Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/121-130

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Fascicules du tome 1
pages 111 à 120

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 121 à 130

pages 131 à 140


& d’un mérite distingué : on adore, en se dévouant entièrement au service de ce qu’on aime : on honore par les attentions, les égards & les politesses : on révère en donnant des marques d’une haute estime, & d’une considération au-dessus du commun. M. Diderot.

ADORF, AUDORF. Petite ville de la Haute-Saxe. Adorfium. Elle est dans la Misnie, sur l’Ester, au-dessous de Plawen.

ADOS. s. m. Terme de Jardinage. Terre élevée en talus contre une muraille bien exposée. On sème des pois & des féves sur un ados, pour les avancer plus qu’en pleine terre, parce que la réfléxion du soleil échauffe ces talus. Les laitues ont besoin d’un bon ados pour venir promptement. On donne à la terre ainsi élevée, le nom d’ados, parce qu’elle est en talus, & qu’elle forme une espèce de dos ; Id. ou bien parce qu’elle est au dos du mur, adossée, appuyée contre le mur.

ADOSSER. v. a. mettre le dos contre quelque chose. Applicare dorsum. On adosse un enfant contre un mur, pour l’empêcher de tomber. ☞ Les nouveaux Vocabulistes qui expliquent ce verbe, pris dans cette signification, par dorso incumbere, n’ont pas fait attention que ces mots latins ne signifient pas adosser quelqu’un, mais être adossé, avoir le dos appuyé contre quelque chose. Mettre le dos de quelqu’un, mettre son dos contre un mur, s’adosser.

s’Adosser, dorsum applicare, dorso incumbere. Il s’adossa contre la muraille, contre un arbre, & se défendit long-temps.

s’Adosser, verbe réciproque, signifie aussi avoir le dos tourné l’un contre l’autre. Tergum obvertere. Les soldats s’étant ainsi adossés, ne craignirent plus d’être enveloppés par l’ennemi. Ablan.

Adosser, dans un sens figuré, signifie la même chose qu’appuyer, placer une chose contre une autre, qui lui sert d’appui. Applicare. Adosser un bâtiment contre une montagne. Cette maison est adossée contre l’Église. Inniti, incumbere. Cet appentis est adossé contre la muraille.

Adosser, se dit en termes de Blason, de ce qui est tourné le dos contre le dos de son pareil. Adversos pingere, ponere. Montbeliard porte d’azur à deux bars adossés d’or : ce sont deux espèces de poissons. On dit aussi adorsé : le contraire est affronté. Il se dit particulièrement des animaux rampans, comme le lion, &c. On le dit en général de tout ce qui a de la longueur, & qui a deux faces différentes : comme des clefs adossées, quand leurs pannetons sont en dehors : des faux adossées, &c.

Adosser, terme de Sculpteurs, de Peintres & d’Antiquaires. Mettre deux têtes sur la même ligne, en sens opposé. Acad. Fr. Ce mot vient d’ad & de dorsum.

ADOSSÉ, ÉE, part. Voyez Adosser.

ADOUAR. s. m. Un Adouar est une espèce de village ambulant (car il y en a très-peu de bâtis & de stables en toute l’Afrique) composé de quelques familles Arabes qui campent sous des tentes, tantôt dans un lieu, tantôt dans un autre, selon que la bonté du terrain les attire. Chaque Adouar a son Marabou, & se soumet à la conduite d’un Chef qu’ils choississent entr’eux. Voyez le Diction. de la Martinière.

ADOUBER. v. a. qui signifioit autrefois raccommoder. Adouber une machine. Reficere. Tous les tuyaux de cette machine sont bien adoubés, elle doit jouer maintenant. On le disoit aussi des vaisseaux ; aujourd’hui on dit radouber.

Ce mot vient du latin adaptare. Du Cange le dérive du mot. adobare, qui signifioit autrefois, Armer. Voyez Adapter.

Adouber, vouloit dire autrefois, donner à un Chevalier, ou à un Soldat, les armes nécessaires, les habits, &c.

Se ne fussiez Chevaliers adoubés. Roman de Gaydon.
Là me fi-il Chevalier Adouber. Id.

Adouber. v. a. Terme de Jeu de Trictrac. Mettre en ordre une dame de son jeu qui est mal rangée, la ranger mieux, & comme elle doit être. Disponere, dirigere, ordinare. Quand il y a dans votre jeu une dame un peu dérangée, & que vous voulez la mieux ranger, il faut dire, avant que de la toucher, j’adoube ; sans quoi, si les dés jetés étoient à vous, on vous forceroit à jouer la dame que vous avez touchée. L. S.

On dit aussi j’adoube par précaution, quand on met la main sur une dame qu’on voudroit jouer, sans être encore bien déterminé, & pour lors on peut la jouer, ou ne la pas jouer.

On peut toucher le talon impunément, & sans dire, j’adoube, excepté lorsqu’il n’y a plus qu’une dame. De même celui qui n’a pas jeté les dés, peut toucher son bois sans conséquence, quand même il seroit battu à faux, & qu’il n’auroit pas marqué ; il le peut faire tant qu’il n’a pas jeté les dés. Id.

☞ On dit aussi ]’adoube aux Echecs quand on touche une pièce pour l’arranger & non pour la jouer.

Adoubeur. Vieux s. m. Celui qui ajuste, qui raccommode. Ch. Est. Concinnator.

☞ ADOUCIR. v. a. rendre doux, moins âcre, moins rude ou moins amer, &c. Temperare, rem aliquam dulcem efficere, mollire. Conj. J’adoucis, j’adoucissois, j’adoucirai. Adoucir l’acide du ciron avec le sucre. Adoucir l’eau de la mer. Adoucir l’âcreté du sang. Acad. Fr.

☞ On dit figurément adoucir la voix, qui signifie parler d’un ton moins aigre ou moins, élevé. Adoucir une expression, c’est-à-dire, la corriger, en se servant de termes moins durs & plus convenables. Acad. Fr.

☞ On dit que la pluie adoucit le temps, pour dire, qu’elle le rend moins froid. Id.

Adoucir, signifie encore dans un sens figuré, rendre moins fâcheux & plus supportable. Cela adoucira un peu votre mal. Adoucir l’ennui, le chagrin, &c. Levare. On dit aussi adoucir l’humeur, le caractère. Acad. Fr. On dit encore adoucir & apprivoiser les lions & les tigres mêmes. Ablanc.

Adoucir, se dit parlant des règles, des constitutions, d’une maison, d’un ordre Religieux, &c. Mitigare, lenire. Dans ce sens il a beaucoup d’analogie avec mitiger. Cependant le premier signifie diminuer la rigueur d’une règle, par la dispense d’une partie de ce qu’elle prescrit & par la tolérance des légères inobservations ; il n’a rapport qu’aux choses passagères & particulières. Ainsi adoucir une règle dépend de la facilité ou de la bonté d’un Supérieur. Mitiger une règle, c’est en diminuer la rigueur par la réforme de ce qu’elle a de rude ou de trop difficile. Mitiger dans ce sens est l’effet de la réunion des volontés ou de la convention des membres d’un Corps ; ou de la loi d’un maître, selon le gouvernement. Adoucir & Mitiger ont encore une légère différence. Exemple, on adoucit les peines d’un ami : on mitige le châtiment d’un coupable.

Il se dit aussi avec le pronom personnel, & signifie, devenir plus doux. Mitescere. L’hiver s’est adouci ; le froid est moins âpre, & moins violent. Le dépit de ne posséder pas les richesses, se console et s’adoucit, par le mépris que l’on a pour ceux qui les possédent. Rochef. Les haines & les inimitiés s’adoucissent par le temps. Du R. Il n’y a personne si sauvage, qui ne se puisse adoucir. Dac. La fièvre s’adoucit par l’abstinence & le repos.

Adoucir. Terme de Peinture. C’est mêler ou fondre deux ou plusieurs couleurs ensemble avec le pinceau, de façon que le passage de l’une à l’autre paroisse insensible. On adoucit aussi les desseins lavés & faits avec la plume, en affoiblissant la teinte ; c’est-à-dire, en rendant ses extrémités moins noires. L’on adoucit encore les traits d’un visage en les marquant moins, en les rendant moins rudes.

Adoucir. Terme de Manufactures de Glaces. On l’entend de la première façon qui se donne aux Glaces brutes, en les usant & frottant les unes contre les autres avec du grès, du sable ou de l’émeri, pour les polir & les rendre transparentes. On dit quelquefois dégrossir, mais le vrai terme de l’art est adoucir.

On appelle l’Atelier de l’Adouci, le lieu où on leur donne cette première façon. Pour les finir, on les porte dans l’atelier du Poli.

Adoucir. Terme de Doreur en détrempe. Il signifie quelquefois, mettre le blanc en traînant le pinceau : & quelquefois il s’entend d’une façon qu’on donne au blanc après la dernière couche, en le mouillant légèrement, & le frottant ensuite avec la prêle, ou avec de grosse toile neuve pour enlever les inégalités. Voyez Dorure en Détrempe.

Adoucir. Terme de Teinturier. C’est mêler des couleurs moins vives avec d’autres qui le sont trop, pour réduire celles-ci à leur véritable teinte.

Adoucir. Terme d’Épingletier. Action d’ôter les traits de la grosse lime avec une plus fine pour pouvoir polir l’ouvrage plus aisément.

Adoucir, chez les Orfèvres. C’est l’action de rendre l’or plus facile à être mis en œuvre, en l’épurant des matières étrangères qui le rendent aigre & cassant.

Adoucir, chez les Diamantaires. C’est ôter les traits que la poudre a faits sur le Diamant, en le changeant de place & de sens sur la roue de fer.

Adoucir, chez les Fondeurs de plomb. C’est polir le plomb dans le moulin.

Adoucir. Terme d’Horlogerie. C’est rendre une pièce plus douce, soit en la limant avec une lime plus douce, soit en l’usant avec différens corps.

ADOUCI, IE. part. Temperatus, mitigatus, lenitus.

☞ La différence entre un corps poli & un corps adouci, c’est que le premier est brillant, au lieu que le second a un air mat, quoiqu’il ait souvent bien moins de traits que le premier.

ADOUCISSAGE. s. m. Terme de Teinturier. Manière de rendre une couleur moins vive, en y mêlant des drogues qui en puissent diminuer la force. Les instructions & les règlemens pour la teinture, portent, que les chapeaux qu’on teint en noir, quand ils ont un œil trop bleuâtre, peuvent recevoir l’adoucissage dans un petit bain de bois jaune, s’ils sont de laine grossière, ou dans un bain de gaude, si la laine est fine.

