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qu’alors t croissant, u diminue ; sur quoi voyez mon traité de Dynamique, articles 19 & 20. Or nommant e l’espace parcouru, on a (voyez Vitesse) ; donc l’équation , donne aussi celle-ci  ; c’est-à-dire que les petits espaces que fait parcourir à chaque instant une force accélératrice ou retardatrice, sont entr’eux comme les quarrés des tems.

Cette équation , ou, ce qui revient au même, l’équation n’est point un principe de méchanique, comme bien des auteurs le croyent, mais une simple définition ; la force accélératrice ne se fait connoître à nous que par son effet : cet effet n’est autre chose que la vitesse qu’elle produit dans un certain tems ; & quand on dit, par exemple, que la force accélératrice d’un corps est réciproquement proportionnelle au quarré de la distance, on veut dire seulement que est réciproquement proportionnel à ce quarré ; ainsi ϕ n’est que l’expression abregée de , & le second membre de l’équation qui exprime la valeur de . Voyez l’article Accélératrice & mon traité de Dynamique déjà cités.

L’équation fait voir que pendant un instant l’effet de toute force accéleratrice quelconque est comme le quarre du tems ; car la quantité variable ϕ pouvant être censée constante pendant un instant, est donc constant pendant cet instant, & par conséquent dde est comme dt2. Ainsi pendant un instant quelconque les petits espaces qu’une force accélératrice quelconque fait parcourir, sont entr’eux comme les quarrés des tems ou plûtôt des instans correspondans ; toute cause accélératrice agit donc dans un instant de la même maniere & suivant les mêmes lois que la pesanteur agit dans un tems fini ; car les espaces que la pesanteur fait parcourir sont comme les quarrés des tems. Voyez Accélération & Descente. Donc si on nomme a l’espace que la pesanteur p feroit parcourir pendant un tems quelconque θ, on aura , & par conséquent  ; formule générale pour comparer avec la pesanteur p une force accélératrice quelconque ϕ.

Mais il y a sur cette formule une remarque importante à faire ; elle ne doit avoir lieu que quand on regarde comme courbe rigoureuse la courbe qui auroit les tems t pour abscisses & les espaces e pour ordonnées ; ou, ce qui revient au même, qui représenteroit par l’équation entre ses coordonnées l’equation entre e & t. Voyez Equation. Car si on regarde cette courbe comme polygone, alors dde prise à la maniere ordinaire du calcul différentiel aura une valeur double de celle qu’elle a dans la courbe rigoureuse, & par conséquent il faudra supposer , afin de conserver à ϕ la même valeur. Voyez sur cela les mots Courbe polygone & Différentiel, page 988. col. 1. C’étoit faute d’avoir fait cette attention, que le célebre M. Newton s’étoit trompé sur la mesure des forces centrales dans la premiere édition de ses Principes ; M. Bernoulli l’a prouvé dans les mémoires de l’académie des Sciences de 1711 ; on faisoit alors en Angleterre une nouvelle édition des principes de M. Newton ; & ce grand homme se corrigea sans répondre. Pour mieux faire sentir par un exemple simple combien cette distinction entre les deux équations est nécessaire, je suppose ϕ constante & égale à p ; on aura donc par la premiere équation ; & en intégrant . Donc si , on auroit  ;

ce qui est contre l’hypothèse, puisqu’on a supposé que a est l’espace décrit dans le tems θ, & que par conséquent si t = θ, on aura e = a ; au contraire en faisant , on trouvera, comme on le doit, e = a. Cette remarque est très-essentielle pour éviter bien des paralogismes.

L’équation ϕ d t = d u, donne ϕ d e = u d u, à cause de  ; donc uu = 2 s ϕ d e ; autre équation entre les vitesses & les espaces pour les forces accélératrices. Donc si, par exemple, ϕ est constant, on aura uu = 2 ϕ e ; c’est l’équation entre les espaces & les vîtesses, dans le mouvement des corps que la pesanteur anime.

Forces centrales & centrifuges. Nous avons donné la définition des forces centrales au mot Central[1], & nous y renvoyons, ainsi qu’à la division des forces centrales en centripetes & centrifuges, selon qu’elles tendent à approcher ou à éloigner le corps du point fixe ou mobile auquel on rapporte l’action de la force centrale. Ce même mot de force centrifuge signifie encore plus ordinairement cette force par laquelle un corps mu circulairement tend continuellement à s’éloigner du centre du cercle qu’il décrit. Cette force se manifeste aisément à nos sens dans le mouvement d’une fronde ; car nous sentons que la fronde est d’autant plus tendue par la pierre, que cette pierre est tournée avec plus de vîtesse ; & cette tension suppose dans la pierre un effort pour s’éloigner de la main, qui est le centre du cercle que la pierre décrit. En effet la pierre mue circulairement tend continuellement à s’échapper par la tangente, en vertu de la force d’inertie, comme on l’a prouvé au mot Centrifuge. Or l’effort pour s’échapper par la tangente, tend à éloigner le corps du centre, comme cela est évident, puisque si le corps s’échappoit par la tangente, il s’éloigneroit toûjours de plus en plus de ce même centre. Donc l’effort de la pierre, pour s’échapper par la tangente, doit tendre la fronde. Veut-on le voir d’une maniere encore plus distincte ? Le corps arrivé au point A (fig. 24. Méchaniq.) tend à se mouvoir par la tangente ou portion de tangente infiniment petite AD. Or par le principe de la décomposition des forces (voyez Décomposition & Composition), on peut regarder ce mouvement suivant AD comme composé de deux mouvemens, l’un suivant l’arc AE du cercle, l’autre suivant la ligne ED, qu’on peut supposer dirigée au centre. De ces deux mouvemens, le corps ne conserve que le mouvement suivant AE ; donc le mouvement suivant ED est détruit ; & comme ce mouvement est dirigé du centre à la circonférence, c’est en vertu de la tendance à ce mouvement que la fronde est bandée.

Un corps qui se meut sur toute autre courbe que sur un cercle, fait effort de même à chaque instant pour s’échapper par la tangente ; ainsi on a nommé en général cet effort force centrifuge, quelle que soit la courbe que le corps décrit.

Pour calculer la force centrifuge d’un corps sur une courbe quelconque, il suffit de la savoir calculer dans un cercle ; car une courbe quelconque peut être regardée comme composée d’une infinité d’arcs de cercle, dont les centres sont dans la développée. Voyez Développée & Osculateur. Ainsi connoissant la loi des forces centrifuges dans le cercle, on connoîtra celle des forces centrifuges dans une courbe quelconque. Or il est facile de calculer la force centrifuge dans un cercle ; car suivant ce que nous avons

  1. N. B. Dans cet article, N°. 12. au lieu de raison inverse de la triplée, il faut lire raison sous-doublée de la triplée ; & N°. 13. à la fin, il faut lire sinus pour cosinus.