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L’Encyclopédie/1re édition/OBLIQUE

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OBLIQUITÉ  ►

OBLIQUE, adj. (Gramm.) ce mot en Grammaire est opposé à direct ; on s’en sert pour caractériser certains cas dans les langues transpositives, & dans toutes pour distinguer certains modes & certaines propositions.

1. Il y a six cas en latin : le premier est le nominatif, qui sert à désigner le sujet de la proposition dont le nom ou le pronom fait partie ; & comme la principale cause de l’institution des noms a été de présenter à l’esprit les différens sujets dont nous appercevons les attributs par nos pensées, ce cas est celui de tous qui concourt le plus directement à remplir les vûes de la premiere institution : de-là le nom qu’on lui a donné de cas direct, rectus. Les autres cas servent à présenter les êtres déterminés par les noms ou les pronoms sous des aspects différens ; ils vont moins directement au but de l’institution, & c’est pour cela qu’on les a nommés obliques, obliqui. Voyez Cas.

Priscien & les autres Grammairiens ont imaginé d’autres causes de cette dénomination, mais elles sont si vagues, si peu raisonnables, & si peu fondées, qu’on ne peut s’empêcher d’être surpris du ton serieux avec lequel on les expose, ni gueres moins de celui avec lequel Scaliger (de caus. l. l. lib. IV. cap. lxxx.) en fait la réfutation.

2. On distingue dans les verbes deux especes générales de modes, les uns personnels, & les autres impersonnels. Les premiers sont ceux qui servent à énoncer des propositions, & le verbe y reçoit des terminaisons par lesquelles il s’accorde en personne avec le sujet ; les autres ne servent qu’à exprimer des idées partielles de la proposition, & non la proposition même ; c’est pourquoi ils n’ont aucune terminaison relative aux personnes.

C’est entre les modes personnels que les uns sont directs, & les autres obliques. Les modes directs sont ceux dans lesquels le verbe sert à énoncer une proposition principale, c’est à dire l’expression immédiate de la pensée que l’on veut manifester : tels sont l’indicatif, l’impératif & le suppositif, voyez ces mots. Les modes obliques sont ceux qui ne peuvent servir qu’à énoncer une proposition incidente subordonnée à un antécédent, qui n’est qu’une partie de la proposition principale. Voyez Mode & Incidente. Tels sont le subjonctif qui est presque dans toutes les langues, & l’optatif qui n’appartient guere qu’aux Grecs. Voyez Optatif, Subjonctif.

Le verbe a été introduit dans le système de la parole pour énoncer l’existence intellectuelle des sujets sous leurs attributs, ce qui se fait par des propositions. Quand le verbe est donc à un mode où il sert primitivement à cette destination, il va directement au but de son institution, le mode est direct ; mais si le mode est exclusivement destiné à exprimer une énonciation subordonnée & partielle de la proposition primitive & principale, le verbe y va d’une maniere moins directe à la fin pour laquelle il est institué, le mode est oblique.

3. On distingue pareillement des propositions directes & des propositions obliques.

Une proposition directe est celle par laquelle on énonce directement l’existence intellectuelle d’un sujet sous un attribut : Dieu est éternel ; soyez sage ; il faut que la volonté de Dieu soit faite ; nous serions ineptes à tout sans le concours de Dieu, &c. Le verbe d’une proposition directe est à l’un des trois modes directs, l’indicatif, l’impératif ou le suppositif.

Une proposition oblique est celle par laquelle on énonce l’existence d’un sujet sous un attribut, de maniere à présenter cette énonciation comme subordonnée à une autre dont elle dépend, & à l’intégrité de laquelle elle est nécessaire, il faut que la volonté de Dieu soit faite ; quoi que vous fassiez, faites-le au nom du Seigneur, &c. Le verbe d’une proposition oblique est au subjonctif ou en grec à l’optatif : il n’est pas vrai, même en latin, que le verbe à l’infinitif constitue une proposition oblique, puisque n’étant & ne pouvant être appliqué à aucun sujet, il ne peut jamais énoncer par soi-même une proposition qui ne peut exister sans sujet. Voyez Infinitif.

Toute proposition oblique est nécessairement incidente, puisqu’elle est nécessaire à l’intégrité d’une autre proposition dont elle dépend : il faut que la volonté de Dieu soit faite, la proposition oblique, que la volonté de Dieu soit faite, est une incidente qui tombe sur le sujet il dont elle restraint l’étendue ; il (cette chose) que la volonté de Dieu soit faite, est nécessaire ; quoi que vous fassiez, faites-le au nom du Seigneur, la proposition oblique, que vous fassiez, est une incidente qui tombe sur le complément objectif le du verbe faites, & elle en restraint l’étendue, c’est pour dire, faites au nom du Seigneur le quoi que vous fassiez.