ADOUCISSANT. s. m. Terme de Médecine. Remède qui adoucit. Dulcorandi vim habens, mitigans. Plusieurs pestiférés ont été guéris par des humectans, des adoucissans, &c. Journ. de S. 1721, p. 420. ☞ Il est aussi adj. Remède adoucissant, tisane adoucissante.

ADOUCISSEMENT. s. m. L’action d’adoucir. ☞ Il signifie également la chose qui sert à adoucir, & l’état de la chose qui est adoucie. Temperatio, mitigatio. L’adoucissement de la bile, & des humeurs, des contours d’un tableau.

Adoucissement, signifie figurément, soulagement, diminution de peine & de douleur. Levamen, levamentum, mollimentum. Rien ne peut apporter d’adoucissement à mes déplaisirs. ☞ On le dit aussi en parlant du temps, lorsqu’il est moins froid, moins rude, moins fâcheux. Il y a quelque adoucissement dans le temps. Il signifie aussi, accommodement, tempéramment, correctif. Ne sauriez-vous trouver quelque adoucissement pour concilier les esprits ? Les adoucissemens de la confession attirent le monde. Pasc. Il faut chercher quelques adoucissemens, pour exprimer les choses sales & malhonnêtes. Cail. La Reine le priva de certains adoucissemens, que le privilège de son rang lui faisoit regarder comme permis, & que la flatterie lui avoir conseillés comme nécessaires. Flech. Les personnes polies n’expriment qu’avec bien des précautions & bien des adoucissemens, tout ce qui peut faire naître des idées obscènes. S. Evr. Tout l’adoucissement qu’il apporte dans la doctrine, est de lui avoir ôté le masque affreux dont les Ministres la couvrent. Bossuet.

Adoucissement. Terme de Peinture. Expolitio. On s’en sert pour exprimer que les couleurs sont bien noyées ; que les traits ne sont pas tranchés, & qu’il n’y a rien de rude. L’adoucissement des couleurs rend la peinture plus tendre & plus fine.

Adoucissement. Terme d’Architecture. C’est le racordement qui se fait d’un corps avec un autre par un chanfrein, ou par un cavet, comme le congé du fât, d’une colonne, ou lorsque la plinthe d’une base est jointe à la corniche de son piédestal par un cavet.

ADOUÉ, ÉE. adj. Terme de Chasse, qui se dit des perdrix qui sont appariées & accouplées. Copulatæ.

ADOULÉ, ÉE. adj. Vieux mot, qui vouloit dire autrefois Dolent, triste ; Mœrens, mœstus, dolens, & Adouler, affliger, chagriner.

ADOUR. s. m. Nom propre de trois rivières de Gascogne, en France. Aturus, Atturus. La première est le grand Adour, qui prend sa source dans les Pyrénées, à la montagne de Tourmalet, passe à Tarbe, à Aire, à Saint-Sever, à Dax & à Bayonne, au-dessous de laquelle il se jette dans la mer de Gascogne.

La seconde est l’Adour de Suébe, qui prend sa source dans la vallée de Campan, &, après un cours d’environ douze lieues, se joint au grand Adour.

La troisième est l’Adour de Baudéan, ainsi nommé, parce qu’il a sa source dans la vallée de Baudéan. Il se décharge, comme le précédent, dans le grand Adour, & n’a que la même étendue dans son cours.

ADOUX. adj. m. Terme de Teinturier. Il se dit du pastel, lorsqu’ayant été mis dans la cuve, il commence à jeter une fleur bleue.

AD PATRES. Expression latine, qui est devenue françoise dans le style familier. Il est allé ad patres, c’est-à-dire, il est allé rejoindre les pères en l’autre monde, il est mort.

J’ai, comme vous savez, un habile cousin,
Homme de conscience & savant Médecin,
Qui l’enverroit bientôt ad patres. Boursault.

ADR.

ADRA. Ville du Royaume de Grenade, en Espagne. Abdara. Elle est sur la mer, & elle a un port & un château. Adra est placée entre Alméria & Salobrena. Elle avoit autrefois un évêché qui a été transféré à Alméria.

ADRACHNE. s. m. Espèce d’arbre de grandeur médiocre, dont l’écorce est blanche & luisante ; son bois est fort dur ; sa fleur & son fruit sont semblables à ceux de l’arbousier ; il vient en Candie : sa feuille résiste au venin. Voyez Théophraste.

ADRAGANT. Quelques-uns écrivent ADRAGAN. s. m. Adragantum gummi. C’est le nom d’un suc gommeux qui se tire d’un arbre que les Grecs appellent Tragacantha, les Persans Kar Moghilan, & les Arabes Carad. D’Herb. On ne dit point Adragant tout seul, mais gomme d’Adragant. Quelquefois on écrit Adragante, & quelquefois Adraganth. Ce mot est écrit de la seconde manière dans le Dictionnaire de Commerce : d’Herbelot écrit Adragan.

ADRAME. s. m. Étoit un Dieu particulier à la Sicile, suivant Plutarque, & la ville d’Adrame lui étoit spécialement consacrée, quoique ce Dieu fût en grande vénération dans toute l’île.

ADRAMELECH. s. m. Faux Dieu des Sépharraïmites, Peuple envoyé dans la Terre-Sainte, par les Rois d’Assyrie, à la place des Israëlites, après que Salmanasar eut détruit le Royaume d’Israël. Les adorateurs d’Adramelech brûloient leurs enfans en son honneur, iv des Rois 17, 31, ce qui a persuadé Selden que c’étoit la même Divinité que Moloch. Quelques Auteurs Hébreux, cités par Munster, disent qu’on le représentoit sous la forme d’un mulet, & d’autres sous celle d’un paon.

Adramelech, est aussi le nom d’un des fils de Sennacherib. Ce nom signifie, puissance, grandeur, magnificence du Roi, ou Roi puissant, magnifique.

ADRASTE. s. m. Roi d’Argos & de Sicyone, fut un Prince renommé par sa valeur & par sa sagesse. Il s’acquit une grande réputation dans la première guerre de Thèbes, & fut le seul des sept Chefs qui en revint.

ADRASTÉE, ou plutôt ADRASTIE. s.f. Adrastia. Fausse Divinité, nommée autrement Némésis, fille de Jupiter & de la Nécessité, ou selon Hésiode, de la Nuit, & selon Pausanias, de l’Océan & de la Nuit. Son emploi étoit de punir les crimes. Les Prêtres Égyptiens plaçoient Adrastie au-dessus de la Lune, d’où elle examinoit tout le monde, sans qu’aucun coupable lui échapât.

Strabon tire ce nom de celui d’Adraste. Roi d’Argos ; mais Phormétus le dérive du Grec ἀεί δρᾶν, de sorte qu’il marque une Divinité qui est toujours en action, que rien n’empêche d’agir & de punir les coupables ; Pausanias, de l’α privatif, & de δράω ; pris dans le sens de διδράσϰω je fuis, parce qu’on ne se soustrait jamais à la vengeance céleste.

ADRASTIE, ou ADRASTÉE, est aussi le nom d’une ville de Troade, bâtie par un Adraste, fils de Mérops, qui y bâtit un Temple à la Fortune : il y eut aussi un Oracle d’Apollon.

ADRASTÉE. s. f. Une des Mélisses, ou Nymphes qui nourrirent Jupiter dans l’antre de Dicté ou de Créte.

AD REM. Mots latins dont on se sert dans le discours familier, pour désigner un raisonnement conséquent. L’argument n’est pas ad rem ; c’est-à-dire, il ne prouve point ce dont il est question.

ADRESSANT, ANTE. adj. m. & f. Qui est envoyé à certain lieu, ou à certaines personnes. Inscriptus. ☞ Il n’est guère d’usage que dans cette phrase, lettres patentes, adressantes au Parlement, ou phrases semblables. Les lettres de Chancelleries sont toutes adressantes aux Juges ou autres Officiers royaux.

ADRESSE. s. f. Dextérité, soit de la main, soit du corps. Art dans l’action. Solertia, ars. ☞ M. de Montesquieu a dit très-ingénieusement, l’adresse est une juste dispensation des forces que l’on a. Les Charlatans font mille tours avec une adresse merveilleuse. Ce Cavalier fait tous ses exercices avec beaucoup d’adresse ; il a une adresse naturelle pour toutes choses. Les jeux d’adresse sont permis, comme la paume, le billard, &c.

On appelle, tour d’adresse, un tour de subtilité de main. Il se prend aussi pour un tour de finesse d’esprit. Il lui a joué un tour d’adresse. Acad.

Adresse, au figuré, Calliditas, consilium, dextrietas. C’est l’art de conduire ses entreprises d’une manière propre à réussir. Voyez souplesse, finesse, ruse, artifice. L’adresse emploie les moyens, elle demande de l’intelligence. Les trois premiers de ces mots se prennent plus souvent en bonne part que les deux autres. M. L’Abbé Girard. Syn. Fr. Il a fait réussir cette affaire par son adresse & par la manière dont il l’a tournée. On lui a tiré son secret avec adresse. Le peuple est si grossier, qu’on ne doit pas se donner la peine de le tromper avec adresse. S. Evr. Pour réussir à la Cour, il faut plus d’adresse que de bonne foi.

Adresse, en signification synonyme avec dextérité & habileté. La dextérité a plus de rapport à la manière d’exécuter les choses ; l’adresse en a d’avantage aux moyens de l’exécution ; & l’habileté regarde plus le discernement des choses mêmes. L’habileté dicte le plan, l’adresse indique les moyens, & la dextérité les met en usage. Il faut de l’habileté dans le Prince, ou dans ses Ministres ; de l’adresse dans ceux à qui l’on confie la manœuvre du détail ; & de la dextérité dans ceux à qui l’on confie l’exécution des ordres.

☞ La dextérité donne un air aisé, & répand des grâces dans l’action. L’adresse fait opérer avec art & d’un air fin. L’habileté fait travailler d’un air entendu & savant. Savoir couper à table & servir les convives avec dextérité ; mener une intrigue avec adresse ; avoir quelque habileté dans les jeux de commerce & dans la musique ; voilà, avec un peu de jargon, sur quoi roule aujourd’hui le mérite de nos aimables gens.

Adresse, se transporte quelquefois figurément de l’ouvrier, à l’instrument dont il le sert.

De son urne à leurs yeux l’autre étale l’ouvrage,
Et leur fait admirer l’adresse du ciseau.

Adresse. Indication, désignation soit de la personne à qui il faut s’adresser, soit du lieu où il faut aller ou envoyer. Donner une adresse pour faire tenir des lettres. Une bonne adresse. Une fausse adresse. Je vous donnerai mon adresse. Envoyer une lettre à son adresse. Dict. Acad.

☞ On dit faire tenir des lettres à leurs adresses, pour dire, envoyer des lettres à ceux à qui elles son adressées.

