Aller au contenu

L’Encyclopédie/1re édition/UNION, JONCTION

La bibliothèque libre.

UNION, JONCTION, (Synonyme.) l’union regarde particulierement deux différentes choses, qui se trouvent bien ensemble. La jonction regarde proprement deux choses éloignées, qui se rapprochent l’une de l’autre.

Le mot d’union renferme une idée d’accord ou de convenance. Celui de jonction semble supposer une marque ou quelque mouvement.

On dit l’union des couleurs, & la jonction des armées ; l’union de deux voisins, & la jonction de deux rivieres.

Ce qui n’est pas uni est divisé, ce qui n’est pas joint est séparé.

On s’unit pour former des corps de société. On se joint pour se rassembler, & n’être pas seuls.

Union s’emploie souvent au figuré en vers & en prose ; mais on ne se sert de jonction que dans le sens littéral.

L’union soutient les familles, & fait la puissance des états. La jonction des ruisseaux forme les grands fleuves. Girard, synon. françois. (D. J.)

Union chrétienne, (Hist. ecclésiastique.) communauté de veuves & de filles, projettée par madame de Polaillon, institutrice des filles de la providence, & exécutée par M. Vachet, prêtre, de Romans en Dauphiné, secondé d’une sœur Renée de Tordes, qui avoit fait l’établissement des filles de la propagation de la foi à Metz, & d’une sœur Anne de Croze, qui avoit une maison à Charonne, où la communauté de l’union chrétienne commença, en 1661. Le but singulier de cette association étoit de travailler à la conversion des filles & femmes hérétiques, à retirer des femmes pauvres, qui ne pourroient être reçues ailleurs, & à élever de jeunes filles. Le séminaire de Charonne fut transféré à Paris en 1685 ; elles eurent des constitutions en 1662 : ces constitutions furent approuvées en 1668. Ces filles n’ont de pénitence que celles de l’église ; seulement elles jeûnent le vendredi. Elles tiennent de petites écoles. Après deux ans d’épreuves, elles s’engagent par les trois vœux ordinaires & par un vœu particulier d’union.

Elles ont un vêtement qui leur est propre.

La petite union est un autre établissement fait par le même M. le Vachet, mademoiselle de Lamoignon, & une mademoiselle Mallet. Il s’agissoit de retirer des filles qui viennent à Paris pour servir, & de fonder un lieu où les femmes pussent trouver de femmes-de-chambre & des servantes de bonnes mœurs. Ce projet s’exécuta en 1679.

Union, (Gram. & Jurisp.) signifie en général la jonction d’une chose à une autre, pour ne faire ensemble qu’un tout.

En matiere bénéficiale on entend par union la jonction de plusieurs bénéfices ensemble.

On distingue plusieurs sortes d’unions.

La premiere se fait quand les deux églises restent dans le même état qu’elles étoient, sans aucune dépendance l’une de l’autre, quoique possédées par le même titulaire.

La seconde, lorsque les deux bénéfices demeurent aussi dans le même état, & que les fruits sont perçus par le même titulaire, mais que le moins considérable est rendu dépendant de l’autre ; auquel cas le titulaire doit desservir en personne le principal bénéfice, & commettre pour l’autre un vicaire, s’il est chargé de quelque service personnel ou de la conduite des ames.

La troisieme est lorsque les deux titres sont tellement unis, qu’il n’y en a plus qu’un, soit au moyen de l’extinction d’un des titres, & réunion des revenus à l’autre, soit par l’incorporation des deux titres.

Les unions personnelles ou à vie ou à tems, ne sont pas admises en France, n’ayant pour but que l’utilité de l’impétrant, & non celle de l’église.

Les papes ont prétendu être en droit de procéder seuls à l’union des archevêchés & évêchés.

De leur côté les empereurs grecs prétendoient avoir seuls droit d’unir ou diviser les archevêchés ou évêchés, en divisant les provinces d’Orient.

