t. v, fasc. i, 1868. Les deux autres manuscrits se trouvent à Paris, à la Bibliothèque nationale ; l’un (Syr. n. 27) contient le livre de Daniel, il est daté de 720. Des fragments de ce texte et quelques-unes des gloses ont été publiés par Bugati, Daniel secundum edilionem LXx interpretum, Milan, 1788. D’après Bugati, Jacques revisa la Peschito à l’aide d’une version grecque qui n’est pas celle des Septante, mais dérive de Théodotion. L’autre manuscrit de Paris (Syr. n. 26) renferme le Pentateuque ; il fut décrit d’abord par Ladvocat, dans le Journal des savants, août 1765, p. 542-555. Cet auteur cite les notes placées à la fin des divers livres ; celle qui termine la Genèse porte : « Ici finit le premier livre de Moise, appelé le livre de la création, lequel a été rectifié (revisé) avec soin sur deux traditions (versions), tant des Grecs que des Syriens, du (par le) pieux évêque d’Orrhoaï (d’Édesse), l’an de Séleucus 1015 (704), dans le grand monastère du village de Téléda. » On trouve la même date à la fin de l’Exode et du Lévitique, mais à la fin des Nombres et du Deutéronome on trouve l’an 1016 de Séleucus (705). Ladvocat crut pouvoir en conclure que le manuscrit lui-même avait été écrit à cette époque ; il reconnaissait cependant qu’il ne pouvait être de la main de Jacques d’Édesse parce qu’on y relevait des transpositions et autres fautes qui étaient certainement le lait de copistes. Silvestre de Sacy, Notices et extraits des manuscnts, t. iv, p. 648-669, n’eut pas de peine à montrer que ces dates 701-705 se rapportent à la composition de l’ouvrage par Jacques et non à la transcription du manuscrit. Il fit remarquer de plus que ce manuscrit renferme d’assez nombreuses lacunes et qu’il est de deux mains et de deux époques différentes. Enfin M. Ceriani, Monumenta sacra et profana, t. ii, fasc. i, p. x-xiii, écrivit que la partie la plus ancienne est du vin< siècle, et en publia quelques fragments : Gen., iv, 8-16 ; et v, 21-vi, 1. Ladvocat et Silvestre de Sacy sont d’accord d’ailleurs pour montrer par des citations et des extraits l’importance de cette revision. Jacques d’Édesse avait sous les yeux le texte grec (le texte des Septante d’après Bugati. mais nous croirions plutôt que c’était une revision de ce texte, ou un texte hexaplaire), car il cite parfois le mot grec ou le transcrit en marge. La version sjriaque dont il se sert semble différer souvent de la Peschito, S. de Sacy conjecture donc qu’il corrigeait l’ancienne version syriaque d’après la Peschito et les Septante. Il utilise aussi le Pentateuque samaritain et lui emprunte une addition, Exod., viii, 4, et Num., x, 10 ; il en avertit du reste en note. De même Deut., xxvii, 4, Jacques, comme le Samaritain, substitue le mont Garizim au mont Hébal et ajoute une longue note pour justifier cette leçon. En d’autres endroits, on constate que Jacques lisait certains mots hébreux autrement que les Massorètes. Nous avons constaté aussi qu’en Exod., xxviii, 22-29, et xxxvi, il suit le texte hébreu (ou celui de la Peschito). En somme, il voulut donner au vin » siècle une édition critique du Pentateuque basée sur les textes hébreu, grec, syriaque et samaritain. Notons encore que Jacques fut le père de la Massore syrienne. Voir Massore.

III. Ses traductions.

Jacques d’Édesse traduisit du grec en sjriaque en particulier les homélies de Sévère

d’Antioche qui traitent explicitement ou incidemment de nombreux sujets scripturaires, et la légende des Réchabites que nous avons éditée : Les fils de Jonadab, fils de Réchab, et îles les Fortunées, Paris 1899. Les descendants de Réchab, d’après cette légende, habitent dans une lie au milieu de l’Océan. Voir Réchabites.

IV. Son Hexaméron.

Le commencement de la Genèse avait déjà offert à plusieurs écrivains grecs un cadre commode pour y placer toutes leurs connaissances scientifiques ; Jacques d’Édesse, à l’imitation sans doute de Jean Philoponus d’Alexandrie, fut le premier qui introduisit ce genre chez les Sj riens ; son Heiaméron, commentaire sur les six jours de la création, servit de modèle à Moïse bar Képha, Emmanuel bar Schahharé, Jacques de Bartela, etc. Il est conservé dans quatre manuscrits : à Lyon (ms. daté du 8 mars 837), à Leyde, à Glasgow et à Paris (ce dernier est fragmentaire). Il a été étudié par l’abbé P. Martin, dans le Journal asiatique, 1888, t. xi, p. 155-219, 401-490, et par M. Hjelt : Etudes sur l’Hexaméron de Jacques d’Édesse, notamment sur les notions géographiques contenues dans le 3e traité, Helsingfors, 1892. Il est divisé en sept traités : 1o de la première création intellectuelle et incorporelle des puissances célestes et angéliques ; 2o de la création du ciel et de la terre et de tout ce qu’ils renferment, c’est-à-dire de la seconde création, corporelle et matérielle, des quatre éléments différents : la terre, l’eau, l’air et le feu ; 3o de la terre, qui sortit des eaux, apparut sèche et fut adaptée à la demeure de l’homme par l’ordre de Dieu ; des mers, des golfes, des îles, des lacs, des fleuves, des montagnes célèbres et grandes ; des semences, des racines et des arbres que Dieu fit pousser sur la terre ; 4o des astres que Dieu créa dans le firmanent des cieux ; 5o des animaux et des reptiles, que Dieu fit naître dans les eaux, et des oiseaux, qu’il fit également de la nature de l’eau ; 6o des animaux domestiques et sauvages, et des reptiles de la terre ; 7o de l’homme que Dieu créa à son image et qu’il constitua comme un autre monde, grand et merveilleux, dans ce petit monde. On trouve, çà et là, des citations de l’Écriture, faites d’après la revision de Jacques d’Édesse, et quelques détails personnels à l’auteur. On apprend en particulier, qu’au moment où il écrivait le cinquième traité, il avait soixante et quinze ans, et comme une autre note nous apprend qu’il mourut (en 708) pendant qu’il écrivait le septième traité, et que Georges, évêque des Arabes, son correspondant et ami, dut terminer son œuvre, il s’ensuit que Jacques d’Édesse naquit en 633, et non vers 640, comme on avait cru pouvoir le conclure d’un autre synchronisme donné par Bar Hébræus. — On a démontré depuis, que la géographie de Jacques d’Édesse était empruntée à Ptolémée, mais cet Hexaméron n’en demeure pas moins un tableau fidèle et intéressant des connaissances scientifiques chez les Syriens au vire siècle, qui eut grande influence sur la littérature postérieure.