☞ On appelle Bureau d’adresse, un lieu où l’on s’adresse pour diverses choses qui regardent la société & le commerce. Il est principalement en usage en parlant du lieu où l’on reçoit les nouvelles pour la Gazette, & où on la débite. C’est à Téophraste Renaudot, fameux Médecin, qu’on doit celui qui est à Paris. On appelle figurément Bureau d’adresse, les maisons où on débite beaucoup de nouvelles.

Adresse, se dit encore des mémoires qu’on laisse, ou des instructions qu’on donne pour trouver quelque personne, ou quelque chose. Il n’a garde de manquer de trouver cet homme-là, on lui a donné de trop bonnes adresses. Il a toutes les adresses du chemin qu’il doit tenir dans son voyage, & des lieux où il se doit arrêter.

Adresse, se dit quelquefois des Requêtes qu’on présente, en cette phrase, fort ordinaire dans les Gazettes : on a présenté une adresse au Roi d’Angleterre ; pour dire une Requête, un Mémoire, un Placet. Libellus supplex, memorialis. Adresse est un terme plus honorable que celui de Requête. Larrey. Édouard VI, p. 624.

Adresse, s. f. Terme en usage à la grande Chancellerie, qui se dit en parlant des Édits & Déclarations du Roi, qui sont adressées aux Cours souveraines, & par elles aux Juridictions ou Justices inférieures. Ces adresses sont exprimées de cette manière : À tous présens & à venir, salut. À tous ceux qui ces présentes verront. Et dans le corps des Lettres : Si donnons en mandement à nos amés & féaux Conseillers, les gens tenant notre Chambre des Comptes à Paris, &c. Quelquefois ces Lettres sont adressées à plusieurs Cours souveraines, comme la Déclaration de la Capitation du mois de Mai 1711. Si donnons en mandement à nos amés & féaux Conseillers, les gens tenant notre Cour de Parlement, Chambre des Comptes, Cour des Aydes, qu’ils aient, &c.

Adresse, en termes de Chancellerie du Palais, est celle qui se fait des Lettres royaux, ou Lettres de cette Chancellerie, aux Juges royaux. Quand elles sont données pour affaires pendantes pardevant des Juges des Seigneurs, l’adresse s’en fait aux Huissiers royaux. La clause qui se met à la fin de ces Lettres, concernant leur exécution, commence à ces mots : Mandons à tel Juge, &c.

ADRESSER. v. n. Tirer, aller droit au but. Toucher droit où l’on vise. Adresser au but. Ferire signum. Ce tireur a bien adressé ; dès le premier coup il a emporté le prix.

Adresser, v. a. Envoyer quelque chose directement en quelque lieu, ou à quelque personne qui est marquée & désignée par quelque inscription. Mittere. Les Commis de la Poste portent les lettres où on les adresse. Vous m’avez adressé un homme dont je suis embarrassé. Cette lettre s’adresse à vous. On dit, adresser ses pas ; pour dire, tourner ses pas vers quelque endroit. Iter dirigere.adressez-vous vos pas ?

Adresser, synonyme de dédier. Adresser un ouvrage à quelqu’un, dicare, dedicare. Le P. Maimbourg s’est fait un honneur d’adresser tous ses ouvrages au Roi. Bayl. M. Ménage a fait un recueil des vers qui lui étoient adressés.

Adresser, synonyme d’invoquer. Adresser ses vœux à Dieu, ses prières.

Adresser le discours, la parole à quelqu’un, lui parler directement. Compellare, alloqui. C’est à vous, Scipion l’Africain, que j’adresse maintenant la parole ; vous dont le nom donne encore tant d’éclat & de gloire à cette ville, quoique vous ne soyez plus au monde.

Celui qui sans discernement
Adresse à tous venans les louanges qu’il donne,
Fait grand tort à son jugement
Et ne fait honneur à personne.

Adresser avec le pronom personnel. Conj. Je m’adresse, je m’adressai, je me suis adressé. Il signifie, se présenter directement à quelqu’un, avoir recours à lui, lui demander une grâce, réclamer sa protection, son secours. Consugere. Il faut s’adresser directement à Dieu. Le Roi veut qu’on s’adresse à lui pour obtenir des grâces. Il faut s’adresser au Parlement pour faire entériner une rémission. Je m’adresse à vous pour me tirer du mauvais pas où je suis engagé.

On dit proverbialement, il faut s’adresser à Dieu plutôt qu’à ses Saints ; pour dire, qu’il vaut mieux s’adresser directement au maître pour obtenir quelque grâce, que d’employer pour cela la faveur de ses créatures, ou de ses domestiques.

s’Adresser. Attaquer quelqu’un, soit par raillerie, soit par malignité. Oppugnare, insectari, petere, lacessere. Prudemment on ne doit point s’adresser aux personnes puissantes, de peur de succomber sous leur crédit. S. Evr. Vous êtes bien téméraire de vous adresser à moi. Ce reproche ne s’adresse qu’aux lâches.

On dit, à qui vous adressez-vous ? Vous vous trompez. Vous vous êtes mal adressé ; pour dire, à qui vous jouez-vous ? Vous n’y trouverez pas votre compte. Je sais bien à qui je m’adresse.

ADRESSÉ, ÉE. part. Missus, inscriptus.

ADRIA. Ville des Vénitiens en Italie. Hadria. Elle est dans le Polésin de Rovigo, sur une petite île formée par le fleuve Tartaro. La mer l’a presque détruite, & son Évêque réside à Rovigo. Cette ville donna son nom au golfe ou mer.

ADRIANE. Adrianopolis. Ville de la province de Cyrène en Afrique. Ce nom vient de celui de l’Empereur Adrien, qui, comme le témoigne Spartien, au lieu de monumens publics, aimoit à donner son nom à des villes. Comme les médailles écrivent toujours HADRIANUS par un H, il faudroit aussi en François écrire Hadrien, & Adriane ; mais l’usage contraire a prévalu.

☞ ADRIANÉES ou ADRIANALES. s. f. pl. Hadrianea, Hadrianalia. Jeux institués en l’honneur de l’Empereur Adrien. Il y avoit deux sortes d’Adrianales ; les unes se célébroient tous les ans, & les autres tous les cinq ans. M. Tristan explique dans son premier Tome une médaille qu’il croit conserver la mémoire de ces Jeux. On y voit le bœuf Apis, avec la marque d’un croissant. Le Chevalier Marsham croit que cette médaille & quelques autres semblables, furent frappées en Egypte l’année qu’on fit l’Apothéose d’Adrien, après avoir célébré les Jeux.

☞ ADRIANISTES. s. m. pl. Théodoret met les Adrianistes, au nombre des hérétiques qui sortirent de la secte de Simon le Magicien ; mais aucun auteur ne parle de ces hérétiques.

Les sectateurs d’Adrien Hamstedius, un des novateurs du xvie siècle, furent appelés de ce nom.

ADRIANOPOLI. Ville de Thrace auprès de l’Hébre. C’étoit le siége de l’Empire des Turcs, avant la prise de Constantinople. Adrianopolis. Ils l’appellent maintenant Endren.

ADRIATIQUE. La mer Adriatique. Adria, Adriaticum mare. C’est le Golfe de Venise, appelé quelquefois par les Latins, Mare superum ; & qui, selon Strabon, L. 7. prit le nom d’Adriatique, du fleuve Adria. On trouve encore deux autres mers appelées Adriatiques dans des siècles plus reculés : 1.o S. Jérôme dans la vie de S. Hilarion, c. 30. appelle mer Adriatique, celle qui est entre la Palestine & la Sicile. 2.o Les Auteurs de la vie de Saint Willibalde dans Surius, Jun. VII. & dans Canisius, Var. Lect. T. IV. appellent la mer Phénicienne, mer Adriatique. Apparemment c’est le nom que les Phéniciens donnoient à la Méditerranée, l’appelant grande mer, ים אדיר, ou peut-être יםאדירה, Jam adir, ou Jam adira, d’où en Latin l’on aura fait Adria, & Adriaticum mare. Les Hébreux l’appeloient aussi ים הגרול, la grande Mer.

☞ ADRIEN. s. m. Nom propre d’homme. Adrianus. Sur toutes les médailles latines & les monumens antiques, ce nom est écrit par un H ; ce n’est que dans les siècles postérieurs qu’on l’a retranché. Adrien fut adopté par Trajan, auquel il succéda.

ADROBE, ou ATROBE. Rivière de la Tartarie Moscovite. Adroba, Atropa. Elle commence près de la petite ville de Simberska ; & après avoir reçu les eaux du Sook, elle change de nom, & prend celui d’Usa, puis se décharge dans le Volga, du côté de l’orient, entre Bolgar & Samara.

☞ ADROGATION. s. f. Terme de Jurisprudence. C’étoit une sorte d’adoption qui n’étoit différente de l’adoption proprement dite, qu’en ce qu’il falloit que le sujet qui consentoit à être adopté par l’adrogation, fût libre, affranchi de la puissance paternelle, soit par la mort de son pere naturel, soit par l’émancipation ; & parce qu’elle se faisoit dans l’Assemblée du Peuple, pendant que la République subsistoit, & depuis, par un rescrit des Empereurs. Hors ces différences, qui ne regardent que la forme, c’est dans le fond la même chose que l’adoption. Adrogatio, arrogatio. Ce mot se disoit aussi chez les Romains d’une personne Praticienne, qui se faisoit aggréger dans l’ordre des Plébéiens, pour parvenir au Tribunat, & pour gagner l’affection du peuple. ☞ Ainsi c’étoit proprement l’association ou aggrégation d’un Praticien a l’ordre des Plébéiens.

ADROIT, OITE. adj. Qui a de l’art dans l’action, qui a une grande dextérité de main, de corps. Industrius, solers, dexter. Ce sauteur est bien adroit, bien agile. Cet ouvrier est fort adroit de la main.

Adroit, dans le sens figuré. Qui a l’art de conduire ses entreprises d’une manière propre à y réussir. Il faut qu’un Négociateur soit adroit. M. l’Abbé Girard Syn. C’est un esprit adroit. Ac. Fr. Solers. Suhtilis.

Adroit, synonyme d’habile. L’homme adroit opère avec art & d’un air fini. L’homme habile travaille d’un air entendu & savant.

On le dit quelquefois substantivement, mais dans le style familier ou populaire ; pour dire, rusé, fin. Astutus. Défiez-vous de cet homme, c’est un adroit.

À DROIT. adv. Du côté droit, qui est opposé à gauche. Dextrà. On dit populairement, qu’un gaucher ne fait jamais rien à droit.

ADROITEMENT. adv. Avec adresse, d’une manière adroite & subtile. Dexterè, subtiliter, callidè. Ce coupeur de bourse lui a volé adroitement sa montre dans sa poche. Il a conduit cette affaire fort adroitement.