L’église gallicane a pris là-dessus un sage tempérament, ayant toujours reconnu depuis l’établissement de la monarchie que l’union de plusieurs archevêchés ; ou évêchés ne peut être faite que par le pape ; mais que ce ne peut être que du consentement du roi.

Le légat même à latere ne la peut faire, à moins qu’il n’en ait reçu le pouvoir par ses facultés duement enregistrées.

L’union des autres bénéfices peut être faite par l’évêque diocésain, en se conformant aux canons & aux ordonnances.

Mais si l’union se faisoit à la manse épiscopale, il faudroit s’adresser au pape, qui nommeroit des commissaires sur lieux, l’évêque ne pouvant être juge dans sa propre cause.

Aucun autre supérieur ecclésiastique ne peut unir des bénéfices, quand il en seroit le collateur, & qu’il auroit jurisdiction sur un certain territoire.

C’est un usage immemorial que les bénéfices de collation royale peuvent être unis par le roi seul en vertu de lettres-patentes registrées en parlement.

Toute union en général ne peut être faite sans nécessité ou utilité évidente pour l’église.

Il faut aussi y appeller tous ceux qui y ont intérêt, tels que les collateurs, patrons ecclésiastiques & laïcs, les titulaires ; & les habitans, s’il s’agit de l’union d’une cure.

Si le collateur est chef d’un chapitre, comme un évéque ou un abbé ; il faut aussi le consentement du chapitre.

Quand les collateurs ou patrons refusent de consentir à l’union, il faut obtenir un jugement qui l’ordonne avec eux : à l’égard du titulaire & des habitans, il n’est pas besoin de jugement ; les canons & les ordonnances ne requierant pas leur consentement ; on ne les appelle que pour entendre ce qu’ils auroient à proposer contre l’union, & l’on y a tel égard que de raison.

On ne peut cependant unir un bénéfice vacant, n’y ayant alors personne pour en soutenir les droits.

Pour vérifier s’il y a nécessité ou utilité, on fait une information de commodo & incommodo, ce qui est du ressort de la jurisdiction volontaire ; mais s’il survient des contestations qui ne puissent s’instruire sommairement, on renvoie ces incidens devant l’official.

Le consentement du roi est nécessaire pour l’union de tous les bénéfices consistoriaux, des bénéfices qui tombent en régale, & pour l’union des bénéfices aux communautés séculieres ou régulieres, même pour ceux qui dépendent des abbayes auxquelles on veut les unir.

On obtient aussi quelquefois des lettres patentes pour l’union des autres bénéfices lorsqu’ils sont considérables, afin de rendre l’union plus authentique.

Avant d’enregistrer les lettres patentes qui concernent l’union, le parlement ordonne une nouvelle information par le juge royal.

On permet quelquefois d’unir à des cures & prébendes séculieres, dont le revenu est trop modique, ou à des séminaires, des bénéfices réguliers, pourvu que ce soient des bénéfices simples, & non des offices claustraux, qui obligent les titulaires à la résidence.

On unit même quelquefois à un séminaire toutes les prébendes d’une collégiale.

Mais les cures ne doivent point être unies à des monasteres, ni aux dignités & prébendes des églises cathédrales ou collégiales, encore moins à des bénéfices simples.

L’union des bénéfices en patronage laïc doit être faite de maniere que le patron ne soit point lézé.

On unit quelquefois des bénéfices simples de différens diocèses, mais deux cures dans ce cas ne peuvent être unies, à cause de la confusion qui en résulteroit.

Quand l’union a été faite sans cause légitime, ou sans y observer les formalités nécessaires, elle est abusive, & la possession même de plusieurs siecles n’en couvre point le défaut.

Celui qui prétend que l’union est nulle, obtient des provisions du bénéfice uni ; & s’il y est troublé, il appelle comme d’abus du decret d’union.

Si l’union est ancienne, l’énonciation des formalités fait présumer qu’elles ont été observées.