V. Ses commentaires.

En sus de ce grand travail sur le commencement de la Genèse, Jacques d’Édesse composa encore des commentaires et des scolies sur l’Ancien et sur le Nouveau Testament qui sont cités parles auteurs postérieurs, par Jacques (Denjs) Bar Salibi, par Bar Hébræus et par le moine Sévère ; quelques-unes de ces scholies ont été publiées dans l’édition romaine des œuvres de saint Éphrem, t. iet n ; d’autres l’ont été par Philips d’après les mss. de Londres, add. 14483 et 17193 : Scholia on sonie passages of the Old Testament by Mar Jacob, Londres, 1864, et par Nestlé, Jacob von Edessa uber den schem hammephorasch, und andere Gottestament dans la Zeitschrift der deutschen morgent ândischen Geseltschaft, t. xxxii, 1878, p. 465. — On trouve aussi de nombreuses questions relatives à la Sainte Écriture dans ses lettres, encore inédites pour la plupart et contenues dans le manuscrit de Londres add. 12172. L’une a été publiée par M. Schroder dans

la Zeitschr. der deustch. morg. Gesellsch., 1870, t. xxiv, p. 261-300. Jacques d’Édesse montre que deux homélies sur la création attribuées à Jacques (de Sarug) sont l’œuvre d’un faussaire et même d’un hérétique. Deux autres l’ont été par M. Wright, Journal of Sacred Literature, 4e série, t. x, p. 430-461. Jacques y répond aux questions posées par son correspondant sur Gen., xv, 13 ; sur l’écriture avant Moïse ; sur la femme éthiopienne mentionnée Num., xii, 1 ; sur Job, ii, 6 ; sur Béhémoth ; sur Zacharie mentionné Matth., xxiii, 35 ; sur les auteurs des psaumes ; sur divers hérétiques, etc. Enfih nous avons commencé une édition des lettres de Jacques d’Édesse à Jean le Stylite en publiant, dans la Revue de l’Orient^ chrétien, suppl. trim. J900, la Lettre de Jacques d’Édesse à Jean le Stylite sur la chronologie biblique et la date delanaissance du Messie ; dans cet écrit, Jacques apprend à son correspondant que l’ancienne chronologie biblique est artificielle, on l’a obtenue en additionnant les dates données par la Bible et, comme ces dates diffèrent avec les versions et les exemplaires, il n’y a pas deux chronologistes qui soient d’accord ; d’ailleurs Eusèbe s’est trompé de trois ans dans le comput des rois de Syrie, et la naissance de N.-S. doit être placée l’an 309 et non l’an 312 de l’ère des Séleucides. — Jacques d’Edesse a encore composé d’autres écrits dont nous n’avons pas à nous occuper ici. — Voir Assémani, Bibl. orient., t. i, p. 468 ; t. ii, p. 335 ; Rubens Duval, La litt. syriaque, Paris, 1899, p. 70-71, 77, 376-378.

F. Nau.

    1. JACQUES DE SARUG##


7. JACQUES DE SARUG, théologien et poète syrien, né à Kourtam, sur l’Euphrate, probablement dans le district de Sarug, vers 451, mort à Balnan, principale ville du même district, le 29 novembre 521. Il fut longtemps périodeute (chorévêque) de Haura (Havra’), et fut nommé évêque de Batnan (ville qui, plus tard, fut appelée Sarug) en 519, à l’âge de 68 ans.

C’est par ses poèmes surtout que Jacques de Sarug excita l’admiration des Syriens. Il fut appelé « la flûte du Saint-Esprit, la harpe de l’Église orthodoxe, le docteur de la vérité, la colonne spirituelle ». Ses homélies métriques étaient au nombre de 760 (alias 763) et soixante-dix scribes étaient, dit-on, occupés à les copier, sans parler de ses autres ouvrages : lettres, interprétations, instructions, hymnes et cantiques. « Le Saint-Esprit, qui l’avait choisi, dit l’un de ses biographes, lui donna de révéler les mystères et les arcanes des Livres Saints. Il expliqua tout l’Ancien et le Nouveau Testament, et ses explications éclairent l’esprit de tous les sages. » Ces explications ne sont cependant pas des commentaires proprement dits, mais sont contenues dans des homélies métriques qui ont pour objet divers passages de la Bible. La première composition qui attira l’attention sur Jacques fut une homélie sur le char d’Ézéchiel. L’homélie qui nous reste sous ce titre ne renferme pas moins de 1400 vers. Cette prolixité est le défaut principal de Jacques de Sarug.