ADRUMETE. Adrumetum. Ancienne ville d’Afrique, appelée aujourd’hui Hamameta par les Arabes. Elle a eu un Évêque suffragant de Carthage ; & en 394 il s’y tint un Concile. Elle étoit capitale de la province de Bysacène. Strabon l’appelle Adrume, & Étienne Adrumès. Mais Ptolomée, Salluste, Hirtius, Pline, &c. la nomment Adrumète. Salluste dit que c’étoit une Colonie Phénicienne.

Scaliger, & après lui, Drusius, Casaubon, & d’autres prétendent que ce nom est Phénicien, & signifie le Palais de Pluton, חצר מות, Palais de la mort. D’autres soutiennent que cela ne peut être, qu’on auroit dit Adramota, & non Adrumetum ; peut-être même Hatsarmotha, ou Hatsramotha, plutôt qu’Adramotha ; que d’ailleurs il n’y avoit point de raison de l’appeler ainsi ; qu’elle étoit dans un pays beau & fertile ; qu’une ancienne inscription la nomme, COLONIA CONCORDIA ULPIA TRAJANA AUG. FRUGIFERA HADRUMETINA ; que Pline, L. XVII. 5. XVIII. 10. Varron, de Re Rust. L. i. c. 44. Silius Italicus, L. VIII. mettent la Bysacène parmi les contrées les plus fertiles. Bochart aime donc mieux tirer son nom de חצר Palais, & םאה cent, & sous-entendre שערים mesures, parce que son territoire produisoit cent pour un. Cet étymologie ne prévient pas les connoisseurs en sa faveur. Adrumète s’appelle aujourd’hui Mahometta, & par les Arabes Hamametha. Le Concile d’Adrumète se tint en 394. Quelques Moines d’Adrumète, au commencement du cinquième siècle, se scandalisèrent de la doctrine de Saint Augustin.

ADSCRIPTITII, ou GLEBÆ adscripti servi. Esclaves chez les Romains, qui étoient attachés à la culture d’une certaine terre, tellement qu’ils ne pouvoient être vendus qu’avec cette terre.

ADV.

ADVEILLER. v. n. Vieux mot, qui veut dire, être dolent. Dolere, mœrere.

ADUÉÏTAM. s. m. indéclinable. Terme de Relation. Nom d’une secte philosophique des Indiens. Adueitamus, secta Indorum philosophica. Il y a plusieurs sectes parmi les Indiens au sujet du monde, de la Religion & de la Morale. Les trois dominantes sont exprimées par les noms Duéitam, Aduéitam, & Aduéita vichista duéitam. 1o . Aduéitam est le système de ceux qui tiennent qu’il n’y a qu’un Etre qui existe ; c’est Dieu ; que ce monde est phantastique. 2o . Duéitam est le système de ceux qui distinguent Dieu du monde, & admettent l’existence réelle de l’un & de l’autre, comme deux Etres distincts. Une des paroles de leur Profession de foi, est : Tuam Karta Dassoham, en parlant à Dieu : Vous êtes le Seigneur, & je ne suis que l’esclave. Ils ne suivent pas dans la pratique ce principe, & ne sont pas moins idolatres que les premiers. 3o . Aduéita vichista duéitam est le système de ceux qui voulant tenir un milieu, mettent entre le monde & Dieu une unité mêlée de multiplicité, qui est le sens littéral de ces termes, Aduéita vichista duéitam. Le premier système est celui des Vedantam, une de leurs sectes, & des Brames, appelés Smatouloa. Le second est celui des Brames, appelés Tatvadouloa, qui suivent la secte de Madoa leur maître, dont ils ont retenu le nom de Madoulouvou. La troisième est la secte des Brames Vichaouvistes. Ces trois sectes s’appuyant principalement sur les traités de Védam, qui est le Livre sacré des Indiens, peuvent être regardées comme la Théologie des Brames. P. Calmet, Miss. Jésuite.

ADUÉÏTÄ VICHISTA DUÉÏTAM. Voyez dans l’article Aduéïtam.

ADVENANT. Voyez Avenant.

ADVENEMENT. Voyez Avénement.

ADVENIR. v. n. Voyez Avenir.

ADVENT. Voyez Avent.

☞ ADVENTICE, ou ADVENTIF, IVE. adj. Adventitius. Se dit de ce qui arrive à quelqu’un ou à quelque chose du dehors. Matière adventice, est celle qui n’appartient pas proprement à un corps, mais qui y est jointe fortuitement.

☞ En jurisprudence, adventice ou adventif, se dit des biens qui arrivent à quelqu’un, soit comme un présent de la fortune, soit par succession collatérale, soit par la libéralité d’un étranger. Bona adventitia. Ce mot est opposé à profectitia, qui signifioit les biens qui proviennent du pere directement. Ce mari a été condamné à restituer aux héritiers de sa femme, non-seulement ses deniers dotaux ; mais aussi ses biens adventifs, qui lui étoient échus par succession collatérale. ☞ Dans la Coutume d’Auvergne, par biens adventices, on entend généralement tous les biens qui échoient à une femme après ses fiançailles. Ces biens sont ainsi appelés, parce qu’ils n’augmentent point la dot, & que la femme en peut disposer à sa volonté, au profit de qui bon lui semble (à l’exception de son mari) sans avoir besoin de son autorisation.

ADVENTURE. Voyez Aventure.

ADVENTURER. Voyez Aventurer.

ADVENTUREUX. Voyez Aventureux.

ADVENTURIER. Voyez Aventurier.

ADVENTURINE. Voyez Aventurine.

ADVENU. Voyez Avenu.

ADVENUE, Voyez Avenue.

ADVERBE. s. m. Terme de Grammaire. Adverbium. Partie indéclinable de l’oraison qui se joint avec les verbes & avec les adjectifs, pour exprimer les manières ou les circonstances. Ce nom vient de la préposition latine ad, & du nom verbum, verbe, & signifie une diction qui se joint au verbe ; parce qu’il modifie plus fréquemment cette partie d’oraison. ☞ Ce qui n’empêche pas qu’il n’y ait des adverbes qui se rapportent aussi aux noms adjectifs, aux participes, & à des noms qualificatifs. Il agit constamment ; il est vivement poursuivi ; il est fort malade ; il est puissamment riche ; souverainement maître ; véritablement Roi, plus Mars que le Mars de la Thrace. Malh. Un adverbe se joint même quelquefois à un autre adverbe pour en modifier le sens ; pour marquer les degrés de signification & de comparaison. Très-courageusement, fort dévotement, bien malheureusement. De-là vient que quelques Grammairiens aiment mieux les appeler modificatifs, & les renfermer sous ce nom avec quelques autres parties d’oraison, comme la préposition, la conjonction. ☞ Dans l’ordre des mots qui entrent dans le discours, il semble que l’adverbe seroit bien placé après la préposition, parce qu’on peut dire que ce qui distingue tout l’adverbe des autres parties d’oraison, c’est qu’il vaut autant qu’une préposition & un nom. C’est un mot qui abrège. Par exemple, sagement vaut autant qu’avec sagesse.

Ainsi tout mot qui peut être rendu par une préposition & un nom, est un adverbe : par conséquent ce mot y, quand on dit, il y est, ce mot, dis-je, est un adverbe qui vient du mot latin ibi ; car il y est, est comme si l’on disoit, il est dans ce lieu là, dans la maison, dans la chambre, &c. Les adverbes augmentent ou diminuent la force des mots avec lesquels ils sont joints. Notez qu’il ne faut pas placer l’adverbe trop loin de son verbe ; & quand c’est à un nom ou à un autre adverbe qu’il se joint, il ne faut jamais l’en séparer, ni rien mettre entre deux. Il y a des adverbes de quantité, c’est-à-dire, qui marquent la quantité, comme peu, beaucoup ; des adverbes de lieu, comme près, loin ; des adverbes de temps, comme demain, hier, toujours, jamais ; des adverbes de situation, comme en haut, en bas, devant, derrière ; des adverbes de qualité, & le plus grand nombre est de ceux-ci : ils sont ordinairement formés de l’adjectif, qui signifie la qualité, ou la manière, comme écrire poliment, parler agréablement, combattre vaillamment ; des adverbes d’affirmation & de dénégation, oui, non, certainement, nullement ; des adverbes de doute, peut-être. On disoit, il y a quelque temps, possible en ce sens ; par exemple, il sera possible guéri dans quatre jours : cette manière de parler n’est plus en usage ; des adverbes de répétition, qui marquent que la chose se réitère, se fait plus d’une fois, encore ; des adverbes de choix & de comparaison, sur-tout, principalement, plus, moins, plutôt ; des adverbes de similitude, comme, ainsi, de même.

ADVERBIAL, ALE. adj. qui tient de l’adverbe. Adverbialis. Il se dit de deux ou plusieurs mots joints ensemble, qui ont la force d’un adverbe, comme à tâtons, au pis aller, coup sur coup, de temps en temps, sont des phrases adverbiales, des façons de parler, des locutions adverbiales.

ADVERBIALEMENT. adv. d’une manière adverbiale. Adverbialiter. Ce mot se prend adverbialement en telles ou telles phrases.

ADVERBIALITÉ. s. f. Terme de Grammaire. Qualité d’un mot qui est adverbe ou regardé comme adverbe. L’adverbialité d’un mot le rend indéclinable. M. de Vaugelas, dans sa remarque, prendre à témoin, s’est servi de ce mot avec un correctif ; mais depuis, ce terme s’est introduit par l’analogie de plusieurs autres semblables, dont on se sert sans scrupule.

ADVERSAIRE. s. m. Qui est d’un parti opposé, ou d’un sentiment contraire. Adversarius. David avoit à combattre un redoutable adversaire : c’étoit Goliath. Cardan avoit un puissant adversaire qui écrivoit contre lui : c’étoit Scaliger en ses Exercitations. Ne poussez point un adversaire à bout. Il faut prendre conseil sur le champ, & se résoudre sur la mine & sur la contenance de son adversaire. Balz.

ADVERSATIF, IVE. adj. Terme de Grammaire, se dit d’une particule ou conjonction, qui marque quelque différence, ou quelqu’opposition entre ce qui la suit, & ce qui la précède. Adversus. Mais est une particule adversative. Je voulois partir ; mais le mauvais temps m’en a empêché. Ou est une conjonction adversative : c’est lui ou vous. Oui, ou non.

ADVERSE. adj. Terme de Palais. Contraire, opposé, Adversus. C’est la personne contre laquelle on plaide. Il y a des Praticiens qui écrivent & qui prononcent averse : c’est une faute. Il faut nécessairement écrire & prononcer le d, comme dans adversaire, adversité, parce qu’il vient d’adversus, & non pas d’aversus. Voilà les deux parties adverses. On dit aussi, l’adverse fortune ; pour dire, la mauvaise fortune. Il ne s’emploie que dans ces deux phrases.