Enfin, quand le motif qui a donné lieu à l’union cesse, on peut rétablir les choses dans leur premier état. Voyez le concile de Trente, M. de Fleury, d’Héricourt, de la Combe, les mém. du clergé, & le mot Bénéfice. (A)

Union de créanciers, est lorsque plusieurs créanciers d’un même débiteur obéré de dettes, se joignent ensemble pour agir de concert, & par le ministere des mêmes avocats & procureurs, à l’effet de parvenir au recouvrement de leur dû, & d’empêcher que les biens de leur débiteur ne soient consommés en frais, par la multiplicité & la contrariété des procédures de chaque créancier.

Cette union de créanciers se fait par un contrat devant notaire, par lequel ils déclarent qu’ils s’unissent pour ne former qu’un même corps, & pour agir par le ministere d’un même procureur, à l’effet de quoi ils nomment un, ou plusieurs d’entre eux pour syndics, à la requête desquels seront faites les poursuites.

Lorsque le débiteur fait un abandonnement de biens à ses créanciers, ceux-ci nomment des directeurs pour gérer ces biens, les faire vendre, recouvrer ceux qui sont en main tierce, & pour faire l’ordre à l’amiable entre les créanciers. Voyez Abandonnement, Cession de biens, Créancier, Directeur, Direction. (A)

Union, (Gouver. polit.) la vraie union dans un corps politique, dit un de nos beaux génies, est une union d’harmonie, qui fait que toutes les parties quelqu’opposées qu’elles nous paroissent, concourent au bien général de la société ; comme des dissonnances dans la musique, concourent à l’accord total. Il peut y avoir de l’union dans un état, où l’on ne croit voir que du trouble, c’est-à-dire qu’il peut y avoir une harmonie, d’où résulte le bonheur qui seul est la vraie paix ; une harmonie qui seule produit la force & le maintien de l’état. Il en est comme des parties de cet univers éternellement liées par l’action des unes, & la réaction des autres.

Dans l’accord du despotisme asiatique, c’est-à-dire de tout gouvernement qui n’est pas modéré, il n’y a point d’union ; mais au contraire, il y a toujours une division sourde & réelle. Le laboureur, l’homme de guerre, le négociant, le magistrat, le noble, ne sont joints que parce que les uns oppriment les autres sans résistance ; & si l’on y voit de l’union, ce ne sont pas des citoyens qui sont unis, mais des corps morts ensévelis les uns auprès des autres. L’union d’un état consiste dans un gouvernement libre, où le plus fort ne peut pas opprimer le plus foible. (D. J.)

Union de l’Ecosse avec l’Angleterre, (Hist. mod.) traité fameux par lequel ces deux royaumes sont réunis en un seul, & compris sous le nom de royaume de la grande Bretagne.

Depuis que la famille royale d’Ecosse étoit montée sur le trône d’Angleterre, par l’avénement de Jacques I. à la couronne, après la mort d’Elisabeth ; les rois d’Angleterre n’avoient rien négligé pour procurer cette union salutaire ; mais ni ce prince, ni son successeur Charles I. ni les rois qui vinrent ensuite, jusqu’à la reine Anne, n’ont eu cette satisfaction ; des intérêts politiques d’une part, de l’autre des querelles de religion y ayant mis de grands obstacles. La nation écossoise jalouse de sa liberté, accoutumée à se gouverner par ses lois, à tenir son parlement, comme la nation angloise a le sien, craignoit de se trouver moins unie que confondue avec celle-ci ; & peut-être encore davantage d’en devenir sujette. La forme du gouvernement ecclésiastique établi en Angleterre par les lois, étoit encore moins du goût des Ecossois chez qui le presbytérianisme étoit la religion dominante.

Cependant cette union si salutaire, souvent projettée & toujours manquée, réussit en 1707, du consentement unanime de la reine Anne, & des états des deux royaumes.

Le traité de cette union contient vingt-cinq articles, qui furent examinés, approuvés & signés le 3 Août 1706, par onze commissaires anglois, & par un pareil nombre de commissaires écossois.

