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DISSÉQUEUR, s. m. en Anatomie, celui qui disseque. C’est un fort mauvais disséqueur. Tout bon disséqueur n’est pas pour cela bon anatomiste. (L)

* DISSERTATION, s. f. ouvrage sur quelque point particulier d’une science ou d’un art. La dissertation est ordinairement moins longue que le traité. D’ailleurs le traité renferme toutes les questions générales & particulieres de son objet ; au lieu que la dissertation n’en comprend que quelques questions générales ou particulieres. Ainsi un traité d’Arithmétique est composé de tout ce qui appartient à l’Arithmétique : une dissertation sur l’Arithmétique n’envisage l’art de compter que sous quelques-unes de ses faces générales ou particulieres. Si l’on compose sur une matiere autant de dissertations qu’il y a de différens points de vûes principaux sous lesquels l’esprit peut la considérer : si chacune de ces dissertations est d’une étendue proportionnée à son objet particulier, & si elles sont toutes enchaînées par quelqu’ordre méthodique, on aura un traité complet de cette matiere.

DISSIDENS, (Hist. ecclésiast. mod.) l’on nomme ainsi en Pologne ceux qui font profession des religions Luthérienne, Calviniste, & Greque : ils doivent joüir en Pologne du libre exercice de leur religion, qui, suivant les constitutions, ne les exclut point des emplois. Le roi de Pologne promet par les pacta-conventa de les tolérer, & de maintenir la paix & l’union entr’eux ; mais les dissidens ont eu quelquefois à se plaindre de l’inexécution de ces promesses. Les Ariens & Sociniens ont aussi voulu être engagés au nombre des dissidens, mais ils en ont toûjours été exclus.

DISSIMILAIRE, adj. en Anatomie, se dit des parties qui sont diversement composées de différentes parties similaires sensibles, & dont la structure n’est pas la même par-tout dans ces parties ; par exemple, le bras qui est autrement composé que la jambe, & dont la structure n’est pas uniforme, ne peut pas être mis au rang des parties similaires Voyez Similaire. (L)

DISSIMILITUDE, s. m. en Rhétorique, ou comme s’expriment les Rhéteurs, à dissimili, lieu commun d’où l’on tire des argumens de choses dissemblables ou différentes, pour en établir d’autres d’une nature aussi différente.

Tel est l’argument de Cicéron, lorsqu’il dit : si barbarorum est in diem vivere, nostra consilia tempus spectare debent. On diroit dans le même sens, s’il appartient au libertin de ne penser qu’au présent, l’homme sage doit s’occuper de l’avenir.

On trouve dans Catulle un argument à dissimili d’une grande beauté :

Soles occidere & redire possunt,
Nobis cum semel occidit brevis lux,
Nox est perpetua una dormienda.
(G)

DISSIMULATION, s. f. (Morale.) il y a de la différence entre dissimuler, cacher, & déguiser. On cache par un profond secret ce qu’on ne veut pas manifester. On dissimule par une conduite réservée ce qu’on ne veut pas faire appercevoir. On déguise par des apparences contraires ce qu’on veut dérober à la pénétration d’autrui. L’homme caché veille sur lui-même pour ne se point trahir par indiscrétion. Le dissimulé veille sur les autres pour ne les pas mettre à portée de le connoître. Le déguisé se montre autre qu’il n’est pour donner le change. On ne parle ici que de la dissimulation.

Rien ne donne une idée plus avantageuse de la société, que ce que rapporte l’évangile de l’état où elle se trouvoit parmi les premiers Chrétiens. Ils n’avoient, dit-on, qu’un cœur & qu’une ame, erat cor unum & anima una. Dans cette disposition d’esprit,

avait-on besoin de la dissimulation ? Un homme se dissimule-t-il quelque chose à lui-même ? & ceux qui vivroient les uns par rapport aux autres, dans la même union où chacun de nous est avec soi-même, auroient-ils besoin des précautions du secret ?

Aussi voyons-nous que dans le caractere d’un homme propre à faire le bonheur de la société, le premier trait que l’on exige, est la franchise & la sincérité. On lui préfere un caractere opposé, par rapport à ce qu’on appelle les grandes affaires, ou les négociations importantes ; mais tout ce qu’on en peut conclure, c’est que ces occasions particulieres ne sont pas ce qui contribue au bonheur de la société en général. Toute négociation légitime ne devroit rouler que sur un point, qui est de faire voir à celui avec qui on négocie, que nous cherchons à réunir son avantage avec le nôtre.

Les bons princes ont regardé la dissimulation comme un mal nécessaire : les tyrans, tels que Tibere, Loüis XI. &c. s’en paroient comme d’une vertu.

Il n’est pas douteux que le secret est souvent nécessaire contre la disposition de ceux qui voudroient interrompre nos entreprises légitimes. Mais la nécessité de la précaution deviendroit incomparablement plus rare, si l’on ne formoit d’entreprises que celles qu’on peut avoüer sans être exposé à aucun reproche. La candeur avec laquelle on agiroit alors, mettroit beaucoup de gens dans nos intérêts. Le maréchal de Biron auroit sauvé sa vie, en parlant avec plus de franchise à Henri IV.

Ce que j’ai voulu dire dans cet article sur le secret de la dissimulation, par rapport à la douceur de la société, se réduit donc à trois ou quatre choses.

1°. Ne point estimer le caractere de ceux qui, sans choix & sans distinction, sont réservés & secrets : 2°. ne faire des secrets que sur des choses qui le méritent bien : 3°. avoir une telle conduite, qu’elle n’ait besoin du secret que le moins qu’il soit possible. Article de M. Formey.

DISSIPATION, s. f. terme de Physique, signifie proprement une perte ou déperdition insensible qui se fait de petites parties d’un corps, ou plûtôt l’écoulement invisible par lequel elles se détachent & se per dent. Voyez Ecoulement & Transpiration.

Ainsi on ne dit point que le sang se dissipe, mais se perd, en parlant du sang qu’un homme perd par une plaie, ou de quelqu’autre maniere sensible.

Au contraire, on dit fort bien : la dissipation des esprits se fait beaucoup plus abondamment que celle des parties solides. Chambers.

Dissipation, (Jurispr.) lorsqu’elle va jusqu’à la prodigalité, c’est une cause d’interdiction, parce qu’on la regarde comme une espece d’aliénation d’esprit.

C’est aussi un moyen de séparation de biens pour la femme ; & pour cela il n’est pas nécessaire que la dissipation soit totale, il suffit que le mari vergat ad inopiam, & que la dot de la femme soit en péril. Voyez Interdiction, Prodigue, & Séparation. (A)

DISSOLVANT, adj. (Chimie.) Voyez Menstrue.

DISSOLUTION, s. f. (Chimie.) l’action du menstrue. Voyez Menstrue. On appelle aussi dissolution en Chimie le corps résultant de l’union chimique de deux substances. C’est ainsi qu’on dit une dissolution de savon par l’eau ; une dissolution de cuivre par un certain menstrue, &c. pour exprimer la liqueur composée par l’union de l’eau & du savon, d’un menstrue quelconque, du cuivre & de ce métal, &c. Dans le langage chimique ordinaire, ou lorsqu’on parle aux gens de l’art, on se dispense souvent d’énoncer le menstrue employé à la dissolution : on