On le dit par application d’une personne qui n’en aime pas une autre, qui la déchire, ou la contredit par-tout : il ne faut pas prendre garde à ce qu’il dit d’un tel, c’est sa partie adverse.

ADVERSITÉ. s. f. Etat fâcheux où l’on se trouve par la perte de sa santé, de l’honneur, ou des biens ; état d’une fortune malheureuse. Adversæres. Job souffrit constamment son adversité. Dieu éprouve les Elûs par l’adversité. La vertu se recueille & se réunit dans l’adversité, au lieu qu’elle se dissipe dans le bonheur. Flech. Il est plus aisé de résister aux chagrins de l’adversité, qu’aux charmes de la prospérité. S. Evr. Un ami soulage le poids de l’adversité, parce qu’il en prend la moitié sur lui-même. L’homme ne sauroit tenir ni contre la prospérité, ni contre l’adversité. Flech.

ADVERSITÉ, se dit aussi d’un accident, d’un coup de fortune, dont la suite jette dans un état malheureux. Il lui est arrivé une étrange adversité. En ce sens il se dit plus ordinairement au pluriel. Il a soutenu de grandes adversités. Acad. Fr. Les plus courageux succombent souvent sous les adversités extrêmes. S. Evr.

☞ On voit assez qu’adversité & malheur ne sont point termes absolument synonymes. Malheur ne présente l’idée que d’un accident ou plusieurs accidens passagers. Adversité dit plus, & fait naître l’idée d’une fortune constamment malheureuse. C’est l’opposé de prospérité.

Ces mots viennent de la préposition Adversus.

ADVERTANCE. s. f. Vieux mot. Avertissement.

ADVERTIN. Vieux mot, qui veut dire, fantaisie, boutade. Impetus, lubido, arbitrium.

ADVERTIR. Voyez Avertir.

ADVERTISSEMENT. Voyez Avertissement.

ADVERTISSEUR. Voyez Avertisseur.

ADVEST. s.m. Vieux mot qui signifie investiture, possession. Ce mot se trouve dans la Chronique de Flandre. On a dit aussi, advesture.

ADVEU. Voyez Aveu.

ADVIS. s. m. Sentiment, opinion.

Advis me fut que vers moi tout seul vint. Marot.

C’est-à-dire, ma pensée, mon sentiment fut. On écrit & l’on prononce aujourd’hui Avis Voyez Avis.

ADVISER. Voyez Aviser.

ADVISEMENT. s. m. Ce mot se disoit autrefois pour advis, & dans le même sens.

Je suis de cet advisement
Que foi leur soit gardée.

ADVISION. s. f. Vieux mot. Avis, avertissement. Monitio, monitus. Saint Louis eut trois advisions en son dormant, & à trois divers jours, pour assembler ses Barons & Chevaliers de son Royaume, & aller conquérir le Saint Sépulcre de N. S. Jésus-Christ. Anonyme. Vie de Saint Louis.

ADULA. Nom d’une contrée des Alpes. Adula. Elle est entre les Grisons, les Suisses & les Valésans. Elle comprend le Crispal & le Vogelsberg, où sont les sources du Rhin & du Russi. Elle renferme le mont Saint-Godar, & celui de la Fourche, où naissent le Rhône, le Maggia & le Tessin. Elle contient aussi le mont Adula, qui lui donne son nom, & d’où sort la source méridionale du Rhin. Toutes ces sources montrent que c’est un pays très-élevé, & peut-être le plus élevé de l’Europe.

ADULATEUR, TRICE. s. m. & f. Celui ou celle qui fait métier de flatter, qui par bassesse ou par intérêt donne des louanges excessives à celui qui ne les mérite pas. Adulator, assentator. C’est un lâche adulateur, un perpétuel adulateur. Combien la fortune a-t-elle d’adulateurs ? P. Gail.

On peut se servir de ce mot sur-tout dans la poësie à l’exemple de Boileau, qui a dit,

Du tyran soupçonneux, pâles adulateurs :


& de Rousseau, dont voici un passage :

Ses dons versés avec justice,
Du pâle calomniateur,
Ni du servile adulateur
Ne nourriront point l’avarice. Rouss.

On peut se servir encore de ce mot dans le style oratoire. Adulateur a quelque chose de plus beau & de plus grand que flatteur. Il faut cependant en user sobrement, & ne le point prodiguer. Dans le discours ordinaire on ne s’en sert point ; on dit, flatteur. Pour représenter le mal que fait un adulateur, on a peint un singe, qui étouffe ses petits à force de les embrasser, & de les flatter ; avec ce mot pour ame de la devise, Complectendo necat. Ou une abeille avec ce mot Italien, Se porta suo il mel, la punge ancora. On a donné à l’adulateur même pour devise une petite barbe, avec ce mot Italien, ad ogni vento, pour signifier qu’il change avec la fortune : ou bien une alouette, sub pluvio silet. Elle ne dit mot quand le temps est mauvais. C’est une grande adulatrice.

ADULATIF. adj. m. Flatteur. Ce terme vieillit. Nous avons ici un bénéficier natif d’Angers, nommé M. Ménage, qui est un homme d’esprit & de grande érudition : il a fait des vers fort adulatifs au Cardinal Mazarin, dans lesquels Messieurs du Parlement prétendent être offensés. Il y a du bruit contre lui. J’ai regret qu’il ait fait ce pas de clerc, faute de jugement ; car il est honnête homme & de mérite. Gui Patin. Cette affaire est expliquée au long dans les Mémoires pour servir à la vie de M. Ménage, au-devant du Menagiana. La pierre de scandale étoit ce vers d’une Elégie latine adressée au Cardinal Mazarin :

Et, puto, tam viles despicis ipse togas.

ADULATION. s. f. Ce mot, qui vient du latin adulatio, est nouveau, & signifie flatterie basse. Adulatio, assentatio. Le foible des Grands est d’aimer à être trompés, & à écouter avec plaisir l’adulation & le mensonge, dont on nourrit leur amour-propre. Bourd. Les femmes doivent plus à nos adulations, qu’à leur mérite. S. Evr. Je crois qu’il faut en user peu dans la conversation, & dans le discours ordinaire aussi-bien que d’adulateur ; à moins que ce ne soit en badinant, & en affectant un discours relevé.

ADULTE. adj. m. & f. Qui est parvenu à l’adolescence, à l’âge de raison. Adultus.

Ce mot est aussi très-souvent substantif. Il est masculin quand on parle d’un garçon, & féminin quand on parle d’une fille. Le Baptême des Adultes. Dans les premiers temps on ne baptisoit les Adultes que la veille de Pâques ou de la Pentecôte. Il n’est guère d’usage que dans cette phrase.

On le dit aussi en Anatomie. Il y a plusieurs parties dans le corps des enfans, qui sont différentes de celles des adultes:comme la fontaine de la tête, les apophyses des os, &c. Adulte se dit non-seulement de l’homme, mais aussi des animaux ; il signifie, ceux dont le corps & les membres ont acquis leur perfection & leur maturité, leur achévement. Si l’on veut savoir ce que c’est que ce gros canal charnu, ce n’est plus dans les jeunes oiseaux qu’il le faut examiner, c’est dans les adultes. Acad. des Scienc. 1699. Hist pag. 44. On voit donc dans les oiseaux adultes, que ce canal est composé de plusieurs petits godets placés les uns au-dessus des autres, &c. Ib. p. 45. Ce mot vient d’adolescere, croître.

ADULTÉRATION. s. f. Terme de Droit. Action de gâter, de dépraver quelque chose qui est pur, en y mêlant d’autres choses qui ne le sont pas. On dit mieux altération. Voyez ce mot.

Adultération, en Pharmacie, est l’action de falsifier un Médicament, en y ajoutant quelque chose qui en diminue la valeur & la qualité, ou en le mêlant avec quelque autre qui n’est pas aussi chère.

