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qu’à tous autres égards ils restent entiers, ils perdent alors toute leur action dans les parties comprises entre la ligature & les extrémités auxquelles ils tendent, sans en perdre cependant dans les parties comprises entre la ligature & la moëlle du cerveau ou le cervelet, il paroîtra évidemment que les fibres nerveuses tirent continuellement de la moelle du cerveau un suc qu’elles transmettent par autant de canaux distincts à chacun des points de tout le corps, & que ce n’est que par le moyen de ce suc qu’elles exécutent toutes leurs fonctions dans les sensations & le mouvement musculaire, &c. cette humeur est ce qu’on appelle proprement, esprits animaux ou suc nerveux. Voyez Animal, Esprit, &c.

On a supposé, il y a long-tems, que les nerfs sont des petits tuyaux, mais on a eu bien de la peine à découvrir leurs cavités, enfin on a cru que M. Lewenhock étoit venu à bout de rendre sensibles les cavités qui sont dans les nerfs, mais cette découverte souffre encore quelque difficulté.

Il ne paroît pas qu’il y ait la moindre probabilité dans cette opinion (qui a cependant ses partisans), que les nerfs exécutent leurs opérations par la vibration des fibrilles tendues ; en effet c’est un sentiment contraire à la nature des nerfs, dont la substance est molle, pulpeuse, flasque, croissée & ondée, & suivant lequel on ne sauroit expliquer cette distinction, avec laquelle les objets de nos sensations nous sont représentés, & avec laquelle s’exécutent les mouvemens musculaires.

Or de même que le sang artériel est porté continuellement dans toutes les parties du corps qui sont garnies de vaisseaux sanguins, de même aussi on conçoit qu’un suc préparé dans la substance corticale du cerveau & dans le cervelet, se porte de-là continuellement à chaque point du corps à-travers les nerfs. La petitesse des vaisseaux de la substance corticale, telle que les injections de Ruisch la font connoître, quoique cependant ces injections ne démontrent que des vaisseaux artériels beaucoup plus gros, par conséquent que les moindres vaisseaux secrétoires, prouvent combien ces vaisseaux nerveux doivent être déliés, & d’un autre côté la grosseur du volume du cerveau comparée à la petitesse de chaque fibrille, fait voir que leur nombre peut être au-delà de toutes les bornes que l’imagination paroît lui donner. Voyez Filament.

De plus la grande quantité de suc qui s’y porte constamment & qui y est agitée d’un mouvement violent, y remplira continuellement ces petits canaux, les ouvrira & mettra toujours en action ; mais comme il se prépare à chaque moment de nouveaux sucs & que le dernier chasse continuellement le premier, il semble aussi-tôt qu’il a fait sa derniere fonction être chassé hors des derniers filamens dans des vaisseaux quelconques, de sorte qu’il fait ainsi sa circulation dans le corps comme toutes les autres liqueurs. Voyez Circulation.

M. Vieussens a cru avoir trouvé des tuyaux qu’il a nommés nevro-lymphatiques, mais sa découverte n’est pas confirmée.

Si nous considérons sur-tout la grandeur du volume du cerveau, du cervelet, de la moëlle alongée & de la moëlle de l’épine, eu égard au volume des autres solides du corps ; le grand nombre de nerfs qui se distribuent de-là dans tout le corps ; que le cerveau & la moëlle de l’épine sont la base d’un embryon, de laquelle, selon le grand Malpighi, se forment ensuite les autres parties ; enfin qu’il n’y a à peine aucune partie dans le corps qui ne sente & qui ne se remue, il paroîtra très-probable que toutes les parties solides du corps sont tissues de fibres nerveuses, & ne sont composées d’autres choses. Voyez Filamens & Solides.

Les anciens ne comptoient que sept paires de nerfs qui partent du cerveau, dont ils marquent les usages dans ces deux vers latins,


Optica prima, oculos movet altera, tertia gustat,
Quarta & quinta audit, vaga sexta est, septima linguæ.


mais les modernes, comme nous l’avons déja observé, en comptent un plus grand nombre.

Selon eux, les nerfs de la moëlle alongée sont au nombre de dix paires, dont la premiere se nomme nerfs olfactifs ; la seconde, nerfs optiques ; la troisieme, nerfs moteurs des yeux, moteurs communs, oculaires communs, musculaires communs. oculo-musculaires communs ; la quatrieme, nerfs trochléateurs, musculaires obliques supérieurs, communément nommés nerfs pathétiques ; la cinquieme, nerfs innominés, nerfs trijumaux ; la sixieme, moteurs externes, oculaires externes, musculaires externes, oculo-musculaires externes ; la septieme paire, nerfs auditifs ; la huitieme paire, la petite vague, nerf sympathique moyen ; la neuvieme paire, nerfs hypoglosses, nerfs gustatifs, nerfs linguaux ; la dixieme paire, nerfs sous-occipitaux. Voyez Olfactif, Optique, Vague, &c.

Les nerfs de la moëlle épiniere sont 1° une paire de nerfs accessoires ou associés de la huitieme paire de la moëlle alongée ; 2° une paire de nerfs intercostaux ou grands nerfs sympathiques ; 3° sept paires de nerfs intervertebaux du col ou nerfs cervicaux ; 4° douze paires de nerfs intervertebaux du dos, ou nerfs dorsaux, costaux, vrais intercostaux ; 5° cinq paires de nerfs intervertebraux des lombes, ou nerfs lombaires ; 6° cinq ou six paires de nerfs sacrés. Voyez Accessoires & Intercostaux.

Les autres nerfs qui ont des noms particuliers sont 1° les branches des nerfs de la moëlle allongée ; comme sont 1° les trois branches de la cinquieme paire, dont l’une a été nommée nerf orbitaire supérieur, l’autre nerf maxillaire supérieur, & le troisieme nerf maxillaire inférieur ; 2° les deux branches ou portions du nerf auditif, dont l’une se nomme portion molle & l’autre portion dure. Voyez Orbitaire, Maxillaire, Auditif, &c.

2°. Les branches des nerfs de la moëlle épiniere, tels sont 1° les nerfs diaphragmatiques ; 2° les nerfs brachiaux, dont les six branches différentes ont toutes différens noms, savoir le nerf musculo-cutané, le nerf median, le nerf cubital, le nerf cutané interne, le nerf radial, le nerf axillaire ou articulaire ; 3° les nerfs cruraux, que l’on divise en trois portions, savoir le nerf crural du fémur ou nerf crural supérieur, le nerf crural du tibia ou nerf crural jambier, le nerf crural du pié ou nerf crural pédieux ; 4° les nerfs sciatiques qui produisent le nerf sciatique crural, le nerf sciatique poplité, le nerf sciatique tibial, le nerf sciatique peronier, le nerf plantaire interne, le nerf plantaire externe. Voyez Diaphragmatique, Brachial, Crural, &c.

3°. Les rameaux de quelques-unes des branches dont nous avons fait mention, ont aussi des noms particuliers ; tels sont les canaux des branches de la cinquieme paire, par exemple, le rameau frontal, le rameau nasal, & le rameau lacrymal de la premiere branche, &c. Voyez Frontal, Nasal & Lacrymal.

Vieussens, Willis & Beretini nous ont particulierement donné des Planches sur les nerfs ; l’ouvrage de ce dernier est intitulé : Beretini tabulæ anatomicæ, &c. Romæ 1741, in-fol. Voyez Névrographie & Névologie.

Nerfs, jeux de la nature sur les (Physiol.) les nerfs, de même que les vaisseaux sanguins, se répandent dans toutes les parties, quoique d’une maniere fort différente. Le diametre des vaisseaux sanguins est