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Les Alchimistes toujours occupés de merveilles, ne se sont point oubliés sur le chapitre de l’antimoine ; ils ont donné à cette substance une infinité de noms mystérieux, par lesquels on a voulu indiquer les propriétés de ce demi-métal, dont on n’avoit que des idées très-imparfaites ; c’est ainsi qu’on l’a appellé lupus, proteus, ultimus judex, plumbum sacrum, marcasita saturni, plumbum philosophorum, plumbum nigrum, magnesia plumbi, radix metallorum, omnia in omnibus, le lion rouge, le lion oriental, &c. Quelques-uns ont cru qu’il étoit susceptible d’être converti en un métal plus parfait, & l’on a sur-tout vanté l’antimoine qui venoit des mines d’or de Hongrie, parce qu’on étoit dans la persuasion qu’il contenoit un soufre solaire. On ne s’arrêtera point à refuter toutes ces idées romanesques qui n’ont aucun fondement.

Les Chimistes plus raisonnables regardent l’antimoine comme composé de trois substances ; 1°. d’une terre métallique, qui a la propriété de se vitrifier, comme on le voit par le verre d’antimoine ; 2°. d’une substance arsénicale, à laquelle on attribue sa volatilité, & la propriété qu’il a d’exciter le vomissement ; 3°. du phlogistique, ou de la matiere inflammable qui donne à toutes les substances métalliques la forme qui leur est propre, & qui, lorsqu’elle leur est enlevée, les laisse dans l’état d’une terre ou d’une chaux.

L’antimoine a la propriété de dissoudre tous les métaux, à l’exception de l’or ; c’est pour cela qu’on s’en sert avec succès pour purifier ce roi des métaux, de tous ceux avec qui il peut être allié. Voyez Or. Mais dans cette opération ce n’est point la partie réguline de l’antimoine qui purifie l’or ; c’est le soufre avec le quel il est uni qui décompose l’argent, le cuivre, le fer, ou le plomb, qui étoient alliés avec l’or ; ce qui est si vrai, que jamais on ne parviendroit à purifier l’or, si on n’employoit que du régule d’antimoine ; il faut pour produire cet effet de l’antimoine crud, qui est chargé de soufre, comme on l’a fait observer.

Le régule d’antimoine entre dans un grand nombre d’alliages métalliques. On en met avec l’étain, dans le bronze, &c.

C’est sur-tout dans la médecine & dans la pharmacie que son usage est le plus étendu ; la propriété qu’il a à faire vomir le rend très-propre à dégager l’estomac, & les premieres voies des humeurs qui l’embarrassent ; mais les préparations de l’antimoine demandent à être faites par une main habile, vû que c’est de-là que dépendent ses bons ou ses mauvais effets. Il faut aussi que le médecin, avant que de l’administrer, consulte le tempérament & la force de son malade. Il est nécessaire d’observer que les acides tirés des végétaux, tels que le vinaigre, le jus de citron, &c. donnent beaucoup plus d’activité aux préparations de l’antimoine ; c’est donc une méthode absurde & dangereuse, que celle de quelques médecins, qui ordonnent de la limonnade aux malades qui sont trop fatigués par les effets du tartre émétique, vû que par là loin d’amortir son action, ils l’augmentent considérablement. On ne courra aucun risque lorsqu’on donnera une petite quantité du tartre émétique, préparé de la maniere qui a été indiquée, dans un grand volume d’eau chaude. La méthode que M. Rouelle recommande, est de faire dissoudre quatre grains de ce tartre dans une chopine d’eau, que l’on divisera en quatre verres, & que le malade prendra de quart d’heure en quart d’heure, jusqu’à ce qu’il commence à vomir ; alors il cessera d’en prendre, & boira une grande quantité d’eau chaude ; ce qui empêchera l’incommodité & le danger du remede.