ADULTÈRE. s. m. Péché qui se commet par des personnes mariées, en violant la foi conjugale. Adulterium. On appelle double adultère, l’adultère qu’un homme marié & une femme mariée commettent ensemble. Acad. Fr. Et adultère simple, celui qui se commet entre une personne mariée & une personne libre. Par l’ancien Droit Romain il n’y avoit point de Loi établie contre l’adultère : l’accusation & la peine en étoient arbitraires. L’Emp. Auguste a été le premier qui en a fait une loi, qu’il a eu le malheur de voir exécuter dans la personne de ses propres enfans. C’est la Loi Julia. Quoique par cette Loi l’accusation du crime d’adultère fût publique, & permise à tout le monde, il est pourtant certain que ce crime a été plus considéré comme un crime domestique & particulier, que comme un crime public. On permettoit rarement aux étrangers d’en poursuivre la vengeance ; sur-tout, quand le mariage étoit paisible, & que le mari ne se plaignoit point. La raison qu’en apporte Papinien est qu’il est très-difficile d’arrêter une si juste douleur, Papin, ad L. Jul. de adult. Et les constitutions des Empereurs avoient abrogé les Loix qui permettoient aux étrangers l’accusation d’adultère. La raison est, que cette accusation ne pouvoit être intentée, sans mettre de la division entre la femme & le mari ; sans mettre l’état des enfans dans l’incertitude ; sans attirer sur le mari le mépris & la risée du public ; & sans couvrir la famille de honte & de confusion. Comme le mari est le plus offensé, il est juste quand il garde le silence, que personne ne parle pour lui. On doit supposer qu’étant le principal intéressé à examiner les actions de sa femme, il en juge aussi avec plus de circonspection ; parce qu’il y a un péril égal ou à croire légérement, ou à croire difficilement. C’est pourquoi la Loi en certains cas, l’a établi Juge, & exécuteur en sa propre cause : elle lui a permis de se venger par lui-même de l’injure qui lui étoit faite, & de ravir la vie à des adultères qu’il surprenoit souillans son lit, & qui étoient assez hardis pour lui ravir l’honneur. Dans le cas de la complicité du mari ; c’est-à-dire, ou lorsque le mari faisoit un commerce infame de la débauche de sa femme ; ou qu’ayant vû de ses propres yeux l’infidélité de la femme, il n’entroit pas dans une juste indignation, & dissimuloit l’affront en le souffrant patiemment ; en ce cas l’adultère devenoit un crime public, & la Loi Julia décernoit même des peines contre ces infames maris. En France l’adultère n’est point entre les crimes. Le mari seul en peut former l’accusation, & en poursuivre la vengeance : les Gens du Roi n’y sont pas même reçus. Il faudroit un scandale bien notoire, pour autoriser les étrangers à se porter accusateurs. Socrate, L. V. C. 8, dit, que sous Théodose, l’an 380, on punissoit les femmes adultères par une constupration publique, remède pire que le mal. Lycurgue ordonna qu’on puniroit l’adultère comme le parricide. Les Locriens arrachoient les yeux aux adultères. Val. Max. L. VI. C. 5. Les Orientaux les punissent sévèrement. Voyez Tavernier, Relation de Tunquin, Ch. 7. Toute la peine que l’on inflige à la femme surprise dans le crime, &. convaincue d’adultère, est de la priver de sa dot, & de toutes ses pactions matrimoniales, & de la reléguer dans un monastère. Cependant l’adultère est un empêchement légitime au mariage entre les personnes qui l’ont commis. C’est la décision du Pape Léon, Ne quis ducat in matrimonium quam priùs polluit per adulterium. On ne doit pas souffrir que ceux-là s’unissent par le lien du mariage, qui en ont souillé la pureté par l’adultère. C’est-là l’empêchement dirimant que les Théologiens appellent, impedimetum criminis. Au reste, pour qu’il ait lieu, les Théologiens demandent trois conditions. La première, que l’on sache que c’est un adultère que l’on commet, & que la personne avec qui on a le mauvais commerce, est mariée. La seconde, que l’adultère soit complet. La troisième, qu’il intervienne promesse de se marier après la mort du mari ou de la femme de celui des coupables qui est marié. Selon les Loix de Moyse, celui & celle qui avoient commis adultère, étoient punis de mort. Le grand Constantin fit aussi une Loi qui les condamne au dernier supplice. Cette peine fut adoucie par l’Empereur Léon. Les constitutions de Charlemagne, & de Louis le Débonnaire, leur infligent une peine capitale. Autrefois, chez les Saxons, on punissoit de mort l’adultère. Une femme qui en étoit convaincue, étoit pendue & brûlée ; & sur ses cendres on plantoit une potence, où l’on étrangloit le complice du crime. Quelquefois la femme qui avoit commis un adultère, étoit condamnée à être fouettée par les bourgs & les villages ; & dans chaque endroit les femmes exécutoient elles-mêmes la sentence, pour venger l’injure faite à leur sexe. Voyez la lettre de S. Boniface Archevêque de Mayence au Roi Athelbalde, & Opmer dans sa Chronologie, p. 345. En Angleterre par les Loix du Roi Edmond, on punissoit l’adultère comme l’homicide ; mais le Roi Canut ordonna qu’on envoyât en exil les hommes qui l’auroient commis, & qu’on coupât le nez & les oreilles aux femmes qui en seroient coupables. Les Loix des Visigoths nous apprennent que chez ces peuples, on amenoit à un mari, dont la femme avoit commis un adultère, la femme & le complice ; & si le complice n’avoit point d’enfans, ses biens étoient confisqués au profit de celui de la femme duquel il avoit abusé. En Espagne on coupoit à ceux qui étoient coupables d’adultère les parties qui avoient été l’instrument de leur crime. En Arragon on condamnoit seulement à une amende pour crime d’adultère. Dimarus dit qu’en Pologne, avant que la Religion Chrétienne y fût établie, on punissoit l’adultère & la fornication d’une manière singulière. On amenoit dans la place publique le coupable, & là on l’attachoit avec un clou par la bourse des testicules ; on mettoit un rasoir près de lui, & on le laissoit dans la malheureuse nécessité de se faire justice lui-même, ou de mourir en cet état. Chez les Parthes, les Lidiens, les Arabes, les Athéniens, ceux de Plaisance, & les Lombards, la mort a toujours été la punition de l’adultère : mais les Lacédémoniens au lieu de le punir, le permettoient, ou du moins le toléroient, au rapport de Plutarque, quoique, selon la Loi de Lycurgue, il doit être puni, comme le parricide. Chez les Egyptiens, après que l’homme qui en étoit convaincu, avoit reçu mille coups de fouet, on coupoit le nez à la femme. En France, quoique le crime n’ait jamais été impuni, la diversité des Arrêts fait voir que la peine a toujours été arbitraire ; on se régle sur la qualité des personnes, & sur l’exigence des cas. Les Grecs, & même toutes les autres sociétés Chrétiennes du Levant, pensent que l’adultère rompt le lien du mariage ; ensorte qu’en ce cas-là, & même en plusieurs autres, le mari peut épouser une autre femme.

☞ En France, la femme n’est pas reçue à intenter l’action d’adultère contre son mari. Cependant si elle est par lui accusée d’adultère, elle peut opposer celui de son mari.

Adultère, se dit aussi de celui ou de celle qui commet l’adultère. Adulter, Adultera. Un adultère public doit être privé de ses bénéfices.

Faut-il que sur le front d’un profane adultère,
Brille de la vertu le sacré caractère ? Racin.

☞ Il est aussi adjectif de tout genre, mais alors il ne se dit guère qu’en parlant des femmes. Une femme adultère.

Solon croyoit que la plus grande peine qu’on pût ordonner contre les femmes adultères, étoit la honte publique. Le Mait. A Rome on mutiloit l’adultère surpris en flagrant délit ; & par cette punition le mari pourvoyoit à sa sûreté pour l’avenir. Dac. Jésus-Christ ne voulut pas condamner la femme Adultère. S. Thomas, quest. 154, dit que ce mot vient, quòd aliquis accedat ad alteram. La Marre dans son Traité de la Police, L. III. Tit. V. C. I. dit que c’est quasi ad alterius thorum accessio. On disoit en vieux François, alvoutre, & on dit encore en basse-Bretagne, alvoutre, pour signifier la même chose. J’aimerois mieux dire que la signification propre & primitive du Latin, Adulterare est, corrompre, mêler, ajouter à quelque chose une matière étrangère ; qu’ensuite, par métaphore, on l’a appliqué à l’infidélité dans le mariage, parce qu’elle mêle & confond les enfans & les familles.

Les Astronomes, ou plutôt quelques Charlatans, qui se mêlent d’astrologie judiciaire, appellent Adultères du soleil & de la lune, leurs éclipses, quand elles se font en quelque manière contre les règles de l’Astronomie, comme il arrive aux éclipses horizontales. Car quoique le soleil & la lune soient diamétralement opposés, ils ne laissent pas de paroître en même temps sur l’horizon. On en a vu une à Paris le 16 Juin 1666. On tient que de semblables éclipses doivent arriver tous les 19 ans, mais ces éclipses horizontales, que l’on juge à propos d’appeler irrégulières, ne sont pas moins périodiques ni moins régulières que les autres, & dépendent des mêmes causes. Il n’y a point aujourd’hui de petit Astronome, qui ne sache que quoique la lune & le soleil soient pour lors diamétralement opposés, cependant la réfraction fait paroître l’un & l’autre plus élevés. Ainsi lorsque ces astres sont précisément dans l’horizon, la réfraction les fait paroître au-dessus de l’horizon, l’un au couchant & l’autre au levant. 3.o Il est très certain que non-seulement de semblables éclipses, mais aussi toutes les autres éclipses arrivent dans le même ordre & avec très-peu de changement au bout de 19 années, & un peu plus d’une heure. C’est là-dessus qu’est fondé le nombre d’or ou l’ennéadécaétéride de Méton l’Athénien. Il est vrai qu’on a trouvé que Méton s’est trompé, parce qu’il avoit compté qu’au bout de 19 ans juste, les mêmes phases & les mêmes éclipses revenoient sans aucune différence ; et c’est pour cela que dans la réformation du calendrier on a abandonné, ou du moins corrigé le nombre d’or. Mais il est toujours certain que cette différence est très-petite ; & nous avons encore en Astronomie bien des pratiques fondées là-dessus. 4.o Cette différence, toute petite qu’elle est, suffit pour faire qu’une éclipse horizontale, qui revient à peu-près la même au bout de 19 ans & une heure, ne soit plus horizontale dans le même pays, parce que n’arrivant pas à la même heure, le soleil & la lune ne se trouvent plus dans l’horizon, mais l’un dessus & l’autre dessous. Il est vrai cependant que dans le grand nombre d’éclipses qui arrivent pendant l’espace de 19 ans, il est difficile qu’il n’y en ait quelqu’une d’horizontale dans chaque pays. Bien plus, il est très-vrai qu’il n’y a aucune éclipse de lune qui ne soit horizontale à l’égard de quelque endroit de la terre ; savoir, à l’égard de celui qui a pour lors les deux astres dans son horizon : dans l’année 1703, l’éclipse de lune du 3 Janvier a été horizontale, & celle du 23 Décembre le fut encore d’une manière plus remarquable à Paris & dans bien d’autres endroits.

ADULTÉRER. v. n. Commettre le crime d’adultère. Adulterari, Adulterare. Ces deux personnes ont plusieurs fois adultéré ensemble. Celui qui convoite la femme d’autrui, a déjà adultéré dans son cœur. ☞ Ce mot a vieilli & ne se dit plus. Tous nos traducteurs disent commettre l’adultère. Il a déjà commis l’adultère dans son cœur.

Adultérer. v. a. Gâter une chose qui est pure, en y mêlant des choses qui ne le sont pas ; où falsifier un médicament, en y ajoutant quelque drogue qui en diminue la valeur & la qualité. Corrumpere. Ce mot n’est plus d’usage. On dit altérer, falsifier. ☞ Les grands Vocabulistes définissent ce mot comme étant de l’usage ordinaire, & trouvent qu’il n’a vieilli que dans le sens de commettre un adultère. Ils ne seront pas crus sur leur parole.

ADULTÉRESSE. Femme adultère. C’est un mot dont s’est servi Bayle dans la deuxième édition de son Dictionnaire, Rotterdam, 1702. T. I. p. 144, col.2, lig. 6. Il est fâcheux que ce mot ne soit pas françois, & que nous n’ayons qu’adultère pour signifier tout à la fois & le crime d’infidélité conjugale, & le mari & la femme qui le commettent. Les Latins, qui ont un mot pour chacune de ces choses, sont bien mieux partagés que nous de ce côté-là.

ADULTÉRIN, INE. adj. Fils ou fille qui sont nés d’un adultère. Terme de droit dont on ne se sert guère que dans le barreau. Nothus, Notha. Les bâtards adultérins sont incapables de bénéfices. Les enfans adultérins sont plus odieux que ceux qui sont nés de personnes libres. Le Droit Romain leur refusoit même le nom d’enfans naturels, comme si la nature les eût désavoués. ☞ Ils ne pouvoient demander des alimens à leurs peres & meres. Le droit Canonique suivi en France a une disposition plus conforme à l’équité. Quia non est tam donatio quàm debiti præstatio.

ADVOATEUR. s. m. Advocator. Terme de Coutume. On appelle en certains pays, Advoateur, celui qui trouvant des bestiaux en dommage sur ses terres, les appelle, les prend, les avoue comme s’ils étoient à lui.

