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Page:Rabelais marty-laveaux 04.djvu/273

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tiers livre, t. ii, p. 232-244.

Page 232, l. 18 : Comme atteſte Ammianus. Liv. XXII.

Page 235, l. 14 : Pantagruel les tenait à la guorge. Voyez ci-dessus, p. 157-160, la note sur la p. 213.*

* Cette page est la reproduction du frontispice de la dernière édition séparée de Pantagruel, qui a précédé l’impression du roman complet. Pour la description de cette édition et des précédentes, voir notre Bibliographie.

Nous avons établi, par des preuves qui nous paraissent irrécusables (voyez ci-dessus p. 15-19), que le Pantagruel, dont la plus ancienne édition connue est sans date et la première datée de 1533, a paru avant Gargantua, et qu’il était primitivement destiné à servir de suite à l’édition des Grandes Cronicques remaniée par Rabelais et publiée par lui en 1532 (voyez p. 23-56). La Monnoye, dans une note sur la 42e nouvelle de Des Périers, semble croire que Pantagruel a paru avant 1529. Il se fonde sur une phrase du discours de l’écolier limousin, qui se trouve dans le Champ fleury de Geoffroy Tory, publié en 1529, et qui peut paraître tirée de Pantagruel. Nous reviendrons plus loin sur cette question avec quelques détails. Pour le moment, nous nous contentons de rappeler que Rabelais, arrivé à Montpellier seulement en 1530, ne peut guère avoir publié son Pantagruel avant cette époque. D’ailleurs la date des poursuites dirigées par la Sorbonne contre cet ouvrage nous fait connaître celle de sa publication : elle se trouve indiquée, ainsi que le remarque Rathery, par une lettre latine de Calvin, d’octobre 1533, dans laquelle il raconte que la Faculté, cherchant à s’excuser d’avoir fait saisir Le Miroir de l’ame pechereſſe, de Marguerite de Valois, avait déclaré par la bouche de son suppôt, Leclerc, curé de Saint-André-des-Arcs, que ce livre avait simplement été mis à part pour être examiné, et qu’on n’avait tenu décidément condamnables que La Forêt d’amours, Pantagruel, et autres romans obscènes, « ſe pro damnatis habuiſſe obſca ; nos illos Pantagruelem, Syluam amorum, & eius monetæ. »

Pantagruel n’est pas, comme Gargantua, un personnage populaire ; toutefois, bien avant Rabelais, ce mot existe en français comme nom propre et comme nom commun. Comme nom propre il désigne un diable qui paraît plusieurs fois dans les mystères. On le trouve dans les Actes des apotres, par Arnoul et Simon Gresban, représentes en 1478 devant le roi René. Il figure aussi dans la Vie de Saint Louis par perſonnages (Bibl. nation., f. fr. 24331, fo 110, ro), et là un de ses tours est d’exciter la soif, comme le Pantagruel de Rabelais :

Ie vien de la grande cité
De paris [et] y ay eſté
Toute nuit. Onquez tel painne neu.
A cez galanz qui auoyent beu
Hier au ſuer juſqua hebreoz
Tandis qu’ilz eſtoyent au repos
Ie leur ay par ſoutille touche
Bouté du ſel dedenz la bouche
Doucement ſans lez eſueiller.

Mais par ma ſoy au reſueiller
Ilz ont eu plus ſoef la mitié
Que deuant.

Comme nom commun il désigne un violent mal de gorge, une sorte d’angine, qui suffoque et empêche presque absolument de parler. L’auteur du Vergier d’honneur dit en parlant d’un homme parvenu à une extrême vieillesse :

… le Panthagruel le grate
Si tres fort dehors & dedans,
Que parler ne peult…

On lit dans une sotie où il s’agit d’un personnage qui feint d’être muet :

… il a le lempas.
— Non vrayement, il ne l’a pas ;
Tu ſcès bien qu’il n’eſt pas cheual.
— Il a donc quelque aultre mal.
A-il point le Panthagruel ?
— On ne l’a iamais ſi cruel
Qu’il garde de parler aux gens.