Il consacra sa vie à l’étude et se tint éloigné des polémiques religieuses qui agitaient alors l’Orient. Il ne tut donc pas poursuivi et exilé par Justin Ier comme le furent Sévère d’Antioche, Philoxène de Mabbug et Paul d’Édesse. D’ailleurs le mystère de l’union (des natures divine et humaine en N.-S. ne faisait pas l’objet direct des homélies de Jacques de Sarug, ou du moins le manque de précision des termes employés permettait d’interpréter en sens divers les passages qui avaient trait à l’Incarnation ; aussi la doctrine de Jacques fut-elle longtemps regardée comme catholique. Cette thèse a été soutenue par Assémani, Matagne, Bickell, Abbeloos et Lamy. Néanmoins, Jacques était aussi réclamé par les monophysites, et l’abbé P. Martin a montré que ses sympathies avaient été pour ces hérétiques, et qu’il doit être rangé parmi les adversaires du concile de Chalcédoine. Cf. P. Marlm, Un évêque poète au V et au ri’siècle, ou Jacques de Sa

rug, sa vie, son temps, ses œuvres, ses croyances, dans la Bévue des sciences ecclésiastiques, 4e série, - 1. ai, oct.nov. 1876, p. 309, 385. Voir aussi la correspondance de Jacques de Sarug avec les moines du couvent de Mar Bassus près d’Apamée, éditée avec traduction française par l’abbé Martin dans la Zeitschrift des deutschen niorgent ândischen Gesellschaft, 1876, t. xxx, p. 217-275. D’ailleurs Jacques était du nombre des évêques qui, sous Justin I tr, consacrèrent Jean de Telia, un fervent monophysite. Voir Kleyn, Het Leven van Joh. van Telia, Leyde, 1882, p. vii, 31.

La plupart des œuvres de Jacques de Sarug existent encore, inédites, dans les manuscrits syriaques du Vatican, du British Muséum, de Paris, d’Oxford et de Berlin. Ms r Graffin a réuni des transcriptions et des photographies de ces manuscrits pour en donner une édition complète. Les homélies relatives à la Bible seront rangées dans l’ordre des livres et des récits qu’elles commentent. Citons, parmi les ouvrages édités, l’homélie sur le char d’Ezéchiel, publiée par Mœsinger, Monumenla syriaca, t. ii, p. 761, et par Cardohi, Liber Thesauri, Rome, 1875, p. 13 ; Sechs Homihen des h. Jacob von Sarug, traduites par Zingerle, BonD, 1867. Zingerle a aussi publié l’homélie sur Thamar, Sermo de Thamar, Inspruck, 1871, et Bickell a traduit en allemand quelques homélies dans la Bibliothek der Kirchenvâter de Thalhofer, n. 58, Kempten, 1872. Wenig en avait édité deux dans Hchola syrxaca, Inspruck, 1866, etc. — Voir Bar Hébræus, Chronicon ecclesiasticum, in-8o, Louvain, 1872-1877, t. i ; Assemani, Bibhotheca orientahs, in-f », Rome, 1719-1728, 1. 1, 283-340 ; t. ii, 321 ; t. iii, 385-388 ; Acta sanctorum, octobris t. xii, p. 824-831, 897 ; Abbeloos, De vita etscriptis sancti Jacobi Batnarum Sarugi in Mesopotamia episcopi, in-8o, Louvain 1867 ; Rubens Cuvai, La littérature syriaque, Paris, 1899, p. 352-356.

F. Nau.

JAOA (hébreu : Yâdâ’; Septante : ’IaSaé et AaSai), de la tribu de Juda, second fils d’Onam, fils lui-même de Jéraméel et de sa seconde femme Atara. Voir Atara, t. l, col. 1 199. Le frère aîné de Jada s’appelait Séméi. Il eut pour fils Jéther et Jonathan. I Par., ii, 28, 32.

    1. JADAÏA##

JADAÏA (hébreu : Yeda’eyâh ; Septante : ’USovi.) chef, du temps de David, de la seconde classe sacerdotale. Ses descendants revinrent à Jérusalem après la captivité de Babylone. I Esd., ii, 36. Il est appelé ailleurs dans la Vulgate Idaîa, Jédéia, etc. VoirlDAiA 2, col. 806.

    1. JADASON##


JADASON, rivière mentionnée une seule fois dans Écriture, Judith, l, 6 ; et encore ne se trouve-t-elle que dans la Vulgate, car le texte grec porte Têaum) ?, l’Hydaspe. Ce dernier nom est lui-même une erreur évidente de transcription. Nous lisons, en effet, dans le grec, plus développé et plus exact que la version latine : « En ces jours-là, le roi Nabuchodonosor fit la guerre au roi Arphaxad dans la grande plaine qui est sur les confins de Ragaù ; et se joignirent à lui tous les habitants du district montagneux et tous les habitants des bords de l’Euphrate, et du Tigre, et de l’Hydaspe. » Or l’Hydaspe, la Vitasld de la géographie sanscrite, est une grande rivière de l’extrémité nord-ouest de l’Inde, appelée aujourd’hui Djélani, le plus occidental des quatre grands tributaires du Sindh ou Indus qui arrosent le Pendjab. L’énorme distance qui la sépare du Tigre et de l’Euphrate, aussi bien que des autres contrées signalées dans le récit, empêche de compter ses riverains parmi les peuples qui s’allièrent aux Assyriens pour combattre les Mèdes. Il est donc certain qu’il y a dans le texte une faute de copiste. Si l’on cherche dans la région indiquée ici un nom qui se rapproche de’l"îâ « nic> on trouvera facilement Xoiffmn et l’on comprendra que les deux aient pu être aisément confondus. Le Choaspès des Grecs est généralement identifié avec la Kerkha, en

turc Kara-sou, rivière de la région occidentale de la Perse, affluent gauche du Schatt-el-Arab, qu’il rejoint à une petite distance en aval du confluent de l’Euphrate et du Tigre. Son cours, qui est d’environ 600 kilomètres, ne baigne aucune cité considérable, mais seulement de rares villages et des ruines, parmi lesquelles celles de Roudbar, datant des Sassanides, et celles de Suse, l’ancienne capitale de la Perse. Nous arrivons à la même conclusion en suivant la version syriaque, qui, au lieu de’Yôi<jm)£, donne Ulai ; c’est le >W, ’Ulâi, de Daniel,

T

vin, 2, fleuve du pajs d’Elam, le nâr XJ-la-ai des inscriptions assj riennes, rEOiatoç, Eulieus, des Grecs et des Romains. Un certain nombre d’auteurs l’identifient aec le Choaspès ou la Kerkha ; d’autres cependant l’assimilent au Karûn ou Kurân, qui vient aujourd’hui déboucher en aval de Bassorah, dans le Schatt-el-Arab, par conséquent un peu au-dessous du premier. Voir Ulaï.