ADVOCASSER. Voyez Avocasser.

ADVOCASSERIE. Voyez Avocasserie.

ADVOCAT. s. m. Voyez Avocat.

ADVOLER. v. n. Ce mot qui signifie, aller vîte pour se rendre en quelque lieu, est vieux, & tout-à-fait hors d’usage. Advolare. Mézerai s’en est servi : Mais lui étant advolé à Paris.

ADVOUATEUR. s. m. Terme de Coutume. Celui qui reclame & reconnoît pour sien du bétail qui a été pris en métas sur les terres d’autrui.

ADVOUÉ. Voyez Avoué.

ADVOUER. Voyez Avouer.

ADVOUERIE. Voyez Avouérie.

ADURÉ, ÉE. part & adj. Vieux mot, qui veut dire, endurci au travail, comme si l’on disoit, qui est devenu dur. Duratus, induratus.

ADUSTE. adj. m. & f. Terme de Médecine, qui ne se dit que du sang & des humeurs, quand elles sont brûlées par une trop grande chaleur naturelle. Adustus. Un tempérament aduste. La mélancholie est une bile noire, & aduste. Un sang est aduste, lorsqu’à raison d’une chaleur extraordinaire, les plus subtiles parties étant séparées, les plus grossières restent chargées de lie, & toutes noires, comme si elles étoient brûlées. Harris. Il est mieux dans l’usage ordinaire de dire, un sang brûlé.

On le trouve au figuré. Tetricus, Austerus. C’est la bile qui domine dans l’humeur de ce Magistrat, & cette humeur aduste imprime sur son front une négative perpétuelle. Balz. Cet exemple ne doit pas être imité.

ADUSTION. s. f. Terme de Médecine. Etat de ce qui est brûlé. Ustio, Adustio. Ce mot ne se dit ainsi que le précédent, qu’en parlant du corps humain. Sa maladie est causée par une adustion d’humeurs.

ADY.

ADY. s. m. Palmier qui croît dans l’île de Saint-Thomas. C’est un très-grand arbre, excédant en hauteur le pin ; son tronc est fort, droit, nu, partant seul de sa racine, d’un bois clair & léger. Il est plein de suc. Ses feuilles ressemblent à celles du Palmier qui porte le coco. Son sommet est garni d’une multitude de branches. Si l’on coupe ces branches, ou si l’on fait une ouverture au tronc, il en sort des larmes, ou un suc, que les Indiens ne manquent pas de recevoir dans des vases. Il leur tient lieu de vin. Cette liqueur enivre aisément. Dict. de James.

ADZ.

ADZEL. Bourgade de Livonie. Adzelia. Elle est dans la contrée de Lettonie, sur la rivière de Teydéra, au-dessous de la ville de Walmes.

Æ.

Æ. Diphtongue. On l’a bannie de tous les mots qui viennent du latin. On écrit César, l’Enéide, Egyptien avec un E simple. Æ n’est point, à proprement parler, une diphtongue en François, Si ce n’est une diphtongue d’écriture. Car pour le son que forme ce double caractère, il est très simple, & ne diffère point du son de la voyelle. Voyez au mot Diphtongue. Cependant, parce qu’on s’obstine encore à retenir l’Æ, sur-tout dans les mots purement latins, l’on en mettra encore quelques-uns avec cette diphtongue.

Æ. s. m. Vieux mot venant d’ætas, dont il garde la seule diphtongue æ. Âge, vie. Poësie de Thibaut, Roi de Nav.

ÆA.

ÆACÉES. s. f. pl. Æacæa. Fêtes & jeux, ou combats solennels qui se célébroient à Ægine en l’honneur d’Æaque, ou Æacus, d’où ils avoient pris leur nom, & qui avoit un temple à Ægine.

ÆAQUE. s.m. Æacus. C’étoit chez les anciens le nom d’un des trois Juges des enfers. Æaque fut fils de Jupiter & d’Europe, ou selon d’autres, d’Ægine. Strabon dit qu’il régna dans Œnopie. Quelques-uns croient qu’il faut lire Œnonem, au lieu d’Œnopiam. Il donna à cette île le nom de sa mère Ægine. La peste ayant emporté tous les hommes de l’île, il pria Jupiter de changer des fourmis qu’il avoit vues, en hommes ; de-là les Mirmidons. Il eut d’Eudéide, Télamon & Pelée, & Phocus de Psamathe. Il étoit d’une équité si grande & si reconnue, que dans les enfers Pluton le fit Juge des morts avec Minos & Rhadamante.

ÆC.

ÆCHMALOTARQUE. s. m. & f. Æchmalotarcha. Ce nom est Grec, & vient de αἰχμαλωτὸς, & de αἰχμή ; le premier formé de αἰχμή, une pointe, une pique, & de ἀλίσχω, ou ἀλόω, je prens, signifie un homme pris par les armes, ou, comme nous disons, pris à la pointe de l’épée, ou de la pique, & le second ἄρχη marque un chef. Ainsi Æchmalotarque, signifie chef des Captifs. Les Juifs, qui ne voulurent point suivre Zorobabel, ni retourner à Jérusalem avec lui, créerent un Æchmalotarque pour les gouverner. Mais c’est une erreur grossière de dire que Æchmalotarque est le nom que ces Juifs donnerent à celui qu’ils choisirent pour leur chef, proche de Babylone ; car ces Juifs ne parloient pas grec, mais hébreu, ou chaldéen. Ils appelerent ce chef qu’ils se donnerent, ראש גלות, ou Rosch gula, chef de la captivité, ainsi qu’ils le nomment encore, comme on le peut voir dans les Rabbins, & en particulier dans le Sepher Juhhasin, fol. 122, p. 2, & dans l’Itinéraire de Benjamin, p. 71, 72, & 81. Origène, qui écrivoit en Grec, a nommé ce chef de la captivité, ἀιχμαλωτάρχης. Au reste, je suis persuadé que les Juifs n’attendirent point au retour de la captivité à se donner des Æchmalotarques. Les Rois de Babylone leur laisserent beaucoup de liberté, comme il paroît par ce que Jérémie leur dit, Ch. XXIX. ℣ 5 & 6, & selon la coutume des Rois d’Orient, dont Hérodote nous rend témoignage. L’histoire de Susane en est une preuve évidente ; & les deux vieillards qui la condamnerent étoient les Æchmalotarques de cette année-là. Les Juifs disent que les Æchmalotarques ne peuvent être pris que de la tribu de Juda ; qu’ils commandent à tous les Israélites, de quelque tribu qu’ils soient ; qu’on les installe avec beaucoup de cérémonies, & qu’on leur rend de grands honneurs, que l’on trouvera décrits dans le Sepher Juhhasin, & dans Benjamin de Tudela, aux endroits que j’ai cités. On peut voir encore R. Salon Ben Wirga, la Gémare sur le traité Sanédrin, L. I, fol. 5, 1. Selden, de Synedr. Vet. Hebr. L. II, C. 4. §. 10 & C.7. §. 5. Origène, L. II, des Princip. C. 1. S. Epiphane contre les Ebionites, & le I. Dialogue de Théodoret.

AED.

AËDO. s. f. Fille de Pandare, fut mariée à Zéthus, frere d’Amphyon, dont elle n’eut qu’un fils nommé Ityle.

ÆG.

ÆGÉE. adj. Ægæum mare. C’est le nom ou l’épithète que l’on donne à la partie de la Méditerranée qui a l’Anatolie à l’orient ; la Macédoine, la Thessalie, l’Achaïe, le Péloponèse à l’occident ; la Romanie au nord, & l’île de Candie au midi. On la nomme communément Archipel. Les Grec, suivant le témoignage de Léunclavius, l’appellent Acdeniz ; c’est-à-dire, Mer Blanche, pour l’opposer au Pont Euxin, qu’ils appellent Garadeniz ; c’est-à-dire, Mer Noire.

On apporte plusieurs étymologies du mot Ægée. Les fables disent que Thésée, fils d’Ægée, revenant vainqueur du Minotaure, n’ayant point pensé à faire changer les voiles noires de son navire, son pere le crut mort, & de douleur se précipita dans la mer, & lui donna son nom. D’autres le tirent d’Ægéon, un des Géans qui firent la guerre à Jupiter ; & d’autres d’une Ægéa Reine des Amazones. Le Scholiaste d’Apollonius prétend que cette mer a pris son nom d’une petite île voisine de l’Eubée ou Negrepont, & qui s’appeloit Ægæ. Le même rapporte un autre sentiment qui le dérivoit de Cariste, ville de l’Eubée, qui s’appeloit Ægæa. Strabon, dans son 8e Livre, rapporte l’origine de ce nom à une ville de l’Eubée qui se nommoit Æga, et dans son 13e Livre, d’un Promontoire de l’Æolide nommé Æga. Pline, L. IV. C. 11. à un rocher nommé Æge, qui est entre Ténédos & Scio. D’autres disent qu’Ægée est un surnom de Neptune, qu’on a donné à cette mer. D’autres le font venir de je ne sais quelle chèvre qu’ils surnomment Percania. D’autres disent, qu’on l’a donné à cette mer, parce qu’elle s’agite, qu’elle bondit comme une chèvre. Festus assure que ce nom vient du grand nombre d’îles dont cette mer est pleine, & qui de loin paroissent comme des chèvres. Enfin, il en est qui conjecturent que les Phéniciens ont appelé cette mer עז az, forte, violente, à cause des tempêtes auxquelles elle est exposée, & que les Grecs confondant עז az, fort, avec עז ez qui veut dire une chèvre, lui donnèrent le nom de Mer Ægée, qui en Grec signifie, Mer de la chèvre, de ἂιξ, ἀιγος. C’est le sentiment du savant Bochart dans son Phaleg. L. 1. C. 13.

Ainsi la mer Ægée au fond de ses abîmes,
Ou d’Erix, ou d’Athos, engloutiroit les cimes. Breb.

ÆGIALE. s. f. Une des trois Grâces.

