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tous les autres arts agréables, la médiocrité, dont les oreilles peu délicates se contentent, est insupportable à celles que l’expérience & le goût ont formées. Tous les chanteurs & chanteuses qui composent l’académie royale de Musique sont dans cette position.

L’opéra est le lieu d’où la médiocrité, dans la maniere de chanter, devroit être bannie ; parce que c’est le lieu où on ne devroit trouver que des modeles dans les différens genres de l’art. Tel est le but de son établissement, & le motif de son érection en académie royale de Musique.

Tous les sujets qui composent cette académie devroient donc exceller dans le chant, & nous ne devrions trouver entr’eux d’autres différences que celles que la nature a pû répandre sur leurs divers organes. Que l’art est cependant loin encore de cette perfection ! Il n’y a à l’opéra que très-peu de sujets qui chantent d’une maniere parfaite ; tous les autres, par le défaut d’adresse, laissent dans leur maniere de chanter une infinité de choses à desirer & à reprendre. Presque jamais les sons ne sont donnés ni avec la justesse, ni avec l’aisance, ni avec les agrémens dont ils sont susceptibles. On voit par-tout l’effort ; & toutes les fois que l’effort se montre, l’agrément disparoît. Voyez Chant, Chanteur, Maître à chanter, Voix.

Le poëme entier d’un opéra doit être chanté ; il faut donc que les vers, le fond, la coupe d’un ouvrage de ce genre, soient lyriques. Voyez Coupe, Lyrique, Opéra. (B)

* CHANTERELLA, s. f. (Bot.) M. Tournefort comprend sous cette dénomination tous les champignons qui ont la tête solide, c’est-à-dire qui ne l’ont ni laminée, ni poreuse, ni treillissée, qui sont sans piquans, & qui ne se tournent point en poussiere en mûrissant. Voyez Champignon.

* CHANTERELLE, s. f. (Luth. & musiq. instr.) c’est ainsi qu’on appelle la corde la plus aigue du violon & autres instrumens à corde.

Chanterelle, (Chapel.) c’est dans l’arçon des Chapeliers la partie qui sert à faire resonner la corde, dont le son indique à l’ouvrier qu’elle est assez bandée pour battre & voguer. Voyez les articles Arçon & Chapeau.

Chanterelle, en terme de Tireur d’or, est une petite bobine sous laquelle passe le battu en sortant des roues du moulin. On la nomme ainsi à cause du bruit qu’elle fait.

* Chanterelle, (Chasse.) c’est ainsi qu’on appelle les oiseaux qu’on a mis en cage, pour servir d’appeaux à ceux à qui on a tendu quelques piéges. On met la perdrix femelle au bout des sillons où l’on a placé des passées & des lacets, & elle y fait donner les mâles en les appellant par son chant.

CHANTEUR, EUSE, s. (Musicien.) acteur de l’opéra, qui récite, exécute, joue les rôles, ou qui chante dans les chœurs des tragédies, & des ballets mis en musique.

Les chanteurs de l’opéra sont donc divisés en récitans & en choristes, & les uns & les autres sont distingués par la partie qu’ils exécutent ; il y a des chanteurs hautes-contres, tailles, basses-tailles ; des chanteuses premiers & seconds-dessus. Voyez tous ces différens mots, & l’article Parties.

Parmi ceux qui exécutent les rôles, il y a encore une très-grande différence entre les premiers chanteurs, & ceux qui en leur absence (par maladie ou défaut de zele) les remplacent, & qu’on nomme doubles.

Les chanteurs qui jouent les premiers rôles sont pour l’ordinaire les favoris du public ; les doubles en sont les objets de déplaisance. On dit communément : cet opéra n’ira pas loin, il est en double.

L’opéra de Paris est composé actuellement de dix-sept chanteurs ou chanteuses récitans, & de plus de cinquante chanteurs & chanteuses pour les chœurs. Voyez Chœurs. On leur donne communément le nom d’acteurs & d’actrices de l’opéra ; & ils prennent la qualité d’ordinaires de l’académie royale de Musique. Les exécutans dans l’orchestre & dans les chœurs prennent aussi la même qualité. Voyez Opéra & Orchestre.

Nous jouissons de nos jours d’un chanteur & d’une chanteuse qui ont porté le goût, la précision, l’expression, & la légereté du chant, à un point de perfection qu’avant eux on n’avoit ni prévû ni crû possible. L’art leur est redevable de ses plus grands progrès ; car c’est sans doute aux possibilités que M. Rameau a pressenties dans leurs voix flexibles & brillantes, que l’opéra doit ces morceaux saillans, dont cet illustre compositeur a enrichi le chant François. Les petits Musiciens se sont d’abord élevés contre ; plusieurs admirateurs du chant ancien, parce qu’ils n’en connoissoient point d’autre, ont été revoltés, en voyant adapter une partie des traits difficiles & brillans des Italiens, à une langue qu’on n’en croyoit pas susceptible ; des gens d’un esprit étroit, que toutes les nouveautés allarment, & qui pensent orgueilleusement que l’étendue très-bornée de leurs connoissances est le nec plus ultrà des efforts de l’art, ont tremblé pour le goût de la nation. Elle a ri de leurs craintes, & dédaigné leurs foibles cris : entraînée par le plaisir, elle a écouté avec transport, & son enthousiasme a partagé ses applaudissemens entre le compositeur & les exécutans. Les talens des Rameau, des Jeliote, & des Fel, sont bien dignes en effet d’être unis ensemble. Il y a apparence que la postérité ne s’entretiendra guere du premier, sans parler des deux autres. Voyez Exécution.

En conformité des lettres-parentes du 28 Juin 1669, par lesquelles l’académie royale de Musique a été créée, & des nouvelles lettres données le mois de Mars 1671, les chanteurs & chanteuses de l’opéra ne dérogent point. Lorsqu’ils sont d’extraction noble, ils continuent à jouir des priviléges & de tous les droits de la noblesse. Voyez Danseur.

Les chanteurs & les chanteuses qui exécutent les concerts chez le Roi & chez la Reine, sont appellés ordinaires de la Musique de la chambre du Roi. Lorsque Louis XIV. donnoit des fêtes sur l’eau, il disoit, avant qu’on commençât le concert : je permets à mes Musiciens de se couvrir, mais seulement à ceux qui chantent.

Il y a à la chapelle du Roi plusieurs castrati qu’on tire de bonne heure des écoles d’Italie, & qui chantent dans les motets les parties de dessus. Louis XIV. avoit des bontés particulieres pour eux ; il leur permettoit la chasse dans ses capitaineries, & leur parloit quelquefois avec humanité. Ce grand roi prenoit plaisir à consoler ces malheureux de la barbarie de leurs peres. Voyez Castrati, Chant, Chantre, Exécution, Opéra. (B)

Chanteur, (oiseau.) voyez Roitelet.

CHANTIÉES, (Jurispruden.) voyez ci-devant Chantelage.

* CHANTIER s. m. ce mot a plusieurs acceptions, dont quelques-unes n’ont aucun rapport avec les autres.

Les Menuisiers, les Charpentiers, les Constructeurs de vaisseaux, les Marchands de bois, les Constructeurs de trains, les Cordiers, les Tonneliers, &c. ont leurs chantiers.

Chantier, terme de Marine, est l’endroit où l’on construit un vaisseau. On dit un chantier de construction ; mettre un vaisseau sur le chantier ; l’ôter du chantier, &c.

Le chantier proprement dit est l’endroit où l’on