    1. JADDO##

JADDO (hébreu : Iddô ; Septante : ’IaSai), fils de Zacharie, chef de la tribu de Manassé transjordanique au temps de David. I Par., xxvii, 21.

    1. JADIAS##

JADIAS (hébreu : Yéhdeyâhû, « union de Jéhovah [ ?] ; » Septante : ’IaStaç), serviteur de David, originaire d’une localité inconnue appelée Méronath. Le roi lui avait confié le soin de ses ânesses, d’après l’hébreu (les Septante et la Vulgate lisent ôvwv et asmos, « les ânes » ). I Par., xxvii, 30. — Un autre Israélite, qui portait le même nom en hébreu, est appelé dans la Vulgate Jéhédéia. [ Par., xxiv, 20.

    1. JADIEL##


JADIEL, nom de deux Israélites. La Vulgate écrit ce nom Jadihel, excepté dans I Par., vii, 6. Voir Jadihel 1.

    1. JADIHEL##

JADIHEL (hébreu : Yedî’â'ël, « que Dieu connaisse » ), nom de trois ou de quatre Israélites dans le texte hébreu. La Vulgate appelle deux d’entre eux Jadihel et elle appelle Jédihel les deux qui sont nommés dans I Par., xi, 45, et xii, 20. Voir Jédihel.

1. JADIHEL (Septante : ’leS(^À), fils de Benjamin et petit-fils de Jacob. I Par., vii, 6, 10, 11. Son nom est écrit Jadiel dans I Par., vii, 6. Il est nommé ici comme le troisième (ou plutôt le second fils) de Benjamin, tandis que, Gen., xlvi, 21, le troisième filsde cepatriarche (ou le second, voir Béchor, - t. i, col. 1636) est appelé Asbel. Asbel est dit le second fils de Benjamin, dans I Par., viii, 1, et il est probablement le même que Jadihel. Ses descendants, du temps de David, étaient au nombre de 17200 capables de porter les armes. I Par., vu, 11. Voir Benjamin 1, t. i, col. 1589.

2. JADIHEL (Septante : ’Ia8tY)X), lévite, second fils de Mésélémia, descendant de Coré, un des portiers de la maison de Dieu du temps de David. I Par., xxvi, 2.

    1. JADON##

JADON (hébreu : Yâdôn, « juge ; v » Septante : Eùdepwv ; il est omis dans les manuscrits Valicanus, Alexandrinus, Sinaiticus), un de ceux qui, après le retour de la captivité, du temps de Néhémie, travaillèrent avec les Gabaonites et lesgensdeMaspha à la reconstruction des murs de Jérusalem. Il était de Méronath. II Esd., iii, 7.

    1. JAFFA##

JAFFA, ville de Palestine. Voir Juppé.

    1. JAGER Jean Nicolas##


JAGER Jean Nicolas, prélat français, né à Grening (Moselle) le 17 juin 1790, mort à Paris le 5 février 1868. Après de bonnes études au collège ecclésiastique d’Isming, Jager entra, en 1809, au grand séminaire de Nancy où il reçut la prêtrise en 1813. Il devint ensuite pro-secrétaire de l’évêché de Nancy, puis supérieur, après Rohrbacher, du collège d’Isming. En 1810 il fonda à Vie une maison d’éducation et la dirigea jusqu’en . Royer-Collard le nomma alors principal du collège de Phalsbourg. À la demande de Mo r de Croy, grand-aumônier de France, l’abbé Jager accepta les fonctions d’aumônier du 9 « régiment de ligne (1820) en résidence à Phalsbourg, et fit en cette qualité l’expédition d’Espagne (1823). Au retour il fut nommé chapelain des Invalides à Paris (1825), et enfin, en 1841, professeur d’histoire ecclésiastique à la faculté de théologie de la Sorbonne, fonctions qu’il conserva jusqu’à sa retraite forcée, en 1857. Pie IX lui conféra, en 1863, la dignité de camérier secret, pour le récompenser de ses travaux qui ne furent interrompus que par la mort. — On a de lui, outre des travaux historiques : Vêtus Testamentum grsecum, cura J.N. Jager, 2 in-4o, Paris, 1855, avec une traduction latine en regard ; 1 in-4o, texte grec seul. Le texte grec et la version latine sont la reproduction de l’édition de Caraffa, ainsi qu’il est dit dans la préface, 1. 1, p. v ; Novum Testamentum grsece et latine in antiquis testîbus textum versionis Vulgatse latinse indagavit, lectionesque variantes Stephani Griesbachii notavil, venerabili Jager in consilium adhibito, Constantius Tischendorf, in-4 « , Paris, 1842, 1851, 1861. — La Sainte Bible (Ancien et Nouveau Testament), Traduction de Sacy, revue et corrigée sur les textes originaux, in-f°, Paris, 1838-1844 ; cette édition monumentale est enrichie de 48 gravures reproduisant les chefs-d’œuvre de Raphaël et de Rubens ; la même, 3 in-4o, avec 32 gravures, Paris, 1843. L’abbé Jager a aussi traduit l’Histoire de N.-S. Jésus-Christ et de son siècle, par le comte de Stolberg, in-12, Paris, 1842 ; 3e édit., 1858. - Voir J. E. Darras, Mgr Jager, notice biographique, in-8o, Paris, 1808.

