Phonétique d’un parler irlandais de Kerry/1-6

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Première partie. Le système consonantique.
Chapitre VI. — h

Chapitre vi

§ 87. h, (écrit th, sh, h, parfois ch, et parfois non noté).

Il n’y a pas, dans notre parler un son h mais des sons h. Comme la répar­tition des diffé­rentes variétés, au reste souvent mal tranchées, est déter­minée extéri­eure­ment, par la place dans le mot, il a paru inutile de distin­guer celles-ci dans la tran­scription, sauf exception.

h peut être sourd ou sonore. h sourd est un h ordinaire compa­rable à l’h aspiré anglais, et moins énergique­ment aspiré que l’h allemand. h est normale­ment sourd à la finale et à l’initiale absolues. Un h final de mot peut cependant être au moins partielle­ment sonorisé sous l’influence d’une initiale sonore suivante, de même qu’un h initial de mot peut l’être sous l’influence d’une finale sonore précé­dente, les actions assimi­latrices qui s’exercent plus ou moins sur toutes les consonnes étant particu­lière­ment sensibles dans le cas de h.

h inter­vocalique est sonore, dans la mesure où ce terme peut s’appliquer exacte­ment à un h.

On a en fait une position des cordes vocales inter­médiaire entre la position fermée, qu’on a pour les sonores, et la position ouverte, qu’on a pour les sourdes ; l’im­pression acous­tique produite est analogue à celle que produi­sent les sons chuchés ; nasales ou liquides précédant ou suivant h « sonore » sont fréquem­ment modifiées dans leur sonorité, phénomène que nous notons par approxi­mation en disant que ces phonèmes peuvent être alors assourdis : il serait plus juste de dire qu’ils sont alors, au moins partielle­ment, « chuchés ».

§ 88. Au point de vue de l’oppo­sition vélaire-palatale, h se règle sur les phonèmes environ­nants et peut être soit neutre, ou faible­ment vélarisé, soit légère­ment pala­talisé ; en finale de mot, h, de qualité indif­férente, a tendance à agir comme une vélaire sur les voyelles d’avant et comme une palatale sur les voyelles d’arrière (cf. §§ 149, 159, 171, 188).

En position inter­vocalique, là où il y a désaccord entre la qualité de la voyelle suivante et celle de la voyelle précé­dente, c’est sur la voyelle suivante que se règle h, qui peut ensuite modifier à son tour la voyelle précé­dente : c’est ainsi qu’on a ahɩrʹ (athair) « père », en face du génitif ɑhər (athar).

Il arrive dans un petit nombre de cas que h soit pala­talisé devant voyelle d’arrière (voir plus bas). Dans ce cas, et dans ce cas seulement, nous notons dans le courant de la tran­scription la palata­lisation, soit .

§ 89. h ne se rencontre en position initiale que dans un petit nombre de mots d’emprunt, dans des inter­jections, ou comme alter­nance gramma­ticale de t, , s, ʃ (dans ce dernier cas, on peut aussi avoir ç, cf. § 68) ou insertion gramma­ticale.

hɑtə (hata) « chapeau » ; hɑrt (heart) « cœur (aux cartes) » ; hᴜⁱʃtʹe꞉ᵊr (hucster­ing ?) « offre (au marché) ».

hɑhəmaχ (thath amach) « dehors ! » (se dit au chien pour qu’il chasse les animaux qui entrent dans la maison) ; hᴜriʃ, « excla­mation employée pour appeler les cochons » ; hiʃ hiʃ, « excla­mation pour faire avancer les vaches », ho꞉valʹɩ ho꞉valʹɩ « appel pour faire rentrer les vaches ».

hɑnəm ən rɪꞏəχ (th’anam o’n riabhach) « le diable emporte ton âme » ho꞉g ʃeꞏ (thóg sé) « il prit », de to꞉gʷɩmʹ (tógaim) « je prends » ; hitʹ ʃeꞏ (thuit sé) « il tomba », de tʹitʹɩmʹ (tuitim) « je tombe » ; hᴜꞏəs (thuas) « en haut » ; hi꞉ᵊs (thíos) « en bas » ; hɑ꞉ⁱgʹ ʃeꞏ (sháidh sé) « il planta », de sɑ꞉ⁱmʹ (sáidhim) « je plante » ; ɑnəhi꞉ᵊlvər (ana­shíolmhar) « très fertile », de ʃi꞉ᵊlvər (síolmhar) « fertile ».

də hlɑ̃꞉ⁱnʹtʹɩ (do shláinte) « ta santé » ou də hl̬ɑ̃꞉ⁱnʹtʹɩ, de slɑ̃꞉ⁱnʹtʹɩ (sláinte) « santé », etc.

ə hᴇ̈꞉ᵊn (a haon) « un (en comptant) », de ᴇ̈꞉ᵊn (aon) « un » ; gə hɑ꞉lɩnʹ (go háluinn) « beau, splendide ».

§ 90. En position médiane ou finale :

bʹrʹeh (breith) « s’emparer de » ; krʹïh (crith) « trembler » ; mah (maith) « bon » ; gə lᴜꞏəh (go luath) « de bonne heure » ; rλh, röh (rith) « courir » ; srλh (sruth) « courant » ; trɑ꞉h (tráth) « temps ».

mo̤lh (molt) « bélier », gén. mʷɪlʹh (muilt) s’entend concurrem­ment à mo̤lt, mʷɪlʹtʹ ; de même fo̤lh pour fo̤lt.

On entend aussi tʹeh (té) « chaud » ; et même nə bɑh (na ba) « les vaches » pour nə ba, cf. § 289.

α (beatha) « vie » ; kahɩnʹ (cathain) « quand » ; kəhᴜ꞉ (cothugh­adh) « nourrir » ; drʌhəd (droichead) « pont » ; gnɑ̃꞉həχ (gnáthach) « usuel » ; is mʹihɩdʹ (is mithid) « il est temps » ; h non pala­talisé et h faible­ment pala­talisé alternent dans la flexion de : kahɩrʹ (cathair) « ville », gén. kɑhərəχ. (cathrach) ; flɑhəs (flaitheas) « royaume », plur. flahɩʃ (flathais) ; sɑhəχ (sathach) « vaisseau, vase », gén. sɛhɩgʹ (soithigh), etc.

Exemples de devant voyelle d’arrière ou mixte d’arrière :

kahʹən (caitheann) « (il) dépense » : kahʹəv (caitheamh) « dépenser » ; α (cheadhna) « déjà » ; mahʹəv (maitheamh) « pardonner » : αmahʹu꞉ⁱlʹ (neamh­maitheamhail) « vindi­catif ».

h écrit ch :

drʌhᴀ̃ᴜ̃rəs (droch­amhras) « suspicion » ; cf. § 63.

h précédé ou suivi de liquides ou nasales : cf. § 238.

Note.
, tʹʃ.

§ 91. Il n’existe pas de demi-occlu­sives en irlandais. Cependant il arrive quelque­fois, tout à fait exception­nelle­ment, que des mots récemment empruntés (à la diffé­rence des emprunts anciens qui ont ʃtʹ‑) à l’anglais conser­vent dans notre parler les sons (écrit en anglais j, dg), et tʹʃ (écrit en anglais tch). Cf. aussi §§ 220 et 251.

On entend ainsi : džo꞉k « joke » ; džʌdž « judge » ; džɑm « jam » ; sɑ꞉sɛdž « sausage ».

matʹʃ « match », et dans deux mots d’origine obscure : sb̬ʹrʹo꞉ⁱtʹʃɑ꞉ⁱlʹ « déchi­queter » ; ɑlfratʹʃ « coquin ».