La Démocratie devant la science/Table des matières
Félix Alcan, (p. TdM).
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION | ||
Première partie. — L’idéal égalitaire et la morale « scientifique ». | ||
I. | Puissance des idées égalitaires dans notre civilisation. — Le mouvement des institutions démontre cette puissance ; la conspiration des doctrines philosophiques et des formes sociales propres à l’Occident l’explique. — Mais cela ne suffit pas à démontrer la valeur des idées en question. | 1 |
II. | La conscience contemporaine, défiante à l’égard non seulement des religions, mais des métaphysiques, attend un « mètre des valeurs » de la science elle-même. — Le progrès des sciences, et en particulier des sciences de la vie, qui enveloppent l’homme, encourage cette espérance. | 5 |
III. | Formes antérieures de la morale scientifique. — Le naturalisme des Grecs. — Le mathématisme de Spinosa, de Kant. — Dans l’utilitarisme, à côté du calcul, la part de l’expérience grandit. — Mais tous ces systèmes de morale semblent encore laisser trop de place aux préférences subjectives ; on veut « laisser parler les faits », consulter directement les lois de la nature. D’où le prestige d’une morale scientifique naturaliste. | 10 |
IV. | Mais cette morale ne va-t-elle pas juger le mouvement démocratique avec sévérité ? — Témoignages des savants contre l’idéal égalitaire. — Exploitation de ces témoignages par la littérature politique. — Entre la démocratie et la science, l’antagonisme serait essentiel. | 15 |
Deuxième partie. — Les trois piliers du naturalisme contemporain. | ||
La conception « objective » de la nature. Les trois lois qui la fondent (Milne-Edwards, Lamarck, Darwin). | 21 | |
I. | Théorie de la différenciation. — Conséquences précieuses de la division du travail. — Elle progresse comme progressent les organismes. — Elle remplit d’autant mieux son rôle que les organes sont plus nettement différenciés. | 22 |
II. | Théorie de l’hérédité. — En même temps que hiérarchie, il y a continuité d’une forme de l’être à une autre. — C’est que les transformations des espèces s’expliquent par les effets de l’habitude transmis eux-mêmes par l’hérédité. | 26 |
III. | Théorie de la concurrence. — La sélection automatique différencie et perfectionne les êtres, tout comme la sélection artificielle. — C’est que le nombre croissant des êtres les force à lutter pour survivre : les meilleurs triomphent. — Progrès que cette théorie fait faire à la conception mécaniste de la nature : elle n’implique aucun finalisme. | 30 |
À ces trois théories correspondent les trois formes principales de la sociologie naturaliste (Anthroposociologie, Théorie organique, Darwinisme social). | 35 | |
LIVRE I | ||
Hérédité. | ||
Position du problème. — La philosophie des races et l’anthroposociologie. — L’apologie scientifique des castes, de la noblesse, de la bourgeoisie. | 37 | |
Note bibliographique. | ||
Chapitre I. — Le Lamarckisme et l’Hérédité des qualités professionnelles. | ||
L’apologie du régime des castes implique la solidité des principes posés par Lamarck. | 44 | |
I. | Restrictions imposées au lamarckisme par le progrès de la biologie. — Le weismanisme : ses arguments théoriques et ses arguments expérimentaux. — Sélection et panmixie. | 46 |
II. | Le weismanisme limité à son tour. — Observations nouvelles, concessions forcées. — Comment la question se précise aujourd’hui et ce qui manque pour la résoudre. | |
Mais le lamarckisme sort du débat diminué : il faut, pour que les qualités acquises se transmettent, des circonstances exceptionnelles. — La transmission des qualités professionnelles est en tous cas invraisemblable : lois du retour à la moyenne, et de l’instabilité des complexes. — Différences entre les coordinations instinctives et les coordinations intelligentes. Importance croissante des « causes actuelles ». | 52 | |
III. | Confirmation de ces résultats généraux par les recherches spéciales portant sur le monde humain. — Les dynasties d’hommes célèbres. — Elles ne prouvent nullement l’existence d’une hérédité professionnelle. — Difficulté de discerner l’apport de l’hérédité et l’apport de l’éducation. | 59 |