0. Rey.

    1. JAGUR##

JAGUR (hébreu : Yâgâr, « hôtellerie ; » Septante, Vaticanus : ’Aiivp ; Alexandrinus : ’Iayoûp), ville de la tribu de Juda, située à l’extrémité méridionale, « près des frontières d’Édom. » Jos., xv, 21. La troisième de l’énumération, dans laquelle elle se trouve entre Éder et Cina, elle n’est mentionnée qu’en ce seul endroit de l’Écriture. Comme la plupart des autres cités de ce premier groupe, elle est restée jusqu’ici complètement inconnue. Les Talmuds signalent, il est vrai, dans les environs d’Ascalon un endroit appelé Yâgûr, cf. A. Noubauer, La géographie du Talmud, Paris, 1868, p. C9 ; R. J. Schwarz, Dos heilige Land, Francfort-sur-le-Main, 1852, p. 70, qui est sans doute représenté par El-Djûr ou Djûrah, au nord-est et tout près OCAsqalàn ; mais la situation ne répond aucunement à celle de l’antique

cité de la tribu de Juda.

JAHADDAl’(hébreu : Yàhedaï ; Septante : ’AB8a<), homme de la tribu de Juda dont les six enfants sont énumérés I Par., ii, 47. Le nom de son père ne figure pas dans les généalogies de ce chapitre, contrairement à l’usage, ce qui donne lieu de supposer qu’ily a une lacune dans le texte.

    1. JAHALA##

JAHALA (hébreu : Va’âlâ’; Septante : ’Ie^X), Nathinéen ou esclave de Salomon, dont les descendants retournèrent de la captivité de Babylone avec Zorobabel. II Esd., vii, 58. Il est appelé Jala dans I Esd., ii, 56.

    1. JAHATH##

JAHATH (hébreu : Yahat), nom de cinq Israélites dans le texte hébreu. Quatre seulement portent le nom de Jahath dans la Vulgate. Le cinquième, I Par., xxiii, 1011, par une erreur de lecture, est devenu Léheth dans notre version latine. Voir Léheth.

1. JAHATH (Septante : ’K6), fils de Raïa, père d’Ahumai et de Laad, de la tribu de Juda. I Par., iv, 2.

2. JAHATH (Septante : ’Iéfl), lévite, fils de Lobni et j>etit-fils de Gersom. I Par., vi, 20. Il fut un des ancêtres d’Asaph, ꝟ. 39-43. Au J. 43, la Vulgate l’appelle Jeth.

3. JAHATH (Septante : ’156), lévite, fils de Salémoth, de la famille de Caath, chef des Isaarites du temps de David. Voir Isaarite, col. 936.

4. JAHATH (Septante : lie), lévite, de la famille de Mérari, l’un des chefs qui dirigèrent les travaux de réparation du temple de Jérusalem sous le régne de Josias. II Par., xxxiv, 12.

    1. JAHAZIEL##

JAHAZIEL (hébreu : YahâzVël, « que Dieu voie » ), nom, dans le texte hébreu, de cinq Israélites. Dans la Vulgate, deux d’entre eux sont appelés Jahaziel ; le troisième est appelé Jéhéziel, I Par., xii, 4 ; le quatrième Jaziel, I Par., xvi, 6 ; et le cinquième Ézéchiel. I Esd., vin, 5. Voir ces mots.

1. JAHAZIEL (Septante : ’IeCi^X), lévite, de la famille de Caath, le troisième fils d’Hébron. I Par., xxiii, 19. Voir HÉBRON 1, col. 553. Il vivait du temps de David.

2. JAHAZIEL (Septante : ’Ol^X), lévite, fils de Zacharie, descendant d’Asaph, qui vivait du temps de Josaphat, roi de Juda. Il lui prédit la victoire, lorsque ce prince marcha contre les Moabites et les Ammonites. II Par., xx, 14-17. Les Moabites et les Ammonites s’entre-tuèrent en effet les uns les autres, et l’armée de Josaphat n’eut qu’à recueillir leurs dépouilles, ꝟ. 22-25.

    1. JAHEL##

JAHEL (hébreu : Yâ’êl ; Septante : ’Ia^X), femme du Cinéen Haber. Nous ne savons rien concernant Haber, sinon que la paix existait entre sa maison et Jabin, roi d’Azor, à l’époque où Débora et Barac mirent fin à la servitude des Hébreux, opprimés depuis vingt ans par ies Chananéens. Jud., iv, 17. Quant à Jahel, elle est restée célèbre par l’acte viril qui compléta la victoire des Israélites sur les Chananéens et enleva aux ennemis du peu pie de Dieu tout espoir de revanche. Le fait est raconté dans Jud., iv, 17-22. Sisara, fuyant du champ de bataille où son armée avait été anéantie, était parvenu jusqu’à la tente de Jahel. La Cinéenne alla au-devant de lui et l’engagea à entrer chez elle en l’assurant qu’il n’aurait rien à craindre dans cet asile. Le général chananéen entra donc et Jahel le cacha en le couvrant d’un semîkâh, « couverture » (Vulgate : pallium, « manteau » ). Dès que Sisara commença à goûter un peu de repos, il éprouva une grande soif, causée par la fatigue du combat et sa fuite précipitée ; il demanda de l’eau à Jahel. Celle-ci ouvrit une outre qui contenait du lait, lui en fit boire et le recouvrit de nouveau du manteau. Débora, Jud., v, 25, parle de lait et de beurre ou de crème présentée dans « la coupe des princes » ; mais la seconde partie du vers est une répétition synonymique de la première. Jud., IV, 19. Les voyageurs modernes qui ont reçu l’hospitalité sous la tente des Arabes y ont mangé du lait caillé ayant une certaine propriété soporifique et qu’on appelle lében. Certains ont pensé que c’est le rafraîchissement que Jahel donna au général chananéen. Sisara, ayant bu, recommanda à Jahel de se tenir devant la porte de la tente et d’écarter par une réponse négative quiconque voudrait savoir s’il y avait quelqu’un à l’intérieur. Il ne tarda pas à s’endormir, t. 21. Jahel prit alors un marteau et un des clous qui servaient à fixer la tente, s’avança avec précaution et silencieusement, plaça la poir_.e du clou sur la tempe de Sisara et, d’un coup de marteau, l’enfonça avec tant de force qu’il traversa le crâne et atteignit le sol. Sisara mourut sur le coup, non toutefois sans s’être agité dans une convulsion suprême, si les paroles de Débora, Jud., v, 27, ne sont pas une expression poétique. En ce moment, comme l’avait prévu le général de Jabin, survint Barac qui s’élait mis à sa poursuite. Jahel s’avança vers lui et lui dit : « Venez, je vais vous montrer l’homme ue vous cherchez. » Barac vît en ellet le coi’ps de Sisara