Mais toute proposition incidente n’est pas oblique, parce que le mode de toute incidente n’est pas lui-même oblique, ce qui est nécessaire à l’obliquité, si on peut le dire, de la proposition. Ainsi quand on dit : Les savans qui sont plus instruits que le commun des hommes, devroient aussi les surpasser en sagesse ; la proposition incidente, qui sont plus instruits que le commun des hommes, n’est point oblique, mais directe, parce que le verbe sont est à l’indicatif, qui est un mode direct.

La proposition opposée à l’incidente, c’est la principale ; la proposition opposée à l’oblique, c’est la directe : l’incidente peut être ou n’être pas nécessaire à l’intégrité de la principale, selon qu’elle est explicative ou déterminative, voy. Incidente ; mais l’oblique l’est à l’intégrité de la principale d’une nécessité indiquée par le mode du verbe ; la principale peut être ou directe ou oblique, & la directe peut être ou incidente ou principale, selon l’occurrence. Voyez Principale. (B. E. R. M.)

Oblique se dit en Géométrie de ce qui s’écarte de la situation droite ou perpendiculaire. Voyez Droit & Perpendiculaire.

Angle oblique est un angle qui est ou aigu ou obtus, c’est à dire toute sorte d’angle, excepté l’angle droit. Voyez Angle.

Ligne oblique est une ligne qui tombant sur une autre, fait avec elle un angle oblique. Voyez Ligne.

Une ligne qui tombe sur une autre obliquement, fait d’un côté un angle aigu, de l’autre un angle obtus ; & la somme de ces angles est égale à deux droits.

Plans obliques se dit dans la Gnomonique des plans qui s’écartent du zénith, & qui s’inclinent vers l’horison. Voyez Cadran & Plan.

L’obliquité d’un tel plan ou la quantité de son écartement du zénith se mesure aisément par un quart de cercle, puisqu’elle n’est autre chose que l’arc de quelque azimuth ou cercle vertical, intercepté entre le zénith & le plan proposé. Cet azimuth ou cercle vertical est toujours perpendiculaire au plan dont on veut mesurer l’obliquité.

Percussion oblique est celle dans laquelle la direction du corps choquant n’est point perpendiculaire au corps choqué, ou n’est point dans la ligne du centre de gravité de ce dernier corps. Voyez Percussion.

Projection oblique en Méchanique est celle par laquelle un corps est jetté suivant une ligne qui fait avec l’horison un angle oblique. Voyez Projectile, Balistique, Jet des bombes, &c.

Sphere oblique en Géographie est cette situation de la sphere, dans laquelle l’horison coupe l’équateur obliquement, & dans laquelle l’un des poles est élevé au-dessus de l’horison d’un angle moindre que 90 degrés, mais qui n’est pas zéro ou nul. Voyez Sphere & Droit.

C’est cette obliquité qui occasionne l’inégalité des jours & des nuits. Voyez Nuit & Jour.

Ceux qui ont la sphere oblique, comme nous & tous les habitans des zones tempérées, n’ont jamais les jours égaux aux nuits que dans les équinoxes. Voyez Equinoxe.

Ascension oblique en Astronomie est l’arc de l’équateur, compris entre le premier point d’aries & le point de l’équateur qui se leve avec une-étoile, &c. dans la sphere oblique. Voyez Ascension.

Descension oblique est l’arc de l’équateur, compris entre le premier point d’aries & le point de l’équateur qui se couche avec une étoile &c. dans la sphere oblique ; cet arc se compte de l’occident vers l’orient. Voyez Descension.

Pour trouver, par le moyen du globe, l’ascension & la descension oblique, voyez Globe.

Navigation oblique se dit de la route que fait un vaisseau lorsque courant sous quelque rhumb intermédiaire entre les quatre points cardinaux, il fait un angle oblique avec le méridien, & change à chaque instant de latitude & de longitude. Voyez Rhumb, Navigation & Loxodromie.

La navigation oblique est de trois sortes ; savoir la navigation plane, la navigation de mercator, & la navigation par un grand cercle. Voyez Navigation.