Le parlement d’Ecosse ratifia ce traité le 4 Février 1707, & le parlement d’Angleterre le 9 Mars de la même année. Le 17 du même mois, la reine se rendit au parlement, où elle ratifia l’union. Depuis ce tems-là il n’y a qu’un seul conseil privé, & un seul parlement pour les deux royaumes. Le parlement d’Ecosse a été supprimé, ou pour mieux dire réuni à celui d’Angleterre ; de sorte que les deux n’en font qu’un, sous le titre de parlement de la grande Bretagne.

Les membres du parlement que les Ecossois peuvent envoyer à la chambre des communes, suivant les articles de l’union, sont au nombre de quarante-cinq, & ils représentent les communes d’Ecosse ; & les pairs qu’ils y envoient, pour représenter les pairs d’Ecosse, sont au nombre de seize. Voyez Parlement.

Avant l’union, les grands officiers de la couronne d’Ecosse étoient le grand chancelier, le grand trésorier, le garde du sceau privé, & le lord greffier ou secrétaire d’état. Les officiers subalternes de l’état étoient le lord greffier, le lord avocat, le lord trésorier député, & le lord juge clerc.

Les quatre premieres charges ont été supprimées par l’union, & l’on a créé de nouveaux officiers qui servent pour les deux royaumes, sous les titres de lord grand chancelier de la grande Bretagne, &c. & aux deux secrétaires d’état qu’il y avoit auparavant en Angleterre, on en a ajouté un troisieme, à cause de l’augmentation de travail que procurent les affaires d’Ecosse.

Les quatre dernieres charges subsistent encore aujourd’hui. Voyez Avocat, Greffier, Trésorier, Député, &c.

Union, (Chimie.) il est dit à l’article Chimie, page 417. col. 1. que la Chimie s’occupe des séparations & des unions des principes constituans des corps ; que les deux grands changemens effectués par les opérations chimiques, sont des séparations & des unions ; que les deux effets généraux primitifs & immédiats de toutes les opérations chimiques, sont la séparation & l’union des principes ; que l’union chimique est encore connue dans l’art sous le nom de mixtion, de génération, de synthese, de syncrese, ou pour mieux dire, de syncrise, de combinaison, de coagulation, &c. que de ces mots les plus usités en françois, sont ceux d’union, de combinaison & de mixtion. Voyez sur-tout Mixtion.

Quoique les affections des corps aggrégés n’appartiennent pas proprement à la Chimie ; & qu’ainsi strictement parlant, elle ne s’occupe que de l’union mixtive, cependant comme plusieurs de ses opérations ont pour objet, au moins secondaire, préparatoire, intermédiaire, &c. l’union aggrégative ; la division méthodique des opérations chimiques qui appartiennent à l’union, doit se faire en celles qui effectuent des unions mixtives, & celles qui effectuent des unions aggrégatives : aussi avons-nous admis cette division. Voyez l’article Opération chimique.

On voit par cette derniere considération, que le mot union est plus général que celui de mixtion ou de combinaison ; aussi dans le langage chimique exact, doit on ajouter l’épithete de chimique ou de mixtive au mot union, lorsqu’on l’emploie dans le sens rigoureux. On ne l’emploie sans épithete que lorsqu’on le prend dans un sens vague, ou qui se détermine suffisamment de lui-même.

Le principe de l’union chimique est exposé aux articles Mixtion, Miscibilité, Rapport ; celui de l’union aggrégative n’est presque que l’attraction de cohésion, ou la cohésibilité des physiciens modernes. Voyez Cohésion. (b)

Union, s. f. (Archit.) on appelle ainsi l’harmonie des couleurs dans les matériaux, laquelle contribue avec le bon goût du dessein, à la décoration des édifices. (D. J.)

Union de couleurs, on dit qu’il y a une belle union de couleurs dans un tableau, lorsqu’il n’y en a point de trop criantes, c’est-à-dire qui font des crudités, mais qu’elles concourent toutes ensemble à l’effet total du tableau.