étendu par terre avec le clou encore enfoncé dans la tête. Jud„ iv, 17-22.

L’historien des Juges raconte l’action de Jahel sans l’approuver ni la blâmer. Beaucoup l’ont condamnée comme une violation des lois de l’hospitalité et une perfidie aggravée encore par cette circonstance qu’il y avait un traité de paix entre Jabin et la maison d’Haber. On va même jusqu’à accuser Jahel d’avoir attiré Sisara dans un guet-apens dressé d’après un plan prémédité. Ce dernier grief est une hypothèse toute gratuite, en contradiction formelle avec le récit. Jahel ignorait que Sisara viendrait lui demander asile.

Pour ce qui regarde le traité de paix, le livre des Juges, iv, 17, dit seulement : « Il y avait la paix entre Jabin, roi d’Azor, et la maison d’Haber le Ginéen, » locution qui signifie simplement que les rapports étaient bons entre le roi chananéen et le mari de Jahel. Cf. IV Reg., ix, 17-19. Cette circonstance valait la peine d’être notée ; car, étant donné l’étroite amitié qui existait entre les Cinéens et les Israélites depuis le temps de Moïse, voir Cinéens, t. i, col. 768-769, il semblait que Haber aurait dû prendre part au soulèvement du peuple de Dieu, et l’historien place ici cette observation pour expliquer la confiance de Sisara en la parole de Jahel. Ce qu’il y a de vrai dans l’accusation de perfidie contre Jahel, c’est qu’elle viola, en effet, la parole donnée et qu’elle tua Sisara de sa propre main après lui avoir promis de le dérober aux coups de ses ennemis. Mais on comprend sans peine comment dut se l’aire ce revirement dans les dispositions de la courageuse Cinéenne, lorsqu’elle vit endormi à ses pieds lechef des oppresseurs d’un peuple qui était en quelque sorte son peuple ; le tuer, c’était achever l’affranchissement des Hébreux et garantir pour l’avenir la sécurité de sa propre famille. Un élan de patriotisme lui inspira alors cet acte de vaillance qui mérita d’être chanté par Débora. Jud., v, 24-27. Il est comparable à tant d’autres que les historiens rapportent avec éloge dans les annales de l’antiquité profane. Les commentateurs catholiques justifient généralement la conduite de Jahel, non en elle-même, mais à cause de ses intentions. E. Palis.

    1. JAHÉLEL##

JAHÉLEL (hébreu : Yafrle’êl, « qui se confie en Dieu ; » Septante : ’Axw^X/, petit-fils de Jacob, le troisième fils de Zabulon. Gen., xlvi, 14 ; Num., xxvi, 26. Il fut le chef de la famille des Jalélites. Dans Nuiï.., xxvi, 26, les Septante l’appellent’AXX ?jX, et la Vulgate Jalel. On ne connaît de lui que son nom.

    1. JAHIEL##

JAHIEL (hébreu : Yefri’êl ; Septante : ’IeVriX), nom, dans le texte hébreu, de onze personnes. Huit d’entre elles sont appelées Jahiel dans la Vulgate ; elle écrit le nom des trois autres Jéhiel. I Esd., x, 2, 21, 26.

1. JAHIEL (Septante : ’Is’e^X), lévite qui vivait du temps de David. Il fut un de ceux qui accompagnèrent l’arche en jouant du nable lorsqu’elle fut transportée de la maison d’Obédédom sur le mont Sion. I Par., xv, 18, 20. Plus tard, il fit partie du chœur d’Asaph. IPar., xvi, 5.

2. JAHIEL (Septante : ’Ieïrp.), lévite de la famille de Gerson, qui vivait du temps de David. Il était le chef des Benê-Laadan (Vulgate : « fils de Léédan » ), I Par., xxiii, . 8, et la garde des trésors de la maison de Dieu lui fut confiée. I Par., xxix, 8 ; cf. xxvi, 21-22, où lui-même ou bien sa famille est mentionnée sous le nom de Jéhiéli. Voir Jéhiéli.

3. jahiel (Septante : ’IerçX), fils d’Hachamoni (voir ce mot, col. 388). Dans la liste des fonctionnaires du roi David, il est dit de lui et de Jonathan, oncle de David, qu’« ils étaient avec les fils du roi », c’est-à-dire probablement chargés de les diriger et de les élever. I Par., xxvii, 32.

4. JAHIEL (Septante : ’Ieïifa), troisième fils de Josaphat, roi de Juda, et frère de Joram, successeur de Josaphat. Son père lui avait donné de grandes richesses, ainsi qu’à ses autres frères, mais Joram les fit tous mettre à mort après son avènement au trône. II Par., xxi, 2-4.

5. JAHIEL (Septante : ’Ieïr, ).), lévite de la famille de Caath, descendant d’Élisaphan. Il vivait du temps d’Ézéchias et prit part à la restauration du Temple au commencement du règne de ce roi. II Par., xxix, 13.