Ce sont apparemment les mauvais effets de l’antimoine, ou plûtôt la mauvaise maniere de l’administrer, qui ont fait autrefois regarder cette substance comme un poison. Tout le monde sait que l’antimoine

a été jadis proscrit par arrêt du parlement de Paris. Les ouvrages de plusieurs médecins du siecle passé sont remplis de déclamations étranges contre un remede, qui sera infiniment utile, lorsqu’il sera donné à propos & avec les précautions nécessaires. (—)

Régules, nom que les Horlogers donnent à deux petits poids qui servoient autrefois à régler les horloges ; ils se mettoient sur le folio de chaque côté de son centre de mouvement ; de façon qu’en les approchant plus ou moins près de ce centre, on parvenoit à régler l’horloge. Voyez nos Planches de l’Horlogerie.

RÉGULIER, adj. (Gramm.) Voyez Regularité.

Regulier, ere, adj. il y a en Grammaire des mots réguliers & des phrases régulieres. Les mots déclinables sont réguliers, lorsque la suite des terminaisons que l’usage leur a accordées est semblable à la suite des terminaisons correspondantes du paradigme commun à tous les mots de la même espece. Les phrases sont régulieres lorsque les parties en sont choisies & ordonnées conformément aux procédés autorisés par l’usage de la langue dans les cas semblables. Voyez Irrégulier, Anomal, Hétéroclite, Paradigme, Phrase & Proposition.

Régulier, en terme de Géométrie ; une figure réguliere est celle dont tous les côtés & tous les angles sont égaux entre eux. Voyez Figure.

Le triangle équilatéral & le quarré, sont des figures régulieres. Voyez Quarré & Triangle. Toutes les autres figures régulieres qui ont plus de quatre côtés, sont appellées polygones réguliers. Voyez Polygone. Il n’y a point de figure réguliere qu’on ne puisse inscrire dans le cercle. Voyez Cercle. Sur les propriétés, &c. des figures régulieres, voyez Polygone.

Un corps régulier que l’on appelle aussi corps platonique, est un solide terminé de tous côtés par des plans réguliers & égaux, & dont tous les angles solides sont égaux. Voyez Corps, Plan & Solide.

Il n’y a que cinq corps réguliers, savoir l’hexahedre ou le cube, qui est composé de six quarrés égaux ; le tétrahedre, de quatre triangles égaux ; l’octahedre, de huit ; le dodecahedre. de douze pentagones, & l’icosahedre, de vingt triangles égaux. Voyez Cube, Tetrahedre, Octahedre, &c. Ces cinq corps sont les seuls de cette espece qui existent dans la nature.

Maniere de mesurer la surface & la solidité des cinq corps réguliers. On a donné la méthode de trouver la solidité du cube au mot Cube. Le tétrahedre étant une pyramide, & l’octahedre une double pyramide ; l’icosahedre étant composé de vingt pyramides triangulaires, & le dodécahedre un solide compris sous 12 pyramides à 5 angles, dont les bases sont dans la surface de l’icosahedre & du dodécahedre, & les sommets au centre ; on peut trouver la solidité de ces corps par les regles que nous avons données au mot pyramide. Voyez Pyramide. On a leur surface en trouvant celle d’un des plans au moyen des lignes qui le terminent (voyez Triangle) ; & en multipliant l’aire ainsi trouvée par le nombre dont le corps reçoit sa dénomination ; par exemple par 4 pour le tétrahedre, par 6 pour l’exahedre ou cube, par 8 pour l’octahedre, par 12 pour le dodécahedre, & par 20 pour l’icosahedre. Le produit donnera la surface de ces solides. Voyez Aire & Superficie.

Proportion de la sphere & des cinq corps réguliers qui y sont inscrits, le diametre de la sphere étant supposé égal à 2.

La circonférence d’un grand cercle est 6. 28318.
Surface d’un grand cercle, 3. 14159.
Surface de la sphere, 12. 56637.
Solidité de la sphere, 4. 18859.
Coté du tétrahedre, 1. 62299.
Surface du tétrahedre, 4. 6188.
Solidité du tétrahedre, 0. 15132.