Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/395

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
387
CES

dit pas que tous ces Arrêts aient été rendus dans la Coutume de Chartres, qui paroît, comme l’a remarqué Du Moulin, n’avoir permis de retrait féodal, que pour réunir au fief dominant, le bien que le Seigneur retireroit en cas de vente. La moindre circonstance peut changer l’espèce des affaires, & rend inutiles les inductions qu’on tire des Arrêts. Ainsi l’on ne peut point encore regarder cette question comme absolument décidée pour la Coutume de Chartres. Jour. des Sav.

L’usufruitier peut exercer le retrait féodal, sans être tenu de rendre après l’usufruit les héritages retirés… & quoique Brodeau & quelques autres soient du sentiment contraire, j’estime que l’usufruitier peut céder son droit à un autre, vu que le retrait féodal est cessible. Ferriere, in-12, sur la Coutume de Paris, Tom. 1, p. 63, de l’édition de 1707. Quoique le droit d’habitation ne soit pas cessible, & qu’il soit purement personnel & inhérent à la personne du propriétaire, néanmoins il a été jugé qu’un propriétaire, d’une seizième partie par indivis d’une maison, ayant le consentement des autres copropriétaires, étoit bien fondé de faire vider le locataire, pour aller habiter en personne ladite maison. L’Arrêt est du 17 Mai 1629, rapporté par du Fresne, dans son Journal des Audiences, Liv. II, c. 43. Guéret sur le chap. 81, de la 1, cent. des Arrêts de M. le Prestre.

CESSION. Il f. Acte par lequel un homme transmet à un autre le droit qui lui appartenoit. Cessio juris sui, vel suo jure. Il a fait cession & transport d’une telle dette. On ne le dit guère que des obligations, rentes ou dettes mobiliaires, qui consistent en la tradition d’un écrit. A l’égard des meubles, offices, ou des héritages & immeubles, le transport qu’on fait de la propriété s’appelle vente, échange, donation. Cession est un terme générique, dont les espèces sont le transport, l’abandonnement de biens, la subrogation, & la cession en Justice.

Cession est aussi un abandonnement qu’on fait de tous ses biens en Justice, ou volontairement à ses créanciers, pour éviter la contrainte par corps. Bonorum cessio. On ne peut faire cession qu’en vertu des Lettres du Prince, qu’on appelle bénéfice de cession. La cession est une mort civile. On n’y est point reçu pour dettes de deniers royaux, de mineurs, de dépôts, ou cautionnement en Justice, ni quand il y a stellionat ou crime ; ni pour moisson de grains, ni pour vente du poisson salé, &c. Le bénéfice de cession n’est accordé qu’à ceux qui étant tombés en pauvreté, remettent de bonne foi leurs biens à leurs créanciers. Les étrangers non naturalisés ne sont point reçus à cession, ni le fermier contre le propriétaire, ni le principal obligé contre la caution, ni ceux qui ont obtenu des remises, & fait des contrats d’atermoiement. La cession emporte note d’infamie, & oblige à porter un bonnet vert ; autrement on est déchu de la grâce : ce qui a eu lieu d’abord dans la Coutume de Laval, pour signifier que celui qui avoit fait cession de biens étoit devenu pauvre par sa folie. A Lucques le cessionnaire porte un chapeau ou un bonnet orangé. Les Docteurs d’Italie disent que celui qui faisoit abandonnement de biens, étoit tenu de fraper trois fois du cul sur une pierre en présence du Juge. Autrefois on faisoit la cérémonie de faire quitter la ceinture & les clefs en Justice à ceux qui faisoient cession, parce que les Anciens portoient à leur ceinture les principaux instrumens qui leur servoient à gagner du bien, comme un homme de robe son écritoire, le Marchand sa gibecière ou escarcelle, & le Gendarme son épée, &c. Elle doit être faite en personne, tête nue & sans ceinture. La forme des cessions chez les Romains & les vieux Gaulois étoit telle ; celui qui la faisoit ayant amassé dans sa main gauche de la poussière des quatre coins de sa maison, se plantoit sur le seuil de la porte, dont il tenoit le poteau avec la main droite, & jetoit la poussière qu’il avoir amassée par dessus ses épaules : puis se dépouillant tout nu en chemise, ayant quitté sa ceinture & ses houssaux, il sautoit avec un bâton par-dessus une haie, donnant à entendre par-là à ses parens & à ses créanciers, qu’il n’avoit plus rien au monde, & que quand il sautoit, tout son bien étoit en l’air. La cession se faisoit ainsi en matière criminelle : mais en matière civile, il mettoit seulement une houssine d’aune, ou bien un fétu, ou une paille rompue sur le seuil de la porte, pour marquer qu’il abandonnoit ses biens : ce que l’on appeloit Chrenecruda per durpillum & festucam, Cession par le seuil & par le fétu. Il en est parlé dans la Loi Salique au titre Chrenecruda. Voyez une autre ancienne formule de cession au mot de Scandale. Le P. Ruinart, dans l’Appendix de Grégoire de Tours p. 1331, a donné trois anciennes formules de Cession. Voyez Banqueroute & Abandonnement.