(Ancien Théâtre françois, t. II, p. 235 : Sottie nouvelle à ſix perſonnaiges)

M. Picot a conclu de ce dialogue que le Pantagruel de Rabelais était depuis longtemps connu des spectateurs. « Ce motif, dit-il, nous autorise à placer la sottie nouvelle vers 1545. » (Étude sur la sottie, Romania, année 1878, p. 307). On a pu se convaincre, par les deux premiers passages que nous avons cités, que Pantagruel est beaucoup plus ancien que Rabelais.

Comme nos anciens auteurs, Rabelais a tait plus d’une fois allusion à cette signification du nom de son héros : l’écolier limousin « diſoit ſouuent que Pantagruel le tenoit à la gorge » (t. I, p. 243) ; « aultres auons ouy ſus l’inſtant que Atropos leurs couppoit le fillet de vie, ſoy grieſuement complaignans & lamentans de ce que Pantagruel les tenoit à la guorge. » (t. II, p. 235). — (Voyez encore ci-après, à la fin de la note sur la l. 15 de la p. 229,* une variante de l’édition de Marnef). C’est le nom de ce mal de gorge, de gosier, qui a donné à Rabelais l’idée de cette étymologie bouffonne : « Panta en Grec vault autant à dire comme tout, & Gruel en langue Hagarene vault autant comme altéré. » (t. I, p. 228). Le nom du peuple, les « Dipſodes, » du grec διψάω « je suis altéré, » s’accorde parfaitement avec celui du souverain.

* Il fera choſes merueilleuſes, & s’il vit il aura de l’eage. On s’attend après ces mots s’il vit à quelque promesse extraordinaire, comme dans ce passage de L’yſtoire des ſept ſages (ch. II, éd. de la Société des anciens textes français, p. 61) : « Quant les ſept maiſtres ouyrent la reſponſe dirent entre eux : ſi ceſtuy enfant vit, y ſera de luy quelque grant chouſe degne de memoire. » La plaisanterie consiste dans cette attente trompée. Cette phrase était devenue du reste une sorte de locution proverbiale : « Vous ſerez homme de bien, s’il n’y a faute ; ſi vous viuez vous aurez de l’aage. » (Noël du Fail, t. I, p. 54.) — On lit à la fin de ce chapitre dans l’édition de Marnef : « Ceulx ſont deſcenduz de Pantagruel qui boyuent tant au Soir que la nuyt ſont contrainctz de eulx leuer pour Boire et pour eſtaindre la trop grand ſoif et charbon ardant que ilz ont dedans la gorge. Et ceſte ſoif ſe nomme Pantagruel pour ſouuenance et memoire dudit Pantagruel. »

Page 236, l. 7 : Par la relation du Prophète. — Les Juges, c. 9.

Page 240, l. 23 : Le reſte empliſſans d’eau, comme font les Limoſins à belz eſclotz. « Aux beaux sabots, » dit Éloi Johanneau, qui évidemment croit voir là une parodie de cette expression de l’Iliade : « les Achaiens aux belles cnémides. » Burgaud des Marets combat avec raison cette explication et dit fort justement que les charretiers « remplissaient d’eau à pleins sabots le vide qu’ils avaient fait, » Cette locution est analogue à celle de « mordre à belles dents, » qui est encore en usage.

Page 241, l. 3 : Cela eſt eſcript. — Pline, XVI, 35.

L. 30 : Aſbeſton. Voyez ci-dessus, p. 81, la note sur la l. 28 de la p. 23.*

* La pierre dicte ἄσβεστος n’eſt plus inextinguible. Ce mot ἄσβεστος, qu’on a traduit par aſbeſte, désigne une substance qu’on ne peut consumer, qu’on ne peut éteindre. Voyez La pierre inextinguible, ditte Aſbeſtos (Œuvres de Remy Belleau, t. II, p. 246, édit. Lemerre).

L. 31 : Le climat Dia Cyenes. — Dia est la préposition grecque διά « à travers. »

Page 242, l. 23 : Que Alexander Cornelius nommoit Eonem. « Alexander Cornelius arborem eonem appellavit, ex qua facta esset Argo, similem robore viscum ferenti, quæ nec aqua, nec igni posset corrumpi, sicut nec viscum. » (Pline, XIII, 22). Eonem est l’accusatif d’eone.

Page 244, l. 1 : Congneut Cæſar l’admirable nature de ce boys. Voyez Vitruve, II, 9.