ÆEGILOPS, ou ANGILOPS, ou ANCHYLOPS. s. m. Ægilops. Terme de Médecine. C’est une tumeur ou enflure dans le grand angle de l’œil à la racine du nez, accompagné d’inflammation, ou sans inflammation. Harris. Ce mot est Grec, ἀιγιλὼψ. Cette tumeur naît entre le grand canthus & l’os du nez. Cette espèce d’abcès s’appelle Ægilops, c’est à-dire, Œil de chèvre, de ἂιξ, ἀιγος, chèvre, & de απτομαι, je vois ; parce que les chèvres sont fort sujètes à cette maladie. Si on néglige l’ægilops, il se crève, & dégénère en une fistule qui pénètre jusqu’à l’os. Æginéte appelle cette tumeur Anchilops avant qu’elle se change en ulcère ; & Ægilops quand l’ulcère est fait, & quand elle dégénère en fistule : les autres la nomment toujours Ægilops avant & après son changement. Quoique l’ægilops se change souvent en fistule, il n’est pas proprement une fistule, & il n’en est pas toujours suivi. Si l’ægilops est accompagné d’inflammation, il a pour cause l’abondance du sang, que la trop grande plénitude fait regorger sur le grand coin de l’œil : s’il est sans inflammation, il procède des humeurs corrompues qui se déchargent sur cette partie, & le plus souvent d’une humeur pituiteuse, crasse & visqueuse. Degori. C’est à ceux qui ont fait ce mot, à nous apprendre son rapport à la fistule lacrymale. Voyez Fistule, & Saint Yves, Traité des Maladies des yeux, L. I. Ch. 2.

ÆGIPAN. f. m. Ægipan. Ce mot vient de Pan, nom d’un Dieu champêtre, & ἂιξ, ἀιγος, chèvre. Les Poëtes ont donné ce nom au Dieu Pan, parce qu’ils supposoient que ce Dieu étoit moitié chèvre ; qu’il en avoit les cornes, la queue, les pieds, & même tout le bas du corps depuis la ceinture.

Les anciens ont encore appelé Ægipans, des monstres dont Méla parle, L. I. C. 8. Pline & Solin en parlent aussi, & les placent en Lybie ; celui-là, L. V. C. 8. & celui-ci, C. 34. Saumaise, dans ses Notes sur Solin, a prétendu que l’Ægipan, étoit ce que les Romains appeloient Sylvanus. Vossius le réfute dans ses Notes sur l’endroit de Mélà que j’ai cité. Car 1o , dit-il, Saumaise ne se fonde que sur les petits parallèles attribués à Plutarque ; mais il est certain que ce Livre n’est point de cet Auteur, & qu’il est indigne de lui, aussi-bien que celui qui est intitulé, De fluminibus, qui sont tous deux de la même plume. 2o  Les Ægipans n’avoient point un visage d’homme comme les Sylvains, mais un museau de chèvre : ils avoient même toute la partie supérieure du corps d’une chèvre : outre cela on les peignoit avec une queue de poisson. Ainsi le monstre qu’on voit par les médailles d’Auguste, & que nos Antiquaires appellent Capricorne, est la vraie figure d’un Ægipan ; & en effet Théon, sur Aratus, dit, que le Capricorne est la figure d’un Ægipan. Hyginus, & le Scholiaste de Germanicus disent la même chose. On voit aussi souvent des Ægipans dans les anciens monumens des Égyptiens.

☞ ÆGIUCHUS. Terme de Mythologie. Surnom de Jupiter, sous lequel les Romains l’honoroient quelquefois en mémoire de ce qu’il avoit été nourri par une chèvre.

ÆGLÉ. s. f. Une des Grâces.

ÆGLÉ. La plus belle des Naïades, dit Virgile.

ÆGOBOLE. s. m. Terme de Mythologie, Ægobolus. Surnom que les Potniens donnerent à Bacchus, parce qu’au lieu d’un jeune homme bien fait qu’ils immoloient à ce Dieu par le conseil d’Apollon, il leur déclara lui-même qu’il suffisoit dans la suite de lui sacrifier une chèvre, & qu’il n’en vouloit pas davantage. Ce mot vient de αἴξ, αἰγός, chèvre, & Βούλομαι, Je veux.

ÆGOCEROS. s. m. Capricornus. Capricorne. De αἴξ, αἰγός, chèvre, & ϰέρας, corne.

☞ ÆGOLETHRON. s. m. Plante décrite par Pline. Elle croît dans la Colchide. Les abeilles sucent la fleur : mais le miel qu’elles en tirent, rendent furieux ou ivres ceux qui en mangent. Voyez dans M. Tournefort les caractères de cette plante sous le nom de Chamærododendros pontica maxima, mespili folio, flore luteo.

ÆGOPHAGE. adj. s. Terme de Mythologie. Surnom de Junon, parce qu’on lui sacrifioit des chèvres. De αἴξ chèvre, & φάγω je mange.

ÆGYPTIAC. adj. m. Terme de Pharmacie. Pharmacum Ægyptiacum. C’est une espèce d’onguent détersif décrit par Mésué, ainsi nommé, à cause qu’il est d’une couleur obscure comme les Égyptiens. Il est composé de vert-de-gris, de vinaigre & de miel, & sert à consumer les chairs pourries.

ÆL.

ÆLAM. Voyez Élam.

ÆLATH. Voyez Aila.

ÆLIE, ou ÆLIA. Nom que l’Empereur Adrien, qui s’appeloit Ælius Hadrianus, donna à Jérusalem. Voyez Jérusalem.

ÆLIEN, ENNE. s. & ad. Arien. Ælianus, a, um. On a donné dans l’antiquité ce nom aux Ariens. Voyez Arien.

AËLLO. s. f. Une des trois Harpies, fille de Thaumas & d’Electra, selon Hésiode.

☞ ÆLURUS. Dieu des chats. Il est représenté dans les Antiques Egyptiennes tantôt en chat, tantôt en homme avec une tête de chat.

ÆM.

ÆM, AM, AME. s. m. Cette mesure pour les liquides, qui est en usage presque par toute l’Allemagne, n’est pourtant pas la même que celle d’Amsterdam, quoiqu’elle en porte presque le nom ; & elle n’est pas même semblable dans toutes les villes d’Allemagne. L’ame communément est de 20 vertels, ou 80 masses. A Heydelberg elle est de 12 vertels, & le vertel de 4 masses, ce qui réduit l’ame à 48 masses. Et dans le Wirtemberg l’ame est de 16 yunes, & l’yune de 10 masses ; ce qui fait monter l’ame à 160 masses. L’æm est de 4 ankers, l’anker de 2 stekans, ou de 32 mingles ou mingéles, & le mingle revient à deux pintes mesure de l’aris. L’æm revient à 250 ou 260 pintes de Paris.

AËMERE. adj. C’est un terme de Martyrologe, qui signifie, qui n’a point de jour certain. M. Châtelain, à la fin de son Martyrologe universel, a fait imprimer un catalogue des Saints aëmères, c’est-à-dire, des Saints dont on ne connoît point le nom. De l’α privatif, & ἡμέρα jour.

AEN.

AËN, ou AÏN. Ville ou Bourgade de la tribu de Juda, dans la Terre-Sainte. Aën. Elle fut donnée ensuite à la tribu de Siméon, & elle étoit dans la partie septentrionale de cette tribu, aux confins de celle de Dan. Elle devint aussi ville Lévitique. Voyez Jos. XV. 32. & I. Paral. IV. 32. Ce mot est hébreu, & signifie, Fontaine.

ÆNÉE. Voyez Énée.

AËNGANNIM. Voyez Engannim.

ÆO.

ÆOLE. s. m. Æolus. Nom propre d’homme. Il y a trois Æoles. L’un qui regna dans les îles qui ont porté son nom, & qui par la fumée de ces îles découvrit, dit-on, les vents qu’il devoit faire trois jours après. Voyez Pline, L. III. C. 9. & Solin, C. 12. Un autre qui regna en Étrurie ; & un troisième fils d’Hellen. Quelques-uns attribuent à ce dernier l’invention de la Carte des vents. Quoiqu’il en soit, c’est de cette invention que les Poëtes ont pris occasion de faire un Æole Roi des vents, ou du moins modérateur & distributeur des vents. Ovide le fait fils d’Hippotas ; d’autres lui ont donné Jupiter pour pere. Les uns disent que Ménécla, & d’autres, que Lygia fut sa mere. Il résidoit, selon la Fable, dans les îles Vulcaniennes, qui furent appelées de son nom Æoliennes. Le Géographe Denys a dit qu’il fut grand hospitalier. Au lieu de ce que nous avons rapporté de ses prédictions sur les vents, Isacius & Palæphatus disent qu’il étoit grand Astronome ; & Strabon, que par le flux & reflux, il prévoyoit les tempêtes & les vents qu’il devoit faire. Bochart, L. I. C. 33. croit que cette fable est venue de la Langue phénicienne, où עעול, Aol, signifie, tempête ; d’où s’est fait en Grec ἄελλα.

ÆOLIE, ou ÆOLIDE. Æolis, Æolia. Pays de l’Asie mineure, entre la Troade au septentrion, & l’Ionie au midi, & située sur la mer Ægée. Il s’appela d’abord Mysie ; mais les Æoliens étant venus l’habiter, ils lui donnèrent leur nom.


ÆOLIEN, ENNE. Æolius, & au plur. ÆOLIENS. Æoles. Peuples de Grèce ainsi appelés d’Æole fils d’Hellen. Ils quitterent la Grèce leur patrie, passerent dans l’Asie mineure, s’emparerent de la Mysie, & fonderent peu à peu une des trois grandes colonies des Grecs en Asie. Les jeunes gentilshommes servoient chez les Æoliens aux sacrifices publics.

Æolien, enne, est aussi adj. Le dialecte Æolien se rapporte au Dorien. Port-R. La musique Æolienne étoit douce, appaisoit les passions, & endormoit agréablement. T. Cor. Les îles Æoliennes étoient plusieurs îles dans la mer de Toscane, entre l’Italie & la Sicile, plus près toutefois de la Sicile.

Les îles Æoliennes sont sept petites îles, entre l’Italie & la Sicile, Lipara, Hiera, Strongyle, Didyme, Ericusa, Phœnicusa, & Eronymos. Voyez Æole.

ÆOLIPILE. Voyez Eolipile.

ÆOLIQUE. adj. m. & f. Æolicus. Qui appartient aux Æoliens. Le dialecte Æolique est un des cinq dialectes de la langue Grecque ; c’étoit la manière de parler propre des Æoliens. Dialectus Æolica. C’est du dialecte Æolique que la langue latine s’est formée. Je trouve cependant qu’on dit communément Æolien plutôt qu’Æolique, si ce n’est dans les Colléges.

ÆON. s. m. Ce mot qui est Grec, αἰών, siècle, signifie, la durée d’une chose, éternité ; mais les hérétiques des premiers siècles y ont attaché une autre idée. Abusant de la philosophie de Platon, ils donnoient de la réalité aux idées que ce Philosophe avoit admises en Dieu ; bien plus, ils les personnifioient, & feignoient que c’étoient des êtres distincts de Dieu, & qu’il avoit produits les uns mâles & les autres femelles ; c’est-là ce qu’ils appeloient Æons, de l’assemblage desquels ils composoient la Divinité toute entière, qu’ils appeloient πλήρωμα, nom Grec, qui signifie Complément, comme si c’eût été là le complément de la Divinité. Au