Oblique, en Anatomie, nom de différentes parties dont la situation est oblique, par rapport aux différens plans du corps. Voyez Corps. C’est dans ce sens, qu’on dit les apophyses obliques des vertebres, voyez Obliques. Les muscles obliques ou simplement les obliques supérieurs & inférieurs de la tête, le grand & petit oblique de l’œil, les grands & petits obliques du bas-ventre, &c. Voyez Vertebre, Muscle, Ventre, &c.

L’oblique inférieur de la tête part de l’apophyse épineuse de la seconde vertebre du cou, & va en se grossissant s’insérer obliquement à l’apophyse transverse de la premiere. Quelques auteurs le rangent au nombre des muscles du cou. Voyez Cou.

L’oblique supérieur ou le petit oblique de la tête part de l’apophyse transverse de la premiere vertebre du cou, & va en montant obliquement s’insérer latéralement à la partie inférieure de l’occipital, au-dessous de la tubérosité.

L’oblique supérieur ou le grand oblique de l’œil. Voyez Œil.

Il a son origine dans le fond de l’orbite ; & venant gagner le grand angle de l’œil, il passe à travers une membrane en partie cartilagineuse située à la partie latérale externe de l’apophyse angulaire interne, & qu’on appelle trochlée ou poulie, ce qui le fait appeller lui-même trochléateur ; & de là il se réfléchit dans son extrémité vers la sclorétique, sur la partie postérieure du globe de l’œil où il se termine.

L’oblique inférieur ou le petit oblique de l’œil, sort du bord extérieur de la partie inférieure de l’orbite, près de l’angle interne ; & de-là s’élevant vers l’angle externe, il se termine auprès de l’autre.

Oblique descendant, paire de muscles de l’abdomen, fort larges, & dont chacun couvre une moitié de l’abdomen & une partie du thorax. On le nomme de la sorte par rapport à l’obliquité de leurs fibres. Ils viennent des deux ou trois dernieres vraies côtes & des cinq fausses ; & il est entrelacé par sa partie supérieure avec le grand pectoral, le grand dentelé, au moyen de cinq à six digitations, dont chacune reçoit un nerf des interstices de la côte. Il s’attache inférieurement au bord de la levre externe ou de l’os des isles ; de-là plusieurs de ses fibres tendineuses étant parvenues à l’épine antérieure supérieure, le réfléchissent en formant un replis intérieurement, auquel on a donné le nom de ligament de Fallope ou de Poupart. Elles s’inserent à l’os pubis, & forment le pilier postérieur, tandis que les fibres tendineuses qui se remarquent au-dessus de celle-ci, vont s’attacher à l’os pubis du côté opposé, & former le pilier postérieur. C’est l’écartement qui se remarque entre ces fibres, qu’on appelle l’anneau. Les plans tendineux des digitations supérieures vont se croiser avec celles du côté opposé. Voyez nos Planches anatomiques & leur explication.

L’oblique ascendant est au-dessous de la partie inférieure de l’autre ; il va précisément en sens contraire, c’est-à-dire, de la partie inférieure & postérieure à la partie supérieure & antérieure. Il prend son origine à la crête de l’os des isles, aux apophyses transverses des vertebres des lombes, & se termine au bord cartilagineux formé par la derniere des vraies côtes & par toutes les fausses, & antérieurement à la ligne blanche en formant une espece de gaîne dans laquelle une grande partie du muscle droit est placée. Voyez nos Pl.

L’oblique de l’oreille est attaché dans la partie extérieure du canal de l’aqueduc ; d’où montant par derriere, il entre dans le tambour par une sinuosité oblique qui se trouve immédiatement au-dessous du cercle osseux, auquel le timpan est attaché, & il s’insere ensuite dans la petite apophyse du marteau.

L’oblique du nez ou latéral est étroitement uni avec le pyramidal ; il vient de l’apophyse nasale de l’os maxillaire, & se termine en cartilage mobile près l’os maxillaire.

Oblique ascendant du nez. Voyez Myrti-forme.

Oblique, (Ecrivains.) se dit aussi, dans l’Ecriture, des lignes de pente gauche & droite, sur lesquelles se trouve placée la plus grande partie des traits de l’écriture.

Oblique, Obliquité. (Morale.) Il se dit de toutes les actions qui s’écartent de la vérité, de la justice, de la décence, en un mot de tout ce qui est considéré comme regle de droiture parmi les hommes. Mais outre l’idée d’injustice & d’écart, il s’en trouve encore une autre à l’obliquité, c’est la feinte, la tromperie, la trahison secrete.