CESSIONNAIRE. s. m. Celui qui accepte, & à qui on fait une cession ou transport de quelque chose. Is cui aliqua possessione ceditur. Le cessionaire n’a pas plus de droit que son cédant. Cessionnaire des droits de quelqu’un.

Cessionnaire, signifie aussi, celui qui a fait cession de biens en Justice. Is qui cedit alteri possessione suâ. On peut remettre en prison le cessionnaire qui ne porte point de bonnet vert. Le cessionnaire soit volontaire ou judiciaire, ne peut être élu dans les charges, non plus que ceux qui ont obtenu des Lettres de répit ; il ne peut être réhabilité qu’après avoir entièrement satisfait ses créanciers.

C’EST FAIT, C’EN EST FAIT. Ces deux manières de parler n’ont pas la même construction. C’est fait a un régime, on dit, c’est fait de vous, de lui, &c. C’en est fait n’a point de régime : on dit par exemple, c’en est fait, il n’y faut plus penser, il n’en faut plus parler.

J’étais dans les filets, c’étoit fait de ma vie. Malh.

CESTE. s. m. Terme Poétique. C’est une ceinture mystérieuse que les Poëtes & les Peintres attribuent à Vénus & à Junon. Zona, cingulum, cestus. Quelques-uns disent que c’étoit un corset. Cupidon déroba le ceste à Vénus. Ablanc. Comme ce mot est Latin, & peu commun en François, bien des gens n’ont pas approuvé l’usage qu’en fait M. Ménage dans ces deux vers.

Elle avait en ses yeux, en sa voix, en son geste,
Plus de charmes divers que Vénus dans son ceste.

Chez les Anciens, ceste étoit proprement la ceinture que le mari donnoit à sa femme le premier jour de ses noces. Voyez Ceinture.

Ce mot vient du grec κεστὸς, qui signifioit une ceinture, ou autre ouvrage brodé à l’aiguille, qui étoit un ornement ordinaire des femmes. Voyez Ceinture. Il faut dire en Latin cestus sans diphthongue, à la différence de cæstus, qui suit ; car on ne dit point cæstus en ce sens, non plus que cestum, neutre, au moins dans la bonne Latinité, quoi qu’en dise le Moréri ; Κεστὸς, cestus, ceinture du ventre, vient du Celthique Cest, qui signifie ventre. Pezron.

Ceste est aussi un gros gantelet de cuir garni de plomb, dont se servoient les anciens Athlètes dans les combats du pugilat. cæstus. Calepin a cru que c’étoit une massue de laquelle pendoient des balles de plomb attachées par des morceaux de cuir. Il se trompe, car c’étoit seulement une longe de cuir garnie de cloux, de plomb, ou de fer, dont on entouroit la main en forme de liens croisés, & même le poignet & une partie du bras, pour empêcher qu’ils ne fussent rompus ou démis. On l’appeloit ainsi, à cædendo, tuer & fraper. Voyez sur le ceste Vigénere dans ses Annotations sur Tite-Live, Tom. I, p. 972.

CESTIPHORES. s. m. pl. C’étoient des gens qui combattoient à coups de poing, ou avec le gantelet, appelé Ceste.

C’EST POURQUOI. Voyez Pourquoi.

CÉSURE. s. f. Terme de Poësie. Cæsura. C’est dans