IV. | Examen du « cas privilégié » de la civilisation hindoue. — Il est impossible d’y relever rien qui ressemble à une prédestination professionnelle des membres des diverses castes. — La thèse des apologistes de la caste reste invérifiable autant qu’invraisemblable. | 66 |
Chapitre II. — Noblesse, métissage et dégénérescence. | ||
I. | L’aristocratie. Les services qu’elle a partout rendus à la civilisation. — La décadence des peuples expliquée par la disparition des classes nobles, où les talents se concentrent. | 73 |
II. | Réquisitoire contre le métissage : ses fâcheuses conséquences physiques et mentales. — Mais l’observation ne confirme pas ces arguments. | 76 |
III. | Inversement l’observation prouve la nécessité des croisements : dégénérescence des aristocraties. Qu’elle ne s’explique sans doute pas par les seuls mariages consanguins ? par les fâcheux effets du surmenage intellectuel ? ou du privilège lui-même ? — Isolement et étiolement. | 85 |
Chapitre III. — La bourgeoisie et le renouvellement anthropologique. | ||
I. | Comment les classes survivent, et ce qui les sépare : faut-il viser à maintenir ou à diminuer leurs distances ? — Il faut, nous dit-on, que les ascensions sociales soient possibles, mais il est heureux qu’elles soient difficiles. — On démontre a priori qu’aucune capacité n’est perdue. Faiblesse de cette démonstration. | 91 |
II. | Effets fâcheux de l’institution des classes sur la vitalité, la mortalité, la nuptialité chez les classes « supérieures ». | 98 |
III. | Ses effets chez les classes déshéritées. — L’institution n’a pas la valeur sélective qu’on lui attribue. — L’extrême inégalité des puissances économiques empêche souvent l’utilisation sociale des facultés naturelles. | 103 |
LIVRE II | ||
Différenciation. | ||
Position du problème — La différenciation des organismes, modèles des sociétés, entraîne la disparition de la liberté et de l’égalité de leurs éléments : d’où le caractère dangereux, parce qu’ « antiphysique » des tendances démocratiques. — Exemple d’une argumentation contre la « tendance collectiviste ». | 111 | |
Note bibliographique. | ||
Chapitre I. — Différenciation et Progrès. | ||
Discussion de la thèse qui mesure le progrès à la différenciation. | 117 | |
I. | Restrictions préalables : La différenciation n’est jamais absolue, même dans les organismes supérieurs. — Des ressemblances subsistent, des rapports sont institués entre les éléments différenciés. | 118 |
II. | La différenciation n’est assurément pas avantageuse pour ces éléments : ils y perdent en puissance aussi bien qu’en indépendance. — Mais les organismes différenciés eux-mêmes ne sont forcément ni les plus durables, ni les plus féconds, ni les plus plastiques. | 122 |
III. | Leur rôle dans l’économie générale de la nature n’est pas le plus important. — Si nous continuons à les déclarer « supérieurs », c’est parce qu’ils sont les porteurs de l’esprit. — Mais ce n’est plus là un critère objectif. | 129 |
Chapitre II. — Les formes de la division du travail dans la société. | ||
Comment nous discuterons la thèse qui assimile les sociétés aux organismes. | 135 | |
I. | Comment l’influence de la biologie a pu nous aider à élargir la théorie de la division du travail, telle qu’elle avait été élaborée par les économistes. — Mais qu’elle n’a nullement suggéré les distinctions sociologiques indispensables : spécialisation des professions, décomposition des opérations, sectionnement de la production. | 137 |
II. | Distinction de l’aspect technique et de l’aspect juridique, des formes et des régimes de la production. — Exemples des questions auxquelles il faudrait répondre. | 143 |
III. | Confusions impliquées dans la thèse générale des apologistes de la différenciation sociale. — Possibilité de retourner cette thèse ; mais insuffisance de cette argumentation. — Au point de vue technique, le travail se divise en effet de plus en plus dans les sociétés humaines comme dans les organismes. — Mais la différenciation juridique n’accompagne pas forcément cette spécialisation technique : caractère exceptionnel, ou du moins transitoire du régime des castes. — De plus en plus les liens se détendent entre le métier et la situation juridique. | 146 |