G. JAHIEL (Septante : ’Ieïr, ), ), lévite descendant d’Héman qui prit part aux travaux de purification et de restauration du temple de Jérusalem au commencement du règne d’Ézéchias. Il Par., xxix, 14. C’est probablement ce Jahiel ou bien Jahiel 5 qui est nommé dans Il Par., xxxi, 13, parmi les lévites préposés à la garde des prémices et des dîmes offertes au Temple.

7. JAHIEL (Septante : ’IeiYJX), un des chefs du temple de Jérusalem à l’époque des réformes de Josias, roi de Juda. Avec Helcias et Zacharie, il donna aux prêtres deux mille six cents (brebis) et trois cents bœufs pour la célébration de la fête de Pâques. II Par., xxxv, 8.

8. JAHIEL (§eptante : ’Ieï/jX), descendant de Joab et père d’Obédia. Obédia était le chef d’une des familles qui revinrent avec Esdras de la captivité au nombre de 218 personnes. I Esd., viii, 9.

    1. JAHN Johann##


JAHN Johann, exégète et orientaliste catholique autrichien, né à Taswitz en Moravie, le 18 juin 1750, mort à Vienne (Autriche) le 16 août 1816. Après avoir fait ses études au gymnase de Znaym, à l’université d’Olmutz et au séminaire de Bruck, il reçut la prêtrise et exerça quelque temps les fonctions ecclésiastiques à Mislitz. En 1782, il obtint le grade de docteur à Olmutz et enseigna les langues orientales et l’herméneutique biblique à Bruck. Sa connaissance des langues et le succès qu’il eut dans son enseignement ne tardèrent pas à le rendre célèbre, et en 1789 il fut appelé à l’université de Vienne en qualité de professeur de langues orientales, de dogmatique et d’archéologie biblique. Il occupa sa chaire pendant dix-sept ans avec beaucoup d’éclat, mais la hardiesse de ses opinions finit par la lui faire perdre. On lui reprocha de soutenir que les livres de Job, de Jonas, de Tobie et de Judith n’étaient que des poèmes ou des fictions édifiantes, et que les démoniaques de l’Ancien Testament n’étaient que de simples malades. Le cardinal Migazzi déposa contre lui, en 1792, une plainte devant l’empereur François II ; une commission fut instituée pour examiner les griefs qu’on lui reprochait ; elle lui recommanda d’être plus réservé à l’avenir et de réformer les opinions incriminées. De nouvelles plaintes s’étant élevées contre Jahn, à la suite de la publication de quelques-uns de ses ouvrages, il fut destitué en 1806 et nommé chanoine de l’église métropolitaine de Saint-Étienne à Vienne, dignité qu’il garda jusqu’à sa mort.

— Il publia des grammaires, des chrestomathies, des vocabulaires de plusieurs langues orientales. Ses écrits relatifs à la Bible sont : Emleitung in die gôttlichen Bûcher des Allen Bundes, 1 in-8° en 2 tomes, Vienne, 1793 ; 2e édit., considérablement augmentée, i r « part., 1802 ; il » part., 1803 ; Biblische Archaologie mit Kupfern, 5 in-8°. Vienne, 1797-1805 ; les tomes I et n ont eu une seconde édition, 1817 et 1818 ; Bibha hebraica digessit et graviores lectionum varietates adjecit, 4 in-8o, Vienne, 1806 ; Introductio in hbros sacros Veteris Testamenti in compendium redacta, in-8o, Vienne, 1804 ; Archseologia bibhca in compendium redacta, in-8o, Vienne, 1806 ; 2e édit., 1814 ; Enchiridion hermeneuticæ gêneralis tabularum Veteris et Novi Fœderis, in-8o, Vienne, nos

JAHN — JAÏRE

1110

1812 ; Appendix hermeneuticx, seu exercitationes exegelicæ (Vaticinia de Messia), fasc. 1, 1813 ; fase. ii, 1815. Ces quatre derniers ouvrages furent mis à l’Index par un décret du 26 août 1822. Après sa mort, on publia, d’après ses manuscrits, Nachtrâge zu Jahns theologischen Werken nach seinem Tode ausgegeben von eînem seiner Freunden, in-8o, Tubingue, 1821, où se trouvent, entre autres, six dissertations sur divers sujets bibliques. Son successeur à la chaire de l’université de Vienne, L. Ackermann, publia, en 1825 et 1826, une nouvelle édition corrigée de VIntroduclio et de VArchscologia de Jahn. Voir Ackermann, t. i, col. 149 ; K. Werner, dans l’Attgemexiie deutsche Biographie, t. xill, 1881, p. 665 ; Id., Geschichte der neuzeitlichen christlich-kirchlichen Apologehk, in-8o, Schaffouse, 1867, p. 417.

F. Vigouroux.

    1. JAHVÉH##


JAHVÉH. Voir Jéhovaii.

à celle de Machir, dont l’importance était si considérable que son nom sert quelquelois à désigner la tribu de Manassé. I Par., ii, 21. — Jair se distingua par ses exploits dans la conquête de la Terre Promise à l’est du Jourdain. Il réussit à s’emparer d’un pays de très difficile accès et occupé par des Repliai m ou géants ; on l’appelait alors le paysd’Argob ; c’est le Ledjah actuel. Deut., m, 14. Voir Argob, t. i, col. 950. Jair donna aussi son nom (Havoth Jair) à plusieurs villages du royaume de Basan. Num., xxxii, 41 ; Deut., iii, 14 ; I Par., ii, 23. Voir Havoth Jair, col. 457. — L’histoire de ses descendants ne nous est pas connue ; il est cependant possible qu’il fut l’ancêtre de Jair 2, l’un des juges d’Israël, et d’Ira le Jaïrite. Voir Ira 1, col, 921, et Jairite, col. 1111. C’est sans raison que des exégètes modernes veulent confondre Jair, fils de Ségub, avec Jair de Galaad dont l’histoire est toute différente. Voir Jair 2.

