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car étendre son pouvoir au-delà du droit & de la justice, c’est joindre la tyrannie à l’usurpation.

Dans tous les gouvernemens policés, une partie considérable de la forme du gouvernement & des privileges essentiels des peuples, c’est de nommer les personnes qui doivent gouverner. L’anarchie ne consiste pas seulement à n’avoir nulle forme de gouvernement, mais à n’avoir pas constitué les personnes qui doivent être revêtues du pouvoir. Ainsi les véritables états ont non-seulement une forme de gouvernement établie, mais encore des lois pour revêtir certaines personnes de l’autorité publique. Quiconque entre dans l’exercice de quelque partie du pouvoir d’une société par d’autres voies que celles que les lois prescrivent, ne peut prétendre d’être obéi, quoique la forme du gouvernement soit conservée, parce qu’il n’a pas été désigné à jouir du pouvoir par les lois. En un mot, un tel usurpateur, ni aucun de ses descendans, ne sauroient avoir une domination légitime, jusqu’à ce que le peuple y ait donné son aveu, sans lequel leur pouvoir sera toujours un pouvoir usurpé, & par conséquent illégitime. (D. J.)

USURPER, ENVAHIR, S’EMPARER, (Synonymes.) Usurper, c’est prendre injustement une chose à son légitime maître, par voie d’autorité & de puissance ; il se dit également des biens, des droits & du pouvoir. Envahir, c’est prendre tout-d’un-coup par voie de fait quelque pays ou quelque canton, sans prévenir par aucun acte d’hostilité. S’emparer, c’est précisément se rendre maître d’une chose, en prévenant les concurrens & tous ceux qui peuvent y prétendre avec plus de droit.

Il semble aussi que le mot d’usurper renferme quelquefois une idée de trahison : que celui d’envahir fait entendre qu’il y a du mauvais procédé : que celui de s’emparer emporte une idée d’adresse & de diligence.

On n’usurpe point la couronne, lorsqu’on la reçoit des mains de la nation. Prendre des provinces dans le cours de la guerre, c’est en faire la conquête, & non pas les envahir. Il n’y a point d’injustice à s’emparer des choses qui nous appartiennent, quoique nos prétentions soient contestées. Guard. (D. J.)

U T

UT, s. m. en Musique, est la premiere des six syllabes de la gamme de l’Aretin qui répond à la letre C.

Par la méthode des transpositions, on appelle toujours ut la tonique des modes majeurs. Voyez Gamme, Transposition.

Les Italiens trouvant le nom de cette syllabe ut trop sourd, lui substituent la syllabe do en solfiant. (S)

UTERIN, (Gram. & Jurisprud.) se dit de celui qui est issu du même ventre. On appelle frere uterin celui qui est né de la même mere qu’un autre enfant. Voyez ci-devant les mots Frere & Sour, & les mots Consanguinité, Double lien, Parenté, Propres, Succession. (A)

Uterine Pierre, (Hist. nat.) lapis uterinus ; nom donné par quelques auteurs à une pierre qui se trouve dans l’Amérique espagnole & dans d’autres contrées. On dit qu’elle est très-dure & très-pesante, d’un beau noir, & susceptible d’un très-beau poli. Les Indiens l’appliquent sur le nombril dans les douleurs de ventre, & prétendent en sentir beaucoup de soulagement.

UTERUS, en Anatomie, ou matrice, est l’organe de la génération dans la femme ; c’est-là que se passe l’œuvre de la conception, & où le fetus ou l’embryon se loge, se nourrit, & croît pendant la grossesse & jusqu’à la délivrance. Voyez sa description sous l’article Matrice, la fonction sous les articles

Génération, Conception, Grossesse, Fetus, &c.

Uterus, maladies de l’, (Médec.) Il faut d’abord se rappeller la structure de cette partie organique, qui ne se trouve que dans le sexe féminin ; elle est attachée aux os du bassin, placée entre la vessie & l’intestin rectum ; son épaisseur approche d’un pouce & demi ; sa longueur depuis l’orifice jusqu’au fond, est d’environ trois pouces ; & sa cavité mitoyenne contiendroit à peine le fruit d’une amande. Il est difficile d’introduire un stilet dans son orifice, qui se dilate si fort pour l’accouchement.

Chez-les femmes enceintes, non-seulement la grandeur de l’uterus augmente, pour qu’elle puisse contenir le fœtus & l’arriere-faix, mais ses côtés mêmes deviennent plus épais ; les vaisseaux sanguins de ce viscere s’alongent & se grossissent. Sa substance spongieuse se gorge de sang ; dans la partie où est attaché le placenta, on découvre des orifices très-amples ; & les vaisseaux auparavant transparens se trouvent alors rouges ; son ouverture se maintient naturellement fermée pendant tout le tems de la grossesse ; mais quand le moment d’accoucher ou d’avorter approche, elle devient plus molle & plus large ; ensuite dans l’espace de seize jours depuis l’accouchement, elle reprend sa grandeur naturelle.

Les maladies de l’uterus se rapportent 1° aux parties voisines, telles que le vagin, les trompes, les ovaires, mais spécialement à celles de l’uterus dont il s’agit ici : 2°. elles ont rapport aux maladies de fonction, de menstruation, de conception, de grossesse, d’avortement, d’accouchement & de vuidanges, qu’on a coutume de mettre sous des titres particuliers.

Quant aux maladies propres à l’uterus, elles font relatives 1°. à ce qui est contenu dans sa cavité 12°. à son orifice : 3°. à sa position : 4°. à sa figure : 5°. aux affections qui viennent de cause externe : 6°. à celles de toute sa substance : 7°. à l’augmentation de sa masse : 8°. à sa diminution : 9°. à son action : 10°. enfin à ses évacuations.

I. Dans la cavité de l’uterus 1°. sont contenues ses diverses humeurs : 2°. le sang menstruel ou celui des vuidanges, qui s’y arrête par la clôture de l’orifice, par le ralentissement du mouvement, & la qualité du sang augmentée par la stagnation dégénere en pourriture, ou par sa mauvaise qualité, cause un grand nombre de symptomes, auxquels on ne peut remédier qu’en ouvrant l’orifice de l’uterus, qui se trouve resserré, & en modifiant sa partie interne ; 3°. les corps étrangers introduits dans la matrice se couvrent d’une croûte calculeuse ; 4°. les choses qui s’y sont formées comme un grumeau, doivent en être ôtées par la dilatation de l’orifice & par l’usage des emménagogues ; mais 5°. le sarcôme qui occupe la cavité de l’uterus, ne peut être tiré dehors par l’orifice ; & comme il n’est pas non plus possible de le ronger, il faut tâcher d’empêcher son accroissement par un bandage extérieur, & par l’application des antiseptiques.

II. L’orifice de l’uterus, qui dans le tems des regles, de l’accouchement, & de l’évacuation des vuidanges, se trouve fermé ou resserré par quelque inflammation, par une tumeur ou par une espece de convulsion de son col, s’oppose à la sortie des humeurs ; on tâchera d’en procurer l’écoulement par le moyen des topiques & des médicamens internes ; mais s’il y a une coalescence, & que l’orifice de l’uterus soit fermé par une membrane, il en résulte une stérilité incurable & la suppression des regles ; si au contraire l’uterus est continuellement ouvert (ce qu’on reconnoît par l’intromission du doigt), il an arrive un écoulement de fleurs blanches, un flux immodéré des regles, un avortement fréquent : cet ac-