IV. | La complication sociale : les groupements partiels se multiplient et s’entre-croisent de plus en plus. — Comment ce phénomène peut expliquer le progrès de la différenciation individuelle, essentiellement distincte de la différenciation sociale. — Insuffisance des analogies biologiques pour la connaissance de l’évolution des sociétés. | 154 |
Chapitre III. — La lutte de la différenciation et de la complication sociales. | ||
En quel sens et sur quels points la démocratie s’oppose à la différenciation. | 160 | |
I. | La distinction entre les formes techniques et les régimes juridiques de la division du travail n’est pas utilisée et est méconnue au contraire par le matérialisme historique. — En réalité la hiérarchie des situations commande le plus souvent la répartition des fonctions : constatation qui ébranle les plaidoyers naturalistes en faveur de la différenciation sociale. — La « division du travail contrainte » : il faudrait que d’égales possibilités fussent ouvertes aux puissances inégales. | 160 |
II. | S’il est vrai que dès à présent il n’y a plus de classes. — Distinction de l’aspect juridico-politique et de l’aspect juridico-économique du problème. — Effets produits par la coexistence du régime actuel de la propriété avec certaines formes de l’industrie : la « prolétarisation », le Theilindividuum, la civilisation réduite, pour beaucoup, à un dressage qui les transforme en machines. — Il survit donc une différenciation qui enraie les tendances émancipatrices de la complication sociale : pourquoi les groupements destinés à défendre les « intérêts de classe » priment aujourd’hui les autres dans le monde ouvrier. | 167 |
III. | Réserves formulées, au nom des faits, contre les thèses que nous venons de résumer. — Comment ces thèses peuvent cependant se défendre. — Quelles observations seraient nécessaires pour trancher ce débat. — Intervention indéniable d’un idéal plus ou moins nettement aperçu : en quel sens le socialisme serait l’héritier légitime de l’individualisme. — Illusion de ceux qui escomptent, pour résoudre de pareilles questions, les enseignements de la biologie. | 179 |
LIVRE III | ||
Concurrence. | ||
Position du problème. — Le pessimisme darwinien ; les conséquences sociales qu’on en tire. — Si les prescriptions de l’économie politique orthodoxe sont confirmées par les résultats des sciences naturelles. | 187 | |
Note bibliographique. | ||
Chapitre I. — La limitation du Darwinisme. | ||
I. | Distinction des diverses formes de la lutte pour la vie ; elles ne sont pas toutes brutales et sanglantes. — Mais la théorie de la sélection naturelle nous enferme dans une conception toute mécaniste du progrès ; comment le darwinisme élimine le finalisme non seulement transcendant, mais immanent. | 194 |
II. | Théorie de la sélection sexuelle : la part qu’elle reconnaît à l’amour dans la direction de l’évolution. — En quel sens elle rapproche les procédés de la nature de ceux de l’homme, et permet une sorte de réintégration de l’idéalisme au sein de l’évolutionnisme. | 198 |
III. | Limitation de la théorie darwinienne. — Ambiguïté du terme « les plus aptes ». La concurrence n’aboutit pas toujours au perfectionnement. — De plus sa puissance est négative plutôt que positive, limitative plutôt que productive. — Théories récentes destinées à expliquer les métamorphoses des espèces : devant ces théories, l’importance du facteur darwinien décroît. — [Théorie de la sélection « organique » ou « subjective ».] | 207 |
IV. | Le rôle des principes contraires au principe de la guerre universelle. — Interprétation « solidariste » de certains faits invoqués par le darwinisme : passage de l’antagonisme à la symbiose. — Si la concurrence est forcément portée à son maximum, à l’intérieur d’une même espèce. — Multiplicité et diversité des formes d’association dans le monde animal et comment elles contribuent au progrès. | 215 |
Einseitigkeit du darwinisme. Libération de l’idéal humain. | 227 | |
Chapitre II. — Les conditions humaines de la lutte pour la vie. | ||
La réintégration de l’homme dans la nature : équivoques auxquelles expose l’évolutionnisme. | 229 | |