JAIR (hébreu : Ya’ir, « qui brille ; » Septante : l « tp), 2. JAIR, de Galaad, juge d’Israël pendant vingt-deux

202. — Résurrection de la fille de Jaïre. Antique sarcophage d’Arles. D’après Edm. Le Blant, Étude sur les sarcophages chrétiens antiques de la ville d’Arles, 1868, pl. xvit.

nom de trois Israélites dans l’Ancien Testament. Jaïre, le chef de la synagogue dont la fille lut ressuscitée par Notre-Seigneur, Marc, v, 22, portait ce même nom ; mais les écrivains du Nouveau Testament ayant donné aux noms bébreux une forme déclinable, tandis que les Septante les avaient traités comme des mots indéclinables, le nom du chef de la synagogue est devenu en français Jaire. Le nom du père de Mardochée est écrit aussi une fois Jaire. Voir Jair 3. — Un autre Israélite, dont le nom peut se transcrire en français par Jair, s’appelait en hébreu Ya’îr, avec un am au lieu d’un aleph, « bois, bosquet. » Voir Jair 4.

1. JAÏR, fils de Ségub, descendant par sa mère de Manassé et par son père d’Hesron, de la tribu ds Juda. Cf. IPar., ii, 21-22. Son grand-père Hesron avait épousé une fille de Machir, père de Galaad, de la tribu de Manassé. I Par., vii, 14 ; ii, 21 ; cf. Gen., l, 22. C’est parce qu’il descendait par sa mère de Manassé et qu’il s’établit sur le territoire de cette tribu, à l’est du Jourdain, dans le pa} s qu’il avait conquis, que Jair est appelé « fils de Manassé » dans Num., xxxii, 41, et Deut., iii, 14 ; mais un souvenir de son origine paternelle de la tribu de Juda est peut-être resté dans la ville appelée Juda du Jourdain, dans Jos., XIX, 34. Cf. Matth., xix, 1. Voir Juda du Jourdain. Il était contemporain de Moïse et appartenait, comme on vient de le voir, par son origine à deux des familles les plus puissantes d’Israël, c’est-à-dire à celle de Juda, par son père, et, par sa mère,

ans. Le texte sacré nous apprend seulement qu’il avait trente fils, montés sur trente ânons, et qu’il possédait dans le pays de Galaad trente villes appelées Havoth Jair. L’écrivain hébreu fait un jeu de mots sur les mots « ânons » et « villes », qu’il appelle du même mot’âyârtm. La Vulgate ajoute que Jair appela « de son nom » les trente villes Havoth Jair, mais les mots « de son nom » ne se lisent ni dans le texte original ni dans les Ceptante. Ces Havoth Jaïr tiraient probablement leur nom de Jair, fils de Ségub, dont le juge d’Israël était peut-être un descendant. Voir JairI, et Havoth Jair, col. 458. Jair fut enterré à Camon. Jud., x, 3-5. Voir Camon, t. ii, col. 93. Aux détails donnés par l’Écriture, Josèphe, Ant.jud., V, vii, 6, ajoute que ce juge d’Israël était de la tribu de Manassé.

3. JAÏR, Benjamite, père de Mardochée, descendant de Cis et de Séméi. Esth., ii, 5 ; xi, 2. Dans ce dernier passage, que l’on n’a qu’en grec, le nom est écrit’Iocpoi ;, Jaïrus.

4. JAÏR (hébreu : Ya’îr [lien ; le chetib porte : Tirl ; Septante : ’Iotîp), père d’Elhanan. La Vulgate a traduit Elhanan par Adéodat, et Ya’îr par saltus, « bois. » Voir Adéodat, 1. 1, col. 215.

1. JAÏRE, père de Mardochée. Voir Jaïr 3.

2. J AÏRE(’Ideip o ;, voir IaïRjCoI. 1 109), chef de synagogue ;

{kpXiavvàfiù-foç ; voir Sïnagogue), dont Notre-Seigneur ressuscita la fille. Il est nommé par saint Marc, v, 22, et par saint Luc, viii, 41. Saint Mathieu, ix, 18-19, 2325, ne le désigne que par le titre d’apxwv, princeps, et ne raconte que sommairement le miracle. Les deux autres synoptiques entrent dans plus de détails. Lorsque le père alla implorer Jésus de sauver sa fille, elle était à l’extrémité, mais elle n’était pas encore morte. Jésus partit avec le père pour se rendre auprès de la malade. Chemin faisant, il guérit l’hémorrhoisse (voir col. 588). A ce moment, on vint annoncer au chef de la synagogue que sa fille était morte et qu’il était inutile de faire venir le Maître. Jésus dit au père de ne rien craindre, mais de croire que sa fille serait sauvée. Il ne laissa entrer dans la maison que Pierre, Jacques et Jean avec le père et la mère de l’enfant. On se lamentait àl’intérieur et l’on pleurait la mort de la jeune fille. « Pourquoi pleurez-vous ? leur dit Jésus, la jeune fille n’est pas morte, elle dort. » Marc, v, 39. On se moqua de ses paroles, mais lui, ayant fait sortir tout le monde, entra, avec ses trois disciples, le père et la mère, là où était la morte. Saint Marc, v, 41, par une rare exception dans les Évangiles, nous a conservé les propres paroles que prononça Notre-Seigneur dans la langue du pays, c’est-à-dire en araméen. La prenant par la main, il lui dit : Talithacumi ; « Jeune fille, lève-toi. » Aussitôt la jeune fille se leva et marcha et il ordonna qu’on lui donnât à manger. Elle était âgée de douze ans. — Aucun des Évangélistes ne nomme le lieu où s’accomplit le miracle. C’était probablement une ville située sur l