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d’où l’on distingue forme absolue & forme indicative. Ainsi la forme du sacrement de pénitence est absolue chez les Latins, qui l’expriment ainsi, ego te absolvo ; & elle est déprécative chez les Grecs, qui la commencent par cette priere : Domine J. C. condona, dimitte, relaxa peccata, &c.

On distingue encore la forme en absolue & conditionnelle : elle est absolue, quand le ministre du sacrement n’y joint aucune condition, comme dans ces paroles, ego te baptiso ; & conditionnelle, lorsqu’il y appose une condition qui emporte avec elle un doute, comme dans celle-ci, si non es baptisatus, ego te baptiso. On ne trouve point d’exemple de la forme conditionnelle avant le huitieme siecle.

La forme des sacremens peut être altérée principalement de six manieres ; 1°. par simple changement, soit d’idiome, soit de termes synonymes, soit de mode ; 2°. par simple corruption ; 3°. par addition ; 4°. par détraction ou retranchement ; 5°. par transposition ou par inversion ; 6°. par interruption. Le principe général à cet égard est, que quand quelqu’une de ces différentes altérations est notable, ensorte qu’il en résulte une erreur ou un changement substantiel qui détruise le sens de la forme, alors le sacrement est nul ; mais une mutation accidentelle dans la forme n’ôte rien au sacrement de sa validité.

Quelle que soit la créance ou la foi du ministre, pourvû qu’il prononce la forme prescrite par l’Eglise & dans les circonstances convenables, le sacrement est valide : aussi l’Eglise n’a-t-elle jamais rejetté le baptême conféré par les hérétiques, excepté par ceux qui en altéroient la forme. Voyez Intention & Sacrement. (G)

Forme, (Jurispr.) est la disposition que doivent avoir les actes ; c’est un certain arrangement de clauses, de termes, de conditions & de formalités.

La forme des actes se rapporte, ou à leur rédaction simplement, & à ce qui peut les rendre probans & authentiques ; ou à ce qui habilite les personnes qui disposent, comme l’autorisation ; ou à la disposition des biens, comme l’institution d’héritier qui est nécessaire en pays de droit écrit pour la validité du testament.

Ce qui concerne la forme extérieure des actes se regle par la loi du lieu où ils sont passés ; c’est ce que signifie la maxime locus regit actum.

La forme qui tend à habiliter les personnes, dépend de la loi de leur domicile.

Enfin celle qui concerne la disposition des biens, dépend de la loi du lieu où ils sont situés.

On confond souvent la forme d’un acte avec les formalités ; cependant le terme de forme est plus général, car il embrasse tout ce qui sert à constituer l’acte ; au lieu que les formalités proprement dites ne s’entendent que de certaines conditions que l’on doit remplir pour la validité de l’acte, comme l’insinuation, le contrôle. On distingue cependant aussi plusieurs sortes de formalités. Voyez ci-devant Formalités. (A)

Forme est quelquefois opposée au fond ; la forme alors se prend pour la procédure, & le fond est ce qui en fait l’objet.

Il y a des moyens de forme, & des moyens du fond. Les moyens de forme sont ceux qui se tirent de la procédure, comme les nullités, les fins de non-recevoir ; au lieu que les moyens du fond se tirent du fait & du droit.

On dit communément que la forme emporte le fond, c’est-à-dire que les moyens de forme prévalent sur ceux du fond ; comme il arrive, par exemple, lorsque l’on a laissé passer le tems de se pourvoir contre un arrêt ; la fin de non recevoir prévaut sur les moyens de requête civile ou de cassation que l’on auroit pû avoir. (A)

Forme authentique, est celle qui fait pleine foi tant en jugement que dehors. Les actes sont revêtus de cette forme, lorsqu’ils sont expédiés & signés par une personne publique ; comme les jugemens qui sont signés du greffier, les expéditions des contrats signés de deux notaires, ou d’un notaire, & de deux témoins. (A)

Forme exécutoire, est celle qui donne aux actes l’exécution parée, paratam executionem, c’est-à-dire le droit de les mettre directement à exécution par voie de contrainte, sans être obligé d’obtenir pour cet effet aucun jugement ni commission.

Les jugemens & les contrats sont les seuls actes que l’on mette en forme exécutoire.

Cette forme consiste à être expédiés en parchemin, & intitulés du nom du juge ; & si c’est un arrêt, du nom du roi. Cette expédition est ce que l’on appelle la grosse d’un acte.

L’usage n’est pourtant pas par-tout uniforme à ce sujet ; & il y a des pays où la forme exécutoire est différente : par exemple, dans quelques endroits on ne met point les sentences en grosse ni en parchemin, c’est la premiere expédition en papier qui est exécutoire. Dans d’autres les grosses des contrats sont intitulées du nom du roi, comme les arrêts.

Mettre un acte en forme, c’est le mettre en forme exécutoire.

Quand les actes sont revêtus de cette forme, on peut directement en vertu de ces actes faire un commandement, & ensuite saisir & exécuter, saisir réellement, même procéder par emprisonnement, si c’est un cas où la contrainte par corps ait lieu. Voy. Exécution parée, Exécutoire & Grosse (A)

Forme judiciaire, c’est l’ordre & le style que l’on observe dans la procédure ou instruction, & dans les jugemens. Voyez Instruction & Procédure. (A)

Forme probante, est celle qui procure à l’acte une foi pleine & entiere, & qui le rend authentique. Un jugement & un contrat devant notaire sont des actes authentiques de leur nature ; mais l’expédition que l’on en rapporte pour être en forme probante, doit être sur papier ou parchemin timbré, & signé du greffier, si c’est un jugement ; ou des parties & des notaires & témoins, si c’est un contrat, testament, ou autre acte public.

La forme probante rend l’acte authentique ; c’est pourquoi l’on joint ordinairement ces termes, forme probante & authentique. Voyez ci-devant Forme authentique. (A)

Forme, en matiere bénéficiale, est la maniere dont les provisions de cour de Rome sont conçûes.

Le pape a coûtume de pourvoir en deux manieres ; en forme commissoire, & en forme gracieuse. La forme gracieuse, in formâ gratiosâ, est lorsqu’il pourvoit lui-même sur l’attestation de l’ordinaire, sans lui donner aucune commission pour procéder à l’examen de l’impétrant, lequel peut se faire mettre en possession, autoritate propriâ.

La forme commissoire, qu’on appelle aussi le committatur du pape, est lorsqu’il mande à l’ordinaire de pourvoir ; ce committatur se met en trois formes différentes, savoir in formâ dignum antiquâ, in formâ dignum novissimâ, & in formâ juris.

La forme dignum antiquâ n’est autre chose que la maniere, en laquelle le pape ordonne que les bulles soient expédiées tant par rapport à l’examen des capacités de l’impétrant, que pour la conservation des droits de ceux qui pourroient avoir quelque intérêt à l’établissement & à la possession du bénéfice dont il s’agit. Cette clause a été appellée in formâ dignum, parce que la bulle commence par ces mots : Dignum arbitramur, ut illis se reddat sedes apostolica