I. | L’homme faiseur d’outils : le monde artificiel par l’intermédiaire duquel il s’adapte le monde naturel. — Le système des fins superposé au système des moyens : l’action, directe ou indirecte, de la société sur les buts proposés à l’effort vers la vie. | 232 |
II. | Effets des moyens propres à l’homme sur la lutte pour la vie : ils permettent des économies d’éliminations. — Mais n’entravent-ils pas par là même la sélection ? Elle peut être contrariée par l’inégale distribution des pouvoirs extrinsèques : le parasitisme social. | 237 |
III. | Effets des fins propres aux hommes. — Plus ils se civilisent, plus tous les ressorts de leur activité sont tendus ; conséquences de cette suractivité pour la vie matérielle et spirituelle. — Efforts de la civilisation pour réglementer et atténuer la lutte. La paix par le droit. — Tendance normale et formes variées de l’intervention collective. Jusqu’où pourra-t-elle aller ? | 243 |
Chapitre III. — Libre concurrence et solidarisme. | ||
Position actuelle de la question. Les critiques que l’économie politique orthodoxe adresse au « réformisme » démocratique sont-elles justifiées par les sciences naturelles ? | 251 | |
I. | En quel sens le régime de la libre concurrence, bien loin de représenter un état de nature, est l’œuvre des lois. — Mais tel quel, il serait pour nos sociétés une nécessité vitale, étant le plus propice à la mise en valeur des ressources de la nature et des facultés des hommes. — Déperditions entraînées par « l’anarchie économique ». — La concurrence est-elle indispensable à l’invention ? Et de quelles supériorités assure-t-elle la prédominance ? — Ce qui fausse dans nos sociétés l’application de la loi darwinienne : en quel sens c’est la démocratie qui prétend universaliser la concurrence. | 251 |
II. | Interprétation plus profonde des tendances démocratiques. Le « solidarisme » : quels aspects de la réalité et de l’idéal il met en lumière. — Le droit au produit intégral du travail ; pourquoi il est impraticable et insuffisant : caractère collectif de la production. — Théorie de la dette sociale. Utilité supérieure des « socialisations du droit » ; la volonté de vie commune, le droit à la vie. — Les « plus aptes » au sens humain. | 265 |
Solidarisme et individualisme. | 278 | |
CONCLUSION | ||
Résultats généraux des discussions instituées. Diversité de nos tactiques. | 283 | |
I. | Nous avons, en les précisant, limité la portée et diminué le prestige des lois naturelles qu’on nous opposait. — Nous avons démontré, en un certain sens, que ces lois ne sont nullement contrariées par les efforts des sociétés démocratiques. — Mais, à d’autres points de vue, nous avons reconnu que des forces et des fins nouvelles entrent en ligne de compte dans ces sociétés : en quel sens elles essaient en effet de dépasser la nature. | 284 |
II. | Cette duplicité d’attitude s’explique par la duplicité essentielle des sociétés humaines, méconnue par la sociologie naturaliste. — Incompétence fatale de la morale qu’elle nous proposait : elle ne suffit pas à déterminer, pour nos sociétés, même le possible, a fortiori le désirable. — Conclusion dirigée à la fois contre ceux qui pensaient prouver « scientifiquement » que la démocratie a tort et contre ceux qui pensaient prouver « scientifiquement » qu’elle a raison. | 289 |
III. | Mais si la morale scientifique tenait compte de la nature spéciale aux sociétés humaines ? Si elle se fondait sur la sociologie proprement dite et non plus sur la biologie ? — Nécessité d’attendre que l’expérience en ait été faite. — Toutefois, jusqu’ici, dans les études expérimentales consacrées aux sociétés démocratiques, on sent la présence d’un idéal qui juge les faits bien plutôt qu’il n’est jugé par eux. — Qu’il est difficile de dégager objectivement, par une méthode comparative, ce qui est normal pour nos sociétés. — En tout état de cause les inférences sociologiques paraissent supposer, pour posséder une efficacité morale, l’existence préalable de certains sentiments. — L’esprit social et le sentiment individualiste : leur synthèse dans les aspirations égalitaires. — La philosophie morale et la démocratie. | 294 |
Valeur émancipatrice de nos conclusions. | 302 |